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Art et Culture Publié le samedi 10 juillet 2010 | Nord-Sud

Sonloué Flora Natacha Nash, les secrets d’un garçon manqué…

Une des rares filles du mouvement hip-hop ivoirien, Nash, a donné une touche éburnéenne à cette musique venue des Etats-Unis. Nouchi (langage populaire ivoirien), force de caractère, défense des droits de la femme, la fille de Guitrozon (son village) a convaincu plus d’un observateur. D’où tire-t-elle son énergie ? Portrait.

Vêtue d’un grand t-shirt rouge et d’un buggy digne d’un jeune américain de Brooklyn, la chanteuse de la vidéo attire l’attention. Cette jeune rappeuse a un style particulier. Le rap qu’elle fait met en avant le nouchi (langage populaire ivoirien). Le thème est d’actualité. Sur la musique de la chanson ‘’1er Gaou’’ du groupe Magic System, elle donne des conseils aux jeunes filles qui se font enceinter hors mariage. Le ton est agressif. Et, aucun cadeau n’est fait aux hommes. Ainsi, le public découvrait Nash sur le titre ‘’1ère Djandjou’’. Quelques années après ses premiers pas dans la chanson, ses différentes participations sur des compilations et son second album solo ‘’Zié dédja’’, la rappeuse est devenue une icône du mouvement en Côte d’Ivoire.

Tout part de Yopougon

Les nombreuses tournées de la star lui ont permis de découvrir plusieurs contrées du monde. France, Suisse, Burkina, Sénégal…Mais, c’est la commune de Yopougon qui constitue son point de focal. En effet, Nash qui est le diminutif de Natacha, son prénom, y est née un 17 novembre d’une année qu’elle préfère taire. Une commune qu’elle quitte très tôt. Elle doit suivre son père Sonloué Honoré, qui est un Côte d’Ivoire-trotter pour exercer sa fonction de greffier. Korhogo, Danané, Man, maître Sonloué amène toujours sa famille dans les villes où il est affecté. En 1998, il est de retour à Yopougon. C’est à Abidjan que l’amoureuse du hip-hop découvre Diam’s, une rappeuse française. En Diam’s, Nash retrouve une force de caractère. Une énergie qui épouse sa vision du milieu rap. «J’ai découvert en elle des points qui nous sont communs. A savoir qu’elle parlait des réalités vécues tous les jours et particulièrement par les femmes. Elle est devenue mon idole», se souvient-elle. Mais avant Diam’s, la ‘’go cracra’’ (jeune fille éveillée) était tombée sous le charme de Prisca, artiste locale de hip-hop. Quoi de plus normal d’autant que Prisca était la seule fille du milieu qui avait réussi à s’imposer. Aujourd’hui, Prisca est devenue une de ses meilleures amies. Aussi, avait-elle essayé plusieurs expériences musicales à Man. En classe de 6e, elle improvisait avec des amis, des free-styles dans la cour de recréation. C’est là qu’elle a rencontré Yannick et Flash, des aînés qui ont renforcé son amour pour le mouvement hip-hop. Nash devient la seule fille du groupe ‘’The Best’’ qu’ils créent ensemble.

Non pas sans difficultés

Très tôt, Nash est confrontée à plusieurs difficultés. Elle doit « se battre pour s’en sortir ». Selon elle, quand les difficultés arrivent tôt dans la vie, elles permettent de se fortifier. « Ce qui nous arrive, nous permet de mieux concevoir la vie », affirme-t-elle. Sa philosophie est : «Gnaga (se battre) pour graya (pour manger) ». Après avoir vécu à l’intérieur du pays, la vie à Abidjan n’a pas été facile pour la famille Sonloué. Les parents de Natacha divorcent et le rôle de mère de famille lui revient, en tant que l’aînée des filles. A Abidjan, il faut lutter pour aller à l’école, manger et même dormir. Outre cela, sa génitrice tombe malade. Après quatre ans de maladie, elle décède le 4 janvier 2005. Une situation qui l’a bouleversée. « Nous avions des projets ensemble. Elle avait promis produire mon prochain album. Parfois, je regrette qu’elle ne soit pas là, aujourd’hui, pour voir et profiter du petit succès que j’ai », se lamente-t-elle.
A Yopougon aussi, la fille de Guitrozon découvre le nouchi. Un jargon né dans la capitale économique ivoirienne. Un moyen de communication qui est un mélange de français et de plusieurs langues locales, pratiqué par des jeunes déscolarisés ou n’ayant jamais été à l’école. Fille du ghetto, c’est en compagnie des garçons (avec qui elle se trouve tout le temps) que Nash apprend ses premiers ‘’mots de la rue’’.

Un nouveau style avec le nouchi

« Au départ, lorsqu’on écoutait mes prémaquettes, certains se demandaient si j’étais une rappeuse française », confie Nash. Loin d’une congratulation, cette remarque gênait la chanteuse. Elle continue : «Cela me gênait énormément. C’est ainsi que l’idée m’est venu de rechercher un style propre à mon pays». Sur ce point, Natacha ne pouvait pas mieux tomber. Elle fait la rencontre de Boni, chanteur du 1er groupe de rap ivoirien, Ras. «Lors d’un sound system organisé par Boni Ras et le rappeur français JoeStar, j’ai posé ma voix sur un beat dans un nouchi approximatif. Et, ils ont apprécié », se remémore-t-elle. Le chanteur de Ras prend l’engagement de la former. C’est ainsi qu’elle composera sa chanson ‘’1ère Djandjou’’ qu’il l’a fait connaître. Aujourd’hui, Nash est devenue l’ambassadrice du nouchi. Elle anime une sorte de dictionnaire nouchi dans un magazine de la place. «J’ai vraiment aimé le nouchi. J’ai accepté d’apprendre tout en y croyant. J’ai aussi un côté intellectuel qui m’a permis de développer certains aspects de la langue. J’ai surtout su écouter. Je suis en train de réaliser un lexique nouchi », se conforte-telle. La rappeuse continue d’aller à l’école. Elle est en deuxième année d’anglais à l’université de Cocody si bien qu’elle reconnaît avoir mis du temps à ce stade. « Je continue d’aller l’école. J’ai une autre conception de l’apprentissage. Je pense qu’il est possible d’apprendre tout en faisant autre chose», s’encourage-t-elle.

De bons rapports avec ses amis

Il est dit que la rappeuse est très polie. « Elle respecte tout le monde. Et s’empresse toujours de saluer », reconnaît un de ses proches. Elle entretient de bons rapports avec ses amis. A l’origine du collectif ‘’Gbonhi Yo Yo Yo’’, elle a regroupé plusieurs personnes qu’elle côtoie sur un album. Le groupe est composé de Zongo, Prisca, Raja Ananconda, Kader, Patché. Son aspect de garçon manqué s’explique par le fait qu’elle n’a que des grands frères. Enfant, ceux-ci lui demandaient de garder les buts lorsqu’ils jouaient au foot. Ou encore, la faisaient jouer aux billes. Côté sentimental, Nash est libre. Mais, pas tout à fait. « Mon premier mari, c’est mon album », scande-t-elle à qui veut l’entendre. Son homme, elle le veut «vrai môgô » (vrai homme). Attentionné, soucieux de ses problèmes, beau. Contrairement à ce que pensent certaines personnes, elle n’aime pas les femmes. Pour elle, une femme, ça se respecte. Avec un peu de fierté et de dignité. Qui se bat et n’attend pas que tout vienne de son homme. Car pense-t-elle, « au départ, l’homme donne tout. Ensuite, il te laisse tomber ». Son arme principale est l’humilité. « Les stars de la musique les plus cotées sont très humbles. Que ce soit Tiken Jah, Diam’s, Soprano, Mokobé, ce sont des personnes rabaissées », soutient-elle. Sur le calepin de la native de Yop, il y a plusieurs projets. Le plus proche est le concert dénommé ‘’le clash’’. Il mettra en opposition les chanteurs de coupé-décalé et les rappeurs ivoiriens le 25 juillet prochain. Au plan musical, elle souhaite réaliser un featuring avec son idole Diam’s et même organiser un festival de la musique hip-hop en Côte d’Ivoire. Sa structure de production, ‘’Nouchi art’’ veille à cela. La jeune régué (inversion de guéré : son ethnie) aime le kpléba. En bonne Abidjanaise, elle n’est jamais loin du vendeur de garba. Son passage à Korhogo, lui donne souvent envie de manger du Kabato (pâte de maïs). Doucement, la chanteuse trace son sillon. Entre étude, musique et projets. Avec une force, son caractère. Pour donner une identité à cette génération qui, plus ou moins, cherche toujours ses repères.

Sanou Amadou (Stagiaire)
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