Jean Michel Moulod, Député-maire de Grand-Bassam : “Nous allons nous opposer par tous les moyens”

Dans cet entretien, le député-maire de Grand-Bassam, Jean Michel Moulod, président du groupe parlementaire Pdci-Rda par ailleurs président du Rhdp dans cette ville balnéaire, parle de l`actualité politique, notamment la dissolution de la Cei et du gouvernement, les manifestations des jeunes houphouétistes…

Grand-Bassam a été le théâtre de manifestation des jeunes houphouétistes. Quel bilan en faites-vous?
A la suite du faux problème des 429.000 personnes brandi par le clan Gbagbo et ses affidés, le chef de l`Etat a dissous unilatéralement la Commission électorale indépendante et le gouvernement usant encore et toujours du dilatoire pour ne pas aller aux élections. C`est à la suite de cet acte que le Rhdp a appelé le peuple de Côte d`Ivoire à s`opposer par tous les moyens à cette dictature. Nos jeunes à Grand-Bassam ont décidé de manifester. Ils ont donc marché pacifiquement, encadrés par les Fds de la ville. Je peux dire qu`on n`a cassé aucun étal de commerçants. Mais vers midi alors que la marche avait pris fin, le CeCos a débarqué pour molester des manifestants qui rentraient tranquillement chez eux. Les marcheurs ont réagi. Trois de nos jeunes ont été grièvement blessés. Dieu merci, on ne déplore pas de mort comme on a pu le voir ailleurs. Je n`ose pas imaginer la gravité de la réaction si le CeCos était arrivé pendant la marche. Au niveau de la direction locale du Rhdp, nous déplorons cette barbarie inutile. Les marches et sit-in sont l`expression de la démocratie. Laurent Gbagbo n`a fait que ça toute sa vie d`ailleurs. Pis ses marches sont suivies de casses. Rappelez-vous le 18 février 1992.

Comment expliquez-vous cette montée en puissance de violences ?
Dans toutes les villes où les Fds ont été républicaines en encadrant les manifestants, il n`y a pas eu de heurts majeurs. Mais là, où elles ont fait du zèle, en empêchant la marche, elle a dégénéré. Résultats, on a déploré des morts et des casses dues certainement à la colère. Nos jeunes n`arrêtent pas de se plaindre à nous. Ils ne comprennent pas qu`un groupe de jeunes, parce que proche du pouvoir, marchent quand ils veulent, comme ils veulent, insultent qui ils veulent dans les medias et qu`à leur tour, on les empêche de faire des manifestations pacifiques. Ce sont certainement toutes ces choses qui les irritent.

Qu`avez-vous obtenu à la suite de cette marche ?
En dissolvant la Cei et le gouvernement, le pouvoir voulait avoir une mainmise sur la Cei et chasser les ministres du Rhdp gênants. Les marches éclatées du Rhdp sur tout le territoire ont obligé le chef de l`Etat à reculer. L`Ivoirien à qui on a dit : il n`y a rien en face de moi aujourd`hui sait qu`il y a une opposition en face de Laurent Gbagbo. Tous ceux qui pensent à tort que l`opposition n`existe pas ou qu`il n`y a rien en face, ont désormais la réponse.

Youssouf Bakayoko est élu à la tête de la Cei. Quel commentaire faites-vous ?
On ne peut que se réjouir de cette élection qui est l`application effective des accords de Pretoria. En outre, il est député du Pdci, membre éminent du groupe parlementaire Pdci. Elu à l`unanimité 19 voix sur 20. Demain, on ne voudrait pas entendre dire qu`on l`accuse de tous les pêchés. J`estime qu`il sera à la hauteur de la tâche à lui confiée par le pays. Il devra assurer le règlement du contentieux, la publication de la liste définitive. Il doit fixer rapidement la date du 1er tour de la présidentielle. Si d`autres blocages ne viennent pas s`y mettre, comme on en a l`habitude ces 10 dernières années. Je suis confiant que l`équipe de M. Bakayoko pourra tenir dans le délai d`avril-mai 2010. Ce qu`on attend de lui, qu`il conduise avec fermeté et rigueur, cette marche vers la sortie de crise, qui ne peut être effective que par l`organisation des élections. Il devrait savoir éviter les pièges.

Le Fpi demande le renouvellement des Cei locales. N`est-ce pas une proposition judicieuse, surtout que le bureau de la commission centrale est renouvelé ?
Sur la base d`un dysfonctionnement interne à la Cei, le président et ses vice-présidents ont été changés dans les conditions que l`on sait. Ce qui sous-tend que le problème, s`il en est, n`est pas au niveau du bureau de la commission centrale, encore moins au niveau des Cei locales. N`oublions pas que la mise en place des Cei locales a pris au moins un an. Tout ceci, ce sont des montages pour ne pas aller aux élections. Il faut penser à la Côte d`Ivoire. Au Rhdp, nous sommes clairs. Nous nous opposerons par tous les moyens si le Fpi procède au renouvellement des Cei locales. On ne doit pas les renouveler. Nous nous opposerons à ces revendications farfelues de nature à prolonger inutilement la souffrance du peuple.

Depuis plus d`un mois, le pays connaît des délestages et des coupures intempestives d`eau. Le paradoxe, c`est qu`on n`a vu aucun parti politique proposer des solutions pourtant, ils sont censés défendre l`intérêt du peuple ?
Le délestage et les coupures intempestives d`eau sont venus rappeler à la mémoire collective, la politique hasardeuse du Fpi. Son incompétence et son incapacité à prévoir les besoins vitaux de la population. Si on en croit le pouvoir, le délestage est du fait de l`avarie d`une turbine d`Azito. Or, depuis 5 ans au moins, tous les opérateurs du secteur ont attiré l`attention des pouvoirs publics sur la nécessité de faire des investissements dans le domaine.

Interview réalisée par Emmanuelle Kanga à Grand-Bassam