Le samedi 21 mai 2011. Pendant qu`à Yamoussoukro, qui abritait la cérémonie d`investiture du président Alassane Ouattara, beaucoup poussaient des cris de joie et de victoire relativement à cet événement, à Larabia, village situé à 17 kilomètres de Bonoua (axe Bonoua-Aboisso), on se tordait de douleur, on coulait des larmes de sang. La raison, c`est ce jour-là qu`un commando lourdement armé a choisi d`y semer la désolation, la tristesse et la mort. Habitations saccagées et pillées, des blessés et un mort sont les fruits de leur passage dans ce village.
A Larabia, village de près de 3500 âmes, on vit essentiellement d`agriculture. Il est environ 10 heures, ce samedi 21 mai 2011. Il fait déjà beau temps. Les hommes et les femmes de ce village, après une nuit tranquille, s`affairent et vaquent chacun à ses occupations quotidiennes, quand ils sont soudainement surpris par une flopée d`hommes lourdement armée. Les témoins, réfugiés à Bonoua, que nous avons interrogés dans cette localité le mardi dernier 24 mai, n`ont qu`une seule et même version à la bouche. En effet, ce samedi-là, à Larabia, lorsqu`ils débarquent de véhicules de type 4X4, ces hommes en treillis entonnent l`hymne des armes et fument le calumet de la violence. Objectif prioritaire, le commando fonce dans une cour et met la main sur Kouassi Aholié, planteur; K. Benoît, instituteur à la retraite et O. Jonas, planteur. `` Montrez-nous les armes que la ministre Christine Adjobi vous a distribuées. Si vous ne le faites pas on vous tue tous ici !``, leur intime le commandant des hommes armés. L`instituteur à la retraite, K. Benoît n`a pas le temps de leur expliquer qu`il ne détient aucune arme et qu`il n`a aucun rapport avec la ministre Adjobi, lorsqu`il reçoit à la tête une pluie de coups de crosse. Aux autres pris également en otage, la question leur est renvoyée. `` Nous sommes de pauvres planteurs, nous n`avons pas d`armes`` répondent-ils, apeurés.
L`argent ou la mort
Copieusement battus sur le champ, les trois otages reçoivent chacun une décharge de chevrotine aux pieds. Le sang gicle. Abondamment. Ils supplient de toutes leurs forces les `` militaires`` et jurent sur tous les dieux qu`ils ne détiennent aucune arme. Furieux , le commandant en chef de `` l`escadron`` ordonne brutalement à un de ses caporaux d`abattre immédiatement un des villageois. Le sort désigne Kouassi Aholié, environ 60 ans.
Froidement, il est criblé de balles. Puis, ordre est donné aux deux autres villageois : K. Benoît et O. Jonas de récupérer la dépouille et de la balancer dans la broussaille. Grièvement blessés aux pieds, il s`exécutent. Après quoi, ils sont embarqués dans un des véhicules du commando. Direction, la palmeraie située à la sortie du village. Là, Benoît et Jonas sont torturés. Leur supplice dure environ une heure. `` Si vous voulez rester en vie, payez chacun 1,5 million de Fcfa `` leur exige le chef des hommes armés. `` Je n`avais que 10.000 F Cfa. Ils ont insisté pour qu`on leur donne à la rigueur 500.000 F Cfa, sinon on devait mourir. Nous leur avons supplié ``, témoigne Benoît, les larmes aux yeux. `` Finalement, j`ai dû leur verser près de 200.000 F CFA pour avoir la vie sauve``, raconte Jonas, entre deux soupirs, lorsque nous les avons rencontrés à Aboisso où ils ont trouvé refuge.
Au bord de la révolte
Pendant que ces quinquagénaires sont soumis aux pires souffrances par certains éléments du commando, d`autres sillonnent le village, passent au peigne fin toutes les habitations. Celles-ci sont vidées de leurs biens. Dans le sauve-qui-peut généralisé, des villageois, les moins chanceux, sont rattrapés, molestés, battus, dépossédés de leur argent. `` Il s`en sont pris uniquement aux autochtones Abouré. Ils n`ont pas touché à seul cheveux des allogènes qui eux applaudissaient quand ces hommes armés torturaient nos parents. Nous avons reconnu le fils d`un allogène du village. Il était aux côtés de ce commando. Il était habillé en tenu militaire et leur servait d`indicateur ``, confie Brou , un natif de Bonoua. Il fait par ailleurs savoir que `` depuis un bon moment, des hommes armés parcourent nos villages et commettent toutes sortes d`exactions. Nos campements se vident. Nos parents ont peur et la situation devient de plus en plus pénible``. A Bonoua, on laisse entendre qu` il ne faudrait pas s`étonner si un jour une révolte venait à éclater au pays Abouré.
Quand l`après-midi de ce mardi 24 mai 2011, nous avons découvert Larabia, quasi désert, le calme qui l`enveloppait était trompeur. Et le parfum qui s`y dégageait était bien celui de la mort.
Alain BOUABRE
Envoyé spécial
A Larabia, village de près de 3500 âmes, on vit essentiellement d`agriculture. Il est environ 10 heures, ce samedi 21 mai 2011. Il fait déjà beau temps. Les hommes et les femmes de ce village, après une nuit tranquille, s`affairent et vaquent chacun à ses occupations quotidiennes, quand ils sont soudainement surpris par une flopée d`hommes lourdement armée. Les témoins, réfugiés à Bonoua, que nous avons interrogés dans cette localité le mardi dernier 24 mai, n`ont qu`une seule et même version à la bouche. En effet, ce samedi-là, à Larabia, lorsqu`ils débarquent de véhicules de type 4X4, ces hommes en treillis entonnent l`hymne des armes et fument le calumet de la violence. Objectif prioritaire, le commando fonce dans une cour et met la main sur Kouassi Aholié, planteur; K. Benoît, instituteur à la retraite et O. Jonas, planteur. `` Montrez-nous les armes que la ministre Christine Adjobi vous a distribuées. Si vous ne le faites pas on vous tue tous ici !``, leur intime le commandant des hommes armés. L`instituteur à la retraite, K. Benoît n`a pas le temps de leur expliquer qu`il ne détient aucune arme et qu`il n`a aucun rapport avec la ministre Adjobi, lorsqu`il reçoit à la tête une pluie de coups de crosse. Aux autres pris également en otage, la question leur est renvoyée. `` Nous sommes de pauvres planteurs, nous n`avons pas d`armes`` répondent-ils, apeurés.
L`argent ou la mort
Copieusement battus sur le champ, les trois otages reçoivent chacun une décharge de chevrotine aux pieds. Le sang gicle. Abondamment. Ils supplient de toutes leurs forces les `` militaires`` et jurent sur tous les dieux qu`ils ne détiennent aucune arme. Furieux , le commandant en chef de `` l`escadron`` ordonne brutalement à un de ses caporaux d`abattre immédiatement un des villageois. Le sort désigne Kouassi Aholié, environ 60 ans.
Froidement, il est criblé de balles. Puis, ordre est donné aux deux autres villageois : K. Benoît et O. Jonas de récupérer la dépouille et de la balancer dans la broussaille. Grièvement blessés aux pieds, il s`exécutent. Après quoi, ils sont embarqués dans un des véhicules du commando. Direction, la palmeraie située à la sortie du village. Là, Benoît et Jonas sont torturés. Leur supplice dure environ une heure. `` Si vous voulez rester en vie, payez chacun 1,5 million de Fcfa `` leur exige le chef des hommes armés. `` Je n`avais que 10.000 F Cfa. Ils ont insisté pour qu`on leur donne à la rigueur 500.000 F Cfa, sinon on devait mourir. Nous leur avons supplié ``, témoigne Benoît, les larmes aux yeux. `` Finalement, j`ai dû leur verser près de 200.000 F CFA pour avoir la vie sauve``, raconte Jonas, entre deux soupirs, lorsque nous les avons rencontrés à Aboisso où ils ont trouvé refuge.
Au bord de la révolte
Pendant que ces quinquagénaires sont soumis aux pires souffrances par certains éléments du commando, d`autres sillonnent le village, passent au peigne fin toutes les habitations. Celles-ci sont vidées de leurs biens. Dans le sauve-qui-peut généralisé, des villageois, les moins chanceux, sont rattrapés, molestés, battus, dépossédés de leur argent. `` Il s`en sont pris uniquement aux autochtones Abouré. Ils n`ont pas touché à seul cheveux des allogènes qui eux applaudissaient quand ces hommes armés torturaient nos parents. Nous avons reconnu le fils d`un allogène du village. Il était aux côtés de ce commando. Il était habillé en tenu militaire et leur servait d`indicateur ``, confie Brou , un natif de Bonoua. Il fait par ailleurs savoir que `` depuis un bon moment, des hommes armés parcourent nos villages et commettent toutes sortes d`exactions. Nos campements se vident. Nos parents ont peur et la situation devient de plus en plus pénible``. A Bonoua, on laisse entendre qu` il ne faudrait pas s`étonner si un jour une révolte venait à éclater au pays Abouré.
Quand l`après-midi de ce mardi 24 mai 2011, nous avons découvert Larabia, quasi désert, le calme qui l`enveloppait était trompeur. Et le parfum qui s`y dégageait était bien celui de la mort.
Alain BOUABRE
Envoyé spécial