Mgr Paul Siméon Ahouana (Archévêque de Bouaké) : “Moi, président de la Cei ?”

Deux jours après la publication de l`article de notre confrère ``Fraternité Matin`` qui l`a cité parmi les probables successeurs de Beugré Mambé à la tête de la Commission électorale indépendante(Cei), l`archevêque métropolitain de Bouaké a répondu à nos questions sur cette information. Mgr Paul Siméon Ahouana s`est également prononcé sur l`actualité sociopolitique.

Monseigneur, à l`occasion du carême qui a débuté aujourd`hui, (hier) quel message pouvez-vous adresser aux fidèles chrétiens ?
Il y a déjà de grands évêques là-bas, à Abidjan, je préfère que ce soit eux que vous interrogiez.

Vous non plus n`êtes pas un petit évêque.
Non. Vous avez sur place là-bas des grands comme le cardinal Agré…

Le cardinal Agré est à la retraite, il ne faut plus le déranger.
Même s`il est à la retraite, il peut parler. Il faut laisser tranquilles nous les petits.

Même si vous êtes petit, vous pouvez quand même adresser un message aux chrétiens dans le cadre du carême.
Dans ce cas, appelez Monseigneur Akey (monseigneur Joseph Akey, archevêque de Gagnoa), c`est lui le président de la Conférence épiscopale.

Ok, nous avons une question qui vous concerne directement. Dans sa parution de mardi, nos confrères de ``Fraternité Matin`` vous ont cité parmi les représentants de la société civile qui pourraient jouer les premiers rôles dans la nouvelle Commission électorale que l`on serait en train de mettre en place. Qu`en est-il ?
Voyons, monsieur le journaliste, c`est une affaire sérieuse ! Ce n`est pas dans un journal qu`on va annoncer que quelqu`un va diriger une institution aussi importante. Surtout lorsque la personne en question n`a même pas été approchée. Depuis cette annonce, mon téléphone n`a pas cessé de sonner. Les gens m`appellent de partout pour demander ce qu`il en est. Pourtant, je ne sais rien et je ne suis rien dans cette affaire.

On dit toujours qu`il n`y a pas de fumée sans feu. Peut-être que vous avez été effectivement approché et que vous ne voulez pas nous le dire.
Je n`ai pas été approché.

Si vous étiez approché, accepteriez-vous de siéger au sein de la Cei ou même d`en être le président ?
Je vous ai dit que c`est une affaire sérieuse. Je ne peux pas de cette façon vous dire que j`accepte ou que je n`accepte pas. Je ne sais même pas ce qu`on attend de moi. Quel est le nouveau format de la Cei ? Est-il question de reprendre tout le processus de A à Z ou s`agit-il de le poursuivre à partir de là où il s`est arrêté ?

Que souhaiteriez-vous ?
Je vous ai dit que c`est une affaire sérieuse et que ce n`est pas au téléphone que je dois répondre à ce type de question.

On pourrait recomposer la Cei et lui demander de poursuivre simplement le travail qui a été entamé. Que diriez-vous dans ce cas ?
C`est vous qui dites cela. Certains disent qu`on va tout reprendre. Je me demande alors si on doit tout reprendre de A à Z après tout cet investissement qu`on a fait et qui se chiffre à ces milliards de francs Cfa.

Est-ce pour cela que vous n`accepteriez-pas le poste?
Je n`ai rien à accepter.

C`est pourtant le pays qui vous appelle
Le pays ne m`a pas encore appelé. Personne ne m`a approché.

Votre nom circule pourtant dans certaines chancelleries.
On peut me citer, comme on peut citer tout autre citoyen ivoirien comme vous.

Et si le pays vous appelait ?
Ce n`est pas de cette façon que les choses se passent. Même quand on devait me nommer évêque, le Vatican m`a préalablement appelé pour me dire qu`il voulait me confier cette charge. J`ai demandé ce qu`on attendait de moi et j`ai demandé un temps pour réfléchir.

Et si la même procédure était suivie ?
Il ne s`agit pas de dire qu`un tel va être président de la Cei, il s`agit de savoir ce qu`on attend de ce président et pourquoi on veut que ce soit telle ou telle personne.

Beaucoup d`acteurs disent que le moment est venu d`essayer un religieux.
Je ne suis pas le seul religieux. Il y a des musulmans, des protestants, des harristes, l`église du christianisme céleste. Nous sommes nombreux.

C`est peut-être parce qu`on voit en vous celui qui est le plus capable de conduire la Côte d`Ivoire à des élections transparentes.
Ce que je fais déjà pour la paix ne suffit-il pas ?

La Nation pourrait vous demander de faire plus!
Comme on ne m`a encore rien demandé, je pense qu`il faut laisser ce débat. Je ne fonctionne pas au conditionnel. On ne m`a rien demandé, je suis dans mon coin. Je suis à Bouaké où je viens de célébrer la messe ce midi. A 18 heures encore, nous allons célébrer la messe pour la prise des cendres puisque c`est le début du carême. Je donne des enseignements à mes fidèles. En un mot, je fais mon travail d`évêque.

Quel est votre avis sur la dernière évolution de la situation sociopolitique ?
Pour l`instant je n`ai pas d`avis. J`aurai un avis après la formation du gouvernement et la présentation du nouveau format de la Cei. Pour l`instant, nous regardons tous.

Vous aviez souhaité un nouveau format de la CEI, et on tend aujourd`hui vers une Cei qui ne sera pas à la solde des seuls partis politiques, mais qui comprendra également la société civile. Cela vous conviendrait-il ?
On ne peut pas savoir si les représentants de la société civile n`auront pas d`accointance avec des partis politiques. On ne sait rien.

Que pensez-vous des troubles qui ont cours ?
Comme je vous l`ai dit, je viens d`une messe. J`ai dit à mes diocésains de prier pour la Côte d`Ivoire afin que ses dirigeants soient habités par l`esprit de sagesse. Je leur ai demandé de rester calmes. Je suis contre toutes ces marches. Cela fait désordre et je ne souhaite pas cela. J`ai dit à mes chrétiens ce que j`ai à dire : D`un, je leur ai demandé de prier pour la Côte d`Ivoire, les dirigeants, le chef de l`Etat et toute la classe politique pour que chacun soit habité par l`esprit de sagesse. La deuxième chose, c`est l`appel au calme. J`ai demandé aux fidèles d`avoir l`espérance fondée en Jésus Christ. Et la troisième chose, c`est que je ne suis pas pour ces marches où on brûle et on détruit des biens publics. Un chrétien ne doit pas poser de tels actes. C`est du désordre et non la discipline. Voici les trois choses que j`ai dites à mes diocésains.

Quel est votre message à l`endroit des hommes politiques ?
J`ai demandé de prier pour le chef de l`Etat et la classe politique afin qu`ils soient habités par l`esprit de sagesse. Et les marches à gauche et à droite, c`est du désordre. Le chrétien n`est pas un homme désordonné.

Interview réalisée au téléphone par Cissé Sindou