Tout a été dit sur l’issue de l’élection présidentielle dont le second tour s’est tenu le 28 novembre 2010. Dr Alassane Dramane Ouattara en est sorti vainqueur légalement et légitimement, il a été proclamé Président et chef de l’État de la République de Côte d’Ivoire. L’ancien Premier ministre, Guillaume Soro, lui a remis la démission de son gouvernement. Puis, le nouveau Président l’a aussitôt reconduit dans ses fonctions de PM. Ensemble ils ont formé un gouvernement dit de mission. Depuis, le Président Ouattara a une reconnaissance universelle. Il a la main sur les comptes bancaires du pays et ses demandes d’accréditation pour les nouveaux Représentants de la Côte d’Ivoire (Ambassadeurs) auprès des Institutions internationales et des autres États sont agréées ou en cours de l’être.
De son côté, l’ancien Président, Laurent Gbagbo, battu aux élections, refuse de quitter le Pouvoir après s’être autoproclamé, arguant sans assise légale ni légitime que les votes de sept (7) régions (du Nord) sur les dix-neuf (19) que compte le pays, devraient être supprimés totalement pour des présumées fraudes. Depuis, sans aucune reconnaissance internationale, il s’est audacieusement entouré d’un PM et d’un gouvernement dont les membres sont tous sanctionnés par la Communauté mondiale et interdits de voyager en Europe et en Amérique. À l’intérieur même de la Côte d’Ivoire, Gbagbo et son équipe sont persona non grata sur 60% du territoire. N’ayant manifestement pas l’appui unanime des Forces de défense et de sécurité (Armée, Gendarmerie et Police), il s’est doté de mercenaires libériens et angolais pour épauler sa garde prétorienne, laquelle sème la terreur dans la population civile dans l’espoir de tuer dans l’œuf toute velléité d’insurrection. Selon les Experts en Droits de l’Homme, Gbagbo aurait déjà les mains tachées du sang de plus de 200 civils assassinés et de plusieurs milliers de blessés, auxquels s’ajoutent comme crimes, l’existence d’au moins 2 charniers et des dizaines de milliers de réfugiés internes et externes, ce, depuis le 28 novembre 2010, date de l’élection du Président Ouattara. Chaque heure qui passe, rend les dernières statistiques caduques, ce que ne cessent de décrier les communautés nationales, régionales et internationales.
Les leaders du monde, États et Institutions tels les États-Unis, la France, la Grande-Bretagne, ONU et UE ont mandaté des Institutions africaines de négocier la transition pacifique du Pouvoir, de l’ancien Président Gbagbo au nouveau Président Ouattara, sans délai, sous peine de sanctions supplémentaires et d’intervention militaire pour rétablir l’ordre républicain.
L’ex Président sud-africain, Thabo Mbeki, a été le premier médiateur africain, pour le compte de l’UA, à fouler le sol ivoirien le dimanche 5 décembre 2010. C’est au cours de son séjour à Abidjan que Laurent Gbagbo a nommé son PM fantoche. Une indélicatesse diplomatique pour montrer sa détermination à usurper le Pouvoir.
Le 28 décembre, trois présidents ouest-africains (Bénin, Sierra Leone et Cap-Vert) mandatés par la CEDEAO arrivent à leur tour à Abidjan pour convaincre Gbagbo de céder le pouvoir pacifiquement. C’est de nouveau un échec, doublé encore une fois d’un doigt d’honneur de Laurent Gbagbo qui réitère au même moment son désir, annoncé la première fois dix jours plus tôt, de voir partir de la Côte d’Ivoire, les Forces impartiales (Casques bleus et Force Licorne française) après que ses miliciens aient attaqué un convoi de l’ONUCI à Abidjan et blessé un Casque bleu à la machette.
Malgré tout, les trois médiateurs de la CEDEAO sont revenus à Abidjan une semaine plus tard comme promis, accompagnés cette fois d’un représentant de l’UA. C’était le lundi 3 janvier dernier où on enregistra un autre refus de Gbagbo de laisser le Pouvoir au Président élu, non sans se payer la tête de ses invités en offrant sa générosité de continuer à dialoguer ultérieurement. Voilà, il est clair, Gbagbo joue le pourrissement de la situation en tentant de ruser avec tout le monde comme lui seul sait le faire. Le mardi 4 janvier dernier, en guise de réaction aux tergiversations du «Boulanger», le président de la CEDEAO, le Nigérian Goodluck Jonathan, «déplore une impasse» après une réunion avec ses émissaires. Le même jour, l’autre président, celui de l’UA, le Malawite Bingu wa Mutharika se dit «déçu de la lenteur du processus de médiation». Aucun d’eux n’a osé évoquer la fin de la médiation verbale pour être en diapason avec le Président élu de Côte d’Ivoire, le Dr Ouattara qui réclame l’option militaire comme convenu au sein de ces deux instances régionales africaines. Deux timides réactions après que depuis Paris, le Président français Nicolas Sarkozy ait déclaré plus tôt que «les 900 soldats de l`Opération Licorne présents en Côte d`Ivoire n`ont pas vocation à s`ingérer dans les affaires intérieures du pays». Toute une volte-face! Mêmes les États-Unis déçoivent lorsqu’on entend Philip Crowley, le porte-parole de la diplomatie américaine, déclarer presque simultanément que «les États-Unis sont prêts à discuter de la possibilité que M. Gbagbo s`installe aux États-Unis s’il quitte le Pouvoir pacifiquement», ce, au moment où ce pays a laissé croire que tout le clan de la Refondation était sous sanction américaine. Or, sans intervention militaire rapide, il y a le risque que l’avènement d’un évènement majeur mondial détourne l’attention internationale de la cause ivoirienne et que le temps faisant son œuvre, le «duel Gbagbo-Ouattara» perde de son exotisme et donc de sensationnalisme pour les médias. C’est pourquoi, une analyse critique de la présente situation conduit à la conclusion que les Forces nouvelles doivent faire le premier pas militaire pour chasser Gbagbo du Pouvoir afin d’entraîner la Communauté internationale à y participer par des appuis logistiques ou en contingent militaire.
La responsabilisation officielle des Acteurs internationaux dans la crise ivoirienne
La France a le dos large. Nous l’avons tous critiquée à tour de rôle en Côte d’Ivoire, côté (ex) rébellion, côté ex-camp présidentiel, comme dans la population civile. N’empêche que sans la France, la Côte d’Ivoire serait peut-être une hécatombe. L’intervention militaire du 43e BIMA pour mettre une trêve à la guerre ivoirienne, le lendemain de la tentative du coup d’État du 19 septembre 2002, a certainement fait éviter le pire. On se souvient que la CEDEAO décida par la suite de prendre la relève au mois de novembre 2002 en organisant une conférence à Lomé pour rapprocher les deux groupes belligérants. Sans succès. Les rebelles ivoiriens exigeaient toujours la démission du Président Gbagbo, lequel refusait toute négociation sans reddition préalable de la rébellion dirigée par Guillaume Soro. À cet égard, voici un extrait de la correspondance de Guy Mario pour le compte de RFI : «L’assassinat du docteur Benoît-Tabley, le tout récent d’une série d’exactions à Abidjan, vient enfin de remettre en cause de sérieux pourparlers entamés depuis deux semaines dans la capitale togolaise pour ramener la paix en Côte d’Ivoire (…). Le 9 novembre (2002), en fin d’après-midi, le Mouvement patriotique de Côte d’Ivoire (MPCI), branche politique de la rébellion, a annoncé sa décision «unilatérale» de quitter la table des négociations. Raison invoquée: le régime du président Laurent Gbagbo, en pourparlers avec le MPCI, ne créé pas «les conditions optimales à des discussions». Dans une déclaration, le MPCI a fait état «d’exactions horribles, d’arrestations nocturnes, d’assassinats lâches de personnes suspectées à tort de collaboration» avec le mouvement des rebelles ivoiriens. Tous ces faits «graves», selon le MPCI, «semblent faire l’objet, de la part du pouvoir de M. Gbagbo, d’une planification visant expressément à saboter les pourparlers de paix, à entretenir la terreur et aussi à rompre le cessez-le-feu auquel les deux parties se sont engagées» (fin de citation).
La guerre menaçait de reprendre lorsqu’à l’invitation du Président de la République française, Jacques Chirac, une Table Ronde des forces politiques ivoiriennes s’est réunie à Linas-Marcoussis du 15 au 23 janvier 2003. Les travaux ont été présidés par M. Pierre MAZEAUD, assisté du juge Keba Mbaye et de l’ancien Premier ministre Seydou Diarra et de facilitateurs désignés par l’ONU, l’Union Africaine (UA) et la CEDEAO.
Par la suite, afin d’éviter les «crimes contre l’Humanité» dont le régime de Laurent Gbagbo s’adonnait déjà, la Table Ronde décida de la mise en place d’un comité de suivi de l’application des Accords de Paris issus de Linas-Marcoussis, lequel comité a été chargé d’assurer le respect des engagements pris et devait saisir les instances nationales, régionales et internationales de tous les cas d’obstruction ou de défaillance dans la mise en œuvre des accords afin que les mesures de redressement appropriées soient prises. C’est ainsi que, pour la sortie de crise en Côte d’Ivoire, la responsabilité des personnalités suivantes fut officialisée, en l’occurrence les représentants de l’Union européenne (UE), de la Commission de l’Union africaine (UA), du secrétariat exécutif de la CEDEAO, du Secrétariat Générale de l’ONU, de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), du FMI et de la Banque mondiale, des pays du G8 et de la France.
Les principaux enjeux structurels de la crise ivoirienne
Il importe de souligner que si tant de personnalités extérieures ont été responsabilisées, c’est que la crise ivoirienne n’est pas tombée des nues. En effet, la tentative de coup d’État du 19 septembre 2002 n’est que le dernier d’une série de soubresauts de légitime-défense face à un système politique ivoirien en démocratisation difficile. Il est bien connu en Europe que c’est à la suite de révoltes populaires face à la dictature des monarchies que la constitutionnalisation des Droits humains a posé les assises de la démocratie moderne et l’avènement des républiques. Plusieurs évènements violents intervenus en Côte d’Ivoire depuis 1960, date de l’indépendance politique, s’inscrivent dans ce cadre, notamment la répression de l’aile nationaliste du PDCI-RDA dans le complot de 1963-1964 (onze condamnations à mort non exécutées) ; la liquidation de la revendication indépendantiste et intellectuelle des monarchistes du Sanwi en 1966, qui a fait 2.000 morts dans la forêt d’Aboisso ; le génocide des insurgés de Gaba (Guébié) en octobre 1970, avec 4.000 morts dans la région de Gagnoa ; la tentative de coup d’État de 1973 ; les manifestations d’étudiants en 1982, 1991 et 1992 ; le coup d'État contre le Président Henri Konan Bédié et finalement, la tentative du coup d’État de septembre 2002, muée en rébellion.
Ainsi, il suffit de se rappeler des sujets évoqués dans les Accords de Linas-Marcoussis, comme devant être l’objet de réformes constitutionnelles, législatives ou réglementaires, pour prendre la pleine mesure des enjeux de la mise en place d’une démocratie en Côte d’Ivoire. Mentionnons, entre autres, les conflits reliés à la nationalité, à l’identité, à la condition des étrangers, au régime électoral, à l’éligibilité à la Présidence de la République, au régime foncier, à la gestion et à la liberté des médias, aux Droits et libertés de l’Homme, à la sécurité nationale par le désarmement des rebelles et des milices, au redressement économique et à la cohésion sociale (ethnique et religieuse).
Les devoirs accomplis par la Communauté internationale
Depuis les Accords de Marcoussis de janvier 2003 jusqu’à maintenant, les intervenants nationaux, régionaux et internationaux responsabilisés dans la résolution de la crise ivoirienne ont assumé, bon an mal an, les responsabilités qui leur ont été confiées lors du processus d’adoption, de financement ou d’application des diverses Ententes et Résolutions. Même l’Accord politique de Ouagadougou (APO) du 4 mars 2007, considéré comme étant le fruit d’un «Dialogue Direct» inter-ivoirien, a été réalisé grâce à la participation de tous, à titre de membres de l’un ou l’autre des deux comités de suivi.
Le Comité d’évaluation et accompagnement (CEA) qui a joué le rôle de Conseil d’administration de l’APO, était composé d’un Facilitateur, Blaise Compaoré du Burkina Faso, d’une délégation de 3 personnes représentant chacun des 2 signataires, l’État et les Forces Nouvelles (FN) et d’un Organe consultatif international (OCI) comprenant le système des Nations-Unies, les bailleurs de fonds et des représentants de la CEDEAO et de l’UA.
Le deuxième comité de suivi est le Cadre permanent de concertation (CPC). Ayant pour rôle l’équivalent d’un Conseil Exécutif, le CPC était composé des 2 signataires de l’APO, Gbagbo et Soro, des 2 principaux leaders de l’Opposition, Bédié du PDCI et Ouattara du RDR, du facilitateur Compaoré et de plusieurs invités et observateurs internationaux.
C’est donc avec le concours de la Communauté internationale que la Commission électorale Indépendante a pu s’acquitter des tâches du processus électoral, soit les audiences foraines, l’enrôlement et l’identification des électeurs, l’affichage des listes électorales, la provisoire et la définitive, ainsi que la tenue effective des scrutins du premier et du second tours. Toutes ces étapes ont été certifiées par M. Choi Young Jin, le Représentant Spécial du SG de l’ONU.
Par ailleurs, l’ONU a joué un rôle majeur dans le processus de sortie de crise à tous les niveaux par le biais de la trentaine de Résolutions du Conseil de sécurité prise sur la Côte d’Ivoire et par des actions directes sur le terrain. Par exemple, le financement issu de la Communauté internationale a été géré par le PNUD et non par le Trésor public, question de mal gouvernance du côté ivoirien. L’ONUCI a rendu efficace la CEI en identifiant les 20 mille bureaux de vote, en élaborant plus de 1000 microprojets dans le cadre du Service Civique, en se chargeant du rapatriement des ordinateurs de Sagem (Opérateur technique) de l’Europe en Côte d’Ivoire. C’est aussi l’ONUCI qui s’est occupée du transport des Agents et du matériel de l’identification et d’enrôlement. Elle a formé 80 policiers d’intervention rapide sous le commandement de U.N.POL en remplacement de la BAE, brigade anti-émeute à la solde du FPI, parti de Gbagbo. L’ONUCI a supervisé l’insertion des mille soldats FN descendus à Abidjan pour sécuriser les bureaux de vote dans le cadre du Centre du Commandement Intégré (CCI). L’ONUCI dispose de plus de 8 mille soldats casques bleus et de 900 soldats Licornes, soit environ 9 mille soldats composant les Forces impartiales qui sécurisent le pays. C’est l’ONUCI qui a défini et fait le consensus autour des critères de certification des élections. Elle a demandé et bénéficié de l’expertise en matière électorale de 8 observateurs du Centre Jimmy Carter; des Experts envoyés par le gouvernement américain avec une dotation d’une subvention de 200 mille dollars, soit 100 millions F CFA.
L’ultime devoir : installer l’élu du peuple à la Présidence de la République
Si la Communauté internationale s’est acquittée avec brio de ses responsabilités dans la résolution de la crise ivoirienne, elle risque de faire effondrer son chef-œuvre en hésitant à y mettre la dernière tâche, celle du couronnement.
En effet, en utilisant le chapitre 7 de la Charte de l’ONU, le CS de l’ONU a régionalisé les conséquences néfastes de la situation en Côte d’Ivoire. Il a pris des décisions courageuses pour peaufiner un mandat à l’ONUCI, mandat dont certaines dispositions varient en fonction des défis sur le terrain. Par exemple les Résolutions 1572 du 15 nov. 04, 1633 du 21 oct. 05 et 1795 du 15 janv. 08 ont réexaminé les mandats de l’ONUCI et des Forces françaises Licorne, notamment pour ce qui concerne l’organisation d’élections libres, ouvertes, justes et transparentes dans les délais prévus et la certification desdites élections. À cet égard, le 26 mai 2009, le Représentant spécial du Secrétaire Général de l’ONU en Côte d’Ivoire, Y.J. Choi a animé une conférence de presse au siège de l’ONUCI et précisé les cinq critères-cadres retenus en concertation avec les acteurs politiques ivoiriens et le Facilitateur : la paix, l’inclusion, les médias d’État, la liste électorale et les résultats. La certification des résultats signifie que le vainqueur des élections reflète la volonté du peuple telle qu’exprimée par les urnes et doit être reconnu comme tel par tous.
Or, c’est cette dernière et ultime étape qui est mise à mal par Laurent Gbagbo, le candidat perdant. Comme le mandat de l’ONUCI et de la Force Licorne couvre entièrement cette étape, M. Choi a la latitude de ramener à l’ordre l’ex-président et son clan. La dernière résolution du CS de l’ONU à ce jour sur la Côte d’Ivoire, la R-1946 du 21 octobre 2010, réitère à ce propos que :
premièrement, c’est la CEI qui établit le chronogramme de l’élection du 31 octobre 2010 que les parties prenantes ivoiriennes sont tenues de respecter et exhortées à veiller à ce que ladite élection soit ouverte, libre, régulière et transparente;
deuxièmement, l’ONU agit en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations unies, considérant que la situation en Côte d’Ivoire continue de mettre en péril la paix et la sécurité internationales dans la région, ce qui revient à reconnaitre que la sortie de crise excède la seule compétence des Autorités ivoiriennes;
troisièmement, les États de la sous-région sont invités à contribuer à l’application intégrale des mesures visant l’embargo sur l’importation d’armes en Côte d’Ivoire et dans le cas échéant à demander à l’ONUCI de leur apporter son plein soutien, dans les limites de ses capacités ou à demande aux forces françaises de soutenir l’ONUCI à cette fin, dans les limites de leur déploiement et de leurs moyens;
quatrièmement, les Autorités ivoiriennes doivent donner à l’ONUCI et aux forces françaises qui la soutiennent, libre accès aux matériels, sites et installations d’armement où qu’ils se trouvent, y compris ceux placés sous le contrôle d’unités de la Garde prétorienne;
cinquièmement, sont passibles de sanction ceux qui : attaquent l’ONUCI, les forces françaises qui la soutiennent, le Représentant spécial du Secrétaire général ou entravent leur action ; sont responsables d’obstacles mis à la libre circulation de l’ONUCI et des forces françaises qui la soutiennent ; sont responsables de graves violations des Droits de l’Homme et du droit international humanitaire, commises en Côte d’Ivoire ; incitent publiquement à la haine et à la violence; entravent le processus électoral, notamment l’action de la CEI et de tous les autres acteurs concernés, ainsi que la proclamation et la certification des résultats des élections présidentielle et législatives.
Il est donc clair que les Forces militaires impartiales (Casques bleus et Force Licorne) qui sont en Côte d’Ivoire sous mandat de l’ONU ont le devoir de veiller à ce que le résultat des élections soit respecté. Il est ironique d’entendre le clan de Gbagbo mettre en cause l’impartialité de l’ONUCI du fait qu’elle protège le Golf Hôtel, comme si celle-ci devait rester neutre devant le bien et le mal.
Néanmoins, il est notoire que les Casques bleus ont la gâchette difficile, ce n’est pas le cas de la Force Licorne sur laquelle les Ivoiriens comptent pour les protéger activement des bandes illégales qui s’en prennent aux civils. Dans le présent cas, Laurent Gbagbo et ceux qui le soutiennent, portent atteinte à la Sûreté de l’État, entravent le processus de paix et méritent par conséquent d’être stoppés. Sous l’initiative et la coordination des FN.
La responsabilité des Forces Nouvelles
Les Forces nouvelles (FN) ont justifié leur tentative de coup d’État contre Gbagbo de septembre 2002 pour espérer avoir en alternative un régime plus démocratique. Après, huit ans de guerre froide avec cet ex-chef d’État qu’elles n’ont pas réussi à faire tomber par les armes, les FN ont le devoir moral de se poser la question du rôle qu’elles doivent jouer dans la présente situation. L’homme en qui elle n’avait pas confiance en septembre 2002 leur donne raison. Le hic est qu’il est toujours là mais dans des rôles inversés. Les FN sont devenues des forces républicaines et c’est Gbagbo qui est maintenant le chef d’une nouvelle rébellion. Peuvent-elles, les FN, rester inactives au moment où Gbagbo tue chaque jour d’innocentes personnes par répressions sauvages? Non, les FN doivent admettre que le départ de Gbagbo par la force est leurs prérogatives, car c’est elles qui ont ouvert la boîte de Pandore en septembre 2002. C’est à elles de se chercher des alliés intérieurs ou extérieurs pour faire pencher de leur bord, le rapport de force qu’elles ont avec les FDS-rebelles et les mercenaires du camp adverse. C’est donc une incongruité que les FN attendent que des forces extérieures, ECOMOG ou autres, viennent à elles.
Il faut se rappeler que l’APO a été signé le 4 mars 2007 et devait prendre fin dix mois plus tard (4 janv.08) par des élections. Cet échéancier n’a pas pu être respecté parce que l’agenda proposé par Gbagbo dans son Dialogue direct (DD) ne visait qu’à faire du dilatoire pour se soustraire aux contraintes de la Résolution 1721 du CS de l’ONU du 1er novembre 2006. Alors le PM Soro a dû exiger, en cours de route, l’ajustement du contenu de l’APO afin d’y insérer des préoccupations majeures des FN, non considérées originellement. Ce qui a abouti aux Accords complémentaires, notamment Ouaga II du 28 novembre 2007 portant sur l'identification et l'inscription sur la liste électorale; Ouaga III du 28 novembre 2007 portant sur l’accélération de la mise en œuvre de l’APO; Ouaga IV du 22 décembre 2008 portant sur 1) l’identification et le processus électoral; 2) les Forces de défense et de sécurité (nouvelle armée); 3) la restauration de l’autorité de l’État et le redéploiement de l’Administration sur l’ensemble du Territoire national; 4) le financement du processus de sortie de crise.
Au lendemain de l’élection présidentielle du 28 novembre dernier, les FN doivent faire le constat que plusieurs problèmes sociopolitiques qui ont justifié leur tentative de coup d’État du 19 septembre 2002 et qui ont été reconnus comme étant légitimes depuis les Accords de Marcoussis, ne sont pas encore résolus, en l’occurrence l’abrogation de l’art.35 de la Constitution, les conflits relatifs au titre foncier dans l’Ouest et le Centre-ouest, la naturalisation des Ivoiriens sans papiers par l’application pure et simple du code de nationalité du pays, le fonctionnement démocratique des Institutions étatiques (exécutives, parlementaires et judiciaires).
Ce constat indique que la lutte générale des FN n’est pas achevée et s’inscrit désormais dans le programme politique du nouveau Président de la République, en l’occurrence le Dr Alassane D. Ouattara. En somme, les FN doivent faire le premier pas visant à chasser Gbagbo du pouvoir usurpé. Quant à la stratégie pour y arriver, c’est à elles de la concevoir. Toute suggestion de ma part serait inappropriée et vendre la mèche à l’adversaire. Devant les hésitations des Communautés extérieures alliées, l’adage «Charité bien ordonnée commence par soi-même» prend ici tout son sens. Allez les FN, toute la Côte d’Ivoire démocratique est avec vous.
Dr Antoine Ahua Jr
Québec, Canada
mailto:antoineahua@hotmail.com
antoineahua@hotmail.com
De son côté, l’ancien Président, Laurent Gbagbo, battu aux élections, refuse de quitter le Pouvoir après s’être autoproclamé, arguant sans assise légale ni légitime que les votes de sept (7) régions (du Nord) sur les dix-neuf (19) que compte le pays, devraient être supprimés totalement pour des présumées fraudes. Depuis, sans aucune reconnaissance internationale, il s’est audacieusement entouré d’un PM et d’un gouvernement dont les membres sont tous sanctionnés par la Communauté mondiale et interdits de voyager en Europe et en Amérique. À l’intérieur même de la Côte d’Ivoire, Gbagbo et son équipe sont persona non grata sur 60% du territoire. N’ayant manifestement pas l’appui unanime des Forces de défense et de sécurité (Armée, Gendarmerie et Police), il s’est doté de mercenaires libériens et angolais pour épauler sa garde prétorienne, laquelle sème la terreur dans la population civile dans l’espoir de tuer dans l’œuf toute velléité d’insurrection. Selon les Experts en Droits de l’Homme, Gbagbo aurait déjà les mains tachées du sang de plus de 200 civils assassinés et de plusieurs milliers de blessés, auxquels s’ajoutent comme crimes, l’existence d’au moins 2 charniers et des dizaines de milliers de réfugiés internes et externes, ce, depuis le 28 novembre 2010, date de l’élection du Président Ouattara. Chaque heure qui passe, rend les dernières statistiques caduques, ce que ne cessent de décrier les communautés nationales, régionales et internationales.
Les leaders du monde, États et Institutions tels les États-Unis, la France, la Grande-Bretagne, ONU et UE ont mandaté des Institutions africaines de négocier la transition pacifique du Pouvoir, de l’ancien Président Gbagbo au nouveau Président Ouattara, sans délai, sous peine de sanctions supplémentaires et d’intervention militaire pour rétablir l’ordre républicain.
L’ex Président sud-africain, Thabo Mbeki, a été le premier médiateur africain, pour le compte de l’UA, à fouler le sol ivoirien le dimanche 5 décembre 2010. C’est au cours de son séjour à Abidjan que Laurent Gbagbo a nommé son PM fantoche. Une indélicatesse diplomatique pour montrer sa détermination à usurper le Pouvoir.
Le 28 décembre, trois présidents ouest-africains (Bénin, Sierra Leone et Cap-Vert) mandatés par la CEDEAO arrivent à leur tour à Abidjan pour convaincre Gbagbo de céder le pouvoir pacifiquement. C’est de nouveau un échec, doublé encore une fois d’un doigt d’honneur de Laurent Gbagbo qui réitère au même moment son désir, annoncé la première fois dix jours plus tôt, de voir partir de la Côte d’Ivoire, les Forces impartiales (Casques bleus et Force Licorne française) après que ses miliciens aient attaqué un convoi de l’ONUCI à Abidjan et blessé un Casque bleu à la machette.
Malgré tout, les trois médiateurs de la CEDEAO sont revenus à Abidjan une semaine plus tard comme promis, accompagnés cette fois d’un représentant de l’UA. C’était le lundi 3 janvier dernier où on enregistra un autre refus de Gbagbo de laisser le Pouvoir au Président élu, non sans se payer la tête de ses invités en offrant sa générosité de continuer à dialoguer ultérieurement. Voilà, il est clair, Gbagbo joue le pourrissement de la situation en tentant de ruser avec tout le monde comme lui seul sait le faire. Le mardi 4 janvier dernier, en guise de réaction aux tergiversations du «Boulanger», le président de la CEDEAO, le Nigérian Goodluck Jonathan, «déplore une impasse» après une réunion avec ses émissaires. Le même jour, l’autre président, celui de l’UA, le Malawite Bingu wa Mutharika se dit «déçu de la lenteur du processus de médiation». Aucun d’eux n’a osé évoquer la fin de la médiation verbale pour être en diapason avec le Président élu de Côte d’Ivoire, le Dr Ouattara qui réclame l’option militaire comme convenu au sein de ces deux instances régionales africaines. Deux timides réactions après que depuis Paris, le Président français Nicolas Sarkozy ait déclaré plus tôt que «les 900 soldats de l`Opération Licorne présents en Côte d`Ivoire n`ont pas vocation à s`ingérer dans les affaires intérieures du pays». Toute une volte-face! Mêmes les États-Unis déçoivent lorsqu’on entend Philip Crowley, le porte-parole de la diplomatie américaine, déclarer presque simultanément que «les États-Unis sont prêts à discuter de la possibilité que M. Gbagbo s`installe aux États-Unis s’il quitte le Pouvoir pacifiquement», ce, au moment où ce pays a laissé croire que tout le clan de la Refondation était sous sanction américaine. Or, sans intervention militaire rapide, il y a le risque que l’avènement d’un évènement majeur mondial détourne l’attention internationale de la cause ivoirienne et que le temps faisant son œuvre, le «duel Gbagbo-Ouattara» perde de son exotisme et donc de sensationnalisme pour les médias. C’est pourquoi, une analyse critique de la présente situation conduit à la conclusion que les Forces nouvelles doivent faire le premier pas militaire pour chasser Gbagbo du Pouvoir afin d’entraîner la Communauté internationale à y participer par des appuis logistiques ou en contingent militaire.
La responsabilisation officielle des Acteurs internationaux dans la crise ivoirienne
La France a le dos large. Nous l’avons tous critiquée à tour de rôle en Côte d’Ivoire, côté (ex) rébellion, côté ex-camp présidentiel, comme dans la population civile. N’empêche que sans la France, la Côte d’Ivoire serait peut-être une hécatombe. L’intervention militaire du 43e BIMA pour mettre une trêve à la guerre ivoirienne, le lendemain de la tentative du coup d’État du 19 septembre 2002, a certainement fait éviter le pire. On se souvient que la CEDEAO décida par la suite de prendre la relève au mois de novembre 2002 en organisant une conférence à Lomé pour rapprocher les deux groupes belligérants. Sans succès. Les rebelles ivoiriens exigeaient toujours la démission du Président Gbagbo, lequel refusait toute négociation sans reddition préalable de la rébellion dirigée par Guillaume Soro. À cet égard, voici un extrait de la correspondance de Guy Mario pour le compte de RFI : «L’assassinat du docteur Benoît-Tabley, le tout récent d’une série d’exactions à Abidjan, vient enfin de remettre en cause de sérieux pourparlers entamés depuis deux semaines dans la capitale togolaise pour ramener la paix en Côte d’Ivoire (…). Le 9 novembre (2002), en fin d’après-midi, le Mouvement patriotique de Côte d’Ivoire (MPCI), branche politique de la rébellion, a annoncé sa décision «unilatérale» de quitter la table des négociations. Raison invoquée: le régime du président Laurent Gbagbo, en pourparlers avec le MPCI, ne créé pas «les conditions optimales à des discussions». Dans une déclaration, le MPCI a fait état «d’exactions horribles, d’arrestations nocturnes, d’assassinats lâches de personnes suspectées à tort de collaboration» avec le mouvement des rebelles ivoiriens. Tous ces faits «graves», selon le MPCI, «semblent faire l’objet, de la part du pouvoir de M. Gbagbo, d’une planification visant expressément à saboter les pourparlers de paix, à entretenir la terreur et aussi à rompre le cessez-le-feu auquel les deux parties se sont engagées» (fin de citation).
La guerre menaçait de reprendre lorsqu’à l’invitation du Président de la République française, Jacques Chirac, une Table Ronde des forces politiques ivoiriennes s’est réunie à Linas-Marcoussis du 15 au 23 janvier 2003. Les travaux ont été présidés par M. Pierre MAZEAUD, assisté du juge Keba Mbaye et de l’ancien Premier ministre Seydou Diarra et de facilitateurs désignés par l’ONU, l’Union Africaine (UA) et la CEDEAO.
Par la suite, afin d’éviter les «crimes contre l’Humanité» dont le régime de Laurent Gbagbo s’adonnait déjà, la Table Ronde décida de la mise en place d’un comité de suivi de l’application des Accords de Paris issus de Linas-Marcoussis, lequel comité a été chargé d’assurer le respect des engagements pris et devait saisir les instances nationales, régionales et internationales de tous les cas d’obstruction ou de défaillance dans la mise en œuvre des accords afin que les mesures de redressement appropriées soient prises. C’est ainsi que, pour la sortie de crise en Côte d’Ivoire, la responsabilité des personnalités suivantes fut officialisée, en l’occurrence les représentants de l’Union européenne (UE), de la Commission de l’Union africaine (UA), du secrétariat exécutif de la CEDEAO, du Secrétariat Générale de l’ONU, de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), du FMI et de la Banque mondiale, des pays du G8 et de la France.
Les principaux enjeux structurels de la crise ivoirienne
Il importe de souligner que si tant de personnalités extérieures ont été responsabilisées, c’est que la crise ivoirienne n’est pas tombée des nues. En effet, la tentative de coup d’État du 19 septembre 2002 n’est que le dernier d’une série de soubresauts de légitime-défense face à un système politique ivoirien en démocratisation difficile. Il est bien connu en Europe que c’est à la suite de révoltes populaires face à la dictature des monarchies que la constitutionnalisation des Droits humains a posé les assises de la démocratie moderne et l’avènement des républiques. Plusieurs évènements violents intervenus en Côte d’Ivoire depuis 1960, date de l’indépendance politique, s’inscrivent dans ce cadre, notamment la répression de l’aile nationaliste du PDCI-RDA dans le complot de 1963-1964 (onze condamnations à mort non exécutées) ; la liquidation de la revendication indépendantiste et intellectuelle des monarchistes du Sanwi en 1966, qui a fait 2.000 morts dans la forêt d’Aboisso ; le génocide des insurgés de Gaba (Guébié) en octobre 1970, avec 4.000 morts dans la région de Gagnoa ; la tentative de coup d’État de 1973 ; les manifestations d’étudiants en 1982, 1991 et 1992 ; le coup d'État contre le Président Henri Konan Bédié et finalement, la tentative du coup d’État de septembre 2002, muée en rébellion.
Ainsi, il suffit de se rappeler des sujets évoqués dans les Accords de Linas-Marcoussis, comme devant être l’objet de réformes constitutionnelles, législatives ou réglementaires, pour prendre la pleine mesure des enjeux de la mise en place d’une démocratie en Côte d’Ivoire. Mentionnons, entre autres, les conflits reliés à la nationalité, à l’identité, à la condition des étrangers, au régime électoral, à l’éligibilité à la Présidence de la République, au régime foncier, à la gestion et à la liberté des médias, aux Droits et libertés de l’Homme, à la sécurité nationale par le désarmement des rebelles et des milices, au redressement économique et à la cohésion sociale (ethnique et religieuse).
Les devoirs accomplis par la Communauté internationale
Depuis les Accords de Marcoussis de janvier 2003 jusqu’à maintenant, les intervenants nationaux, régionaux et internationaux responsabilisés dans la résolution de la crise ivoirienne ont assumé, bon an mal an, les responsabilités qui leur ont été confiées lors du processus d’adoption, de financement ou d’application des diverses Ententes et Résolutions. Même l’Accord politique de Ouagadougou (APO) du 4 mars 2007, considéré comme étant le fruit d’un «Dialogue Direct» inter-ivoirien, a été réalisé grâce à la participation de tous, à titre de membres de l’un ou l’autre des deux comités de suivi.
Le Comité d’évaluation et accompagnement (CEA) qui a joué le rôle de Conseil d’administration de l’APO, était composé d’un Facilitateur, Blaise Compaoré du Burkina Faso, d’une délégation de 3 personnes représentant chacun des 2 signataires, l’État et les Forces Nouvelles (FN) et d’un Organe consultatif international (OCI) comprenant le système des Nations-Unies, les bailleurs de fonds et des représentants de la CEDEAO et de l’UA.
Le deuxième comité de suivi est le Cadre permanent de concertation (CPC). Ayant pour rôle l’équivalent d’un Conseil Exécutif, le CPC était composé des 2 signataires de l’APO, Gbagbo et Soro, des 2 principaux leaders de l’Opposition, Bédié du PDCI et Ouattara du RDR, du facilitateur Compaoré et de plusieurs invités et observateurs internationaux.
C’est donc avec le concours de la Communauté internationale que la Commission électorale Indépendante a pu s’acquitter des tâches du processus électoral, soit les audiences foraines, l’enrôlement et l’identification des électeurs, l’affichage des listes électorales, la provisoire et la définitive, ainsi que la tenue effective des scrutins du premier et du second tours. Toutes ces étapes ont été certifiées par M. Choi Young Jin, le Représentant Spécial du SG de l’ONU.
Par ailleurs, l’ONU a joué un rôle majeur dans le processus de sortie de crise à tous les niveaux par le biais de la trentaine de Résolutions du Conseil de sécurité prise sur la Côte d’Ivoire et par des actions directes sur le terrain. Par exemple, le financement issu de la Communauté internationale a été géré par le PNUD et non par le Trésor public, question de mal gouvernance du côté ivoirien. L’ONUCI a rendu efficace la CEI en identifiant les 20 mille bureaux de vote, en élaborant plus de 1000 microprojets dans le cadre du Service Civique, en se chargeant du rapatriement des ordinateurs de Sagem (Opérateur technique) de l’Europe en Côte d’Ivoire. C’est aussi l’ONUCI qui s’est occupée du transport des Agents et du matériel de l’identification et d’enrôlement. Elle a formé 80 policiers d’intervention rapide sous le commandement de U.N.POL en remplacement de la BAE, brigade anti-émeute à la solde du FPI, parti de Gbagbo. L’ONUCI a supervisé l’insertion des mille soldats FN descendus à Abidjan pour sécuriser les bureaux de vote dans le cadre du Centre du Commandement Intégré (CCI). L’ONUCI dispose de plus de 8 mille soldats casques bleus et de 900 soldats Licornes, soit environ 9 mille soldats composant les Forces impartiales qui sécurisent le pays. C’est l’ONUCI qui a défini et fait le consensus autour des critères de certification des élections. Elle a demandé et bénéficié de l’expertise en matière électorale de 8 observateurs du Centre Jimmy Carter; des Experts envoyés par le gouvernement américain avec une dotation d’une subvention de 200 mille dollars, soit 100 millions F CFA.
L’ultime devoir : installer l’élu du peuple à la Présidence de la République
Si la Communauté internationale s’est acquittée avec brio de ses responsabilités dans la résolution de la crise ivoirienne, elle risque de faire effondrer son chef-œuvre en hésitant à y mettre la dernière tâche, celle du couronnement.
En effet, en utilisant le chapitre 7 de la Charte de l’ONU, le CS de l’ONU a régionalisé les conséquences néfastes de la situation en Côte d’Ivoire. Il a pris des décisions courageuses pour peaufiner un mandat à l’ONUCI, mandat dont certaines dispositions varient en fonction des défis sur le terrain. Par exemple les Résolutions 1572 du 15 nov. 04, 1633 du 21 oct. 05 et 1795 du 15 janv. 08 ont réexaminé les mandats de l’ONUCI et des Forces françaises Licorne, notamment pour ce qui concerne l’organisation d’élections libres, ouvertes, justes et transparentes dans les délais prévus et la certification desdites élections. À cet égard, le 26 mai 2009, le Représentant spécial du Secrétaire Général de l’ONU en Côte d’Ivoire, Y.J. Choi a animé une conférence de presse au siège de l’ONUCI et précisé les cinq critères-cadres retenus en concertation avec les acteurs politiques ivoiriens et le Facilitateur : la paix, l’inclusion, les médias d’État, la liste électorale et les résultats. La certification des résultats signifie que le vainqueur des élections reflète la volonté du peuple telle qu’exprimée par les urnes et doit être reconnu comme tel par tous.
Or, c’est cette dernière et ultime étape qui est mise à mal par Laurent Gbagbo, le candidat perdant. Comme le mandat de l’ONUCI et de la Force Licorne couvre entièrement cette étape, M. Choi a la latitude de ramener à l’ordre l’ex-président et son clan. La dernière résolution du CS de l’ONU à ce jour sur la Côte d’Ivoire, la R-1946 du 21 octobre 2010, réitère à ce propos que :
premièrement, c’est la CEI qui établit le chronogramme de l’élection du 31 octobre 2010 que les parties prenantes ivoiriennes sont tenues de respecter et exhortées à veiller à ce que ladite élection soit ouverte, libre, régulière et transparente;
deuxièmement, l’ONU agit en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations unies, considérant que la situation en Côte d’Ivoire continue de mettre en péril la paix et la sécurité internationales dans la région, ce qui revient à reconnaitre que la sortie de crise excède la seule compétence des Autorités ivoiriennes;
troisièmement, les États de la sous-région sont invités à contribuer à l’application intégrale des mesures visant l’embargo sur l’importation d’armes en Côte d’Ivoire et dans le cas échéant à demander à l’ONUCI de leur apporter son plein soutien, dans les limites de ses capacités ou à demande aux forces françaises de soutenir l’ONUCI à cette fin, dans les limites de leur déploiement et de leurs moyens;
quatrièmement, les Autorités ivoiriennes doivent donner à l’ONUCI et aux forces françaises qui la soutiennent, libre accès aux matériels, sites et installations d’armement où qu’ils se trouvent, y compris ceux placés sous le contrôle d’unités de la Garde prétorienne;
cinquièmement, sont passibles de sanction ceux qui : attaquent l’ONUCI, les forces françaises qui la soutiennent, le Représentant spécial du Secrétaire général ou entravent leur action ; sont responsables d’obstacles mis à la libre circulation de l’ONUCI et des forces françaises qui la soutiennent ; sont responsables de graves violations des Droits de l’Homme et du droit international humanitaire, commises en Côte d’Ivoire ; incitent publiquement à la haine et à la violence; entravent le processus électoral, notamment l’action de la CEI et de tous les autres acteurs concernés, ainsi que la proclamation et la certification des résultats des élections présidentielle et législatives.
Il est donc clair que les Forces militaires impartiales (Casques bleus et Force Licorne) qui sont en Côte d’Ivoire sous mandat de l’ONU ont le devoir de veiller à ce que le résultat des élections soit respecté. Il est ironique d’entendre le clan de Gbagbo mettre en cause l’impartialité de l’ONUCI du fait qu’elle protège le Golf Hôtel, comme si celle-ci devait rester neutre devant le bien et le mal.
Néanmoins, il est notoire que les Casques bleus ont la gâchette difficile, ce n’est pas le cas de la Force Licorne sur laquelle les Ivoiriens comptent pour les protéger activement des bandes illégales qui s’en prennent aux civils. Dans le présent cas, Laurent Gbagbo et ceux qui le soutiennent, portent atteinte à la Sûreté de l’État, entravent le processus de paix et méritent par conséquent d’être stoppés. Sous l’initiative et la coordination des FN.
La responsabilité des Forces Nouvelles
Les Forces nouvelles (FN) ont justifié leur tentative de coup d’État contre Gbagbo de septembre 2002 pour espérer avoir en alternative un régime plus démocratique. Après, huit ans de guerre froide avec cet ex-chef d’État qu’elles n’ont pas réussi à faire tomber par les armes, les FN ont le devoir moral de se poser la question du rôle qu’elles doivent jouer dans la présente situation. L’homme en qui elle n’avait pas confiance en septembre 2002 leur donne raison. Le hic est qu’il est toujours là mais dans des rôles inversés. Les FN sont devenues des forces républicaines et c’est Gbagbo qui est maintenant le chef d’une nouvelle rébellion. Peuvent-elles, les FN, rester inactives au moment où Gbagbo tue chaque jour d’innocentes personnes par répressions sauvages? Non, les FN doivent admettre que le départ de Gbagbo par la force est leurs prérogatives, car c’est elles qui ont ouvert la boîte de Pandore en septembre 2002. C’est à elles de se chercher des alliés intérieurs ou extérieurs pour faire pencher de leur bord, le rapport de force qu’elles ont avec les FDS-rebelles et les mercenaires du camp adverse. C’est donc une incongruité que les FN attendent que des forces extérieures, ECOMOG ou autres, viennent à elles.
Il faut se rappeler que l’APO a été signé le 4 mars 2007 et devait prendre fin dix mois plus tard (4 janv.08) par des élections. Cet échéancier n’a pas pu être respecté parce que l’agenda proposé par Gbagbo dans son Dialogue direct (DD) ne visait qu’à faire du dilatoire pour se soustraire aux contraintes de la Résolution 1721 du CS de l’ONU du 1er novembre 2006. Alors le PM Soro a dû exiger, en cours de route, l’ajustement du contenu de l’APO afin d’y insérer des préoccupations majeures des FN, non considérées originellement. Ce qui a abouti aux Accords complémentaires, notamment Ouaga II du 28 novembre 2007 portant sur l'identification et l'inscription sur la liste électorale; Ouaga III du 28 novembre 2007 portant sur l’accélération de la mise en œuvre de l’APO; Ouaga IV du 22 décembre 2008 portant sur 1) l’identification et le processus électoral; 2) les Forces de défense et de sécurité (nouvelle armée); 3) la restauration de l’autorité de l’État et le redéploiement de l’Administration sur l’ensemble du Territoire national; 4) le financement du processus de sortie de crise.
Au lendemain de l’élection présidentielle du 28 novembre dernier, les FN doivent faire le constat que plusieurs problèmes sociopolitiques qui ont justifié leur tentative de coup d’État du 19 septembre 2002 et qui ont été reconnus comme étant légitimes depuis les Accords de Marcoussis, ne sont pas encore résolus, en l’occurrence l’abrogation de l’art.35 de la Constitution, les conflits relatifs au titre foncier dans l’Ouest et le Centre-ouest, la naturalisation des Ivoiriens sans papiers par l’application pure et simple du code de nationalité du pays, le fonctionnement démocratique des Institutions étatiques (exécutives, parlementaires et judiciaires).
Ce constat indique que la lutte générale des FN n’est pas achevée et s’inscrit désormais dans le programme politique du nouveau Président de la République, en l’occurrence le Dr Alassane D. Ouattara. En somme, les FN doivent faire le premier pas visant à chasser Gbagbo du pouvoir usurpé. Quant à la stratégie pour y arriver, c’est à elles de la concevoir. Toute suggestion de ma part serait inappropriée et vendre la mèche à l’adversaire. Devant les hésitations des Communautés extérieures alliées, l’adage «Charité bien ordonnée commence par soi-même» prend ici tout son sens. Allez les FN, toute la Côte d’Ivoire démocratique est avec vous.
Dr Antoine Ahua Jr
Québec, Canada
mailto:antoineahua@hotmail.com
antoineahua@hotmail.com