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Économie Publié le mardi 7 septembre 2010 | L’expression

Enquête express - Vérification des instruments de mesure - Pourquoi les commerçants s’opposent

© L’expression Par Emma
Grève des transporteurs : Les prix flambent sur les marchés
Jeudi 15 avril 2010. Abidjan. Grand marché de Koumassi
Le ministre du Commerce a lancé une opération de vérification des instruments de mesure pour, dit-il, faire respecter les lois du commerce. Mais l’opération fait jaser les commerçants, qui crient à l’arnaque. Pourquoi cette levée de bouclier ? Qu’est-ce qui fâche les commerçants. L’Expression a enquêté.


«Nous allons retirer du marché les instruments de mesure défaillants ou défectueux qui ne répondent plus aux exigences réglementaires», a souligné le nouveau ministre du Commerce, Yapo Yapo Calice, dans la parution du Patriote n° 3262 du 2 septembre. C’était au cours du lancement de l’opération de vérification des instruments de mesure. Cette opération, malheureusement, ne rencontre pas l’assentiment de certains commerçants. Pourtant, l’opération qui a commencé à Abidjan devrait se poursuivre, selon Yapo Yapo Calice, à l’intérieur du pays. L’objectif de cette vaste campagne de contrôle est, à en croire le ministre du Commerce, de retirer du marché les instruments de mesure qui ne respectent plus les normes, mais surtout de démasquer les commerçants véreux qui trompent les consommateurs en leur vendant des produits en deçà du poids. Une pratique devenue malheureusement courante dans les transactions. Et le Directeur général du commerce intérieur au ministère du Commerce, Kamissoko Mamadou Ba, d’ajouter que l’opération vise également à protéger les opérateurs économiques qui respectent les règles et amener ceux qui ne le sont pas à se mettre en règle. Cependant, si l’opération rencontre quelques réticences au niveau des commerçants pour plusieurs raisons, les consommateurs semblent, eux, satisfaits de cette mesure prise par le nouveau locataire de l’immeuble Ccia du Plateau. C’est le cas de dame Ouattara à Abobo Dokui. Selon elle, les commerçants s’adonnent effectivement à un trucage des instruments de mesure. Du vendeur de l’huile à la viande en passant par le riz et bien d’autres denrées, aussi bien dans les boutiques que sur les étals des marchés, les mesures ne sont pas respectées. Les balances, explique-t-elle, affichent effectivement le kilogramme que vous demandez, mais en réalité le poids n’est pas exact parce que la machine a été réglée. « J’achetais de la viande pour toute la semaine, mais depuis que j’ai constaté la mauvaise foi des bouchers, j’ai changé de méthode. J’achète désormais ½ Kg de viande chaque jour », explique la ménagère qui pointe du doigt les bouchers, plus abonnés, dit-elle, à la pratique. Comme elle, Mme Kouyaté n’est pas en reste. Elle qui a plusieurs fois fait les frais du système.

Les consommateurs saluent une action…

A la faveur du mois de ramadan, cette fidèle musulmane a acheté un sac de mil de 100 Kg pour soutenir ses coreligionnaires. Mais elle doute fort que le sac ait atteint ce poids. Pour elle, les commerçants laissent sciemment beaucoup de grains de sable se mélanger au mil. C’est en effet chaque jour que les consommateurs se plaignent. Ils soutiennent presque tous d’être victimes de bascules et autres appareils de mesures utilisés par les commerçants. Et les échos sont parvenus au président de la Fédération des associations de consommateurs actifs de Côte d’Ivoire (Facaci), Marius Comoé. Pour lui, le dépoussiérage des textes qui instaurent la vérification des instruments de mesure est une bouffée d’oxygène pour les structures syndicales de consommateurs. D’autant plus que depuis le déclenchement de la guerre, le contrôle n’a pas été régulièrement suivi. Il déplore les mauvaises pratiques des commerçants. A l’en croire, « lorsqu’un client demande 1 Kg de riz, le commerçant lui sert en dessous d’un Kg. Et lorsque vous empruntez un taxi, le compteur avance à une cadence accélérée, juste parce que le chauffeur l’a truqué pour vous faire payer plus». Marius Comoé ajoute qu’il en est de même pour les stations d’essence où la pratique est également courante. Toutefois, il pense que l’opération de contrôle ne pourra atteindre ses objectifs que si les agents du ministère, notamment ceux commis au contrôle, jouent franc jeu sur le terrain. Le syndicaliste rappelle à l’instar de Kamissoko Mamadou Ba que leur rôle est de vérifier les instruments pour assurer les droits du consommateur et non de faire des ’’deals’’ avec les commerçants véreux au détriment du consommateur. Cet appel du président de la Facaci, s’il sonne comme une mise en garde contre les agents véreux, apporte par contre de l’eau au moulin des commerçants qui se plaignent. Pour eux, cette opération qui n’est pas à sa première édition est une arnaque du ministère qui veut renflouer ses caisses. De fait, les agents du ministère commis au contrôle sur le terrain seraient, selon plusieurs commerçants rencontrés, des ‘’racketteurs endurcis’’. Leur seul souci, disent-ils, en entrant dans une boutique est d’en ressortir avec de l’argent.

…Qui inquiète les commerçants

D’ailleurs quelques jours après la sortie du ministre du Commerce, plusieurs syndicats de commerçants dont la Fédération nationale des commerçants de Côte d’Ivoire (Fenacci) de Soumahoro Farikou, le Conseil des commerçants de Côte d’Ivoire (Cfc-Ci) se sont, au cours d’une conférence de presse, élevées contre les reformes lancées par Yapo Yapo Calice. Pour eux, le budget de cette opération qui s’élève à 100 millions de Fcfa cache beaucoup de non dits. Ils estiment qu’une telle action devrait associer les commerçants en amont et non leur être imposée. Ils se sont également prononcés sur d’autres initiatives, telles que les états généraux du commerce et l’institution d’une mutuelle d’assurance des commerçants. Ces actions, soulignent-ils, ont été déjà posées. Soumahoro Farikou, président de la Fenacci, explique que les commerçants ne sont pas opposés à l’opération, mais plutôt au racket qu’il y a autour «C’est une opération qui avait été déjà menée par ses prédécesseurs et nous savons comment elle s’est terminée. La preuve dans la ville de Divo à l’époque, il y a eu beaucoup de racket. Lorsque les contrôleurs venaient revérifier les appareils, les informations qu’ils écrivaient sur leurs carnets ne ressortaient pas sur la souche du carnet. Ils prenaient 5.000 Fcfa aux commerçants alors que le coût réel était de 500 Fcfa. En lançant la même opération, nous pensons que ce sont les mêmes problèmes qui s’annoncent», fait-il remarquer lors d’un entretien qu’il nous a accordé. Avant d’ajouter que le ministère doit associer les commerçants afin qu’ils se concertent sur la procédure. «Il faut donner l’information aux gens. Donc nous pensons que le ministre doit passer d’abord par la phase de sensibilisation », conseille le syndicaliste. Pendant ce temps, les commerçants ne cachent pas leurs inquiétudes.

Kuyo Anderson
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