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Économie Publié le jeudi 2 septembre 2010 | Nord-Sud

Pénurie de butane : Les revendeurs mettent pleins gaz

Il est de plus en plus difficile de se procurer le gaz dans les quartiers. Les ménagères usent de tous les moyens pour trouver le produit.

A Abidjan, c’est toujours la galère pour trouver du gaz butane. «La pénurie de bouteilles persiste. On ne sait plus à quel saint se vouer. Outre son approvisionnement, son prix demeure toujours une inquiétude pour les usagers», avoue une ménagère. Aujourd’hui, à cause des désagréments engendrés par la rareté, chacun y va de ses astuces pour se procurer le combustible. Et, ce n’est pas toujours facile. Non loin du dépôt de l’Institut des aveugles, à Yopougon, les femmes sont en file d’attente. La capricieuse pluie qui s’abat depuis l’aube n’émousse pas l’ardeur des dames qui se bousculent. «Si tu ne fais pas ça, il n’est pas sûr que tu puisses en avoir», explique Maimouna qui a passé plusieurs heures devant l’entrepôt. Comme elle, plusieurs autres font le pied de grue dans l’attente d’une éventuelle livraison. Assises sur des bonbonnes vides, elles meublent le temps par des bavardages oiseux. «Même, le gaz est devenu une denrée politique. Ils veulent que les pauvres retournent au village», se plaint Clarisse qui monte carrément la garde. Soudain, on annonce le débarquement d’un butanier. C’est la ruée. Les premiers clients se partagent la cargaison.

On s’arrange avec les livreurs !

Sous le prétexte de faire des provisions, certains clients prennent deux ou trois bouteilles. «J’ai parcouru des kilomètres avant d’arriver ici où j’ai eu la chance d’en trouver. J’ai pris deux bouteilles pour plus de prudence», laisse entendre Rosine, une femme au foyer. Elle sort du magasin comme une héroïne. A l’autre bout de l’entrepôt, un groupe de femmes attend calmement. Elles donnent l’impression de ne pas se soucier des difficultés d’approvisionnement. En réalité, elles ont négocié avec un des livreurs qui a réussi à retenir un certain nombre de bouteilles. Près d’une dizaine. «C’est 4.000 Fcfa ou rien», prévient-il. Les femmes ne semblent pas être d’accord avec ce prix. De vives discussions s’engagent mais les parties finissent par s’entendre sur le montant de 3.500 Fcfa la bonbonne de 6 kilos. Sur place, il est happé par plusieurs autres clientes qui tentent de le soudoyer. Mais il n’y a plus de combustible. Toutefois, rendez-vous est pris pour le lendemain. «Les pénuries ne sont pas faites pour nous déplaire. C’est la traite pour nous parce que les femmes sont prêtes à tout pour avoir le gaz», reconnaît le livreur. Celles que le long rang a découragées, continuent de faire la ronde dans les rues à la recherche du combustible. Face au calvaire, d’autres ont vite trouvé des solutions de substitution. Ils se rendent dans des stations clandestines, en fait des citernes, qui vendent le gaz au détail. Ces «petites stations de pompage» sont approvisionnées par des camions à partir des relais gaz en vrac. Les femmes y vont avec la bonbonne qui est alimentée à partir de balance. «Aujourd’hui, je ne me fatigue plus. Je vais chez les trafiquants qui me livrent la quantité souhaité », note Anastasie, une vendeuse de poissons frits à Cocody. Dans ces stations clandestines, comme à Adjamé «Maison-Blanche» non loin de Saint-Michel, la bouteille de 6 kilogrammes est vendue à 3.500 Fcfa. En fait, dans ces dépôts informels, le prix du gaz enregistre une hausse de l’ordre de 50 voire 80%. «J’ai dû débourser jusqu’à 9.000 Fcfa pour avoir ma bouteille de gaz», souligne un client. De nombreux consommateurs expriment leur mécontentement par rapport à cette anarchie de prix, sujets à de fortes évolutions sur des périodes de temps courtes, manquant de transparence et jugés artificiellement élevés en raison de l’absence de vraie concurrence sur le marché. Mais dans certains foyers, en effet, on préfère retourner aux fagots de bois mort pour la cuisson d’autant que cette pratique en plus d’être dangereuse est interdite. «Je me suis finalement résolu à utiliser le feu de bois. Ce qui n’est toujours pas facile», affirme Sidonie, une ménagère. Sur les raisons de cette pénurie qui a entraîné la flambée des prix, l’existence d’un réseau de spéculateurs qui retiennent les produits dévoués au marché quand ils ne les stockent pas carrément pour provoquer la pénurie. «Il y a des bonbonnes de gaz dans les dépôts, mais le gros problème se trouve au niveau de la chaîne de distribution », explique Daouda Kanouté, un grossiste. Sur la non-conformité du poids du gaz dans les bouteilles, les revendeurs dégagent toute responsabilité. «Ce n'est pas ma faute mais celle de certains de nos intermédiaires qui veulent se faire de l'argent sur le dos des consommateurs », se dédouane-t-il.

Lanciné Bakayoko
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