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Politique Publié le mardi 16 mars 2010 | Le Temps

Fraude sur la nationalité à Kohourou (Aboisso) - Plus de 700 Burkinabè et Maliens inscrits sur la liste provisoire La famille de Ahmed Bassam au coeur du scandale-

Le village de Kohourou dans la sous-préfecture d`Aboisso risque de s`embraser dans les jours à venir, à cause des nombreux cas de fraude sur la nationalité observés dans ce hameau de plus de 8000 âmes.


Kohourou, bourgade de la sous-préfecture d`Aboisso. En plus des autochtones Agni, minoritaires, ce campement est devenu aujourd`hui par la force des choses un village. Il est certes peuplé des populations ivoiriennes mais, il a également des ressortissants des pays de la Communauté économique des Etats de l`Afrique de l`ouest (Cedeao), à savoir des Burkinabè, Maliens, Béninois, Togolais, Nigérians et autres Ghanéens. Tous ont élu domicile dans cette bourgade de plus de 8000 âmes. Ce " campement village " dispose, d`un groupe scolaire de deux écoles, d`un château d`eau potable, de l`électrification, d`un centre de santé et est arrosé par le réseau de téléphonie mobile. Kohourou est aussi " le village " du très célébrissime ex-patron de la société de ramassage d`ordures ménagères Ash international, Ahmed Traoré Bassam. Il y a construit un château, qui malheureusement est dans un état de détérioration avancé faute d’entretien. Tous ces peuples sont venus à la recherche de fortune. Car, le sol est fertile. En témoigne, les nombreuses plantations villageoises d`Hévéa, de palmier à huile, de cacao, de café, mais, surtout des plantations industrielles d`hévéa et de palmier à huile de la Palmci et de la Saph. Si par le passé, ces populations vivaient en bonne harmonie, ce n`est plus le cas en ce moment. La haine et la méfiance ont pris le pas sur tout.

La chefferie aux mains des étrangers

Elles se regardent désormais en chiens de faïence. Deux problèmes fondamentaux sont à l`origine de cette mésentente. Et, si l`on n`y prend garde, cette situation risque d`exploser dans les mois à venir. L`un a trait à la chefferie du village et l`autre porte sur le processus de recensement électoral pour les futures élections générales du pays. S`agissant de la chefferie du village, il ressort que le premier gestionnaire a été un Malien. Mais, le sous-préfet d`alors y a mis de l`ordre en précisant que la chefferie n`est pas une affaire d`étranger. Ainsi, après la mort de ce dernier, un Ivoirien du nom de Seydou Diarra, originaire de Papara dans le département de Tengrela est nommé. Après lui, un autre ivoirien de la même région a été nommé pour prendre les rênes du village. Malheureusement, cela n`a pas été du goût des étrangers qui l`ont ouvertement signifié aux Ivoiriens. Quand ce dernier est décédé, ils ont alors mis leurs menaces à exécution en récusant le Secrétaire général de l`ancien chef, en la personne de Coulibaly, un jeune Ivoirien originaire de Papara. Les ressortissants maliens et burkinabé le traitent de xénophobe. " Ils ont accusé le Secrétaire du chef de xénophobe. Parce que, lui, il ne se laissait pas faire ", indique un jeune du village. Et ce dernier d`ajouter que “cette situation a créé une vive tension dans le village. Nous leur avons dit que certes nous sommes venus d`horizons divers, mais certains d`entre nous ont traversé les frontières ivoiriennes avant de venir ici. Et qu`il n`est pas question de remettre la chefferie à un Malien, encore moins à un Burkinabé ou à un autre ressortissant de la Cedeao ", confie un jeune du village sous le couvert de l`anonymat. Et pour réussir le coup, les Burkinabè et Maliens sont allés convaincre un ancien marabout, Ivoirien, originaire du département de Ferkéssédougou, avec de fortes promesses de conduire les destinés du village. C`est ce dernier qui fait office de chef de village en ce moment.

L`origine des nombreux cas de fraudes sur la nationalité

Celui-ci a pour adjoint, M. Coulibaly Bobossy, l`ex-Secrétaire de l`ancien chef du village. Cependant, les jeunes racontent que cet homme fait office de simple figurant aux côtés du chef et de ses notables qui sont en grande majorité des Burkinabè et de Maliens. Selon les jeunes du village, ce dernier est à la solde des ressortissants de la Cedeao qui ont fait de lui un chef. Ils expliquent que malgré les nombreux appels lors du recensement électoral, le nouveau chef a laissé les étrangers s`inscrire sur la liste électorale. "Lorsque les autorités ont annoncé le processus de recensement, des appels ont été lancés à l`endroit des étrangers, leur demandant que ce processus ne les concerne pas. Malheureusement, nous nous sommes rendu compte que, ce sont ces derniers qui se sont retrouvés sur la liste provisoire. Avec des noms d`Ivoiriens", indique un autre villageois sidéré par cette situation. Accompagné par des jeunes pour consulter cette liste provisoire affichée dans l`enceinte de l`école du village, ces derniers indiquent que 80% des inscrits sur cette liste sont d`origine étrangère. " Tous ceux que vous voyez sont des étrangers. Nous sommes tous nés dans ce village. Nous nous connaissons tous. Nous savons qui est Burkinabé ou Malien. Mais, aujourd`hui, ils sont devenus des Ivoiriens ", lancent-ils. Avant de préciser que les enrôlés n`ont jamais demandé à avoir la nationalité ivoirienne.

Plus de 700 Maliens et Burkinabè inscrits sur la liste provisoire

M. Traoré Ahmed Bassam, l`ex-patron de Ash international et à sa famille, originaires de Sikasso au Mali ont reçu de feu, le Président Félix Houphouët- Boigny, le premier Président de la Côte d`Ivoire, la nationalité ivoirienne. A cause de cette faveur et avec la complicité de certaines personnes, la quasi-totalité des Maliens et mêmes des Burkinabè qui vivent dans ce village portent le nom " Traoré ". On cite même M. Vamara Traoré, un parent de l`ex-Directeur général de Ash international, Traoré Ahmed Bassam. Selon les jeunes du village, cet homme est la cheville ouvrière de cette fraude, avec la complicité de certains agents du service d`état civil de la sous-préfecture d`Aboisso délivrent les extraits d`acte de naissance à ses " frères " étrangers. C`est le cas par exemple du Nigérian Aradjouma qui est devenu Traoré Aradjouma avec tous les membres de sa famille. Il en est de même pour le sieur Sonh, Burkinabé d`origine qui est désormais Sonh Traoré. Situation identique pour M. Fabetchien Koné, un Malien bon teint qui se nomme aujourd`hui, Traoré Koné. La liste est très longue, à en croire les jeunes du village, qui ne supportent plus cette situation. "Nous sommes fatigués de cela. Nous nous connaissons tous dans le village et cela nous écoeure de voir des gens porter le nom Traoré, alors qu`ils ne sont pas de cette famille", confient-ils.

Les parents de Ahmed Bassam au cœur du réseau

Les Ivoiriens y ont été pour quelque chose dans cette situation. C`est le cas de la femme de M. Aman. Cette dernière, originaire du Ghana, avec en sa possession, un acte de naissance authentique établi à la sous-préfecture d`Aboisso a manqué de se faire enrôler n`eût été la vigilance des jeunes du village. Il y a aussi le cas de cette autre femme originaire du village, du nom de Ahiman dont l`extrait de naissance a servi à plusieurs personnes de se faire établir des actes de naissance. Les informations font état du cas de M. Moussa Koné, qui n`a pu se faire recenser sur cette liste alors que son jeune frère y est. Aujourd`hui, cette situation divise cette famille. Selon les informations recueillies lors de notre passage dans ce village, le vendredi 5 mars dernier, ce sont plus de 700 étrangers inscrits sur cette liste provisoire. Malheureusement, personne n`ose en parler. " Nous ne voulons pas être sacrifiés. Parce que, nous sommes minoritaires dans le village. Nous avons peur de dénoncer tous ces étrangers qui aujourd`hui, ont la nationalité ivoirienne et tous leurs complices. De peur d`être éliminés sur la route de nos champs ", indique ce jeune homme rencontré au pied du château d`eau du village. Il ajoute que, même les quelque rares rapports faits auprès des autorités administratives, n`ont jamais été pris en considération. "Personne ne prend au sérieux cette menace qui plane sur le village. Les autorités administratives qui savent cette situation ne font rien. Elles attendent qu`elle s`embrase avant d`intervenir ", indique D. Georges, un jeune natif de Gagnoa. En tout cas, les populations se regardent en chiens de faïence. Chacune d`elles attend la moindre étincelle pour mettre le feu.

Joseph Atoumgbré
attjoseph@yahoo.fr
G-envoyé spécial

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