J`étais à Accra, le président Ouattara m`a téléphoné et a souhaité que je regagne la Côte d`Ivoire. Nous avons discuté d`un certain nombre de choses. Je suis arrivé hier (mardi, Ndlr) et ce matin je sors d`une audience avec lui. Nous avons parlé de plusieurs sujets. En particulier je lui ai fait part des préoccupations des députés qui aimeraient bien qu`en début de mandat, nous puissions nous inscrire dans la légalité constitutionnelle. Donc que les ordonnances qui ont été prises puissent faire l`objet d`une autorisation de l`Assemblée nationale, d`une régularisation. Le président a donné son accord. Les députés ont suggéré aussi que l`on puisse entrer dans l`application de la constitution, le respect de l`Etat de droit, le respect des libertés individuelles. Le président de la République m`a dit qu`il prendrait toutes les dispositions pour qu`il en soit ainsi.
Venant des députés, je lui ai signalé des problèmes de sécurité. L`assemblée nationale ayant été pillée. Mon domicile à Abidjan et à Azaguié, ma famille menacée et pillée. C`est aussi vrai pour l`ensemble des députés. Nous avons trouvé à l`Assemblée nationale un cadavre en putréfaction, tous les bureaux cassés, pillés. Les députés se sont demandé dans quelle mesure ils pouvaient avoir la sécurité. Puisqu`ils se sont déjà inquiétés de la situation auprès des ministres concernés. Rien n`avait encore été fait. Le président a donc donné des instructions pour qu`assez rapidement l`Assemblée nationale soit sécurisée. Parce qu`il y a des pillages chaque jour. Il y a des gens qui passent pour ramasser ce qui est resté.
Nous avons parlé de l`Etat de droit pour dire qu`en début de mandat, conformément au vœu de l`Union africaine, que le président de la République puisse avoir une prestation de serment régulière. Il a donné son accord et je crois savoir, si je ne trahis un secret, que le président du Conseil constitutionnel, Yao-N`dré, est en route pour Abidjan. Où il arrive probablement demain d`Accra. Et très rapidement, le président m`a assuré qu`une cérémonie serait organisée en ce sens pour rester conforme au vœu de l`Union africaine.
Je lui ai dit par ailleurs, toujours concernant la sécurité, que de nombreux militants du Fpi et de Lmp, ceux qu`on appelle pro-Gbagbo étaient très inquiets pour leur sécurité dans les quartiers. Qu`ils étaient dénoncés, indexés comme si être militant de ce parti ou de ce mouvement était une tare. Ils se cachent, ils se sentent brimés. Nombreux sont également ceux qui ont fui et qui se sont réfugiés au Ghana, au Togo ou au Bénin. Il serait bien d`aller vers une détente pour que ces militants se sentent bien sécurisés. Et de surcroit, je lui ai signalé plusieurs appels reçus d`amis et de proches de populations bété qui me disent, " Nous sommes poursuivis, tués dans des quartiers simplement parce que nous sommes Bété. Et l`ethnie ne peut pas être un défaut. Et si l`on peut reprocher des choses au Fpi, ce n`est pas aux Bété qu`il faut le faire payer. Si l`on peut reprocher des choses à Gbagbo Laurent, ce n`est pas aux Bété qu`il faut le faire payer. Si nous rentrons dans ce jeu, jamais nous n`aurons de réconciliation et nous n`aurons de paix. Le président de la République a pris le téléphone, il a appelé les ministres concernés. Il a demandé que des enquêtes soient faites rapidement afin que cette situation s`estompe. Parce qu`il n`a pas envie de gouverner au nom d`une ethnie.
J`en ai profité aussi pour l`informer que l`Assemblée nationale faisait sa séance solennelle d`ouverture le mercredi 27 avril 2011, la première session de l`année.
Je lui ai dit que la méfiance, la tension, l`absence d`Etat, les fonctionnaires qui ne vont pas au travail, les policiers, les gendarmes apeurés, les militaires effrayés. Qu`il serait peut-être bien qu`il parle aux Ivoiriens encore une fois, mais pas dans le cadre d`une interview classique comme nous l`avons déjà vu. Mais qu`il saisisse la tribune de l`Assemblée nationale pour dire aux Ivoiriens où il va, comment il veut y aller, avec qui, dans quelles conditions de sécurité, de détente. Et qu`à ce propos, les députés m`avaient demandé de lui adresser une invitation pour le 27 pour qu`il vienne s`adresser aux Ivoiriens. Le président m`a dit qu`il donnait son accord et qu`il se préparait pour le mercredi 27 pour s`adresser à la nation. Je pense qu`en allant dans ce sens, et si les uns et les autres acceptaient d`arrêter de se bagarrer, si ceux qui ont des armes arrêtaient de menacer ceux qui n`en ont pas, si ceux qui sont RHdp arrêtaient de faire peur à ceux qui ne sont pas Rhdp, si les représentants locaux du Pci ou du Rdr arrêtaient de faire peur aux représentants locaux du Fpi, peut-être que nous aurions une chance extraordinaire de reconstruire ce pays après ce chaos. Mais, si jamais certains pensent que l`arrivée de Ouattara au pouvoir, c`est le pouvoir aux Dioula ou aux Nordistes alors, ils peuvent faire ce qu`ils veulent, alors c`est le chaos promis. Jamais il n`y aura de réconciliation, jamais il n`y aura de paix, jamais il n`y aura d`Etat, jamais il n`y aura de nation. Et là où nous sommes, nous sommes encore loin du fond du puits. C`est vrai que les temps sont durs, mais les Ivoiriens pensent que nous sommes tombés, que c`est grave. Mais il y a pire que la situation dans laquelle nous sommes. Il faut regarder ce qui est arrivé à Haïti, il faut regarder ce qui est arrivé en Somalie. On n`a pas encore vu le pire, faisons donc tout pour l`éviter ".
Propos recueilli par
Akwaba Saint Clair
Venant des députés, je lui ai signalé des problèmes de sécurité. L`assemblée nationale ayant été pillée. Mon domicile à Abidjan et à Azaguié, ma famille menacée et pillée. C`est aussi vrai pour l`ensemble des députés. Nous avons trouvé à l`Assemblée nationale un cadavre en putréfaction, tous les bureaux cassés, pillés. Les députés se sont demandé dans quelle mesure ils pouvaient avoir la sécurité. Puisqu`ils se sont déjà inquiétés de la situation auprès des ministres concernés. Rien n`avait encore été fait. Le président a donc donné des instructions pour qu`assez rapidement l`Assemblée nationale soit sécurisée. Parce qu`il y a des pillages chaque jour. Il y a des gens qui passent pour ramasser ce qui est resté.
Nous avons parlé de l`Etat de droit pour dire qu`en début de mandat, conformément au vœu de l`Union africaine, que le président de la République puisse avoir une prestation de serment régulière. Il a donné son accord et je crois savoir, si je ne trahis un secret, que le président du Conseil constitutionnel, Yao-N`dré, est en route pour Abidjan. Où il arrive probablement demain d`Accra. Et très rapidement, le président m`a assuré qu`une cérémonie serait organisée en ce sens pour rester conforme au vœu de l`Union africaine.
Je lui ai dit par ailleurs, toujours concernant la sécurité, que de nombreux militants du Fpi et de Lmp, ceux qu`on appelle pro-Gbagbo étaient très inquiets pour leur sécurité dans les quartiers. Qu`ils étaient dénoncés, indexés comme si être militant de ce parti ou de ce mouvement était une tare. Ils se cachent, ils se sentent brimés. Nombreux sont également ceux qui ont fui et qui se sont réfugiés au Ghana, au Togo ou au Bénin. Il serait bien d`aller vers une détente pour que ces militants se sentent bien sécurisés. Et de surcroit, je lui ai signalé plusieurs appels reçus d`amis et de proches de populations bété qui me disent, " Nous sommes poursuivis, tués dans des quartiers simplement parce que nous sommes Bété. Et l`ethnie ne peut pas être un défaut. Et si l`on peut reprocher des choses au Fpi, ce n`est pas aux Bété qu`il faut le faire payer. Si l`on peut reprocher des choses à Gbagbo Laurent, ce n`est pas aux Bété qu`il faut le faire payer. Si nous rentrons dans ce jeu, jamais nous n`aurons de réconciliation et nous n`aurons de paix. Le président de la République a pris le téléphone, il a appelé les ministres concernés. Il a demandé que des enquêtes soient faites rapidement afin que cette situation s`estompe. Parce qu`il n`a pas envie de gouverner au nom d`une ethnie.
J`en ai profité aussi pour l`informer que l`Assemblée nationale faisait sa séance solennelle d`ouverture le mercredi 27 avril 2011, la première session de l`année.
Je lui ai dit que la méfiance, la tension, l`absence d`Etat, les fonctionnaires qui ne vont pas au travail, les policiers, les gendarmes apeurés, les militaires effrayés. Qu`il serait peut-être bien qu`il parle aux Ivoiriens encore une fois, mais pas dans le cadre d`une interview classique comme nous l`avons déjà vu. Mais qu`il saisisse la tribune de l`Assemblée nationale pour dire aux Ivoiriens où il va, comment il veut y aller, avec qui, dans quelles conditions de sécurité, de détente. Et qu`à ce propos, les députés m`avaient demandé de lui adresser une invitation pour le 27 pour qu`il vienne s`adresser aux Ivoiriens. Le président m`a dit qu`il donnait son accord et qu`il se préparait pour le mercredi 27 pour s`adresser à la nation. Je pense qu`en allant dans ce sens, et si les uns et les autres acceptaient d`arrêter de se bagarrer, si ceux qui ont des armes arrêtaient de menacer ceux qui n`en ont pas, si ceux qui sont RHdp arrêtaient de faire peur à ceux qui ne sont pas Rhdp, si les représentants locaux du Pci ou du Rdr arrêtaient de faire peur aux représentants locaux du Fpi, peut-être que nous aurions une chance extraordinaire de reconstruire ce pays après ce chaos. Mais, si jamais certains pensent que l`arrivée de Ouattara au pouvoir, c`est le pouvoir aux Dioula ou aux Nordistes alors, ils peuvent faire ce qu`ils veulent, alors c`est le chaos promis. Jamais il n`y aura de réconciliation, jamais il n`y aura de paix, jamais il n`y aura d`Etat, jamais il n`y aura de nation. Et là où nous sommes, nous sommes encore loin du fond du puits. C`est vrai que les temps sont durs, mais les Ivoiriens pensent que nous sommes tombés, que c`est grave. Mais il y a pire que la situation dans laquelle nous sommes. Il faut regarder ce qui est arrivé à Haïti, il faut regarder ce qui est arrivé en Somalie. On n`a pas encore vu le pire, faisons donc tout pour l`éviter ".
Propos recueilli par
Akwaba Saint Clair
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