La scène est là, devant nous, dans toute sa laideur. A présent, il est loisible à tout le monde de comprendre l’état d’âme et les pulsions du chef de file de la refondation et de ses courtisans. En prélude à l’arrivée du panel des Chefs d’Etat africains qui doivent donner des « décisions contraignantes » à Laurent Gbagbo et à ses sbires, une fronde anti-Compaoré est mise en place. Nuitamment, on a mis des miliciens et des patriotards à l’aéroport et dans certaines rues d’Abidjan, pour huer et conspuer le Président du Faso. Pour la simple raison que ce dernier, à l’instar de tout le continent et du monde, a dit publiquement que Laurent Gbagbo n’a pas gagné la présidentielle et qu’il doit se soumettre au verdict des urnes, au lieu de tenter une vaine confiscation du pouvoir d’Etat. Il n’en fallait pas plus pour que la refondation nous montre sa face hideuse, celle qui lui colle à la peau, comme une tare congénitale. C’est assurément un lieu commun que le devoir de reconnaissance n’est pas une chose bien partagée chez les frontistes. Qui pouvait croire que Laurent Gbagbo en arriverait à se braquer contre son bienfaiteur, à le livrer ainsi à la vindicte de ses jeunes instrumentalisés et manipulés grossièrement appelés « patriotes » ? Ah l’ingratitude, quand tu nous tiens, aux collets ! Avant-hier, en fuite devant le Président Félix Houphouët Boigny, Gbagbo s’est exilé, d’abord au Burkina Faso, ensuite en France. Dans le Pays des Hommes Intègres, Blaise Compaoré et les siens lui ont offert le gîte, le couvert et l’or de la République. A cette époque, Compaoré était porté aux nues, semblable à un dieu vivant, aux yeux du camarade socialiste. De 1983 à 2000, soit pendant 17 ans, Compaoré a été le pourvoyeur en fonds et l’homme qui accordait la pitance au « Seplou ». Hier, on est allé, genoux à terre, lui demander de nous aider à mettre un terme à notre palabre nationale. Le Président Compaoré n’a pas hésité. Avec élégance et flexibilité, il a favorisé l’Accord politique de Ouaga, dont il est le médiateur. En ces temps là, Gbagbo était devenu pratiquement le garde du corps et le panégyriste attitré du leader du Faso. Aujourd’hui, on le voue aux gémonies, parce qu’il a simplement dit la vérité sur l’issue de l’élection présidentielle, en affirmant haut et fort que Ouattara en est le vainqueur. C’est tout le sens de la levée de boucliers qu’il vit. Misère et pauvreté, chers refondateurs !
Bakary Nimaga
Bakary Nimaga