Dès sa prise de fonction, le ministre de la Fonction publique, Emile Guiriéoulou, avait promis chasser les petits intermédiaires des abords de son ministère pour lutter contre la fraude qui y sévit. Plusieurs mois après, ces intermédiaires, encore appelés margouillats, sont toujours là. La fraude aussi..
Le désordre se signale déjà à l’entrée : véhicules agglutinés sur la chaussée, gérants de cabines et vendeurs de documents pour les concours d’entrée au Centre d’animation et de formation pédagogique (Cafop), à l’Institut national de formation des agents de la Santé (l’Infas), à l’Ecole nationale d’administration (Ena), etc. Puis, avant même d’entrer dans l’enceinte du ministère de la Fonction publique, on aperçoit, à travers des grilles vertes, du monde à l’intérieur. Ce sont en majorité des candidats aux concours de la fonction publique qui viennent s’inscrire, prendre des convocations, des fiches ou des renseignements ; retirer leurs pochettes, etc. D’autres sont là pour honorer de simples rendez-vous après la visite médicale qu’ils vont effectuer aux 220 logements, à Adjamé. Dans cette mêlée où chacun vaque à sa préoccupation, il y a quelques personnes qui hèlent discrètement les intéressés. « Oui, (monsieur ou madame), c’est pour quoi ? ». Ceux-là, ce sont des intermédiaires qui disent faciliter l’acquisition des dossiers grâce à leur connaissance au sein du ministère. Mais il faut payer. De la visite médicale jusqu’au retrait de la convocation, tout se fait en business avec eux. Les plus pressés qui ne veulent pas suivre le rang dans le petit hall d’entrée, ou patienter longtemps pour un rendez-vous, ont recours à leur service. Ce n’est pas cher. Le tarif se négocie de 1.000 Fcfa à 3.000 Fcfa. L’un d’entre eux demande 2.000 Fcfa pour retirer rapidement la pochette du concours de l’Ena. Ils sont environ une dizaine. Beaucoup semblent connaître le personnel du ministère de la Fonction publique. On peut facilement se casser la figure en ayant confiance en eux. Certains margouillats sont doués dans la fabrication de tampons et l’imitation de signatures des agents, pour faire de faux documents médicaux, par exemple. Très souvent, le postulant aux concours ne s’en aperçoit que trop tard. Il y a quelques mois, Emile Guiriéoulou a décidé de faire le nettoyage aux abords de son département pour lutter contre cette gangrène. On se demande bien sur le terrain ce qui a bloqué. Selon Michel Dureau, le chargé de communication du ministère, ce spectacle vient après une première action d’envergure menée par le ministre contre les margouillats.
Il y a eu, d’abord, l’informatisation du système. Les personnes qui désirent passer un concours de la fonction publique, doivent désormais se déplacer pour faire la visite. Même les femmes enceintes. Cela n’a pas changé grand-chose. Quelquefois, lorsqu’il y a des coupures d’électricité, les agents ne travaillent pas pendant quatre jours. Et lorsque le travail reprend, l’affluence des candidats favorise la fraude massive, car chacun veut vite avoir ses papiers ou pouvoir honorer ses rendez-vous.
Ils ne sont que la face visible de l’iceberg
Puis, grâce à un partenariat avec le 1er arrondissement du Plateau, des policiers ont été désignés pour nettoyer la Fonction publique des margouillats. Ils étaient payés à 3.000 Fcfa, la journée, selon M. Dureau. Au début, tout allait bien, les intermédiaires ont été chassés comme des malpropres. Ensuite, on ignore ce qui s’est passé, mais après quelques semaines, les policiers ont pris eux-mêmes la place des margouillats : ils prenaient de l’argent avec les intéressés pour leur fournir des dossiers rapidement. « Un policier pouvait se retrouver avec la somme de 20.000 Fcfa », explique le chargé de communication. Vu que la police ne faisait pas l’affaire, le ministre les a remerciés. Et les margouillats sont revenus. (C’est la situation qui prévaut actuellement) Emile Guiriéoulou tente en ce moment de charmer la mairie du Plateau afin d’avoir quelques uns de ses agents qui viendront balayer ces intermédiaires du système des concours à la Fonction publique. Pour l’instant, les négociations sont en cours avec Akossi Bendjo. Cependant, alors que le ministère fait des pieds et des mains pour assainir le système, une question se pose. Et si les margouillats ne sont que la face émergente de l’iceberg ? Il suffit de se demander pourquoi la police qui a réussi à chasser pendant un moment ces intermédiaires, s’est lancée elle aussi dans les magouilles. « Nous sommes conscient que des agents à l’intérieur du ministère favorisent la fraude », reconnaît Michel Dureau. Qui plus est, raconte qu’un moment, les vigiles commençaient également à prendre de l’argent avec des personnes pour leur faciliter l’acquisition de leurs documents administratifs. Tout ceci ne peut être possible que grâce à la complicité de quelques agents du ministère. On dirait bien une tentation à laquelle personne ne résiste… « Nous avons été obligés de changer plusieurs fois de compagnie de gardiennage pour lutter contre le fléau », indique-t-il. Selon Dureau, le ministère est en train de voir comment ériger la direction des concours en direction générale pour désengorger le ministère de la Fonction publique. Car l’engorgement est aussi une cause de la fraude.
Selon toute vraisemblance, la mairie du Plateau reste l’unique recours pour chasser les margouillats. Il faut se demander comment les hommes d’Akossi Bendjo parviendront à résister à la fraude alléchante qui déploie ses tentacules à la Fonction publique. Faute de quoi, le projet d’Emile Guiriéoulou risque de ressembler bien à celui du président de la République qui consistait à balayer les «djosseurs de namas» de la commune du Plateau. Mais on verra.
Raphaël Tanoh
Le désordre se signale déjà à l’entrée : véhicules agglutinés sur la chaussée, gérants de cabines et vendeurs de documents pour les concours d’entrée au Centre d’animation et de formation pédagogique (Cafop), à l’Institut national de formation des agents de la Santé (l’Infas), à l’Ecole nationale d’administration (Ena), etc. Puis, avant même d’entrer dans l’enceinte du ministère de la Fonction publique, on aperçoit, à travers des grilles vertes, du monde à l’intérieur. Ce sont en majorité des candidats aux concours de la fonction publique qui viennent s’inscrire, prendre des convocations, des fiches ou des renseignements ; retirer leurs pochettes, etc. D’autres sont là pour honorer de simples rendez-vous après la visite médicale qu’ils vont effectuer aux 220 logements, à Adjamé. Dans cette mêlée où chacun vaque à sa préoccupation, il y a quelques personnes qui hèlent discrètement les intéressés. « Oui, (monsieur ou madame), c’est pour quoi ? ». Ceux-là, ce sont des intermédiaires qui disent faciliter l’acquisition des dossiers grâce à leur connaissance au sein du ministère. Mais il faut payer. De la visite médicale jusqu’au retrait de la convocation, tout se fait en business avec eux. Les plus pressés qui ne veulent pas suivre le rang dans le petit hall d’entrée, ou patienter longtemps pour un rendez-vous, ont recours à leur service. Ce n’est pas cher. Le tarif se négocie de 1.000 Fcfa à 3.000 Fcfa. L’un d’entre eux demande 2.000 Fcfa pour retirer rapidement la pochette du concours de l’Ena. Ils sont environ une dizaine. Beaucoup semblent connaître le personnel du ministère de la Fonction publique. On peut facilement se casser la figure en ayant confiance en eux. Certains margouillats sont doués dans la fabrication de tampons et l’imitation de signatures des agents, pour faire de faux documents médicaux, par exemple. Très souvent, le postulant aux concours ne s’en aperçoit que trop tard. Il y a quelques mois, Emile Guiriéoulou a décidé de faire le nettoyage aux abords de son département pour lutter contre cette gangrène. On se demande bien sur le terrain ce qui a bloqué. Selon Michel Dureau, le chargé de communication du ministère, ce spectacle vient après une première action d’envergure menée par le ministre contre les margouillats.
Il y a eu, d’abord, l’informatisation du système. Les personnes qui désirent passer un concours de la fonction publique, doivent désormais se déplacer pour faire la visite. Même les femmes enceintes. Cela n’a pas changé grand-chose. Quelquefois, lorsqu’il y a des coupures d’électricité, les agents ne travaillent pas pendant quatre jours. Et lorsque le travail reprend, l’affluence des candidats favorise la fraude massive, car chacun veut vite avoir ses papiers ou pouvoir honorer ses rendez-vous.
Ils ne sont que la face visible de l’iceberg
Puis, grâce à un partenariat avec le 1er arrondissement du Plateau, des policiers ont été désignés pour nettoyer la Fonction publique des margouillats. Ils étaient payés à 3.000 Fcfa, la journée, selon M. Dureau. Au début, tout allait bien, les intermédiaires ont été chassés comme des malpropres. Ensuite, on ignore ce qui s’est passé, mais après quelques semaines, les policiers ont pris eux-mêmes la place des margouillats : ils prenaient de l’argent avec les intéressés pour leur fournir des dossiers rapidement. « Un policier pouvait se retrouver avec la somme de 20.000 Fcfa », explique le chargé de communication. Vu que la police ne faisait pas l’affaire, le ministre les a remerciés. Et les margouillats sont revenus. (C’est la situation qui prévaut actuellement) Emile Guiriéoulou tente en ce moment de charmer la mairie du Plateau afin d’avoir quelques uns de ses agents qui viendront balayer ces intermédiaires du système des concours à la Fonction publique. Pour l’instant, les négociations sont en cours avec Akossi Bendjo. Cependant, alors que le ministère fait des pieds et des mains pour assainir le système, une question se pose. Et si les margouillats ne sont que la face émergente de l’iceberg ? Il suffit de se demander pourquoi la police qui a réussi à chasser pendant un moment ces intermédiaires, s’est lancée elle aussi dans les magouilles. « Nous sommes conscient que des agents à l’intérieur du ministère favorisent la fraude », reconnaît Michel Dureau. Qui plus est, raconte qu’un moment, les vigiles commençaient également à prendre de l’argent avec des personnes pour leur faciliter l’acquisition de leurs documents administratifs. Tout ceci ne peut être possible que grâce à la complicité de quelques agents du ministère. On dirait bien une tentation à laquelle personne ne résiste… « Nous avons été obligés de changer plusieurs fois de compagnie de gardiennage pour lutter contre le fléau », indique-t-il. Selon Dureau, le ministère est en train de voir comment ériger la direction des concours en direction générale pour désengorger le ministère de la Fonction publique. Car l’engorgement est aussi une cause de la fraude.
Selon toute vraisemblance, la mairie du Plateau reste l’unique recours pour chasser les margouillats. Il faut se demander comment les hommes d’Akossi Bendjo parviendront à résister à la fraude alléchante qui déploie ses tentacules à la Fonction publique. Faute de quoi, le projet d’Emile Guiriéoulou risque de ressembler bien à celui du président de la République qui consistait à balayer les «djosseurs de namas» de la commune du Plateau. Mais on verra.
Raphaël Tanoh