La musique tradi-moderne baoulé compte aujourd’hui parmi les genres musicaux ivoiriens en vogue. Après plusieurs années d’existence, la romance a basculé vers des textes truffés de grossièreté qui semblent prendre le dessus sur des textes sensés. Mais, des chanteurs privilégient le message.
Le succès de la musique traditionnelle moderne (tradi-moderne) baoulé est incontestable. Après un décollage nonchalant, elle est parvenue à s’imposer au plan national. N’Guess Bon Sens, Amani Djoni, la Tigresse Sidonie, Kolouba Norbert, Loukou Confiance, pour ne citer que ceux-là, sont devenus des stars. « Le ‘’coupé décalé’’ a son public, la musique tradi-moderne baoulé aussi », confie N’Guess Bon Sens, chanteur baoulé très adulé. Mais cela n’est pas du goût de tout le monde, au vu de ce qui se raconte dans les chansons. Certains mélomanes jugent leurs chansons vulgaires. « Dans la musique baoulé, on chante n’importe quoi. Ce qu’ils disent, ce n’est pas la peine », s’insurge K. Michel, jeune baoulé.
Des textes parfois osés…
Selon lui, les textes des chansons sont truffés de grossièretés. Pour exemple, il énumère une chanson de Kouadio Morisson (décédé), ‘’La chose des hommes’’ (relatif au sexe masculin), qu’il résume en ces termes : « Un homme sort nu, toutes les femmes accourent à cause de ‘’la chose des hommes’’. Ensuite, l’auteur entame une description détaillée de cette ‘’chose’’. Ce portrait, il le fera pour ‘’la chose des femmes’’ dans une autre réplique. Aussi, dans la même chanson, l’auteur demande aux femmes de choisir entre la tête de l’homme et son sexe». Pour corroborer sa thèse Michel cite une autre chanson de Amoin Rosalie ‘’Saute mouton’’, qu’il considère aussi perverse que celle de Morisson. K. Ahou Lucienne, une fan de la musique originaire du centre du pays, abonde dans le même sens. « Kouadio Morisson a une chanson dans laquelle on parle de tête et de bas, je n’ai pas trop aimé. Je déteste qu’on dise ce genre de chose en public », se désole la jeune fille. A. Marcelle reconnaît que les musiciens baoulé aiment beaucoup jouer la comédie. Elle croit que c’est la source même de leur inspiration. « Un baoulé ne se lève pas comme cela pour chanter devant un public. Il joue d’abord la comédie, c’est après que ça devient sérieux », éclaircie-t-elle. Seulement, la forte demande des artistes abondant dans ce style musical en période des fêtes de Pâques, traduit largement leur succès. Mais, avant cette vague de ‘’jeunes’’ qui font la pluie et le beau temps, il y a eu Tonton Etienno, Allah Thérèse, Pondô Kouakou, Kouakou Michel...
Des précurseurs basés sur les proverbes
Ces derniers en véritables précurseurs ont su, à partir d’une adaptation des rythmes du terroir et de textes poignants, booster cette musique à la lumière des projecteurs. « Allah Thérèse a une musique basée sur les faits sociaux. Des situations qui se produisent tous les jours au village. Ce sont ces histoires qu’elle habille et met sous forme de chanson. Elle connaît de nombreux proverbes et paraboles », explique N’Dri Affoué Augustine, une autre admiratrice de la musique baoulé. Les chansons d’Allah Thérèse incrustées de proverbes sont de véritables satires sociales. Les chanteurs traditionnels baoulé qu’on peut classer dans la vieille génération, avaient un style musical particulier. On les assimilerait à des griots, tant ils savaient faire les éloges. « Pour ce qui est des chanteurs comme Tonton Etienno ou Allah Thérèse, leurs chants sont basés sur les faits quotidiens du village », explique dame Augustine. C’est donc un récit de faits vécus. « Ils ne développaient pas trop les textes et même la rythmique », contredit N’Guess Bon Sens. Seulement, cela a permis à tous les chanteurs baoulé qui vont suivre, de s’ouvrir un crédo basé sur la guitare à trois cordes. L’évolution qu’a connue la musique du centre, a donné un autre visage à ce rythme. Ce qui a, quelque peu, travesti les textes et souvent la mélodie.
Une prise de conscience
Pour N’Guess Bon Sens, cette situation n’est pas généralisée. « C’est triste, mais il faut dire que cela n’a duré qu’un moment. Le constat est que ceux qui chantaient ce genre de texte, ne sont plus en vie aujourd’hui. Morisson n’est plus, la vieille (Amoin Rosalie) aussi », constate-t-il. Pour lui, les chanteurs baoulé actuels fredonnent tous des textes qui n’ont rien à voir avec ‘’les fesses’’. « Ceux qui sont sur la scène maintenant, je veux parler de Konan Ebongué, la Tigresse Sidonie, Kolouba Norbert, Amani Djoni, ne parlent pas de ‘’fesses’’ dans leurs compositions », justifie l’auteur de ‘’violente question’’. Quant à savoir si cette tendance grossière ne s’était pas développée à cause du caractère pervers des peuples du centre de la Côte d’Ivoire, N’Guess Bon Sens est catégorique : « Ce n’est pas spécifique au peuple baoulé. On a l’exemple des Dj qui ne chantent que ça. Comme tout le monde aime bien, certains chanteurs baoulé s’y sont abonnés. Mais, je pense que ce fait ne doit pas nous coller à la peau ». ‘’Tantie’’ Irène, une adepte de cette musique, adore Kouadio Morisson. Pour elle, il a la plus belle voix parmi les chanteurs baoulé. Le concernant, à part sa chanson citée plus haut, qu’elle regrette d’ailleurs, elle soutient que ses thèmes font très réfléchir et parfois ils arrachent des larmes. Très introduite dans ce genre musical, N’Dri Affoué Augustine passe au scanner chacun des chanteurs. « N’Guess Bon Sens est un très bon compositeur. C’est lui-même qui crée ses chansons. La Tigresse Sidonie axe ses chants sur la réjouissance. C’est pareil pour Antoinette Konan. D’autres jeunes comme Petit Morisson (frère cadet de Kouadio Morisson) chantent aussi des faits sociaux », résume-t-elle. Pour un meilleur rayonnement de cette musique, Affoué Augustine demande aux artistes de se baser sur des textes forts. « Quand il y a un problème, il faut en parler dans les chansons. Il faut aller droit au but. Il faut que nos créateurs se séparent des thèmes qui ne font pas avancer notre musique », conseille-t-elle.
Une vision nouvelle?
« J’invite mes frères à ne plus chanter les fesses. Il faut réfléchir et sortir de bonnes chansons », recommande N’Guess. Selon lui, c’est ce qui est dit dans un enregistrement musical qui donne de l’intérêt à la mélodie. Si les paroles ne sont pas bonnes, la mélodie le devient immédiatement.
Sanou Amadou (Stagiaire)
Le succès de la musique traditionnelle moderne (tradi-moderne) baoulé est incontestable. Après un décollage nonchalant, elle est parvenue à s’imposer au plan national. N’Guess Bon Sens, Amani Djoni, la Tigresse Sidonie, Kolouba Norbert, Loukou Confiance, pour ne citer que ceux-là, sont devenus des stars. « Le ‘’coupé décalé’’ a son public, la musique tradi-moderne baoulé aussi », confie N’Guess Bon Sens, chanteur baoulé très adulé. Mais cela n’est pas du goût de tout le monde, au vu de ce qui se raconte dans les chansons. Certains mélomanes jugent leurs chansons vulgaires. « Dans la musique baoulé, on chante n’importe quoi. Ce qu’ils disent, ce n’est pas la peine », s’insurge K. Michel, jeune baoulé.
Des textes parfois osés…
Selon lui, les textes des chansons sont truffés de grossièretés. Pour exemple, il énumère une chanson de Kouadio Morisson (décédé), ‘’La chose des hommes’’ (relatif au sexe masculin), qu’il résume en ces termes : « Un homme sort nu, toutes les femmes accourent à cause de ‘’la chose des hommes’’. Ensuite, l’auteur entame une description détaillée de cette ‘’chose’’. Ce portrait, il le fera pour ‘’la chose des femmes’’ dans une autre réplique. Aussi, dans la même chanson, l’auteur demande aux femmes de choisir entre la tête de l’homme et son sexe». Pour corroborer sa thèse Michel cite une autre chanson de Amoin Rosalie ‘’Saute mouton’’, qu’il considère aussi perverse que celle de Morisson. K. Ahou Lucienne, une fan de la musique originaire du centre du pays, abonde dans le même sens. « Kouadio Morisson a une chanson dans laquelle on parle de tête et de bas, je n’ai pas trop aimé. Je déteste qu’on dise ce genre de chose en public », se désole la jeune fille. A. Marcelle reconnaît que les musiciens baoulé aiment beaucoup jouer la comédie. Elle croit que c’est la source même de leur inspiration. « Un baoulé ne se lève pas comme cela pour chanter devant un public. Il joue d’abord la comédie, c’est après que ça devient sérieux », éclaircie-t-elle. Seulement, la forte demande des artistes abondant dans ce style musical en période des fêtes de Pâques, traduit largement leur succès. Mais, avant cette vague de ‘’jeunes’’ qui font la pluie et le beau temps, il y a eu Tonton Etienno, Allah Thérèse, Pondô Kouakou, Kouakou Michel...
Des précurseurs basés sur les proverbes
Ces derniers en véritables précurseurs ont su, à partir d’une adaptation des rythmes du terroir et de textes poignants, booster cette musique à la lumière des projecteurs. « Allah Thérèse a une musique basée sur les faits sociaux. Des situations qui se produisent tous les jours au village. Ce sont ces histoires qu’elle habille et met sous forme de chanson. Elle connaît de nombreux proverbes et paraboles », explique N’Dri Affoué Augustine, une autre admiratrice de la musique baoulé. Les chansons d’Allah Thérèse incrustées de proverbes sont de véritables satires sociales. Les chanteurs traditionnels baoulé qu’on peut classer dans la vieille génération, avaient un style musical particulier. On les assimilerait à des griots, tant ils savaient faire les éloges. « Pour ce qui est des chanteurs comme Tonton Etienno ou Allah Thérèse, leurs chants sont basés sur les faits quotidiens du village », explique dame Augustine. C’est donc un récit de faits vécus. « Ils ne développaient pas trop les textes et même la rythmique », contredit N’Guess Bon Sens. Seulement, cela a permis à tous les chanteurs baoulé qui vont suivre, de s’ouvrir un crédo basé sur la guitare à trois cordes. L’évolution qu’a connue la musique du centre, a donné un autre visage à ce rythme. Ce qui a, quelque peu, travesti les textes et souvent la mélodie.
Une prise de conscience
Pour N’Guess Bon Sens, cette situation n’est pas généralisée. « C’est triste, mais il faut dire que cela n’a duré qu’un moment. Le constat est que ceux qui chantaient ce genre de texte, ne sont plus en vie aujourd’hui. Morisson n’est plus, la vieille (Amoin Rosalie) aussi », constate-t-il. Pour lui, les chanteurs baoulé actuels fredonnent tous des textes qui n’ont rien à voir avec ‘’les fesses’’. « Ceux qui sont sur la scène maintenant, je veux parler de Konan Ebongué, la Tigresse Sidonie, Kolouba Norbert, Amani Djoni, ne parlent pas de ‘’fesses’’ dans leurs compositions », justifie l’auteur de ‘’violente question’’. Quant à savoir si cette tendance grossière ne s’était pas développée à cause du caractère pervers des peuples du centre de la Côte d’Ivoire, N’Guess Bon Sens est catégorique : « Ce n’est pas spécifique au peuple baoulé. On a l’exemple des Dj qui ne chantent que ça. Comme tout le monde aime bien, certains chanteurs baoulé s’y sont abonnés. Mais, je pense que ce fait ne doit pas nous coller à la peau ». ‘’Tantie’’ Irène, une adepte de cette musique, adore Kouadio Morisson. Pour elle, il a la plus belle voix parmi les chanteurs baoulé. Le concernant, à part sa chanson citée plus haut, qu’elle regrette d’ailleurs, elle soutient que ses thèmes font très réfléchir et parfois ils arrachent des larmes. Très introduite dans ce genre musical, N’Dri Affoué Augustine passe au scanner chacun des chanteurs. « N’Guess Bon Sens est un très bon compositeur. C’est lui-même qui crée ses chansons. La Tigresse Sidonie axe ses chants sur la réjouissance. C’est pareil pour Antoinette Konan. D’autres jeunes comme Petit Morisson (frère cadet de Kouadio Morisson) chantent aussi des faits sociaux », résume-t-elle. Pour un meilleur rayonnement de cette musique, Affoué Augustine demande aux artistes de se baser sur des textes forts. « Quand il y a un problème, il faut en parler dans les chansons. Il faut aller droit au but. Il faut que nos créateurs se séparent des thèmes qui ne font pas avancer notre musique », conseille-t-elle.
Une vision nouvelle?
« J’invite mes frères à ne plus chanter les fesses. Il faut réfléchir et sortir de bonnes chansons », recommande N’Guess. Selon lui, c’est ce qui est dit dans un enregistrement musical qui donne de l’intérêt à la mélodie. Si les paroles ne sont pas bonnes, la mélodie le devient immédiatement.
Sanou Amadou (Stagiaire)