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Politique Publié le lundi 27 décembre 2010 | Le Patriote

Confiscation du pouvoir/ Cissé Ibrahima Bacongo - « Que la CEDEAO fasse payer comptant à Laurent Gbagbo son arrogance »

© Le Patriote Par Christian
Enseignement supérieur : La Chaire Unesco de Bioéthique de l’Université de Bouaké-la-Neuve installée en présence de plusieurs membres du gouvernement
Lundi 26 juillet 2010. Abidjan. Université de Bouaké à Abidjan. Le président Lazare Poamé reçoit le soutien de nombreuses personnalités dont les ministres Cissé Bacongo (photo), Dosso Moussa et Gilbert Bleu Lainé, et Dr Malick Coulibaly, représentant le chef de l`état
On avait espéré, ardemment, il est vrai sans y croire réellement pour beaucoup, que les élections présidentielles des 31 octobre et 28 novembre 2010 allaient permettre à notre pays, la Côte d’Ivoire, de s’engager, enfin, dans la voie de la paix et du développement, après une crise sociale et politique aiguë, qui aura duré plus d’une décennie et dont chaque habitant a pu mesurer les conséquences sur ses propres conditions de vie et de travail et devrait en avoir tiré tous les enseignements.
Hélas, encore hélas ! Suite à la décision de Laurent Gbagbo de ne pas se plier au verdit des urnes et de se maintenir au pouvoir, envers et contre tous, notre pays connaît, à nouveau, des moments douloureux et s’achemine vers une tragédie, dont on ne peut prédire, à présent, toutes les conséquences. Face à cette situation, où la désillusion, la détresse, la peur et, dans une certaine mesure, la résignation ne sont qu’à la mesure de l’espoir, qui avait été suscité, l’option militaire préconisée contre Laurent Gbagbo par le Premier Ministre Soro Kigbafori Guillaume est une option politique, comme nous l’enseigne l’histoire contemporaine, notamment en Europe Occidentale. Laurent Gbagbo, un dangereux dictateur sans doute, comparaison n’est pas raison. Mais, il peut-être permis de faire un simple rapprochement entre Laurent Gbagbo et Slobodan Milosevic, pour constater, qu’entre les deux personnages, il existe de telles similitudes, qu’on peut préconiser contre le premier les mesures que l’OTAN s’est résolu à prendre vis-à-vis du second lors de la guerre du Kosovo. Première similitude. A propos de Slobodan Milosevic, Bernard-Henri Lévy, philosophe français engagé a écrit : «Il faut écouter les dictateurs. Ils annoncent toujours ce qu’ils vont faire. Ainsi, Milosevic, cet autre Saddam Hussein, qui a toujours annoncé qu’il était prêt, pour récupérer le «berceau de la Serbie», à déstabiliser l’Europe (…)». A lire ces lignes, on croirait qu’elles visent Laurent Gbagbo. Directement ou par personnes interposées, l’ancien Chef de l’Etat ivoirien a toujours annoncé ce qu’il allait faire, peu importe qu’il réussisse toujours à faire ou non ce qu’il annonce. Qui ne souvient du slogan peu original «on gagne ou on gagne» lancé par le camp de Laurent Gbagbo, sur son inspiration. Ce dernier dévoilait ainsi, clairement, son intention de confisquer le pouvoir, qu’il y ait des élections ou non. Sans doute, pour y mettre la manière et préparer, psychologiquement, les Ivoiriens au choc de ce coup de force annoncé, il s’était résolu, sur l’insistance suspecte de conseillers en communication très intéressés, à faire réaliser, par une entreprise clandestine aux ordres, Marketing Field Force, sous le couvert de la société TNS-Sofres grassement rémunérée sur le dos du contribuable ivoirien, des sondages complaisants, dont les conclusions étaient fabriquées in vitro. De même, l’appel lancé par Laurent Gbagbo, à Divo, lors de l’installation de la Compagnie Républicaine de Sécurité 3 (CRS 3), demandant aux Forces de Défense et de Sécurité de mâter tous les «fauteurs de troubles», est encore dans toutes les mémoires. Cet appel n’était que l’annonce de la répression brutale et sauvage de toutes manifestations de protestation organisées par ses adversaires, comme c’est le cas actuellement contre sa tentative éhontée de confiscation du pouvoir en cours. Il n’est pas jusqu’à la résistance qu’il opposerait à céder le pouvoir, en cas de défaite, que Laurent Gbagbo ne s’est pas privé d’annoncer, ouvertement, en déclarant, avant que ses partisans ne reprennent le refrain : «Alassane Ouattara devra passer sur mon corps pour prendre le pouvoir». On y est. La décision rendue au forceps par le Conseil Constitutionnel n’a été qu’une modalité de mise en œuvre de la résistance annoncée.
Un interlocuteur peu ordinaire, un terroriste Deuxième similitude. Encore Bernard-Henri Lévy, qui écrit : « (…) Milosevic n’est pas un interlocuteur ordinaire. C’est un terroriste (…), un Chef d’Etat qui, depuis dix ans, se comporte comme un maître chanteur (…), qui se comporte comme s’il prenait en otage son propre peuple et s’en servait comme d’un bouclier à l’abri duquel peuvent se tramer les tragédies de pouvoir les plus perverses (…)». A travers ces lignes, on croirait avoir affaire à Laurent Gbagbo. Comme Milosevic, Laurent Gbagbo est un interlocuteur pas crédible et peu ordinaire. Pour preuve, le nombre incalculable d’engagements pris, dans le cadre du processus de sortie de crise, qu’il n’a pas tenus ou qu’il a remis en cause. La volte-face à donner le tournis opérée au sortir de la rencontre de Haut Niveau de l’Avenue Kléber faisant suite à la signature de l’Accord de Linas-Marcoussis, en janvier 2003, en est une illustration des plus spectaculaires. Les entraves mises volontairement, sous les prétextes les plus divers, dans l’application des différents accords conclus depuis cette date, n’en sont pas des moindres. Citons, pêle-mêle :
la remise en cause de l’engagement consistant à déléguer au Premier Ministre une partie des pouvoirs de l’Exécutif nécessaires à la mise en œuvre de l’Accord de Linas-Marcoussis et des accords subséquents ;
le veto posé abusivement à la nomination de différentes personnalités dans le Gouvernement, notamment pour occuper les portefeuilles de la Défense et de la Sécurité, en violation de l’Accord d’Accra II ;ü la paralysie des audiences foraines par des obstacles artificiels ;
les arrêts récurrents suivis des interminables prolongations de l’opération d’enrôlement ;
les demandes fantaisistes de radiation visant à «désinfecter» la liste électorale provisoire ;
la suspension, pendant plusieurs semaines, de l’ensemble du processus de sortie de crise, suite à la double dissolution arbitraire de la Commission Electorale Indépendante (CEI) et du Gouvernement, etc.
Comme Milosevic encore, Laurent Gbagbo est un terroriste preneur d’otages. L’interdiction durant une décennie entière et la répression des manifestations de l’opposition l’attestent, autant que l’exploitation des sentiments nationalistes des Ivoiriens et l’instrumentalisation de la jeunesse ivoirienne au moyen de la propagande. A cet égard, la marche pacifique que sept des dix signataires de l’Accord de Linas-Marcoussis regroupés au sein du G7 avaient décidé d’organiser, le 25 mars 2004, restera, pendant longtemps, dans la conscience collective des Ivoiriens, comme un trou noir. Plus d’un demi millier d’innocents aux mains nues, qui n’ont même pas eu le temps de se rassembler pour démarrer la marche programmée, ont été, pour certains, froidement abattus à domicile, pour d’autres, chassés comme des fauves, criblés de balles et abandonnés dans les rues. Quant aux blessés et aux personnes disparues, on n’en connaîtra jamais le nombre réel. Objectif de cette répression, marquer au fer chaud et terroriser les partisans et sympathisants de l’opposition, afin de tuer en eux toute volonté de récidive. De même, de janvier 2003 jusqu’à la tenue de l’élection présidentielle, en octobre-novembre 2010, voire au-delà, on a assisté comme à une prise en otage des populations ivoiriennes par Laurent Gbagbo. Face à la dégradation de tout ce qui faisait la fierté de ce pays, – ses infrastructures administratives, économiques, sanitaires, scolaires et universitaires notamment –, Laurent Gbagbo s’est toujours réfugié derrière le prétexte facile de la guerre livrée à la Côte d’Ivoire par «l’étranger » et, tout particulièrement, par Jacques Chirac hier et Nicolas Sarkozy aujourd’hui. Aux cris d’angoisse, de complainte et de désespoir des populations ravagées par le chômage, l’insécurité, les grandes pandémies et les pathologies provoquées par le scandale des déchets toxiques, la pauvreté, la prostitution à ciel ouvert servant de jauge à la perte des valeurs morales, il est toujours resté insensible, en prétextant encore et encore de la guerre. Instrumentalisés ainsi au moyen d’une propagande à faire rougir Joseph Paul GOEBBELS, orfèvre en la matière, des dizaines voire des centaines d’innocents ont été sacrifiés, des milliers d’autres marqués à jamais et traumatisés. En renonçant à tout, y compris leur vie, – éducation, emploi, logement, loisirs, santé, sécurité, etc. –, tous ces innocents croyaient servir une cause exaltante et noble : la défense de la mère patrie. Or, Laurent Gbagbo n’a jamais fait que se servir d’eux, tantôt comme preuve vivante de sa légitimité pour couvrir ses errements et conserver (son) pouvoir, tantôt comme bouclier humain pour se préserver contre les conséquences des tragédies dues à sa gestion de l’Etat. En ce sens, la tempête provoquée, en novembre 2004, par sa tentative foireuse de sortir de la crise par la guerre est un exemple de triste mémoire. Il est de même du scandale de déchets toxiques. Ecoutons à nouveau Bernard-Henri Levy, à propos de Slobodan Milosevic : «Que se passe-t-il dans la tête d’un homme qui sait que (…) sa capitale sera bombardée et qui, pourtant, s’obstine ? Bravade, sans doute. Mais aussi calcul. Milosevic a calculé que les Occidentaux étant ce qu’ils sont, c’est-à-dire, dans son esprit, des lâches (…)», ils n’oseront pas. Faire payer cash son arrogance à un cynique calculateur et maître chanteur Comme Milosevic encore et encore, Laurent Gbagbo est un cynique calculateur et un maître chanteur. Malgré la pression qui continue d’être exercée sur lui, aussi bien au plan national que par l’ensemble de la Communauté Internationale, il persiste et signe dans son refus de céder le pouvoir au vainqueur de l’élection présidentielle, Alassane Ouattara, sans doute par bravade, mais aussi et surtout par calcul. Par bravade, Laurent Gbagbo a dit et redit qu’il était prêt à mourir pour conserver le pouvoir. Ce faisant, il n’a jamais fait mystère de son intention de s’appuyer sur les Forces de Défense et de Sécurité dont il a mis en garde les chefs de «tomber eux aussi» s’il lui arrivait de tomber. Quels effets peuvent avoir de simples déclarations d’intention ou menaces de sanctions sur un tel psychopathe ? Peu de chose. Par calcul aussi et surtout, Laurent Gbagbo continue de résister, jusqu’aux menaces de sanctions et d’utilisation de la force, parce qu’il a appris et retenu que les «pays n’ont pas d’ami, mais des intérêts». Surtout, il reste convaincu que la Communauté Internationale a de tout temps été velléitaire et qu’elle n’est jamais allée au-delà des menaces dans les crises internes aux Etats. Aussi, ne s’est-il pas encore privé de la moindre occasion pour déclarer, haut et fort, d’être le seul vainqueur de l’élection présidentielle «conformément à la Constitution» et de ne céder à aucune pression, ni devant aucun sacrifice, y compris celui d’éviter à la Côte d’Ivoire de sombrer dans le chaos d’une guerre civile. Une telle disposition d’esprit vient d’être confirmée, autrement et de manière encore plus pathétique, par le porte-parole de son Gouvernement fantoche, Ahoua Don Mello. Cet admirateur écervelé de Lev Davidovitch Bronstein TROTSKI, chargé probablement comme celui-ci de conduire la guerre civile plus énoncée qu’annoncée, en l’occurrence, pour dissuader de toute utilisation de la force, vient de dénoncer sur les ondes des médias internationaux ce qu’il a appelé un «complot international (…), très injuste et inacceptable, dirigé par la France contre la Côte d’Ivoire» (sic). Laurent Gbagbo fait ainsi un calcul sur l’incapacité de la Communauté Internationale à aller au-delà des déclarations votives et des menaces, calcul qui est aussi un pari basé sur le facteur temps et comportant des risques réels et sérieux pour lui. Ainsi que Milosevic a payé cash son entêtement, par l’intervention militaire de l’OTAN au Kosovo, il faut souhaiter que la CEDEAO fasse payer comptant à Laurent Gbagbo son arrogance, par l’utilisation de l’option militaire qui est aussi, dans les circonstances actuelles, une option politique. Justement, pour éviter une guerre civile. Mais aussi, pour la paix, la sécurité et la stabilité de la Côte d’Ivoire et de la sous-région ouest-africaine.
CISSE Ibrahim Bacongo
Juriste-Conseil d’Entreprise
Enseignant, Docteur en Droit


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