Dakar, place de l’indépendance. Malgré un soleil de plomb, qui surchauffe la capitale sénégalaise, cet espace, bien connu des Dakarois et situé en plein cœur du Plateau, le quartier des affaires de la ville, grouille de monde. Les commerces fleurissent et proposent un florilège d’articles divers. Les magasins ne désemplissent pas non plus. Les véhicules écument les artères, avec à la clé un concert de klaxons. Manifestement, c’est le train-train quotidien et Dakar bouge tranquillement.
Pour autant, les habitants de cette cité ne sont pas si sereins que ça. Leurs oreilles sont en effet dressées vers sa « sœur jumelle », Abidjan, quoique située à des milliers de kilomètres. Le mélodrame ivoirien, avec dans le rôle principal, un président qui refuse de reconnaître sa défaite dans les urnes, les inquiète sérieusement. « Ah oui, nous sommes vraiment préoccupés par ce qui se passe en Côte d’Ivoire », concède Aliou Diatta, commerçant de costume. Avant d’enchaîner : « Ce que Gbagbo fait (entendez sa volonté de confisquer le pouvoir) est regrettable pour l’Afrique. Il faut qu’il parte dans l’honneur, pour éviter une guerre civile à la Côte d’Ivoire ».
A l’instar de ce jeune homme, la trentaine, au teint noir et à la silhouette filiforme, les Dakarois dans leur écrasante majorité peinent à comprendre le putsch électoral de Laurent Gbagbo. Pour eux, qui sont habitués à l’alternance politique, l’attitude du président sortant frise une « folie ». « C’est incroyable, ce qu’il fait. Faire une telle entorse à la démocratie est inacceptable. Il faut le pousser à partir », estime Aly Sow, enseignant.
Economiste, Ousseynou Diagne est, on ne peut plus, direct : « Il faut le dégager. L’Afrique doit adopter une position énergique face à la dictature. Le peuple s’est exprimé, il faut impérativement que sa volonté soit respectée. Laurent Gbagbo doit être contraint à céder le fauteuil présidentiel à Alassane Ouattara, le président que les Ivoiriens ont choisi ». Pour ce cadre de banque, si les dirigeants ouest-africains n’emploient pas la fermeté, « le cas Gbagbo risque de faire école». C’est pour quoi plaide t-il pour le recours à la force en cas de refus de Laurent Gbagbo de céder le pouvoir. « On ne peut pas faire des omelettes sans casser des œufs. Entre Laurent Gbagbo et le peuple de Côte d’Ivoire, il y a un seul choix à faire, celui des Ivoiriens. Seule leur aspiration compte et non les intérêts d’un dictateur », assène t-il, un brin dépité par l’attitude du candidat-président.
Autre partisan des moyens forts, Ousmane Faye, opérateur économique, rencontré au quartier Sacré-Cœur 3. « Je suis régulièrement la situation en Côte d’Ivoire. Laurent Gbagbo adore la provocation. Les sanctions n’auront pas d’effet sur lui. Ce qu’il faut c’est la force. Si la dernière médiation de la cedeao qui a lieu aujourd’hui (ndlr, hier) échoue, il faut que la Cedeao envoie des soldats pour le faire partir », préconise t-il.
Contrairement à lui, Pape Dieng, étudiant, pense qu’il faut encore donner sa chance à la diplomatie, parce que, reste t-il convaincu, « une opération militaire risque de faire de nouvelles victimes innocentes ». Et celui-ci d’ajouter : « Je crois qu’il faut intensifier la pression diplomatique. Il finira par céder ».
A la Place de Souvenir, autre endroit bien connu de Dakar, Mahmoud Cissé, expert en développement durable, pense, lui également, que Laurent Gbagbo ne pourra pas résister indéfiniment à la communauté internationale. Il en veut pour preuve, l’exemple de Slobodan, ex-dictateur serbe, qui a séjourné dans les geôles de La Haye, aux Pays-Bas. « On a beau être fort, mais on ne peut pas avoir la carapace solide pour résister au monde entier », souligne t-il, non sans exhorter Laurent Gbagbo, pendant qu’il est encore temps, de partir « la tête haute du pouvoir » avec la dernière médiation de la Cedeao.
A Dakar, on redoute vivement un regain de violence en Côte d’Ivoire, surtout une guerre civile, qui aurait des conséquences dramatiques pour la sous-région. Tous prient pour que le pire ne se produise pas et surtout appellent de leurs vœux à un départ en douceur de Laurent Gbagbo du pouvoir, battu, faut-il le rappeler, lors du second tour de la présidentielle le 28 novembre dernier, par son rival Alassane Ouattara, crédité de 54,1% des suffrages exprimés. « S’il aime vraiment son pays et les Ivoiriens, que Gbagbo reconnaisse sa défaite et accepte de partir dans la paix. C’est le plus cadeau qu’il peut offrir à son pays en cette période de fêtes. J’espère vraiment qu’il va entendre raison », professe, Omar Diakhaté, guide touristique.
Reste à savoir si l’historien, qui a reçu mardi à Abidjan les envoyés de la Cedeao, acceptera, pour une fois, de partir par la grande porte. Et ainsi rentrer dans l’histoire.
Y. Sangaré, Envoyé spécial à Dakar
Pour autant, les habitants de cette cité ne sont pas si sereins que ça. Leurs oreilles sont en effet dressées vers sa « sœur jumelle », Abidjan, quoique située à des milliers de kilomètres. Le mélodrame ivoirien, avec dans le rôle principal, un président qui refuse de reconnaître sa défaite dans les urnes, les inquiète sérieusement. « Ah oui, nous sommes vraiment préoccupés par ce qui se passe en Côte d’Ivoire », concède Aliou Diatta, commerçant de costume. Avant d’enchaîner : « Ce que Gbagbo fait (entendez sa volonté de confisquer le pouvoir) est regrettable pour l’Afrique. Il faut qu’il parte dans l’honneur, pour éviter une guerre civile à la Côte d’Ivoire ».
A l’instar de ce jeune homme, la trentaine, au teint noir et à la silhouette filiforme, les Dakarois dans leur écrasante majorité peinent à comprendre le putsch électoral de Laurent Gbagbo. Pour eux, qui sont habitués à l’alternance politique, l’attitude du président sortant frise une « folie ». « C’est incroyable, ce qu’il fait. Faire une telle entorse à la démocratie est inacceptable. Il faut le pousser à partir », estime Aly Sow, enseignant.
Economiste, Ousseynou Diagne est, on ne peut plus, direct : « Il faut le dégager. L’Afrique doit adopter une position énergique face à la dictature. Le peuple s’est exprimé, il faut impérativement que sa volonté soit respectée. Laurent Gbagbo doit être contraint à céder le fauteuil présidentiel à Alassane Ouattara, le président que les Ivoiriens ont choisi ». Pour ce cadre de banque, si les dirigeants ouest-africains n’emploient pas la fermeté, « le cas Gbagbo risque de faire école». C’est pour quoi plaide t-il pour le recours à la force en cas de refus de Laurent Gbagbo de céder le pouvoir. « On ne peut pas faire des omelettes sans casser des œufs. Entre Laurent Gbagbo et le peuple de Côte d’Ivoire, il y a un seul choix à faire, celui des Ivoiriens. Seule leur aspiration compte et non les intérêts d’un dictateur », assène t-il, un brin dépité par l’attitude du candidat-président.
Autre partisan des moyens forts, Ousmane Faye, opérateur économique, rencontré au quartier Sacré-Cœur 3. « Je suis régulièrement la situation en Côte d’Ivoire. Laurent Gbagbo adore la provocation. Les sanctions n’auront pas d’effet sur lui. Ce qu’il faut c’est la force. Si la dernière médiation de la cedeao qui a lieu aujourd’hui (ndlr, hier) échoue, il faut que la Cedeao envoie des soldats pour le faire partir », préconise t-il.
Contrairement à lui, Pape Dieng, étudiant, pense qu’il faut encore donner sa chance à la diplomatie, parce que, reste t-il convaincu, « une opération militaire risque de faire de nouvelles victimes innocentes ». Et celui-ci d’ajouter : « Je crois qu’il faut intensifier la pression diplomatique. Il finira par céder ».
A la Place de Souvenir, autre endroit bien connu de Dakar, Mahmoud Cissé, expert en développement durable, pense, lui également, que Laurent Gbagbo ne pourra pas résister indéfiniment à la communauté internationale. Il en veut pour preuve, l’exemple de Slobodan, ex-dictateur serbe, qui a séjourné dans les geôles de La Haye, aux Pays-Bas. « On a beau être fort, mais on ne peut pas avoir la carapace solide pour résister au monde entier », souligne t-il, non sans exhorter Laurent Gbagbo, pendant qu’il est encore temps, de partir « la tête haute du pouvoir » avec la dernière médiation de la Cedeao.
A Dakar, on redoute vivement un regain de violence en Côte d’Ivoire, surtout une guerre civile, qui aurait des conséquences dramatiques pour la sous-région. Tous prient pour que le pire ne se produise pas et surtout appellent de leurs vœux à un départ en douceur de Laurent Gbagbo du pouvoir, battu, faut-il le rappeler, lors du second tour de la présidentielle le 28 novembre dernier, par son rival Alassane Ouattara, crédité de 54,1% des suffrages exprimés. « S’il aime vraiment son pays et les Ivoiriens, que Gbagbo reconnaisse sa défaite et accepte de partir dans la paix. C’est le plus cadeau qu’il peut offrir à son pays en cette période de fêtes. J’espère vraiment qu’il va entendre raison », professe, Omar Diakhaté, guide touristique.
Reste à savoir si l’historien, qui a reçu mardi à Abidjan les envoyés de la Cedeao, acceptera, pour une fois, de partir par la grande porte. Et ainsi rentrer dans l’histoire.
Y. Sangaré, Envoyé spécial à Dakar