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Politique Publié le vendredi 7 janvier 2011 | L’expression

Lettre ouverte à Philippe Mangou : "Mon général, vous avez failli…"

© L’expression Par Prisca
PDCI-RDA: Bédié et ses jeunes se sont parlés
Samedi 31 juillet 2010. Abidjan, Maison du PDCI-RDA à Cocody. Le Président Henri Konan Bédié rencontre la jeunesse du parti, conduite par son président Kouadio Konan Bertin (KKB). Photo: le ministre Kobenan Kouassi Adjoumani
Mon Général ! Je sais que vous êtes un homme très occupé en ce moment où la coexistence pacifique entre les citoyens de ce pays est à un fil de la rupture, du chaos et du repli identitaire. Nous avons encore en mémoire votre détermination à vouloir casser, coûte que coûte, hier les opposants, aujourd’hui devenus les membres de la majorité ivoirienne, à qui le peuple souverain a démocratiquement conféré les rênes du pouvoir pour les prochaines années. Aussi et sachant tout le conditionnement qui est le vôtre, je voudrais vous prier, respectueusement, d’accorder à l’élu du peuple que je suis, quelques minutes de votre temps très précieux.

Mon Général ! Récemment, j’ai appris que vous vous êtes plaint de l’Onuci. Il paraît même que vous avez menacé vos frères d’armes venus des quatre coins du monde pour sauver les citoyens ivoiriens que votre armée martyrise à longueur d’année depuis 2000, avec des foudres de l’enfer pour avoir tiré sur de « pacifiques patriotes aux mains nues » en faisant des morts dans leurs rangs. Comme on dit chez nous, je vous adresse un sincère « yako ». N’est-ce pas bien beau de s’attaquer à l’Onuci qui, non seulement, n’a tué personne contrairement à vos affirmations qui reprennent en écho les mensonges de la refondation, mais agissait en légitime défense contre une horde de patriotes opposés à la paix entre Ivoiriens. Un tel zèle de votre part, nous ne l’avons jamais constaté lorsque vos hommes tuent les populations qui n’adorent pas « votre dieu » Gbagbo qui, contre toute attente, a fait de vous en cinq ans seulement, un général TGV. Et pour preuve. Vous êtes passé entre 2005 et 2010, colonel, colonel-major, général de brigade, général de division et général de corps d’Armée. Ce dernier grade, faut-il le souligner, n’existait pas dans l’armée ivoirienne.

Nous savons tous que vos menaces contre les forces de l’Onuci relèvent d’une fanfaronnade destinée à épater vos protégés de la minorité présidentielle, vomis comme ils le sont, par toute la communauté internationale, puisque vous ne disposez pas, malgré votre surarmement réalisé par des voies clandestines, de moyens suffisants et puissants pour affronter les militaires mandatés par le concert des nations pour soutenir les populations ivoiriennes que vous et vos fantassins piétinez sans pitié.

Nous savons aussi que vous pouvez hausser le ton et indexer qui vous voudrez sur les écrans de la télévision Lmp, dans les studios de laquelle on vous déploie le tapis rouge afin de vous aider à déclarer le faux sans contradiction aucune. Vous pouvez même présenter de faux morts et de faux blessés aux pauvres Ivoiriens auxquels les battus de l’élection présidentielle tentent de bourrer le crâne en déformant la vérité pour les besoins de la cause. Mais tout de même mon Général !

Oui, mon Général, je vous soupçonne de jouir de la situation intenable du pays aux côtés de votre bienfaiteur, l’homme qui n’a cure de 1.000 morts à gauche et 1.000 morts à droite, pourvu qu’il exerce le pouvoir. Depuis belle lurette, les Ivoiriens ont compris de quel côté et pour quelle cause bat votre cœur. Vous n’êtes plus le chef de nos armées, mais bel et bien l’instrument du pouvoir frontiste qui a fait de vous ce que vous êtes. Vous êtes le protecteur des bandits de la République, des patriotes que vous défendez avec votre dernière énergie. Puisqu’on vous suppose un honnête homme, dites-nous le nom du candidat le plus voté dans les casernes. N’est-ce pas Alassane Ouattara avec plus de 63% ? Ne vous paraît-il pas étrange, voire inadmissible, que le choix de vos hommes ne soit pas respecté ? De quel côté, d’après vous, se trouve donc la légitimité ?

Vous parlez, sans vergogne, de « patriotes aux mains nues. ». Allons donc ! Qui sont ces patriotes alors que le pays est censé être défendu par une armée pour laquelle il consent d’énormes sacrifices financiers et humains ? Appelez-vous patriotes ces désœuvrés que Charles Blé Goudé jette à la rue pendant qu’il se terre comme un lapin quelque part ? Appelez-vous patriotes ces miliciens lâches déguisés en soldats encagoulés pour commettre en toute impunité des crimes contre l’humanité ? Ou, sont-ce les mercenaires libériens et angolais payés, à prix d’or, par un prétendu Etat souverain pour assassiner ses propres populations ? Où êtes-vous quand ces divers groupes d’assassins s’en prennent aux militants du Rhdp lorsqu’ils manifestent pacifiquement avec les mains nues ? Est-ce un crime d’appartenir au Rhdp que le peuple souverain vient de primé avec 54,10% des suffrages ?

Non mon Général, vous n’êtes plus qualifié à menacer quiconque. Vous avez failli à votre devoir de neutralité, de défendre les hommes et leurs biens, de protéger les institutions légales et les hommes qui les incarnent. Du reste, êtes-vous, malgré vos apparitions gênantes, réellement le vrai Cema de notre pays ? Si vous l’êtes, dites-nous pour quelles raisons ce sont quelques généraux tribalistes qui dictent leur volonté aux troupes, prennent la liberté d’attaquer le Golf Hôtel où, par la force des choses, s’est retiré le Président élu le 28 novembre 2010 ainsi que les membres de son gouvernement ? Quel est le sentiment qui vous anime de voir établi un blocus autour du bâtiment qui abrite les autorités légales, vous qui parlez de Constitution, de légalité et de légitimité ? Dormez-vous tranquille la nuit, sans entendre les cris et supplications des citoyens enlevés, atrocement mutilés et froidement exécutés chaque jour, en raison de leur appartenance politique, tribale ou ethnique, par des assassins issus des rangs des hommes que vous êtes supposé diriger ? En avez-vous la conscience tranquille ?

Dites-moi mon Général. Quelle fierté éprouvez-vous de savoir que votre ancien chef, le président Henri Konan Bédié, au nom duquel on vous a humilié après le coup d’Etat de 1999, est enfermé dans un hôtel avec son épouse ? Quelle joie tirez-vous du fait que le Président voté majoritairement par le peuple ivoirien, Son Excellence Alassane Ouattara, le seul et vrai détenteur de la souveraineté, est privé de liberté ainsi que son épouse et son gouvernement, avec des canons assassins pointés sur eux ?

Est-ce cela que vous avez appris dans les Hautes écoles militaires que vous avez fréquentées ? Etes-vous heureux de protéger des auteurs de crimes contre l’humanité, de voir une partie de la population souffrir et continuer de pleurer depuis que Gbagbo Laurent est au pouvoir ? Le chrétien que vous êtes, n’éprouve-t-il pas quelque part, un sentiment de révolte ou tout simplement de compassion humaine ? Etes-vous d’accord avec l’ex chef de l’Etat qui a eu le culot de dire ceci aux religieux venus lui demander de céder le pouvoir à son légitime propriétaire: « Laissez-moi faire mon travail et faites le vôtre. Quand nous en aurons fini de nous entretuer, vous viendrez confesser les survivants ».

Mon Général ! L’on dit souvent que vous êtes modéré. Pourquoi, diable, faites-vous tout ce tapage pour figurer sur la liste des méchants, des hyènes puantes de la refondation ? Oubliez-vous que votre devoir est de servir la République en toute neutralité et non les hommes ? Sachez que le rôle de toutes les armées du monde est de défendre les populations et leurs biens avant même les institutions qui sont l’émanation du peuple. Car, aucune Constitution n’est au-dessus du peuple. N’est-il pas facile d’être courageux lorsqu’on est couvert par l’impunité totale ? Cette impunité, vous devez le savoir aussi, n’est que temporaire, parce que bientôt la vérité éclatera et, que ceux qui doivent payer, payeront.

Mon Général, telles sont les interrogations, les doutes et les suspicions légitimes qui m’animent et que je voudrais vous faire partager fraternellement. Je ne suis pas votre maître de conscience, mais réfléchir ensemble ne nuit à personne, surtout lorsqu’il s’agit de la vie des hommes. Que le Tout-Puissant vous sorte des griffes dans lesquelles vous vous êtes enfermé pour vous mettre, enfin, au service du peuple souverain de Côte d’Ivoire. Faites-le pour l’amour de Dieu, je vous en conjure !

Bonne réception et que Dieu vous inspire pour le reste de votre carrière.


Le ministre Kobenan Kouassi Adjoumani
Député à l’Assemblée nationale
Délégué départemental Pdci-Rda, Tanda I
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