Curieuse façon de dire adieu à un patron qui s’en va. Le personnel du ministère du Commerce a fêté, aux abords des bâtiments de l’immeuble du Ccia, le départ de Youssouf Soumahoro, allant jusqu’à «cotiser» pour faire venir un orchestre. Fanfare, grelots, danses folkloriques, pancartes hostiles… Les agents ont célébré, mardi, à Abidjan, dans la ferveur, l’allégresse et la joie, la mise à l’écart de Youssouf Soumahoro. Ingratitude ou soulagement? Une chose est sûre: le ministre sortant n’a rien d’un tendre d’autant qu’il a réussi à faire l’unanimité contre sa personne. C’est un bulldozer, qui s’est taillé une réputation de «bagarreur» et même de «tyran». «Une de nos secrétaires est décédée sous ses yeux. Cela ne lui a rien dit. Il a dit qu’il n’était pas là pour les cadavres. Nous sommes libérés», s’écriait une demoiselle. Le remplacement de l’ex-ministre tant décrié, par le directeur général adjoint de l’Ageroute Calixte Yapo, s’est fait d’une manière assez conviviale. M. Soumahoro aura passé 5 ans à la tête du département. Une période relativement longue pour une mission jalonnée de soubressauts de tout genre. A-t-il échoué dans sa mission de gestionnaire? Il y a une évidence : le fait que le Premier ministre intervienne, l’année dernière, pour sauver le secteur privé d’une faillite certaine en suspendant la Fiche de renseignement à l’importation (Fri), a été perçu comme un échec dans le management ministériel de M. Soumahoro. Cela a conduit justement à la constitution d’un comité interministériel. Certains membres de ce comité ont soupçonné l’ex-patron du ministère d’avoir voulu tenter une rétention financière. Par ailleurs, ses sorties sur le riz présumé contaminé n’ont pas été appréciées, notamment sa déclaration selon laquelle la denrée contenait du plomb. «Il fallait, après tout cela, un signal fort sur le plan psychologique pour rassurer le monde des affaires », analysent des cadres du ministère. Fait aggravant, les affectations arbitraires, la caporalisation du service public avec les caméras installées dans le cabinet. Avec la passation de pouvoirs, le nouveau ministre, Calixte Yapo prend la tête d’une boîte plombée par des scandales d’une certaine Côte d’Ivoire. C’est d’une opération de redressement et surtout d’une action rigoureuse de crédibilité perdue qu’a besoin aujourd’hui le ministère pour restaurer son image.
Lanciné Bakayoko
Lanciné Bakayoko