Les tueurs au nom de l’Etat et de sa sécurité étaient jusque-là sous un parapluie atomique. En Afrique notamment, être dans le camp du prince au pouvoir a toujours mis hors des poursuites judiciaires. Les Ivoiriens, pour ne parler que d’eux, ont assisté à de nombreux massacres sous la Refondation. En octobre 2000, par exemple, des dizaines de corps ont été découverts dans le désormais tristement célèbre charnier de Yopougon. Des jeunes gens abattus à bout portant par des gendarmes de l’escadron d’Abobo. Il y a eu un simulacre de procès. Mais, pas de coupables pour ce crime qui restera gravé dans les mémoires un peu comme le crime fondateur du règne par la terreur dans l’histoire du pays. Le commandant Bê Kpan et ses hommes, les prévenus, sont arrivés devant le tribunal militaire qui siégeait dans le principal camp de gendarmerie d’Abidjan en hommes libres. Ils en sont partis libres. A la stupéfaction de tous. Le procureur militaire qui a instruit le dossier et qui avait requis des peines lourdes allant de vingt ans d’emprisonnement ferme à la prison à vie n’a même pas daigné faire appel du verdict de la cour. Ange Kessy avait, dans un premier temps, fait savoir son intention d’interjeter appel avant de se raviser. Confortant tous ceux qui ont parlé d’un procès pour simplement amuser la galerie. Les victimes du charnier ont eu malgré tout de la chance. Une cour a formellement siégé sur leur cas. Les morts des événements des 24, 25 et 26 mars 2004 n’ont pas bénéficié de ce privilège. Pas le moindre début d’enquête au niveau local sur cette tragédie et ses plus de trois cents morts attestés par l’Onu. Les tueurs courent toujours sous la bienveillante protection de l’Etat. Mais, au Kenya, la Cour pénale internationale vient d’ouvrir une enquête sur les morts des violences politiques de la dernière élection présidentielle. Signe que les assassins de civils payeront, tous, un jour !
D. Al Seni
D. Al Seni