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Société Publié le mercredi 24 mars 2010 | Nuit & Jour

Enquête / Phénomène de société ou fait social ? - Pourquoi les filles se tatouent de plus en plus

Autrefois réservé aux marginaux ou aux délinquants, adopté aujourd’hui par les ‘’people version fashion’’, le tatouage est devenu un véritable accessoire de mode féminin à Abidjan. Enquête sur les codes et les tendances d’un phénomène irréversible à Abidjan et où les femmes ont l’exclusivité de la nouveauté.

« Les bas de dos, j’en fais environ un par jour », nous explique Stéphane, designer du corps de son état dans le salon de ‘’Chantou tatouage’’ au II Plateaux Aghien. Depuis quelques temps ces tatouages d’inspiration exotique fleurissent sur le dos des filles à Abidjan à hauteur des reins. Ces motifs abstraits ont toujours une signification précise pour celle qui la met. « Rien avoir avec nos mœurs et coutumes c’est une affaire de mode », a renchérit, Chantal, propriétaire du salon de coiffure qui a la spécialité de réussir les tatouages à Abidjan. Depuis que son visage s’est démocratisé et il n’est plus l’apanage des voyous, taulards et autres marginaux de la société, il est devenu un véritable bijou corporel pour les Abidjanaises. Victime de la mode ? Peut-être pas. Et l’on remarque que les tendances en la matière évoluent au fil des ans. Comme la mode, il y a d’abord eu des tatouages rapidement visibles et au fil du temps cela a pris un tournant beaucoup plus raffiné. « Au début, saisonniers, les tatouages se font maintenant durant toute l’année. Je veux dire que c’était à l’approche des fêtes de fin d’année, ou des évènements à caractère festifs. Mais maintenant tout, se passe comme si les Ivoiriennes ont adopté pour ne pas dire revendiquent le tatouage » a reconnu Stéphane K. Fatim 19 ans s’est fait ‘’un bas de dos’’ sans réfléchir aux conséquences presque avec un air indétrônable : « je suis fais un bas de dos sur la chute de mes reins, il y a de cela 3 semaines. Je m’habille sexy et je voulais me mettre en valeur c'est-à-dire agrémenter mon dos et le haut de mes fesses ». Mais cela plait-il aux hommes ? « Je ne leur ai jamais demandé de façon formel mais ça à l’air de les emballer », avoue la jeune fille. De toute façon, pour Fatim ce n’est pas l’essentiel. « En tout cas, ça me fait du bien et puis ça un effet un peu psychologique comme si je venais de prendre un médicament ». Et des jeunes filles présentent avaient toutes l’air d’approuver ce que dit Fatim. Comme quoi, le tatouage est entré aujourd’hui dans les mœurs et est tout bonnement devenu un accessoire de mode. Surtout avec la vogue du Jean’s taille basse. Ce qui n’est pas sans amuser les professionnels.



La mode c’est un atout, a renchérit Chantal. « Le pantalon on peut le changer, la culotte pareil, le Jean aussi, mais le tatouage on ne le change pas du jour au lendemain. Ce qui veut dire que cette mode n’est pas sans conséquence pour celles qui l’adoptent. Généralement, les filles qui s’adonnent à cette pratique ont entre 18 et 26 ans et elles n’ont pas encore eu leur premier enfant. Après le premier bébé, elles prendront surement à peu près 10 kilos de plus et la situation du quotidien aidant, elles ne pourront plus s’en donner à cœur joie à cette pratique » nous explique un père de famille qui fustige l’insouciance généralisée des 18-25 ans à Abidjan. Pourtant nombreuses sont les femmes qui ne franchissent pas le pas : « je trouve cela un peu idiot et pas vraiment propre de faire tatouer la peau, les fesses et autres », a affirmé une jeune dame. C’est dire que le phénomène, même s’il connaît une percée certaine, est resté circonscrit dans un certain milieu ; le milieu de ‘’fashion revendiqué’’ et il ne saurait être l’apanage de toute la gent féminine abidjanaise. Au départ, de l’ordre du rituel, le tatouage est très vite devenu pour cette catégorie de fille une manière de signifier que leur corps leur appartient. Le corps étant devenu le dernier territoire de liberté pour les jeunes filles, elles ont décidé de le marquer avec des tatouages. Mais il existe des conséquences imprévisibles pour la santé. Effacer un tatouage coute cher et le souvenir de ces moments d’insouciances peut-être à jamais gravé dans la mémoire de ces filles qui s’adonnent à cette pratique. Conséquence sur la santé bien sûr, mais aussi et surtout conséquence psychologique. Les adeptes de cette pratique peuvent-être considérées comme les victimes de la mode. En ce sens que le tatouage censé personnaliser son propriétaire, court tous les coins de rue. Et il n’est plus rare de croiser les personnes ayant à peu près le même tatouage sur le corps. Alors, où se trouve l’originalité ? Il faudra longtemps chercher et pourtant. Montrer son corps dans son plus simple appareil, c'est-à-dire vierge est la meilleure des choses qui puisse arriver à une femme.

Williams Arthur Prescot

Photo : Les filles qui se tatouent la peau.

Légende : Les adeptes du tatouage sont des victimes de la mode.
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