Les nouvelles qui proviennent des centres de correction du bac ne sont pas rassurantes pour les candidats de la série D. Selon plusieurs présidents de jurys joints hier à travers le pays, les résultats partiels dans cette série donnent un taux moyen d’admission en deçà des 20%, soit moins de 2 admis sur 10. « Si les choses continuent dans ce sens, ce sera la catastrophe », craint un président jury à Yopougon. Une inquiétude qui fait déjà penser à la prophétie ? de certains enseignants qui ont juré, l’année dernière, que les résultats du bac 2010 seraient pires que ceux de 2009 pourtant jugés catastrophiques. Le faible taux national de réussite, 20,27%, était lié à la mauvaise performance des candidats de la série D, les plus nombreux. Ils ont tiré la moyenne générale vers le bas avec leur petite moisson de 13,68%. Sur 84.756 candidats évalués, seuls 11.597 ont été déclarés admis. La série A a fait mieux avec 604 admis sur 2058 candidats, soit 29,35%. Cette année, on n’est pas loin du même taux pour la même série. En 2009, les élèves de C ont été les meilleurs de l’enseignement général avec un taux de 66,26%, soit 5.815 admis sur 6.388 candidats. Il n’est pas sûr qu’ils réalisent la même performance cette année. A Odienné par exemple, où ont été corrigées les copies de Bouaké, il y a eu 17% de succès en C. Selon Badou Alain, prof de sciences physiques, le premier problème des apprenants de la série D est le fait qu’ils arrivent à l’examen avec beaucoup de lacunes, et même dans leurs matières spécifiques. Pour lui, ces faiblesses proviennent des effectifs pléthoriques des classes de D. « La majorité des élèves de 2nd C s’orientent vers la 1ère D, puis la Terminale D. Dans mes classes de 1ère et de terminale D, j’ai au moins 80 élèves. Par trimestre, je fais à peine deux devoirs. Et quand des élèves ont des difficultés pour comprendre une leçon, je ne peux pas m’arrêter pour eux. J’avance avec la majorité qui a retenu l’essentiel, au risque de ne pas terminer le programme. Alors qu’en 1ère C ou en terminale C, il suffit qu’un seul élève ait des difficultés pour que je le suive particulièrement parce que la classe compte à peine 30 élèves », confesse l’enseignant. Il n’est pas contre le choix de la série D, mais il estime que l’on devait prendre des dispositions pour que les effectifs de cette série ne débordent pas. Cela implique plus d’infrastructures scolaires et plus d’enseignants pour un ratio plus efficace. Faute d’infrastructures suffisantes, des élèves qui devaient être recalés vont en classe supérieure. «Cet engrenage commence dès le premier cycle», poursuit Sylla Fatoumata, prof de français. Elle rebondit sur la question du surnombre qui oblige beaucoup d’enseignants à «fermer les yeux » pour faire passer, par exemple en classe de 5e puis en 4e ,un enfant de 6e venu du Cm2 sans avoir maîtrisé les règles élémentaires de la grammaire française. Conséquence, qu’ils soient en D, en A ou en C, de nombreux candidats arrivent en terminale avec un très faible niveau en lettres. Au point de ne pas être en mesure de comprendre parfois les énoncés des sujets scientifiques ou littéraires. Ils ont encore plus de peine à formuler les phrases appropriées pour les réponses.
Cissé Sindou
Cissé Sindou