Elle était prévue pour mettre fin à la crise ivoirienne, mais au final, elle a installé le pays dans l'impasse. L'élection présidentielle de sortie de crise de 2010 (l'une des plus coûteuses au monde dit-on) a eu en effet un goût d'inachevé, brisant ainsi tous les espoirs qu'elle avait pourtant suscités depuis le début de l'année 2010 jusqu'à la fin du second tour du scrutin. Faut-il le rappeler, le processus électoral a été décliné en différents points que sont l'identification des populations et l'enrôlement des électeurs, la confection de la liste électorale, la distribution des cartes d'électeur et le scrutin lui même. En dépit de quelques difficultés liées à des problèmes techniques, ces différentes étapes ont été exécutées plus ou moins bien. Il faut ajouter à cela l'acquisition du matériel électoral (urnes, isoloirs, encre indélébile), leur acheminement dans les 22 mille bureaux de vote, et la formation des agents électoraux. Également les dispositions sécuritaires prises avec le déploiement des éléments du Centre de commandement intégré (Cci) pour la sécurisation des élections tant au Nord qu'au Sud. L'aide de la communauté internationale, aussi bien en matériel que logistique, a permis d'huiler la machine électorale, ouvrant ainsi la voie à un scrutin crédible. Tout était donc en place pour la tenue d'une bonne élection. Côté campagnes électorales, au premier comme au second tour, les candidats engagés dans la course ont chacun à son niveau, de différentes manières et selon les moyens dont il disposait, fait campagne pour séduire les électeurs ivoiriens. L'ambiance était bonne et la démocratie s'en trouvait rehaussée. Le clou a été le face-à-face télévisé entre les deux candidats au second tour, Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara. Un débat inédit et très attendu par la communauté nationale et internationale, et au cours duquelle le président sortant et son adversaire ont donné une bonne leçon de démocratie, déjouant tous les pronostics qui prédisaient des attaques et autres propos irrévérencieux, voire la bagarre entre les deux hommes. Tout était donc bien parti. Le cas de la Côte d'Ivoire était cité en exemple, et pour la première fois, les Ivoiriens voyaient la lueur de la paix et de la réconciliation pointée à l'horizon. Le pays semblait donc au bout de la course, et le tandem Gbagbo-Soro devrait savourer leur victoire, quand subitement tout est remis en cause après le vote du second tour. La mésentente des représentants des candidats autour des résultats dans certaines localités, a complètement bloqué la machine électorale, depuis le siège de la Cei. Le candidat Alassane Ouattara et ses alliés du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (Rhdp) se sont retirés au Golf hôtel, QG du candidat. Les événements ont ensuite pris une allure vertigineuse. Proclamation des résultats provisoires (hors délais) par le président de la Cei, donnant Alassane Ouattara gagnant, refus du Conseil constitutionnel, certification des résultats provisoires par M. Choi, chef de l'Onuci, proclamation des résultats définitifs par le Conseil constitutionnel donnant Laurent Gbagbo gagnant. Et ensuite, le blocage. Depuis la proclamation des résultats des élections, au début du mois de décembre en effet, la Côte d'Ivoire se trouve dans l'impasse. L'élection présidentielle de sortie de crise a malheureusement abouti à deux ''vainqueurs'' qui revendiquent chacun le fauteuil présidentiel. Très attendus par les Ivoiriens et perçu comme la fin de leur souffrance, les scrutins d'octobre et de novembre 2010 n'auront donc pas tenu leur promesse. Plutôt que de sortir la Côte d'Ivoire de la crise, ces élections ont débouché sur une autre crise qui laisse penser que rien n'a été fait depuis huit ans.
Hamadou ZIAO
Hamadou ZIAO