Le mercredi 9 décembre dernier, Pr Boniface Ouraga Obou a prononcé une conférence devant les membres de l’Académie des Sciences, des Arts, des Cultures d’Afrique et des Diasporas Africaines (ASCAD), au Palais de la Culture à Treichville. C’était lors des activités de l’entrée 2009 de l’ASCAD réunie autour du grand thème "Science et Paix". Parmi toutes les interventions scientifiques, nonobstant les collaborations de sommités telles Pr Séry Bailly et Pr Mamadou Koulibaly, c’est celle de M. Obou, professeur et doyen de la Faculté de Droit de l’Université d’Abidjan qui fut la plus médiatisée. Il avait discuté du thème de «La Paix par le Droit et la Politique» (Cf. Texte intégral dans Nord-Sud du 12/12/09).
L’évènement de l’ASCAD n’attira pas mon attention jusqu’au jour du 16 décembre où plusieurs journaux abidjanais semblent s’être concertés pour faire écho d’une autre intervention (politique, celle-là) du Pr Ouraga Obou, à titre de cadre co-fondateur du FPI, lors du déjeuner de presse, organisé la veille (15 déc.) par «les communicateurs bénévoles pour le plébiscite du Président Laurent Gbagbo». Les principales «Une» se lisaient comme suit : «Ouraga Obou : Je combattrai Alassane et Bédié» (Nord-Sud); «Ouraga Obou déclare la guerre à Ouattara» (Intelligent d’Abidjan); «Nationalité de Ouattara, (…), Pr Ouraga Obou se vide» (Le Temps); «Ouraga Obou se dévoile enfin : Je vais combattre Ouattara, chaque homme a un prix» (Le Quotidien).
Ainsi l’ambivalence dégagée chez Ouraga Obou, en l’espace d’une semaine, s’expliquerait par le fait que la formation scientifique du Professeur lui confère une notoriété dont il s’est servi pour vouloir s’octroyer une renommée politique qu’il n’a pas.
En réalité, l’analyse de l’exposé du Pr Obou lors des festivités de l’ASCAD, révèle des insuffisances méthodologiques que je me suis senti obliger de souligner afin qu’Obou, l’homme politique, réévalue à la baisse ses capacités intellectuelles de nuisance de l’opposition politique, sans coup férir.
De quoi s’agit-il? Sous le thème de «La Paix par le Droit et la Politique», la dissertation du Pr Obou à l’ASCAD apparaît comme étant une tentative de théorisation des outils (Politique et Droit) choisis par le Pouvoir pour la sortie de crise. D’emblée, la démarche du Professeur n’a pas un caractère scientifique, du fait que ladite démarche s’écarte de la vérité du test selon lequel «les mêmes causes produisent les mêmes effets».
En effet, le Professeur débute avec l’hypothèse, premièrement, que «la crise» est aléatoire, i.e. exogène (ou imposée), deuxièmement, que la paix est une finalité stable, i.e. l’effet endogène (recherché) et, troisièmement, que la Politique et le Droit sont, dans leurs essences, des vecteurs efficaces, individuellement mais surtout conjointement, pour passer d’un état de crise sociale à l’état de paix. La problématique ainsi posée oblige le Professeur à s’en tenir à des définitions réductrices des termes génériques de «Politique», de «Droit» et de «Paix».
Comme de raison, le Professeur assimile la «Politique» à la culture démocratique (et dans une moindre mesure, au civisme) du peuple. Or, la «Politique» est aussi et avant tout, l’art de faire des choix de la part du Pouvoir. L’idée du Professeur est que, sur le plan politique, la paix ne s’obtient que par l’éducation civique (au sens large) de la population, en occultant le fait que la démocratie (ou souveraineté du peuple) est institutionnelle et constitue la prérogative du Pouvoir qui peut être, soit pro-démocratique, soit dictatorial.
Quant au «Droit», le Professeur le circonscrit à sa forme de «devoir civique» du peuple (non anarchique) dans le cadre du Droit commun (i.e. de la Constitution), en occultant la responsabilité du Pouvoir d’octroyer au peuple, la pleine capacité de celui-ci d’exercer son droit d’unité souveraine au sein de l’État, et d’offrir à chaque citoyen, ses Droits fondamentaux.
Concernant la «Paix», le Professeur cite maladroitement Jean Jaurès dont la notion de «paix armée» est une absence de manifestation populaire dans un contexte de peur généralisée d’un Pouvoir martial. Autrement-dit la paix peut être une fausse paix, n’étant que le silence de mort d’un peuple assujetti à une force armée. Alors que le Professeur Obou utilise l’expression de «paix armée» comme la situation d’une paix obtenue par la guerre où le vainqueur impose sa loi au vaincu.
Dès lors, l’examen du Professeur du phénomène de «la Paix par le Droit et la Politique» s’est fait à sens unique alors que ces trois termes sont en relations à la fois bijectives et transitives. En clair, la crise (ou absence de paix) ne peut être circonscrite en vue d’une thérapie sociale que si la Paix, le Droit et la Politique sont considérés dans la réalité de leur interrelation complexe. En d’autres mots, le Droit et/ou la Politique peuvent être, individuellement ou conjointement, aussi bien un instrument de Paix qu’une cause de crise.
Le péché du Professeur Obou est, premièrement, d’avoir volontairement occulté les causes de la crise ivoirienne et, deuxièmement, d’avoir ôté le Pouvoir, des agents responsables de l’exercice de la Politique. Ce qui suggère que le Professeur avait uniquement pour objectif de démontrer comment un magistrat de son acabit peut aider le Pouvoir à mettre le peuple aux pas, par le service civique pris comme une éducation de la population pour avoir la culture démocratique (Politique) et pour éviter l’anarchie (Droit). En oubliant que la légitime-défense exprimée par un acte de rébellion fait partie du Droit et que le Pouvoir exécutif est le premier instrument de la Politique.
N’en déplaise au Professeur Ouraga Obou, s’il était mon étudiant, sa thèse soutenue devant ses compères de l’ASCAD n’aurait pas eu la note de passage. Rien donc ne sert à lui de menacer de combattre Ouattara et Bédié. Il risque de frapper un mur. Intellectuellement.
Dr Antoine Ahua Jr
Québec, Canada
L’évènement de l’ASCAD n’attira pas mon attention jusqu’au jour du 16 décembre où plusieurs journaux abidjanais semblent s’être concertés pour faire écho d’une autre intervention (politique, celle-là) du Pr Ouraga Obou, à titre de cadre co-fondateur du FPI, lors du déjeuner de presse, organisé la veille (15 déc.) par «les communicateurs bénévoles pour le plébiscite du Président Laurent Gbagbo». Les principales «Une» se lisaient comme suit : «Ouraga Obou : Je combattrai Alassane et Bédié» (Nord-Sud); «Ouraga Obou déclare la guerre à Ouattara» (Intelligent d’Abidjan); «Nationalité de Ouattara, (…), Pr Ouraga Obou se vide» (Le Temps); «Ouraga Obou se dévoile enfin : Je vais combattre Ouattara, chaque homme a un prix» (Le Quotidien).
Ainsi l’ambivalence dégagée chez Ouraga Obou, en l’espace d’une semaine, s’expliquerait par le fait que la formation scientifique du Professeur lui confère une notoriété dont il s’est servi pour vouloir s’octroyer une renommée politique qu’il n’a pas.
En réalité, l’analyse de l’exposé du Pr Obou lors des festivités de l’ASCAD, révèle des insuffisances méthodologiques que je me suis senti obliger de souligner afin qu’Obou, l’homme politique, réévalue à la baisse ses capacités intellectuelles de nuisance de l’opposition politique, sans coup férir.
De quoi s’agit-il? Sous le thème de «La Paix par le Droit et la Politique», la dissertation du Pr Obou à l’ASCAD apparaît comme étant une tentative de théorisation des outils (Politique et Droit) choisis par le Pouvoir pour la sortie de crise. D’emblée, la démarche du Professeur n’a pas un caractère scientifique, du fait que ladite démarche s’écarte de la vérité du test selon lequel «les mêmes causes produisent les mêmes effets».
En effet, le Professeur débute avec l’hypothèse, premièrement, que «la crise» est aléatoire, i.e. exogène (ou imposée), deuxièmement, que la paix est une finalité stable, i.e. l’effet endogène (recherché) et, troisièmement, que la Politique et le Droit sont, dans leurs essences, des vecteurs efficaces, individuellement mais surtout conjointement, pour passer d’un état de crise sociale à l’état de paix. La problématique ainsi posée oblige le Professeur à s’en tenir à des définitions réductrices des termes génériques de «Politique», de «Droit» et de «Paix».
Comme de raison, le Professeur assimile la «Politique» à la culture démocratique (et dans une moindre mesure, au civisme) du peuple. Or, la «Politique» est aussi et avant tout, l’art de faire des choix de la part du Pouvoir. L’idée du Professeur est que, sur le plan politique, la paix ne s’obtient que par l’éducation civique (au sens large) de la population, en occultant le fait que la démocratie (ou souveraineté du peuple) est institutionnelle et constitue la prérogative du Pouvoir qui peut être, soit pro-démocratique, soit dictatorial.
Quant au «Droit», le Professeur le circonscrit à sa forme de «devoir civique» du peuple (non anarchique) dans le cadre du Droit commun (i.e. de la Constitution), en occultant la responsabilité du Pouvoir d’octroyer au peuple, la pleine capacité de celui-ci d’exercer son droit d’unité souveraine au sein de l’État, et d’offrir à chaque citoyen, ses Droits fondamentaux.
Concernant la «Paix», le Professeur cite maladroitement Jean Jaurès dont la notion de «paix armée» est une absence de manifestation populaire dans un contexte de peur généralisée d’un Pouvoir martial. Autrement-dit la paix peut être une fausse paix, n’étant que le silence de mort d’un peuple assujetti à une force armée. Alors que le Professeur Obou utilise l’expression de «paix armée» comme la situation d’une paix obtenue par la guerre où le vainqueur impose sa loi au vaincu.
Dès lors, l’examen du Professeur du phénomène de «la Paix par le Droit et la Politique» s’est fait à sens unique alors que ces trois termes sont en relations à la fois bijectives et transitives. En clair, la crise (ou absence de paix) ne peut être circonscrite en vue d’une thérapie sociale que si la Paix, le Droit et la Politique sont considérés dans la réalité de leur interrelation complexe. En d’autres mots, le Droit et/ou la Politique peuvent être, individuellement ou conjointement, aussi bien un instrument de Paix qu’une cause de crise.
Le péché du Professeur Obou est, premièrement, d’avoir volontairement occulté les causes de la crise ivoirienne et, deuxièmement, d’avoir ôté le Pouvoir, des agents responsables de l’exercice de la Politique. Ce qui suggère que le Professeur avait uniquement pour objectif de démontrer comment un magistrat de son acabit peut aider le Pouvoir à mettre le peuple aux pas, par le service civique pris comme une éducation de la population pour avoir la culture démocratique (Politique) et pour éviter l’anarchie (Droit). En oubliant que la légitime-défense exprimée par un acte de rébellion fait partie du Droit et que le Pouvoir exécutif est le premier instrument de la Politique.
N’en déplaise au Professeur Ouraga Obou, s’il était mon étudiant, sa thèse soutenue devant ses compères de l’ASCAD n’aurait pas eu la note de passage. Rien donc ne sert à lui de menacer de combattre Ouattara et Bédié. Il risque de frapper un mur. Intellectuellement.
Dr Antoine Ahua Jr
Québec, Canada