La crise politique qui secoue la Côte d’Ivoire a entraîné de nombreux déplacements des populations ivoiriennes. Selon le HCR, ce sont à ce jour, près de 20.000 personnes qui ont franchi la frontière en direction du Libéria et de la Guinée pour s’y réfugier. Ces mouvements migratoires forcés se constatent également à l’intérieur du pays. A Danané, on dénombre 1157 déplacés internes, soit 182 ménages, répartis sur trois sites depuis le 17 décembre dernier. Composées en majorité de femmes et d’enfants, les populations qui ont trouvé refuge à Danané sont arrivées des localités de Téapleu, Zouan-Hounien, Bin-Houyé, Touleupleu et Guiglo. Contraintes d’abandonner travail et biens, elles ont, pour la plupart, marché sur plusieurs kilomètres avant d’emprunter un véhicule pour la ville de Danané. En compagnie, pour certaines d’entre elles, de leurs chiens. Selon elles, craignant pour leur vie, c’est dans cette ville aux mains des Forces Nouvelles, qu’elles ont préféré se réfugier. Elles pensent y trouver la sécurité. Pour dame Kouya Marie, sexagénaire et originaire du village de Douatouo dans la sous-préfecture de Téapleu, rencontrée sur le site de l’école primaire du quartier Dioulabougou qui reçoit à elle seule 1051 personnes, c’est sur la base d’informations faisant état de coups de feu tirés à Zouan-Hounien qu’elle et sa famille de 13 membres composée d’enfants et de petits enfants, sont arrivées à Danané. Idem pour cette autre déplacée rencontrée sur ce même site, dame Déba Thérèse, la trentaine révolue et vendeuse à Bin-Houyé. « Un jeudi, nous avons entendu des tirs d’armes à feu du côté de Zouan-Hounien. On a eu peur. Et donc quand les choses se sont calmées nous sommes venues ici », explique-t-elle. Mais sans leurs maris qui eux sont restés au village pour sécuriser les biens et récolter les produits des champs qui sont arrivés à maturité. Logés par quinzaine dans les salles de classe qui leur ont été affectées, ces déplacés dorment à même le sol sur des nattes qui leur ont été offertes par le CICR et la communauté musulmane de Danané. Depuis peu, ils ont reçu de MSF-Belgique un don de médicaments de première nécessité. Cependant, ce n’est pas la sécurité alimentaire. L’appui apporté par la communauté musulmane dans ce sens, reste en deçà des besoins. Parfois, ces déplacés sont obligés de ne se contenter que d’un seul repas journalier. C’est dans ces conditions que deux bébés y ont vu le jour. Certainement d’autres naissances sont à venir. Tous les déplacés ne vivent pas sur les sites d’accueil. Certains ont trouvé refuge dans des familles d’accueil. C’est le cas de Zon Daplé François, instituteur et père d’une famille de 11 personnes. « Le jeudi 16 décembre, alors que nous étions au cabaret, un jeune homme est arrivé en criant : “les libériens sont entrés“. Ce fut la débandade. Et le soir venu, des tirs d’armes de toute sorte se sont fait entendre dans la ville de 17h à 4h du matin. C’est suite à cela que ma famille et avons quitté Zouan-Hounien », raconte-t-il.
Rahoul Sainfort (Correspondant )
Rahoul Sainfort (Correspondant )