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Politique Publié le samedi 20 février 2010 | Le Patriote

ADO à Gbagbo: "Koudou, tu as intérêt à démissionner"

Messieurs les présidents des partis membres du RHDP
Monsieur le président du Directoire et les membres du directoire
Mesdames et messieurs les élus
Chers frères et sœurs,

La réunion d’aujourd’hui est importante. C’est d’ailleurs avec beaucoup d’émotion que, personnellement, je prends la parole. Car il y a quelques heures, plusieurs de nos frères, de nos militants du RHDP sont tombés sous les balles assassines de certains éléments des Forces de l’ordre. Il y a quelques semaines la même chose a eu lieu à Divo. Quand des manifestants aux mains nues ont reçu des balles à l’issue desquelles des jeunes manifestants sont tombés. C’est dire donc que depuis quelques semaines la Côte d’Ivoire traverse des moments douloureux. Je pense que nous n’avions pas pensé que nous pouvions en arriver là. Bien avant la décision unilatérale, il y a une semaine exactement, mon aîné le Président Henri Konan Bédié et moi, nous nous sommes mis d’accord pour que j’effectue un voyage à Ouagadougou.

Nous sommes allés au nom du Président Bédié et à mon nom pour attirer l’attention du Facilitateur sur les dangers que nous voyons venir. C’était dans la période du 17 au 21 janvier et le 21 janvier en arrivant à l’aéroport, j’ai été informé d’une rencontre des présidents du RHDP chez le président Bédié. Et dans l’après-midi du 21 janvier, nous avons tenu cette première réunion. Depuis lors, le Chef de l’Etat non seulement a continué de harceler le président de la CEI, à continuer d’interférer dans le processus électoral et d’utiliser les forces de l’ordre, comme il sait le faire de manière abusive. Il est arrivé enfin le 12 février à la dissolution du gouvernement et de la Commission électorale indépendante.

J’ai eu le privilège de participer à toutes les négociations depuis le début de cette crise. Que ce soit à Marcoussis, à Kléber, à Accra, à Pretoria et bien entendu maintenant dans le cadre du CPC avec l’Accord politique de Ouagadougou. Je voudrais rappeler un certain nombre de choses. L’APO reconnaît tous les accords antérieurs, c’est-à-dire les accords de Marcoussis, de Kléber, les accords d’Accra, de Pretoria. Ces accords ont été validés par les Nations Unies. En deuxième lieu, comme l’a si bien dit, mon frère, le Pr Djédjé Mady, le mandat du Chef de l’Etat est venu à expiration. Quand il a vu cela arriver, il a commencé des manœuvres pour essayer d’avoir une prolongation. Il a eu cette prolongation en évinçant le Premier ministre Charles Konan Banny et en s’engouffrant dans ce qu’il a appelé l’APO. Epris de paix comme nous le sommes, nous avons suivi l’accord de Ouagadougou en nous disant que cet accord allait nous permettre de faire des élections, de faire des élections comme ils nous l’ont promis dans dix mois. Le mois prochain, nous serons au 36ème mois de l’Accord de Ouagadougou, au 36ème mois, nous n’avons encore aucune perspective du premier tour de l’élection présidentielle. C’est pour dire que la situation est sérieuse.

Ces retards contrairement à ce que les uns et les autres ont dit ne sont pas dus à des questions techniques ou même sécuritaires. Ils sont dus essentiellement, je dirais même totalement, à la volonté du chef de l’Etat de ne pas aller aux élections. Nous devons noter cela. Et le président du Directoire et le Directoire ont fait une très bonne analyse. Nous avons un chef d’Etat qui se dit « enfant des élections » alors qu’il n’a participé à qu’à deux élections pour être député. Car l’élection de 2000 n’en était pas une. Ce n’était pas une élection. C’était une sélection. Alors ayant participé à cette sélection, se retrouvant donc à la tête de l’Etat par accident, le voilà qui veut continuer malgré la Constitution. J’ai le sentiment que le Chef de l’Etat et ses juristes ne lisent pas la Constitution et ils ne connaissent pas la Constitution. Et surtout ils ne lisent pas les Accords. En réalité, les accords ne sont pas respectés. Ceci paraît évident parce que c’est ce que tout le monde a constaté. Mais une chose est importante que nul n’a signalé jusqu’à présent c’est que dans l’Accord de Pretoria qui a autorisé le Chef de l’Etat à faire utiliser l’article 48, il est dit que s’il s’avérait nécessaire d’avoir de nouveau recours aux dispositions de l’article 48 de la Constitution, il faudrait en discuter avec la médiation et les autres signataires. Le chef de l’Etat n’a discuté ni avec mon aîné le Président Henri Konan Bédié, ni avec moi-même. De mon point de vue, je viens vous dire que les décisions prises à partir de l’article 48, sont nulles et de nul effet. Oui parce que la dissolution de la Commission électorale indépendante qui est une institution constitutionnelle qui a été mise en place avec un Haut représentant de l’ONU chargé des élections, M. Antonio Monteiro, vous vous en souvenez, qui a fait l’objet de dispositions spécifiques du Conseil de sécurité en s’appuyant sur l’accord de Pretoria, devrait avoir notre aval. Ce qui n’a pas été le cas. Nous n’allons donc pas accepter cette décision de dissolution de la CEI ainsi de la dissolution du gouvernement. Ces décisions sont donc nulles et de nul effet.
Il est donc clair pour nous que les décisions du Chef de l’Etat sont arbitraires, injustifiées et inacceptables. Oui, monsieur Laurent Gbagbo et certains de ses partisans en prenant ces décisions, s’exposent aux sanctions des Nations Unies conformément à la Résolution n° 1893 2009 du 29 octobre 2009 en ses articles 6 et 20. J’en appelle donc à la Communauté internationale et notamment au Conseil de sécurité des Nations Unies. Il faut qu’ils cessent de nous gaver de Résolutions s’ils ne les appliquent pas. En réalité, le Directoire n’avait pas besoin de faire ce qu’il a fait et d’annoncer que Laurent Gbagbo n’est plus chef de l’Etat. C’est le Conseil de sécurité des Nations Unies qui devrait le faire. Nous lui demandons de le faire.
Je reviens à la CEI. Il ne faut qu’on pense que, parce que nous sommes gentils, nous sommes pacifiques, que nous sommes des imbéciles, pardonnez-moi. Le contentieux a pris fin le 27 décembre 2009 selon la loi, puisque M. Gbagbo nous parle toujours de la loi. Le contentieux a été prorogé de dix jours, jusqu’au 10 janvier. Prorogé ensuite de nouveau pour dix jours. Du 04 au 14 février. Voilà qu’après cette deuxième prorogation, le contentieux ne pouvait plus être prorogé, le 12 février. Il a décidé de prendre cette décision parce que nous étions à deux jours de la fin du contentieux. Je dis que c’est une décision préméditée. Elle est non seulement arbitraire, inacceptable mais en plus, elle est préméditée. Elle va à l’encontre de la Côte d’Ivoire et de l’ensemble des Ivoiriens. Parce que nous, nous avons fait les calculs. Mais comme nous sommes en Bureau politique, chacun de vous a suivi ce processus. Que dit le processus au plan technique, au plan électoral ? Le processus nous dit qu’après l’arrêt du contentieux, il faut une semaine pour finaliser la liste définitive. Ensuite, on nous dit qu’il faudrait deux semaines pour produire les cartes d’électeurs et les autres documents relatifs au vote. Ce qui fait trois semaines. Je signale au passage que les CNI sont déjà prêtes. Ensuite il nous faut trois semaines pour la distribution des CNI et des cartes d’électeurs et les documents liés au vote. Ce qui fait six semaines. Et enfin, deux semaines pour la campagne électorale. Nous étions donc à 8 semaines du premier tour de l’élection présidentielle. Le 14 avril, nous aurions dû avoir le premier tour de l’élection présidentielle. Si M. Gbagbo ne veut pas les élections, vous savez pourquoi ? Parce que Gbagbo a chaud. Parce qu’il sait qu’il ne peut pas gagner les élections. Il sait qu’il sera 3ème ou 4ème à l’issue du premier tour. Voilà la vérité. C’est pourquoi il a pris cette décision précipitée et tout à fait illégale. Venons-en au gouvernement. Moi, je suis choqué de cet acte. Même si le gouvernement nous importe peu. J’ai été Premier ministre, nous avons d’autres ici, mes jeunes frères Banny et Duncan. Nous avons eu à former des gouvernements sous l’autorité du Président Houphouët-Boigny et du Président Bédié. Nous savons ce qu’il faut pour former un gouvernement. Un gouvernement réduit, suppose qu’il faut regrouper des ministères, quand on regroupe les ministères cela veut dire qu’il faut les restructurer. Il faut aller en Conseil de gouvernement puis en conseil des ministres, signer des décrets. Pensez-vous que tout cela peut se faire en deux mois ? Le fait de dire « je veux un gouvernement », veut dire en réalité que « je ne veux pas des ministres actuels du RHDP au gouvernement de Guillaume Soro ». C’est une manœuvre pour sortir nos ministres du gouvernement, les ministres dont il n’aime pas la tête. J’ai entendu d’ailleurs sur une radio avant-hier un certain porte-parole qui disait : voilà, un ministre ne peut pas être au gouvernement et être candidat. Parce que s’il est candidat et qu’il est au gouvernement, suivez mon regard, il va aller insulter en campagne et que va-t-il dire à la table du conseil des ministres ? Si un ministre ne peut être au gouvernement ou être candidat mais et le chef de l’Etat alors ! Que cherche-t-il à la tête de l’Etat, lui qui est candidat ? Il devrait normalement sortir, se mettre en disponibilité, en congé et venir se battre à armes égales avec les autres car c’est un gouvernement de transition. Ce n’est pas un gouvernement pour quelqu’un qui a un mandat électif. Cette affaire de nouveau gouvernement est une blague parce qu’en deux mois, on ne peut pas restructurer un gouvernement. C’est pour cela que nous disons qu’il faut laisser tomber cette affaire. Il faut qu’il laisse tomber cette affaire de gouvernement parce que nous le voyons venir. Nous savons où il veut aller. Il nous trouvera devant. En plus de cela, chers frères et sœurs, les Ivoiriens ont des problèmes, les difficultés financières sont grandes, sont intenables. De nombreuses familles ne mangent qu’une fois par jour. Aussi bien qu’à Abidjan qu’à l’intérieur. Savez-vous ce qu’un remaniement ministériel comporte ? Même si on réduit le nombre des ministres, pendant 6 mois il faut continuer à payer les ministres qui sont sortis du gouvernement. A supposer qu’il y en ait 8 comme il dit, il va passer de 33 à 25. Il faut payer ces 8 ministres et les autres nouveaux ministres à qui il faut aussi donner des indemnités. Tout cela va augmenter les charges de l’Etat. On a autre chose à faire avec l’argent de l’Etat que de payer les ministres. Moi je viens dire que ce sont des arguments fallacieux. Pour nous qui avons géré l’Etat, jamais je n’accepterai qu’il y ait un gouvernement à 2 mois de l’élection. Sauf si la volonté de celui qui veut mettre en place ce gouvernement est de ne pas aller aux élections dans les 2 mois à venir.

Je vous préviens si Laurent Gbagbo met en place ce gouvernement, nous n’aurons pas d’élections en 2 mois, nous n’aurons pas d’élections en 6 mois. Nous n’aurons pas d’élections en un an. C’est ce que j’en déduis. Autrement, il n’est pas nécessaire de former un nouveau gouvernement.

Messieurs les présidents,
Chers frères et sœurs

Je suis choqué par ce qui se passe. J’estime que cela est indigne de la Côte d’Ivoire. Nous avons une image désastreuse de notre pays. Le Président Bédié et moi-même avons été invités par le Facilitateur, nous ferons donc un aller retour le dimanche. Parce que les partis houphouétistes sont pour le dialogue. Houphouët-Boigny nous a toujours enseigné le dialogue. Parce que même si on fait la guerre, on finit par dialoguer. La paix passe par le dialogue. Donc nous allons voir le Facilitateur le dimanche à sa demande. Mais pour nous, la solution de cette crise est simple, c’est ce que vous devez continuer de réclamer. Ce n’est pas une question de mot d’ordre de parti politique, ce n’est pas une question de mot d’ordre du Directoire. Ce n’est pas de cela qu’il s’agit. Il s’agit en réalité de la Côte d’Ivoire, des Ivoiriens, de notre avenir commun. Chacun doit essayer d’obtenir ce qu’il faut à sa manière. C’est ce que certains jeunes ont voulu faire en allant déposer des motions dans les sous-préfectures pour dire : « nous ne sommes pas d’accord pour la dissolution de la CEI ». C’est qu’ils ont voulu faire et on leur tire dessus, il y a des morts. Je viens dire à vous tous, éminents membres des Bureaux politiques que nous devons tout simplement réclamer une des choses de Laurent Gbagbo.
La première, au vu de ce que je viens de dire et l’appel du directoire, nous devons dire que nous demandons à Laurent Gbagbo de démissionner de ses fonctions de Chef de l’Etat. Nous devons lui dire de démissionner.

La deuxième chose que je voudrais demander avant sa démission, c’est d’annuler les décisions de dissolution de la CEI et du gouvernement. Il faut qu’il le fasse. Parce que nous avons besoin de notre Commission électorale indépendante pour aller aux élections. Rien d’autre ne nous intéresse. La seule chose qui nous intéresse, c’est l’élection présidentielle. Lui, il veut rester au pouvoir. Nous, nous voulons des élections pour le faire partir du pouvoir de manière démocratique. Je lui dis : « Koudou, tu as intérêt à démissionner ».

Je vous remercie.

Propos retranscrits par Thiery Latt
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