Le 8 mars dernier, le monde entier a fêté les femmes. Mais elles restent encore vulnérables et sujettes à toutes formes de violences. La croisade des Ong contre ces violences basées sur le genre (Vbg) continue de buter sur les considérations culturelles dans certaines régions de notre pays. Dans le Denguélé, ces pratiques sont encore monnaie courante.
«Ma grand-mère m’a fait venir à Odienné pour lui rendre visite, et on vient me dire qu’on m’a proposée en mariage à mon cousin. Quand je lui ai opposé mon refus, elle m’a chassée de la cour familiale.» Ces propos ont été tenus par une jeune fille de 18 ans qui demande à sa meilleure camarade de l’aider à quitter la citée du Kabadougou pour échapper au mariage forcé auquel ses géniteurs la destinent. Cette demoiselle déscolarisée a préféré se confier à son ami plutôt que de recourir aux bons offices des Ong qui opèrent dans ce domaine. « Si je vais vers les Ong, ma grand-mère trouvera que je l’ai humiliée. Je préfère donc demander qu’on m’aide à quitter momentanément la ville, le temps qu’on oublie l’affaire », s’est-elle défendue. Son ami l’aidera à quitter la capitale du Denguélé, un de ces beaux matins de bonne heure du mois de février dernier. Si la jeune fille ne réussit pas à quitter la ville, la seule aubaine qui s’offre à elle serait de se confier à une Ong. Elle a réussi à s’échapper, mais pour combien de temps ? Beaucoup de filles confrontées à des situations similaires qui n’ont aucun endroit où aller ni de choix se sont résignées à épouser l’homme qu’on leur propose. De surcroît, ces mariages sont pour la plupart précoces.
Les Peuls, champions de mariages précoces
L’âge de la mariée n’atteint pas 18 ans dans la plupart des cas. Si dans la capitale du Denguélé, les Ong ont réussi à faire reculer ces mariages imposés, force est de constater que dans les contrées reculées de la région, le phénomène est encore présent dans les mœurs. Notons que le record des mariages précoces est battu par la tribu des Peulhs. A moins de 10 ans déjà, la plupart des filles voient le loup. « Lorsque vous voyez une jeune fille peule qui s’habille comme sa maman, en camisole, et parée des divers bijoux, c’est qu’elle est déjà mariée. Dès la petite enfance c’est-à-dire à partir de six ans, c’est que vous avez affaire à une dame mariée », révèle Soro Djica, point focal de la protection enfant de l’Ong Horizon Vert Santé (HVS). Parmi la progéniture que vous trouvez chez un peulh dans le Denguélé, il est fort probable que vous y comptiez l’une de ses dignes épouses ! HVS qui a fait de la défense des droits de l’homme son bâton de pèlerin, ne ménage aucun effort pour sensibiliser les populations contre ces violations. « Nous n’utilisons pas de violence pour lutter contre ces mariages. Au contraire, nous rassurons les populations. La règle d’or est la confidentialité. Quand nous sommes saisis pour un cas de mariage précoce ou forcé, nous approchons les autorités administratives et traditionnelles de la localité pour faire cesser le mariage. Et, nous le faisons de telle sorte que les parents ne se sentent pas frustrés ».
«Quand le père choisit pour le fils, c’est plus sage»
« Le rôle d’un père est de trouver une digne compagne à son fils. Et c’est de cette façon que plusieurs familles ont été consolidées. Les jeunes de maintenant se marient avec des femmes qu’ils ne connaissent pas », soutient Fofana Aboubakar, chef de village de Kahandala, village situé à 12 km d’Odienné. Ces mariages qui sont pour la plupart des mariages familiaux ne manquent pas de défenseurs. « On peut concéder à ceux qui critiquent nos mariages de précoce. Mais je m’insurge même contre l’appellation « mariage forcé » pour désigner nos noces. Pour nous, c’est la finalité et la longévité du mariage qui comptent. Le devoir du père devait être de songer à sa descendance. Il est difficile de voir sa fille se marier à un homme dont les parents sont de mœurs légères. Nous savons que l’éducation peut faire changer, mais nous ne négligeons pas le naturel des gens. De plus, les divorces n’ont jamais foisonné à une époque que celle que nous vivons, où on prétend s’aimer avant de se marier. Les divorces n’existaient pratiquement pas à notre époque. A chaque époque ses réalités, donc nous observons. Mais je pense que les liaisons libérales des couples sont pour beaucoup dans les égarements de ce monde», soutient Touré Moctar, la cinquantaine. « Ce n’est pas parce que les parents ont choisi qu’on va taxer ce mariage de forcé », observe Touré Moctar. Le mariage familial suscite divers avis. Quand il est condamné par certaines croyances, il constitue dans d’autres communautés la réalisation du vœu des familles. Dans le Nord-Ouest de notre pays, le mariage est une affaire de famille. La liaison entre un cousin et sa cousine n’a rien d’incestueux.
Silence, on excise
L’excision n’a pas encore disparu dans la région. C’est encore dans le monde rural que cette mutilation génitale se fait dans la plus grande discrétion. Dans la sous-préfecture de Tienko, située à 98 km d’Odienné, le phénomène a son bon goût. Doumbia Siaka représentant l’Ong Save the Children estime à plus de trente les fillettes excisées dans la sous-préfecture durant les six derniers mois écoulés. « Dans la coutume, c’est une honte pour une fille de se marier sans être excisée. Mais il faut remarquer que certaines commencent à comprendre, mais nous savons qu’il nous faut travailler davantage pour mettre fin à cette pratique », révèle le responsable de l’Ong Save the Children dans le canton Bodougou (Tienko). « Nous donnons des conseils aux femmes qui accouchent à l’hôpital sur les dangers que l’excision fait courir à leurs enfants. Mais quand ces enfants reviennent pour d’autres maladies, on constate qu’elles sont excisées », regrette M. Doumbia, le seul infirmier du centre de santé urbain de Tienko. Dans ce centre de santé urbain (csu) où il n’y a ni médecin, ni sage femme, M. Doumbia continue de déconseiller l’excision. Selon les Ong, cette pratique a cours dans plusieurs sous-préfectures de la région. Certains quartiers de la cité du Kabadougou sont cités comme lieu où se déroulent clandestinement les mutilations génitales.
Les mineures violées
Quant au viol et autres attentats à la pudeur, la situation n’est guère reluisante dans le Denguélé. Les autorités policières de la capitale du Denguélé ont été plusieurs fois saisies pour des cas de viol sur des jeunes filles. Récemment deux enseignants ont abusé d’une de leurs élèves. L’affaire est encore en instance à la police. Les jours de fête sont les moments de prédilection pour ces violeurs. Dans la nuit du 24 au 25 décembre 2009, une fille de 16 ans a été violée. Le 1er janvier 2010, c’est une fillette de 12 ans que des jeunes gens sadiques ont déflorée. Tous ces cas ont été rapportés à l’Ong HVS qui en a pris bonne note. Selon Mme Soro Djica responsable de cette Ong, l’âge des personnes victimes de ces viols varie entre 2 et 16 ans. « Après avoir écouté les victimes qui viennent à nous, nous les évacuons dans un centre de santé pour vérifier la sérologie. Puis une plainte s’en suit contre l’auteur de la violence sexuelle », explique Mme Soro. Il existe une plate-forme présidée par le directeur départemental des Affaires sociales qui est saisi pour suivre la victime. « Le viol est un grave crime en ce sens qu’il expose la victime au sida et autres mst, l’incontinence, les grossesses précoces et non désirées. Sans oublier le traumatisme et autres conséquences psychosociales. Nous aidons donc les victimes à surmonter tout cela », souligne Mme Soro. Elle aurait souhaité que les auteurs de ces violences soient punis, mais la plupart des ces crimes, même s’ils sont traduits devant les autorités finissent par des règlements à l’amiable. Les deux familles (celle de la victime et celle du bourreau) parviennent à convaincre les autorités qu’elles passent l’éponge sur l’affaire en mettant fin aux poursuites.
Ténin Bè Ousmane
«Ma grand-mère m’a fait venir à Odienné pour lui rendre visite, et on vient me dire qu’on m’a proposée en mariage à mon cousin. Quand je lui ai opposé mon refus, elle m’a chassée de la cour familiale.» Ces propos ont été tenus par une jeune fille de 18 ans qui demande à sa meilleure camarade de l’aider à quitter la citée du Kabadougou pour échapper au mariage forcé auquel ses géniteurs la destinent. Cette demoiselle déscolarisée a préféré se confier à son ami plutôt que de recourir aux bons offices des Ong qui opèrent dans ce domaine. « Si je vais vers les Ong, ma grand-mère trouvera que je l’ai humiliée. Je préfère donc demander qu’on m’aide à quitter momentanément la ville, le temps qu’on oublie l’affaire », s’est-elle défendue. Son ami l’aidera à quitter la capitale du Denguélé, un de ces beaux matins de bonne heure du mois de février dernier. Si la jeune fille ne réussit pas à quitter la ville, la seule aubaine qui s’offre à elle serait de se confier à une Ong. Elle a réussi à s’échapper, mais pour combien de temps ? Beaucoup de filles confrontées à des situations similaires qui n’ont aucun endroit où aller ni de choix se sont résignées à épouser l’homme qu’on leur propose. De surcroît, ces mariages sont pour la plupart précoces.
Les Peuls, champions de mariages précoces
L’âge de la mariée n’atteint pas 18 ans dans la plupart des cas. Si dans la capitale du Denguélé, les Ong ont réussi à faire reculer ces mariages imposés, force est de constater que dans les contrées reculées de la région, le phénomène est encore présent dans les mœurs. Notons que le record des mariages précoces est battu par la tribu des Peulhs. A moins de 10 ans déjà, la plupart des filles voient le loup. « Lorsque vous voyez une jeune fille peule qui s’habille comme sa maman, en camisole, et parée des divers bijoux, c’est qu’elle est déjà mariée. Dès la petite enfance c’est-à-dire à partir de six ans, c’est que vous avez affaire à une dame mariée », révèle Soro Djica, point focal de la protection enfant de l’Ong Horizon Vert Santé (HVS). Parmi la progéniture que vous trouvez chez un peulh dans le Denguélé, il est fort probable que vous y comptiez l’une de ses dignes épouses ! HVS qui a fait de la défense des droits de l’homme son bâton de pèlerin, ne ménage aucun effort pour sensibiliser les populations contre ces violations. « Nous n’utilisons pas de violence pour lutter contre ces mariages. Au contraire, nous rassurons les populations. La règle d’or est la confidentialité. Quand nous sommes saisis pour un cas de mariage précoce ou forcé, nous approchons les autorités administratives et traditionnelles de la localité pour faire cesser le mariage. Et, nous le faisons de telle sorte que les parents ne se sentent pas frustrés ».
«Quand le père choisit pour le fils, c’est plus sage»
« Le rôle d’un père est de trouver une digne compagne à son fils. Et c’est de cette façon que plusieurs familles ont été consolidées. Les jeunes de maintenant se marient avec des femmes qu’ils ne connaissent pas », soutient Fofana Aboubakar, chef de village de Kahandala, village situé à 12 km d’Odienné. Ces mariages qui sont pour la plupart des mariages familiaux ne manquent pas de défenseurs. « On peut concéder à ceux qui critiquent nos mariages de précoce. Mais je m’insurge même contre l’appellation « mariage forcé » pour désigner nos noces. Pour nous, c’est la finalité et la longévité du mariage qui comptent. Le devoir du père devait être de songer à sa descendance. Il est difficile de voir sa fille se marier à un homme dont les parents sont de mœurs légères. Nous savons que l’éducation peut faire changer, mais nous ne négligeons pas le naturel des gens. De plus, les divorces n’ont jamais foisonné à une époque que celle que nous vivons, où on prétend s’aimer avant de se marier. Les divorces n’existaient pratiquement pas à notre époque. A chaque époque ses réalités, donc nous observons. Mais je pense que les liaisons libérales des couples sont pour beaucoup dans les égarements de ce monde», soutient Touré Moctar, la cinquantaine. « Ce n’est pas parce que les parents ont choisi qu’on va taxer ce mariage de forcé », observe Touré Moctar. Le mariage familial suscite divers avis. Quand il est condamné par certaines croyances, il constitue dans d’autres communautés la réalisation du vœu des familles. Dans le Nord-Ouest de notre pays, le mariage est une affaire de famille. La liaison entre un cousin et sa cousine n’a rien d’incestueux.
Silence, on excise
L’excision n’a pas encore disparu dans la région. C’est encore dans le monde rural que cette mutilation génitale se fait dans la plus grande discrétion. Dans la sous-préfecture de Tienko, située à 98 km d’Odienné, le phénomène a son bon goût. Doumbia Siaka représentant l’Ong Save the Children estime à plus de trente les fillettes excisées dans la sous-préfecture durant les six derniers mois écoulés. « Dans la coutume, c’est une honte pour une fille de se marier sans être excisée. Mais il faut remarquer que certaines commencent à comprendre, mais nous savons qu’il nous faut travailler davantage pour mettre fin à cette pratique », révèle le responsable de l’Ong Save the Children dans le canton Bodougou (Tienko). « Nous donnons des conseils aux femmes qui accouchent à l’hôpital sur les dangers que l’excision fait courir à leurs enfants. Mais quand ces enfants reviennent pour d’autres maladies, on constate qu’elles sont excisées », regrette M. Doumbia, le seul infirmier du centre de santé urbain de Tienko. Dans ce centre de santé urbain (csu) où il n’y a ni médecin, ni sage femme, M. Doumbia continue de déconseiller l’excision. Selon les Ong, cette pratique a cours dans plusieurs sous-préfectures de la région. Certains quartiers de la cité du Kabadougou sont cités comme lieu où se déroulent clandestinement les mutilations génitales.
Les mineures violées
Quant au viol et autres attentats à la pudeur, la situation n’est guère reluisante dans le Denguélé. Les autorités policières de la capitale du Denguélé ont été plusieurs fois saisies pour des cas de viol sur des jeunes filles. Récemment deux enseignants ont abusé d’une de leurs élèves. L’affaire est encore en instance à la police. Les jours de fête sont les moments de prédilection pour ces violeurs. Dans la nuit du 24 au 25 décembre 2009, une fille de 16 ans a été violée. Le 1er janvier 2010, c’est une fillette de 12 ans que des jeunes gens sadiques ont déflorée. Tous ces cas ont été rapportés à l’Ong HVS qui en a pris bonne note. Selon Mme Soro Djica responsable de cette Ong, l’âge des personnes victimes de ces viols varie entre 2 et 16 ans. « Après avoir écouté les victimes qui viennent à nous, nous les évacuons dans un centre de santé pour vérifier la sérologie. Puis une plainte s’en suit contre l’auteur de la violence sexuelle », explique Mme Soro. Il existe une plate-forme présidée par le directeur départemental des Affaires sociales qui est saisi pour suivre la victime. « Le viol est un grave crime en ce sens qu’il expose la victime au sida et autres mst, l’incontinence, les grossesses précoces et non désirées. Sans oublier le traumatisme et autres conséquences psychosociales. Nous aidons donc les victimes à surmonter tout cela », souligne Mme Soro. Elle aurait souhaité que les auteurs de ces violences soient punis, mais la plupart des ces crimes, même s’ils sont traduits devant les autorités finissent par des règlements à l’amiable. Les deux familles (celle de la victime et celle du bourreau) parviennent à convaincre les autorités qu’elles passent l’éponge sur l’affaire en mettant fin aux poursuites.
Ténin Bè Ousmane