Il a frappé dans le mille ; là où ça fait mal. Mamadou Koulibaly, le « révolté de la refondation » est encore sorti de ses gonds pour fustiger le système mafieux instauré par le régime Gbagbo. La tribune à lui offerte par la Convention de la société civile ivoirienne, mercredi à la Rotonde de l’Assemblée nationale, a été l’occasion pour le numéro deux du régime, de cracher ses « vérités interdites ». Certes, l’homme a habitué ses compatriotes à des pamphlets contre les attitudes déviationnistes de ses camarades du FPI à la tête de l’Etat. Cette fois, il s’attaque non seulement au fonctionnement du système Gbagbo mais, également à l’un de ses barons, en l’occurrence, Désiré Tagro, tout puissant ministre de l’Intérieur, la voix et les yeux du chef de l’Etat dans la conception de l’Accord politique de Ouagadougou. Il réclame la démission de ce dernier du Gouvernement pour s’être rendu coupable de parjure vis-à-vis du peuple ivoirien. Estimant que l’APO s’est embourbé dans ses contradictions congénitales, le président de l’Assemblée nationale est convaincu que la responsabilité de Désiré Tagro est engagée. Car, dit-il « c’est lui qui a négocié, discuté, approuvé et conseillé l’APO ». En conséquence, ajoute-t-il, « l’échec patent de cet accord devrait amener le ministre Tagro à démissionner. Il n’y va pas de main morte dans son attaque contre ce pilier du système. Il l’accuse même d’avoir fait prendre au chef de l’Etat, des « ordonnances illégales » dont le seul but est « l’assouvissement d’intérêts particuliers et clairement à l’opposé du bien-être collectif ». Koulibaly aurait voulu souhaiter la mise à plat ou l’effondrement du système du camarade Gbagbo qu’il ne s’y serait pas pris autrement. Car, Tagro est aujourd’hui, comme on le dit de manière triviale, « l’homme fort » de Gbagbo et de son système. Un système qui, à l’analyse du natif d’Azaguié, est caractérisé par la corruption et le tribalisme ambiant d’une part et d’autre part, par la roublardise politique. Cette corruption gangrène la société ivoirienne à commencer par l’école. Ainsi, à entendre Koulibaly – Dieu seul sait qu’il dit la vérité – les achats des concours à l’ENA, à l’école de police et à la gendarmerie est « la manifestation d’un système corrompu ». Sur ce sujet, le vice-président du FPI ne fait que relever une vérité sue de tous ceux qui vivent en Côte d’Ivoire. Il y a quelques jours, l’ancien ministre de la Fonction publique, Hubert Oulaye, avouait que les concours de l’ENA étaient achetés. La gestion du pouvoir tout comme celle de la crise qui perdure depuis 2002, est tributaire de la politique de la ruse voire de la roublardise du système en place. Une méthode archaïque de gestion du pouvoir d’Etat. En effet, celle-ci ne doit pas être, comme c’est le cas avec la refondation, une manière de se détourner des problèmes ou de les déplacer, mais de les affronter avec responsabilité. En somme, Mamadou Koulibaly a fait sienne devant la Convention de la société civile ivoirienne, une idée de l’Abbé Pierre selon laquelle « la responsabilité implique deux actes : vouloir savoir et oser dire ». Il a osé dire tout haut ce que certainement bon nombre de ses camarades frontistes disent tout bas. Maintenant, il ne lui reste plus qu’à en tirer les conséquences.
Ibrahima B. Kamagaté
Ibrahima B. Kamagaté