18 février 2010 : Mamadou Tandja, le président nigérien, est renversé par un autre coup d’Etat. Le 4è que connaît le pays après ceux de 1974, 1996 et 1999. L’histoire de Tandja est sue de tous : alors qu’il devait quitter le pouvoir après avoir épuisé ses deux mandats, Tandja a organisé un simulacre de référendum pour obtenir un mandat illimité. Il a passé outre la contestation de son opposition pour, à la fin, gouverner par décret. La raison de son entêtement est qu’il voulait ‘‘achever ses grand travaux’’. Les sanctions de l’UA, de la Cedeao, de l’Union Européenne ou de l’ONU, n’ont eu aucun effet sur lui. Il préparait d’ailleurs sa sortie de la Cedeao qui l’avait suspendue de ses instances.
Tandja réalise aujourd’hui, mieux que quiconque, du fond de sa cellule, la vacuité de ses décisions unilatérales et arbitraires en ne comptant que sur l’armée et une poignée d’affidés.
Il y a quelques mois de cela, la Guinée-Conakry enregistrait, encore une fois, l’irruption de militaires au pouvoir. Ils ont enjambé le corps chaud de Lansana Conté pour s’emparer de l’exécutif guinéen. Dadis Camara, le nouvel homme fort allait très vite s’illustrer par des méthodes aux antipodes de la démocratie. Usant et abusant des armes, il fait tirer sur la foule comme bon lui semble, démontrant à la communauté internationale que la Guinée est un pays indépendant et souverain qui ne saurait subir le dicktat de qui que ce soit.
Aujourd’hui, Dadis Camara est inapte pour le pouvoir. Après avoir reçu des soins au Maroc, il va certainement terminer le reste de ses jours au Burkina Faso. En tout cas, pour l’heure, il est persona non grata dans son propre pays.
Dans la même foulée, on pourrait revenir sur le coup d’Etat de 1999 en Côte d’Ivoire. Alors que la succession d’Houphouët-Boigny (plus de 30 ans de pouvoir) avait laissé des séquelles profondes, et divisé ses successeurs, le président Bédié avait entrepris des réformes constitutionnelles profondes. Le mandat du président de la République devait passer de cinq à sept ans. Un nouveau code électoral a vu le jour avec de nouvelles conditions à remplir pour les candidats à l’élection présidentielle : être de père et de mère eux-mêmes ivoiriens d’origine. En revanche, les propositions de l’opposition d’alors de ramener l’âge de vote à 18 ans, l’encre indélébile, les urnes transparentes, ont été catégoriquement refusées par Bédié et son parti dirigé par un certain Laurent Dona Fologo, tout puissant Secrétaire général du Pdci.
Les manifestations des partisans de M. Alassane Ouattara, Rdr, se soldent par l’incarcération des principaux dirigeants de ce parti. Malgré les médiations pour la libération des militants du Rdr, la veille des fêtes de fin d’année, pour faire baisser la tension, Bédié reste inflexible, faisant ainsi le lit à ses ennemis tapis dans l’ombre. Le 24 décembre 1999, la Côte d’Ivoire faisait l’amère expérience des coups d’Etat qui inondent, hélas, le continent africain et relèguent aux calendres grecques, son développement.
Pourquoi les coups d’Etat en Afrique ?
Beaucoup d’auteurs ont consacré des ouvrages sur ce thème. Des mémoires et autres thèses ont disséqué le sujet. Le constat est que, 50 ans après les indépendances africaines, les coups d’Etat se multiplient sur le vieux continent.
Outre l’entêtement, l’aveuglement du pouvoir et l’enrichissement vite, vite, vite, le Pr Mamadou Koulibaly, président ivoirien de l’Assemblée nationale qui a apporté récemment une contribution à Fraternité Matin, cite : ‘‘le traumatisme de la colonisation et de la décolonisation avec l’exploitation politique des différences tribales, les ingérences politiques internationales, militaires ou humanitaires, le poids exorbitant de l’armée dans les Etats africains, les conceptions traditionnelles et tropicalisées de l’Etat et de la République…’’
A toutes ces tares qui contribuent au drame de l’Afrique, Mamadou Koulibaly ajoute que ‘‘les Elites africaines se battent entre elles pour contrôler les Etats et les ressources naturelles des pays’’.
Comment alors expliquer que nos élites actuelles qui ont combattu les Pères des indépendances, ne puissent pas opérer ce saut et développer le continent ?
Rappelons que Mamadou Koulibaly, agrégé en gestion, a été ministre de l’Economie et des Finances de 2000 à 2002 et fait partie des concepteurs de la refondation du Front populaire ivoirien (Fpi).
En dix ans de pouvoir, le parti de Laurent Gbagbo, hier prolixe en propositions pour sortir le pays du marasme, peine à concilier théorie et pratique. Ces intellectuels, pour la plupart des enseignants, sont restés collés à leurs livres, incapables qu’ils sont de trouver une solution concrète à la paupérisation grandissante. C’est qu’ils n’ont jamais pris le temps d’apprendre à gérer. Ils sont donc passés des salles de classes et d’amphis à la salle feutrée et les lambris dorés du conseil des ministres. Après dix ans de règne calamiteux, le résultat est sans appel : le pays est divisé en deux (une ‘‘Côte d’Ivoire utile’’ et une autre, inutile, se trouvant au nord), les pillages et détournements (usine de Fulton, filière café-cacao, mines et énergie…), les assassinats (marche de l’opposition du 24 mars 2004 avec plus de 200 morts), la répression des marches (sur la cherté de la vie), l’importation des déchets toxiques qui continuent de tuer les Ivoiriens, les ordures ménagères, les routes impraticables, l’augmentation vertigineuse du chômage, la situation de l’école ivoirienne où règne en maître absolu, la Fesci, une milice tribale au service du pouvoir et aujourd’hui, cerise sur le gâteau : le délestage.
Le cocktail molotov
Plutôt que de chercher des solutions aux problèmes qui étranglent chaque jour un peu plus les Ivoiriens, M. Gbagbo Laurent et son parti prospèrent dans le dilatoire en narguant l’opposition. De 2002 à 2010, M. Gbagbo signe à la pelle les accords ; mais une fois au pays, il les foule au pied. Togo, Marcoussis, Accra, Pretoria, Ouagadougou. Ce dernier accord ayant été considéré par Gbagbo lui-même comme l’Accord des Africains eux-mêmes, et suscité par lui.
On peut le dire, pastichant Mamadou Koulibaly, que : ‘‘Les Elites africaines se battent entre elles pour contrôler les Etats et les ressources naturelles des pays’’.
Depuis l’arrivée du Fpi au pouvoir, tous les contrats, hier dénoncés, ont été tous reconduits : CIE, Sodeci, Côte d’Ivoire Telecom… en revanche, l’entêtement perdra à coup sûr M. Gbagbo Laurent. Narguant l’opposition non armée, il n’arrête pas de leur dire qu’ils n’obtiendront rien puisqu’ils n’ont ni territoire, ni armes. Malgré les accords et les résolutions de l’ONU, le chef de l’exécutif ivoirien continue de se comporter comme un éléphant dans un magasin de porcelaine. Récitant un jour une leçon bien apprise d’un Chef d’Etat africain, M. Gbagbo a laissé entendre que ‘‘les résolutions de l’ONU ne tuent pas !’’ Elles peuvent donc continuer de pleuvoir.
Aujourd’hui, le cocktail molotov est prêt pour faire exploser la Côte d’Ivoire à cause de l’intransigeance du Chef de l’Etat ivoirien : dissolution de la CEI, dissolution du gouvernement, achat de conscience, débauchage de militants des autres partis, division des partis, etc. Tant de comportements dictatoriaux et de forfaitures qui irritent le peuple ivoirien et donne des raisons à l’opposition, jusque là pacifique, de passer à l’offensive.
Comme Tandja, Dadis camara et Konan Bédié hier, M. Gbagbo Laurent prépare activement le lit d’une autre guerre en Côte d’Ivoire pour faire usage des nombreuses armes qu’il vient d’acquérir. Or, ces armes ne tuent pas des arbres, mais des hommes…
SYLVAIN NAMOYA
Tandja réalise aujourd’hui, mieux que quiconque, du fond de sa cellule, la vacuité de ses décisions unilatérales et arbitraires en ne comptant que sur l’armée et une poignée d’affidés.
Il y a quelques mois de cela, la Guinée-Conakry enregistrait, encore une fois, l’irruption de militaires au pouvoir. Ils ont enjambé le corps chaud de Lansana Conté pour s’emparer de l’exécutif guinéen. Dadis Camara, le nouvel homme fort allait très vite s’illustrer par des méthodes aux antipodes de la démocratie. Usant et abusant des armes, il fait tirer sur la foule comme bon lui semble, démontrant à la communauté internationale que la Guinée est un pays indépendant et souverain qui ne saurait subir le dicktat de qui que ce soit.
Aujourd’hui, Dadis Camara est inapte pour le pouvoir. Après avoir reçu des soins au Maroc, il va certainement terminer le reste de ses jours au Burkina Faso. En tout cas, pour l’heure, il est persona non grata dans son propre pays.
Dans la même foulée, on pourrait revenir sur le coup d’Etat de 1999 en Côte d’Ivoire. Alors que la succession d’Houphouët-Boigny (plus de 30 ans de pouvoir) avait laissé des séquelles profondes, et divisé ses successeurs, le président Bédié avait entrepris des réformes constitutionnelles profondes. Le mandat du président de la République devait passer de cinq à sept ans. Un nouveau code électoral a vu le jour avec de nouvelles conditions à remplir pour les candidats à l’élection présidentielle : être de père et de mère eux-mêmes ivoiriens d’origine. En revanche, les propositions de l’opposition d’alors de ramener l’âge de vote à 18 ans, l’encre indélébile, les urnes transparentes, ont été catégoriquement refusées par Bédié et son parti dirigé par un certain Laurent Dona Fologo, tout puissant Secrétaire général du Pdci.
Les manifestations des partisans de M. Alassane Ouattara, Rdr, se soldent par l’incarcération des principaux dirigeants de ce parti. Malgré les médiations pour la libération des militants du Rdr, la veille des fêtes de fin d’année, pour faire baisser la tension, Bédié reste inflexible, faisant ainsi le lit à ses ennemis tapis dans l’ombre. Le 24 décembre 1999, la Côte d’Ivoire faisait l’amère expérience des coups d’Etat qui inondent, hélas, le continent africain et relèguent aux calendres grecques, son développement.
Pourquoi les coups d’Etat en Afrique ?
Beaucoup d’auteurs ont consacré des ouvrages sur ce thème. Des mémoires et autres thèses ont disséqué le sujet. Le constat est que, 50 ans après les indépendances africaines, les coups d’Etat se multiplient sur le vieux continent.
Outre l’entêtement, l’aveuglement du pouvoir et l’enrichissement vite, vite, vite, le Pr Mamadou Koulibaly, président ivoirien de l’Assemblée nationale qui a apporté récemment une contribution à Fraternité Matin, cite : ‘‘le traumatisme de la colonisation et de la décolonisation avec l’exploitation politique des différences tribales, les ingérences politiques internationales, militaires ou humanitaires, le poids exorbitant de l’armée dans les Etats africains, les conceptions traditionnelles et tropicalisées de l’Etat et de la République…’’
A toutes ces tares qui contribuent au drame de l’Afrique, Mamadou Koulibaly ajoute que ‘‘les Elites africaines se battent entre elles pour contrôler les Etats et les ressources naturelles des pays’’.
Comment alors expliquer que nos élites actuelles qui ont combattu les Pères des indépendances, ne puissent pas opérer ce saut et développer le continent ?
Rappelons que Mamadou Koulibaly, agrégé en gestion, a été ministre de l’Economie et des Finances de 2000 à 2002 et fait partie des concepteurs de la refondation du Front populaire ivoirien (Fpi).
En dix ans de pouvoir, le parti de Laurent Gbagbo, hier prolixe en propositions pour sortir le pays du marasme, peine à concilier théorie et pratique. Ces intellectuels, pour la plupart des enseignants, sont restés collés à leurs livres, incapables qu’ils sont de trouver une solution concrète à la paupérisation grandissante. C’est qu’ils n’ont jamais pris le temps d’apprendre à gérer. Ils sont donc passés des salles de classes et d’amphis à la salle feutrée et les lambris dorés du conseil des ministres. Après dix ans de règne calamiteux, le résultat est sans appel : le pays est divisé en deux (une ‘‘Côte d’Ivoire utile’’ et une autre, inutile, se trouvant au nord), les pillages et détournements (usine de Fulton, filière café-cacao, mines et énergie…), les assassinats (marche de l’opposition du 24 mars 2004 avec plus de 200 morts), la répression des marches (sur la cherté de la vie), l’importation des déchets toxiques qui continuent de tuer les Ivoiriens, les ordures ménagères, les routes impraticables, l’augmentation vertigineuse du chômage, la situation de l’école ivoirienne où règne en maître absolu, la Fesci, une milice tribale au service du pouvoir et aujourd’hui, cerise sur le gâteau : le délestage.
Le cocktail molotov
Plutôt que de chercher des solutions aux problèmes qui étranglent chaque jour un peu plus les Ivoiriens, M. Gbagbo Laurent et son parti prospèrent dans le dilatoire en narguant l’opposition. De 2002 à 2010, M. Gbagbo signe à la pelle les accords ; mais une fois au pays, il les foule au pied. Togo, Marcoussis, Accra, Pretoria, Ouagadougou. Ce dernier accord ayant été considéré par Gbagbo lui-même comme l’Accord des Africains eux-mêmes, et suscité par lui.
On peut le dire, pastichant Mamadou Koulibaly, que : ‘‘Les Elites africaines se battent entre elles pour contrôler les Etats et les ressources naturelles des pays’’.
Depuis l’arrivée du Fpi au pouvoir, tous les contrats, hier dénoncés, ont été tous reconduits : CIE, Sodeci, Côte d’Ivoire Telecom… en revanche, l’entêtement perdra à coup sûr M. Gbagbo Laurent. Narguant l’opposition non armée, il n’arrête pas de leur dire qu’ils n’obtiendront rien puisqu’ils n’ont ni territoire, ni armes. Malgré les accords et les résolutions de l’ONU, le chef de l’exécutif ivoirien continue de se comporter comme un éléphant dans un magasin de porcelaine. Récitant un jour une leçon bien apprise d’un Chef d’Etat africain, M. Gbagbo a laissé entendre que ‘‘les résolutions de l’ONU ne tuent pas !’’ Elles peuvent donc continuer de pleuvoir.
Aujourd’hui, le cocktail molotov est prêt pour faire exploser la Côte d’Ivoire à cause de l’intransigeance du Chef de l’Etat ivoirien : dissolution de la CEI, dissolution du gouvernement, achat de conscience, débauchage de militants des autres partis, division des partis, etc. Tant de comportements dictatoriaux et de forfaitures qui irritent le peuple ivoirien et donne des raisons à l’opposition, jusque là pacifique, de passer à l’offensive.
Comme Tandja, Dadis camara et Konan Bédié hier, M. Gbagbo Laurent prépare activement le lit d’une autre guerre en Côte d’Ivoire pour faire usage des nombreuses armes qu’il vient d’acquérir. Or, ces armes ne tuent pas des arbres, mais des hommes…
SYLVAIN NAMOYA