Que de controverses et d’antagonismes après le 2ème tour du scrutin présidentiel. Deux présidents, deux premiers ministres, deux gouvernements… La Côte d’Ivoire ressemble fort malheureusement à ces cellulaires portables à deux puces appelés communément « chine-toc ». Face au blocage des institutions, aux confrontations fratricides entre des militants des deux camps et à la quête aux forceps d’une hypothétique légitimé et légalité, le débat autour de la question de gouvernement d’union refait surface. Comme ultime solution ou potion magique pour faire sortir le pays de l’impasse. La recherche de la poursuite d’une cogérance des affaires de l’Etat, synonyme, soutiennent les initiateurs, d’une cohésion sociale. Mais après huit années de moult tractations qui ont conduit à l’élection présidentielle de sortie de crise, comment peut-on encore parler de gouvernement d’union ? Et qui de Gbagbo et de Ouattara présidera ce gouvernement ? A quoi aura servi l’élection présidentielle à deux tours, la plus chère au monde, la plus reportée au monde, avec tous les efforts consentis des nationaux et de la communauté internationale pour revenir à la case départ ? Que s’est-il réellement passé pour qu’on arrive à cette situation de blocage et d’incertitude. Les principaux acteurs politiques n’ont-ils pas suffisamment tiré les leçons de la grave crise qui a durement secoué le pays et imposé une partition de fait entre le Nord et le Sud. Ils sont nombreux ces Ivoiriens qui se souviennent du coup d’Etat de Décembre 99 et de l’attaque du 19 septembre 2002. Depuis ces dates fatidiques jusqu’à ce jour, le pays d’Houphouët Boigny est resté sous les feux de la rampe. Que de pays parcourus à la recherche du consensus national, de la paix. D’accords en accords, le paysage politique s’est débarrassé du manteau lugubre fait de haine et d’animosité pour se revêtir d’un nouveau manteau accepté de tous. De Marcoussis au Burkina en passant par Lomé, Accra et Prétoria, les Ivoiriens se sont parlé, on finit par s’entendre et se mettre d’accord sur l’essentiel. Les institutions internationales, les forces impartiales et les chefs d’Etats des pays amis ont accompagné le processus de sortie de crise. Dès cet instant, les règles de jeu ont été décidées de façon consensuelle. En dépit de ces précautions et de ces accords, surtout de la promesse des deux candidats (faites à la nation lors du face-à-face télévisé) à respecter le verdict des urnes, les résultats de l’élection présidentielle diversement publiés sont l’objet de vives contestations. Le résultat de la Commission Electorale Indépendante (CEI) qui a déclaré vainqueur le candidat du RHDP est contesté par La Majorité Présidentielle (LMP) dont le candidat Laurent Gbagbo a été proclamé élu par le Conseil Constitutionnel après son recours en annulation des résultats de neuf départements du Nord. Ce qui pose le problème d’éthique de ceux qui incarnent les institutions de la République. Sinon comment comprendre la controverse. Or, l’honnêteté intellectuelle et la probité morale recommandent, surtout pour une élection de sortie de crise, que les candidats se plient au verdict des urnes. Faut-il alors donner raison à ceux qui soutiennent que sous nos tropiques, il est rare de voir les perdants qui ont été battus à la loyale et la régulière reconnaitre leur défaite et féliciter les gagnants ? Faut-il laisser prospérer les copinages et la «triche» au sommet pour capoter une élection sur laquelle tout un pays fondait tant d’espoirs ? Comment faire pour sortir de ces schémas de gouvernement « wouya-wouya » qui met en péril la démocratie ? Faut-il rester bras croisés et maintenir le peuple souverain qui s’est exprimé le 28 novembre dernier ? Non et encore non. Il y a eu une élection, par conséquent, il doit y avoir un vainqueur. Telles sont les règles de toutes compétitions. Du côté du Golf Hôtel, il n’est pas question de négocier, selon le porte parole Patrick Achi qui, au sortir d’un conseil des ministres, confiait aux journalistes avec une sérénité déconcertante : «La récréation est terminée » Au palais du plateau, la tension semble baisser d’un cran. « Il n’y aura pas de guerre, il n’aura pas de division de la Côte d’Ivoire », s’est exprimé le Président Laurent Gbagbo, recevant les tchaman. A quelques jours seulement de la fin du scrutin présidentiel, la Côte d’Ivoire est devenue ou presque ce monstre à deux têtes. Qui va gouverner et qui répondra de ces actes devant le peuple? Difficile de répondre. Si ce n’est pour dire que le passage de l’autocratie à la démocratie butte sur la résistance et les délices du pouvoir. Quel gâchis ! Que de temps perdu pour rien.
K.C
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