Le président de la coordination du Rassemblement des houphouetistes pour
la démocratie et la paix (RHDP) de Gagnoa, M. N’Guessan Zekré Alexis, était
hier au quartier château de cette commune pour y animer un meeting, à
l’invitation des femmes dudit quartier sorties nombreuses pour l’écouter.
Accompagné d’une forte délégation de cette coalition de partis politiques, M.
Zékré a au cours de son intervention demandé aux femmes de ce département
de marcher dans les sillons de la paix tracés par le chef de l’Etat. « Les élections
présidentielles sont terminés et l’heure est maintenant venue pour vous
d’aller vers tous ceux qui vous ont maltraités pour vous réconcilier avec eux,
car c’est tous ensemble que nous devons reconstruire cette Côte d’Ivoire qui
a été fortement endommagé par les refondateurs», a dit le président de la
coordination du RHDP de Gagnoa, par ailleurs secrétaire départemental du RDR
de cette ville à l’endroit des femmes du quartier château. Avant de prendre
l’engagement de tout mettre en œuvre pour que très rapidement les moyens
soient réunis pour permettre à ces braves femmes de se prendre en charge à
travers la création de petits projets. «Le Dr ADO ne vous oubliera jamais, parce
qu’il sait que vous avez trop souffert pour son élection à la tète de cette nation.
(…) nous allons bientôt penser à vous», a- promis Mr Zekré, qui a terminé sa
rencontre avec les femmes par une visite à la famille de Fofana Amara, un
militant du PDCI qui est décédé récemment des suite d’une longue maladie.
Kouamé Samuel à Gagnoa
Adama Dahico (ex-candidat à la présidentielle 2010)
“Je demande pardon aux Ivoiriens”
Ex-candidat à l’élection présidentielle, Adama Dahico traverse en ce moment
des moments difficiles. Pris en grippe par une partie de l’opinion, pour avoir
tenu des propos durs durant la campagne électorale à l’endroit du candidat
Ouattara, l’humoriste fait son mea culpa. Aussi souhaite t-il tourner cette page
pour apporter sa pierre à l’édification d’une Côte d’Ivoire réconciliée.
Le Patriote: Après avoir appelé à voter Laurent Gbagbo, vous vous êtes rendu
à l’investiture du Président Ouattara. Pourquoi?
Adama Dahico: Pour moi, c’était un devoir citoyen. Le président de la
République a tendu la perche à tous les fils et filles de la Nation. Il voulait
voir la Côte d’Ivoire rassemblée. J’ai eu la chance d’être à une élection où le
président Ouattara a été élu. Je suis donc entré dans l’histoire avec lui. Cela
dit, j’ai été à Yamoussoukro pour faire comprendre à l’opinion nationale et
internationale que nous sommes tous des enfants de la Côte d’Ivoire. Nous
nous reconnaissons dans le message de paix et de réconciliation qu’il a adressé
aux Ivoiriens. Et c’est à travers des actes que l’on doit savoir si on est disposé à
aller vers son prochain. C’est ce que j’ai fait. Je me suis également battu pour
aller le saluer pendant le déjeuner.
L.P: Justement comment a t-il réagi quand il vous a vu?
AD: Il a tenu ma main, durant tout son speech. Il a dit: «Adama, je suis content
de te voir. Quand tout sera calme, je te recevrai». Cela m’a touché et c’était
une manière pour moi de ressentir que le père n’a pas rejeté son fils. Je suis à
la disposition de la Côte d’Ivoire dont il a la charge de la destinée. Je suis allé
confirmer que je veux jouer ma partition dans le processus de réconciliation.
L.P: A Yamoussoukro, vous avez été également pris à partie par le public du
spectacle organisé en marge de l’investiture. Avez-vous ressenti cela comme
un choc?
AD: En tant qu’être humain, je partage parfaitement leurs réactions. Ils ne sont
pas hypocrites. Bien plus, ils manifestent ce qu’ils ressentent. Le public est
notre baromètre, il nous juge. Quand vous posez un acte, il est normal que le
public vous juge pour que vous puissiez corriger vos erreurs. Effectivement,
quand j’allais à la Fondation (Félix Houphouët-Boigny), il y avait un accueil
d’un groupe spontané qui scandait Président ! Président ! Et non loin de la
Fondation, un autre groupe manifestait sa colère. C’est normal. J’ai pris mon
temps pour les applaudir, une manière de leur dire que je partage leur colère.
Le soir, quand je suis allé sur le podium, je n’étais pas obligé de le faire, mais en
toute humilité, j’ai pris le micro. J’ai raconté une ou deux histoires et un groupe
de personnes a commencé à scander: «descends, descends !». Ce n’est pas ce
dont la Côte d’Ivoire a besoin. Le Président Ouattara la veut rassemblée. J’ai
profité de l’occasion pour leur dire que je reconnais avoir tenu des propos qui
ont choqué, vexé durant la campagne électorale. J’ai ajouté que je demandais
pardon. Et j’ai entendu des applaudissements. Si nous reconnaissons ce
que nous avons posé comme actes, les gens comprendront que l’erreur est
humaine. Nous allons dans les églises et les mosquées pour demander pardon
à Dieu. Pourquoi ne devrions-nous pas pardonner à nos semblables. J’ai
bien fait d’y être pour me rendre compte des réalités du terrain. Cela dit, ma
participation à cette élection politique devait être une fierté pour la jeunesse.
L.P: Justement, la majorité des Ivoiriens ont cru à une blague. A partir de quel
moment avez-vous sérieusement songé à y aller véritablement?
AD: Quand j’ai appris que les candidats passeraient sur le plateau de la RTI
1ère chaîne pour expliquer en 90 minutes leur projet de société. Je me suis dis
qu’il faut que j’y aille. Car c’était une occasion inouïe pour moi de m’adresser
à toutes les composantes de la société ivoirienne. Pendant les 90 minutes, je
me suis débrouillé. Sinon dès le départ, j’avoue que je voulais être l’arbitre.
Je voulais en clair donner un signal à l’image de Coluche qui a eu 16% dans
les intentions de vote lors d’une élection présidentielle en France. Mais, il
n’a pas déposé ses dossiers de candidature. Je me disais donc que je n’aurais
pas les 20 millions à payer et que mon dossier serait rejeté. Heureusement
ou malheureusement, j’ai pu réunir cette somme. Et le signal fort que notre
candidature a donné, c’est le fait d’avoir été classé 11ème sur 14.
L.P: D’aucuns pensent, il ne faut pas se voiler la face, que votre candidature
a été suscitée par Laurent Gbagbo qui aurait payé vos 20 millions. Et surtout
que vous vous êtes engagé dans cette bataille, pour faire son jeu…
A.D: Mes 20 millions, je ne vous dirai pas qui me les a donnés. Chacun peut
l’interpréter comme il peut. Devant Dieu, et les Ivoiriens le comprennent pour
une fois, Laurent Gbagbo ne m’a pas appelé pour me demander d’être candidat
à cette élection. Je suis allé de mon propre chef déposer mes dossiers. J’ai
frappé à toutes les portes pour réunir les 20 millions de FCFA. Savez-vous par
exemple, je n’ai pu avoir d’autres affiches que celles que la CEI m’a offertes?
D’ailleurs, je n’ai même pas fait de campagne faute de moyens. A Abidjan, je
n’ai même pas été capable d’installer une bâche à un endroit pour faire mon
meeting. Pensez-vous un monsieur comme Laurent Gbagbo, qui avait tous les
moyens de l’Etat puisse m’utiliser pour aller contre quelqu’un et qu’il ne me
donne pas les moyens ? Je me suis ruiné dans cette affaire, croyant que l’Etat
de Côte d’Ivoire apporterait une aide financière aux candidats. Je sais quelles
difficultés j’ai éprouvées pour inscrire mes enfants à l’école. Même pour la
validation de ma candidature, j’ai dû me défendre moi-même.
L.P: On vous reproche aussi d’avoir posé en boubou et chéchia blanc pour
semer la confusion dans l’esprit des électeurs du Président Ouattara et
occasionner des déperditions de voix…
A.D: C’est un faux procès qu’on me fait. Devant Dieu, ce n’était pas dans le
but de nuire à qui que ce soit. J’ai choisi de me mettre en boubou parce que
je savais que tous les autres candidats seraient en costume. J’ai donc fait ce
choix pour simplement me différencier des autres. Maintenant, si des électeurs
m’ont voté en pensant choisir le président Ouattara, ce n’était que pure
coïncidence.
L.P: De retour de Yamoussoukro, vous avez été victime d’une agression. Que
s’est-il passé?
AD: Le lundi qui a suivi l’investiture, j’étais à bord de mon véhicule à Angré avec
mon jeune frère et mes collaborateurs, quand le radiateur de mon véhicule a
pris un coup, sans doute la conséquence du long trajet Abidjan-Yamoussoukro
que nous avions fait. J’ai garé sur le trottoir aux environs du Commissariat
du 22ème Arrondissement d’Angré, le temps qu’un mécanicien vienne me
dépanner. C’est ainsi qu’une voiture 4X4 avec des hommes en armes s’est
arrêtée à notre niveau. Ils ont exigé que je monte dans leur voiture, ce que
j’ai fait car ils étaient très menaçants. Et en partant, l’un d’eux m’a dit: «C’est
fini pour toi aujourd’hui». Ils ont dit qu’ils vont finir avec moi parce qu’ils ne
comprenaient pas, je suis désolé de le dire, qu’un petit Dioula comme moi
aille derrière Gbagbo. Ils m’ont emmené à Biabou. Là-bas, ils ont exigé que
je leur remette 5 millions de FCFA sinon ils allaient m’abattre. Je leur ai dit
que je n’avais pas cet argent. Ils ont dit d’appeler quelqu’un qui devrait leur
apporter cette somme, à défaut ils me tueraient. J’ai répété que je n’étais
pas en mesure de réunir une telle somme d’argent. Ils ont alors pris mes trois
téléphones portables et le peu d’argent que j’avais sur moi. Ils ne m’ont pas
donné de coups mais ils étaient très nerveux et menaçants. Je ne faisais que
leur demander pardon. Dieu a touché leur cœur et ils ont décidé de me laisser
en vie. Mais, ils sont partis avec mon véhicule. Ce n’est pas le plus important.
Certains ont tout perdu dans cette crise, d’autres sont morts. J’ai une pensée
pieuse pour eux et je prie le Tout-Puissant pour qu’il accueille leur âme en son
paradis.
L.P: Avez-vous saisi la hiérarchie des FRCI?
A.D: Dès qu’ils sont partis, j’ai pu avec le téléphone de quelqu’un d’autre,
joindre le commandant Wattao. Il a dépêché des éléments qui sont venus nous
retrouver à Biabou, où ils ont pris les références de ma voiture, après nous
avoir interrogés. J’avoue que j’étais sous le choc. Mais comme je suis un fils de
Côte d’Ivoire, je considère cette agression comme ma part de sacrifice.
Honnêtement, en tant que candidat à l’élection présidentielle, je mérite un
minimum d’assistance sécuritaire, car attenter à ma vie n’est pas bon pour
l’image de la Côte d’Ivoire. Je demande l’assistance de l’Etat pour reprendre
mes activités. Je suis quand même le Président du Dôrômikan, nous aurons
bientôt un congrès. Et dans les textes qui régissent notre parti, il est écrit que
le président du Dôrômikan est l’ami personnel du président de la République.
Je ne le dis pas parce que je veux obtenir quelque chose. Je suis un humoriste.
J’appelais le président Bédié, Henrison. Quand le général Guéï est arrivé au
pouvoir, on l’appelait général Dahico, j’étais toujours en treillis. Ensuite,
Laurent Gbagbo est venu, il était obligé de faire de moi son homologue
président. Aujourd’hui, le président s’attèle à reconstruire le pays et de
garantir la sécurité du pays, moi mon rôle, est de maintenir la bonne humeur
des Ivoiriens dans leur foyer, sur leurs lieux de travail, partout où ils se
trouvent. Je veux donc travailler. J’ai toutes les potentialités pour m’installer
en Europe et gagner bien ma vie en tant qu’humoriste. Mais je crois en la Côte
d’Ivoire et en l’Afrique. Je suis convaincu qu’avec le Président Ouattara qui
prône la compétence et des valeurs, si Adama Dahico est pardonné, accepté il
peut apporter beaucoup.
L.P: N’est-ce pas facile aujourd’hui de demander pardon après s’être engagé
comme vous l’avez fait?
A.D: Contrairement à ce qu’on pourrait penser, demander pardon est un acte
fort. La réconciliation doit se faire d’abord par la reconnaissance de l’acte que
chacun a posé. Parce que si vous ne reconnaissez pas vos erreurs, il sera
difficile pour vous d’accepter le pardon de quelqu’un ou pour quelqu’un
d’accepter votre pardon. Si des gens ont commis des crimes, il faut que ça se
sache. Il faut que la justice fasse son travail et il appartiendra aux autorités de
prendre la pleine mesure de ce qui a été dit et fait. Si des gens doivent être
graciés, c’est aux autorités de décider. Mais il est important quand même que
chacun sache à un moment donné ce qu’il a fait, que ce soit bien ou mal. En ce
qui me concerne, je suis culturel. Et pendant la campagne, il y a eu des jeux de
mots qui ont été très souvent morts et n’ont malheureusement pas eu de bons
échos auprès de la population. Je suis prêt à passer à la tribune pour
reconnaître de vive voix ce que j’ai posé comme actes et demander pardon. Et
quand je serai pardonné, je pourrai en ce moment-là être introduit dans un
groupe comme leader d’opinion et œuvrer pour la réconciliation. Il faut être
humble et animé de l’esprit divin pour aller vers son prochain. Je vous assure
que ce que je vis aujourd’hui, ce n’est pas facile. Je suis d’accord avec eux, mais
la réconciliation doit se faire avec la purification des corps et de l’âme. Si la
réconciliation est politique, ça sera un échec. Il faut qu’elle soit d’abord
culturelle. Dans la culture, il y a tout : la tradition, la coutume, la religion.
L.P: Comment comptez-vous contribuer à cette réconciliation?
A.D: Je suis en train de créer la République afrikaine (avec «K») du Dôrômikan
où je suis le président. Face à des journalistes, je réponds à des questions
d’actualité. Nous sommes en train de travailler également sur mon projet livre.
Pour chaque production, nous ouvrirons une lucarne sur la réconciliation et
le pardon. Partout où nous serons, nous utiliserons notre talent humoristique
pour parler de paix. Je suis même prêt à sillonner les quartiers pour prêcher la
paix et le pardon.
L.P: Après cette expérience, allez-vous redescendre dans l’arène politique?
AD: En 1999, j’ai dit que je serai candidat, et c’est en 2010 que j’ai fait acte de
candidature. Le président Ouattara est venu avec un programme ambitieux.
En cinq ans, ce ne sera pas facile de mettre en exécution tout ce programme. Il
faut le temps à la Côte d’Ivoire de profiter de son expertise et de ses relations.
Je lui donne en plus du mandat qu’il est en train de faire, un autre mandat.
Quand il finira ses 10 ans, Adama se positionnera. Et je suis convaincu qu’il
m’aidera à faire campagne. Cela dit, ça a été une très belle expérience. Même
si je n’ai pas gagné les élections, je suis le vrai gagnant de ce scrutin. Car, je suis
le seul artiste ivoirien à avoir été candidat à une élection présidentielle en Côte
d’Ivoire.
Réalisée par Y. Sangaré
la démocratie et la paix (RHDP) de Gagnoa, M. N’Guessan Zekré Alexis, était
hier au quartier château de cette commune pour y animer un meeting, à
l’invitation des femmes dudit quartier sorties nombreuses pour l’écouter.
Accompagné d’une forte délégation de cette coalition de partis politiques, M.
Zékré a au cours de son intervention demandé aux femmes de ce département
de marcher dans les sillons de la paix tracés par le chef de l’Etat. « Les élections
présidentielles sont terminés et l’heure est maintenant venue pour vous
d’aller vers tous ceux qui vous ont maltraités pour vous réconcilier avec eux,
car c’est tous ensemble que nous devons reconstruire cette Côte d’Ivoire qui
a été fortement endommagé par les refondateurs», a dit le président de la
coordination du RHDP de Gagnoa, par ailleurs secrétaire départemental du RDR
de cette ville à l’endroit des femmes du quartier château. Avant de prendre
l’engagement de tout mettre en œuvre pour que très rapidement les moyens
soient réunis pour permettre à ces braves femmes de se prendre en charge à
travers la création de petits projets. «Le Dr ADO ne vous oubliera jamais, parce
qu’il sait que vous avez trop souffert pour son élection à la tète de cette nation.
(…) nous allons bientôt penser à vous», a- promis Mr Zekré, qui a terminé sa
rencontre avec les femmes par une visite à la famille de Fofana Amara, un
militant du PDCI qui est décédé récemment des suite d’une longue maladie.
Kouamé Samuel à Gagnoa
Adama Dahico (ex-candidat à la présidentielle 2010)
“Je demande pardon aux Ivoiriens”
Ex-candidat à l’élection présidentielle, Adama Dahico traverse en ce moment
des moments difficiles. Pris en grippe par une partie de l’opinion, pour avoir
tenu des propos durs durant la campagne électorale à l’endroit du candidat
Ouattara, l’humoriste fait son mea culpa. Aussi souhaite t-il tourner cette page
pour apporter sa pierre à l’édification d’une Côte d’Ivoire réconciliée.
Le Patriote: Après avoir appelé à voter Laurent Gbagbo, vous vous êtes rendu
à l’investiture du Président Ouattara. Pourquoi?
Adama Dahico: Pour moi, c’était un devoir citoyen. Le président de la
République a tendu la perche à tous les fils et filles de la Nation. Il voulait
voir la Côte d’Ivoire rassemblée. J’ai eu la chance d’être à une élection où le
président Ouattara a été élu. Je suis donc entré dans l’histoire avec lui. Cela
dit, j’ai été à Yamoussoukro pour faire comprendre à l’opinion nationale et
internationale que nous sommes tous des enfants de la Côte d’Ivoire. Nous
nous reconnaissons dans le message de paix et de réconciliation qu’il a adressé
aux Ivoiriens. Et c’est à travers des actes que l’on doit savoir si on est disposé à
aller vers son prochain. C’est ce que j’ai fait. Je me suis également battu pour
aller le saluer pendant le déjeuner.
L.P: Justement comment a t-il réagi quand il vous a vu?
AD: Il a tenu ma main, durant tout son speech. Il a dit: «Adama, je suis content
de te voir. Quand tout sera calme, je te recevrai». Cela m’a touché et c’était
une manière pour moi de ressentir que le père n’a pas rejeté son fils. Je suis à
la disposition de la Côte d’Ivoire dont il a la charge de la destinée. Je suis allé
confirmer que je veux jouer ma partition dans le processus de réconciliation.
L.P: A Yamoussoukro, vous avez été également pris à partie par le public du
spectacle organisé en marge de l’investiture. Avez-vous ressenti cela comme
un choc?
AD: En tant qu’être humain, je partage parfaitement leurs réactions. Ils ne sont
pas hypocrites. Bien plus, ils manifestent ce qu’ils ressentent. Le public est
notre baromètre, il nous juge. Quand vous posez un acte, il est normal que le
public vous juge pour que vous puissiez corriger vos erreurs. Effectivement,
quand j’allais à la Fondation (Félix Houphouët-Boigny), il y avait un accueil
d’un groupe spontané qui scandait Président ! Président ! Et non loin de la
Fondation, un autre groupe manifestait sa colère. C’est normal. J’ai pris mon
temps pour les applaudir, une manière de leur dire que je partage leur colère.
Le soir, quand je suis allé sur le podium, je n’étais pas obligé de le faire, mais en
toute humilité, j’ai pris le micro. J’ai raconté une ou deux histoires et un groupe
de personnes a commencé à scander: «descends, descends !». Ce n’est pas ce
dont la Côte d’Ivoire a besoin. Le Président Ouattara la veut rassemblée. J’ai
profité de l’occasion pour leur dire que je reconnais avoir tenu des propos qui
ont choqué, vexé durant la campagne électorale. J’ai ajouté que je demandais
pardon. Et j’ai entendu des applaudissements. Si nous reconnaissons ce
que nous avons posé comme actes, les gens comprendront que l’erreur est
humaine. Nous allons dans les églises et les mosquées pour demander pardon
à Dieu. Pourquoi ne devrions-nous pas pardonner à nos semblables. J’ai
bien fait d’y être pour me rendre compte des réalités du terrain. Cela dit, ma
participation à cette élection politique devait être une fierté pour la jeunesse.
L.P: Justement, la majorité des Ivoiriens ont cru à une blague. A partir de quel
moment avez-vous sérieusement songé à y aller véritablement?
AD: Quand j’ai appris que les candidats passeraient sur le plateau de la RTI
1ère chaîne pour expliquer en 90 minutes leur projet de société. Je me suis dis
qu’il faut que j’y aille. Car c’était une occasion inouïe pour moi de m’adresser
à toutes les composantes de la société ivoirienne. Pendant les 90 minutes, je
me suis débrouillé. Sinon dès le départ, j’avoue que je voulais être l’arbitre.
Je voulais en clair donner un signal à l’image de Coluche qui a eu 16% dans
les intentions de vote lors d’une élection présidentielle en France. Mais, il
n’a pas déposé ses dossiers de candidature. Je me disais donc que je n’aurais
pas les 20 millions à payer et que mon dossier serait rejeté. Heureusement
ou malheureusement, j’ai pu réunir cette somme. Et le signal fort que notre
candidature a donné, c’est le fait d’avoir été classé 11ème sur 14.
L.P: D’aucuns pensent, il ne faut pas se voiler la face, que votre candidature
a été suscitée par Laurent Gbagbo qui aurait payé vos 20 millions. Et surtout
que vous vous êtes engagé dans cette bataille, pour faire son jeu…
A.D: Mes 20 millions, je ne vous dirai pas qui me les a donnés. Chacun peut
l’interpréter comme il peut. Devant Dieu, et les Ivoiriens le comprennent pour
une fois, Laurent Gbagbo ne m’a pas appelé pour me demander d’être candidat
à cette élection. Je suis allé de mon propre chef déposer mes dossiers. J’ai
frappé à toutes les portes pour réunir les 20 millions de FCFA. Savez-vous par
exemple, je n’ai pu avoir d’autres affiches que celles que la CEI m’a offertes?
D’ailleurs, je n’ai même pas fait de campagne faute de moyens. A Abidjan, je
n’ai même pas été capable d’installer une bâche à un endroit pour faire mon
meeting. Pensez-vous un monsieur comme Laurent Gbagbo, qui avait tous les
moyens de l’Etat puisse m’utiliser pour aller contre quelqu’un et qu’il ne me
donne pas les moyens ? Je me suis ruiné dans cette affaire, croyant que l’Etat
de Côte d’Ivoire apporterait une aide financière aux candidats. Je sais quelles
difficultés j’ai éprouvées pour inscrire mes enfants à l’école. Même pour la
validation de ma candidature, j’ai dû me défendre moi-même.
L.P: On vous reproche aussi d’avoir posé en boubou et chéchia blanc pour
semer la confusion dans l’esprit des électeurs du Président Ouattara et
occasionner des déperditions de voix…
A.D: C’est un faux procès qu’on me fait. Devant Dieu, ce n’était pas dans le
but de nuire à qui que ce soit. J’ai choisi de me mettre en boubou parce que
je savais que tous les autres candidats seraient en costume. J’ai donc fait ce
choix pour simplement me différencier des autres. Maintenant, si des électeurs
m’ont voté en pensant choisir le président Ouattara, ce n’était que pure
coïncidence.
L.P: De retour de Yamoussoukro, vous avez été victime d’une agression. Que
s’est-il passé?
AD: Le lundi qui a suivi l’investiture, j’étais à bord de mon véhicule à Angré avec
mon jeune frère et mes collaborateurs, quand le radiateur de mon véhicule a
pris un coup, sans doute la conséquence du long trajet Abidjan-Yamoussoukro
que nous avions fait. J’ai garé sur le trottoir aux environs du Commissariat
du 22ème Arrondissement d’Angré, le temps qu’un mécanicien vienne me
dépanner. C’est ainsi qu’une voiture 4X4 avec des hommes en armes s’est
arrêtée à notre niveau. Ils ont exigé que je monte dans leur voiture, ce que
j’ai fait car ils étaient très menaçants. Et en partant, l’un d’eux m’a dit: «C’est
fini pour toi aujourd’hui». Ils ont dit qu’ils vont finir avec moi parce qu’ils ne
comprenaient pas, je suis désolé de le dire, qu’un petit Dioula comme moi
aille derrière Gbagbo. Ils m’ont emmené à Biabou. Là-bas, ils ont exigé que
je leur remette 5 millions de FCFA sinon ils allaient m’abattre. Je leur ai dit
que je n’avais pas cet argent. Ils ont dit d’appeler quelqu’un qui devrait leur
apporter cette somme, à défaut ils me tueraient. J’ai répété que je n’étais
pas en mesure de réunir une telle somme d’argent. Ils ont alors pris mes trois
téléphones portables et le peu d’argent que j’avais sur moi. Ils ne m’ont pas
donné de coups mais ils étaient très nerveux et menaçants. Je ne faisais que
leur demander pardon. Dieu a touché leur cœur et ils ont décidé de me laisser
en vie. Mais, ils sont partis avec mon véhicule. Ce n’est pas le plus important.
Certains ont tout perdu dans cette crise, d’autres sont morts. J’ai une pensée
pieuse pour eux et je prie le Tout-Puissant pour qu’il accueille leur âme en son
paradis.
L.P: Avez-vous saisi la hiérarchie des FRCI?
A.D: Dès qu’ils sont partis, j’ai pu avec le téléphone de quelqu’un d’autre,
joindre le commandant Wattao. Il a dépêché des éléments qui sont venus nous
retrouver à Biabou, où ils ont pris les références de ma voiture, après nous
avoir interrogés. J’avoue que j’étais sous le choc. Mais comme je suis un fils de
Côte d’Ivoire, je considère cette agression comme ma part de sacrifice.
Honnêtement, en tant que candidat à l’élection présidentielle, je mérite un
minimum d’assistance sécuritaire, car attenter à ma vie n’est pas bon pour
l’image de la Côte d’Ivoire. Je demande l’assistance de l’Etat pour reprendre
mes activités. Je suis quand même le Président du Dôrômikan, nous aurons
bientôt un congrès. Et dans les textes qui régissent notre parti, il est écrit que
le président du Dôrômikan est l’ami personnel du président de la République.
Je ne le dis pas parce que je veux obtenir quelque chose. Je suis un humoriste.
J’appelais le président Bédié, Henrison. Quand le général Guéï est arrivé au
pouvoir, on l’appelait général Dahico, j’étais toujours en treillis. Ensuite,
Laurent Gbagbo est venu, il était obligé de faire de moi son homologue
président. Aujourd’hui, le président s’attèle à reconstruire le pays et de
garantir la sécurité du pays, moi mon rôle, est de maintenir la bonne humeur
des Ivoiriens dans leur foyer, sur leurs lieux de travail, partout où ils se
trouvent. Je veux donc travailler. J’ai toutes les potentialités pour m’installer
en Europe et gagner bien ma vie en tant qu’humoriste. Mais je crois en la Côte
d’Ivoire et en l’Afrique. Je suis convaincu qu’avec le Président Ouattara qui
prône la compétence et des valeurs, si Adama Dahico est pardonné, accepté il
peut apporter beaucoup.
L.P: N’est-ce pas facile aujourd’hui de demander pardon après s’être engagé
comme vous l’avez fait?
A.D: Contrairement à ce qu’on pourrait penser, demander pardon est un acte
fort. La réconciliation doit se faire d’abord par la reconnaissance de l’acte que
chacun a posé. Parce que si vous ne reconnaissez pas vos erreurs, il sera
difficile pour vous d’accepter le pardon de quelqu’un ou pour quelqu’un
d’accepter votre pardon. Si des gens ont commis des crimes, il faut que ça se
sache. Il faut que la justice fasse son travail et il appartiendra aux autorités de
prendre la pleine mesure de ce qui a été dit et fait. Si des gens doivent être
graciés, c’est aux autorités de décider. Mais il est important quand même que
chacun sache à un moment donné ce qu’il a fait, que ce soit bien ou mal. En ce
qui me concerne, je suis culturel. Et pendant la campagne, il y a eu des jeux de
mots qui ont été très souvent morts et n’ont malheureusement pas eu de bons
échos auprès de la population. Je suis prêt à passer à la tribune pour
reconnaître de vive voix ce que j’ai posé comme actes et demander pardon. Et
quand je serai pardonné, je pourrai en ce moment-là être introduit dans un
groupe comme leader d’opinion et œuvrer pour la réconciliation. Il faut être
humble et animé de l’esprit divin pour aller vers son prochain. Je vous assure
que ce que je vis aujourd’hui, ce n’est pas facile. Je suis d’accord avec eux, mais
la réconciliation doit se faire avec la purification des corps et de l’âme. Si la
réconciliation est politique, ça sera un échec. Il faut qu’elle soit d’abord
culturelle. Dans la culture, il y a tout : la tradition, la coutume, la religion.
L.P: Comment comptez-vous contribuer à cette réconciliation?
A.D: Je suis en train de créer la République afrikaine (avec «K») du Dôrômikan
où je suis le président. Face à des journalistes, je réponds à des questions
d’actualité. Nous sommes en train de travailler également sur mon projet livre.
Pour chaque production, nous ouvrirons une lucarne sur la réconciliation et
le pardon. Partout où nous serons, nous utiliserons notre talent humoristique
pour parler de paix. Je suis même prêt à sillonner les quartiers pour prêcher la
paix et le pardon.
L.P: Après cette expérience, allez-vous redescendre dans l’arène politique?
AD: En 1999, j’ai dit que je serai candidat, et c’est en 2010 que j’ai fait acte de
candidature. Le président Ouattara est venu avec un programme ambitieux.
En cinq ans, ce ne sera pas facile de mettre en exécution tout ce programme. Il
faut le temps à la Côte d’Ivoire de profiter de son expertise et de ses relations.
Je lui donne en plus du mandat qu’il est en train de faire, un autre mandat.
Quand il finira ses 10 ans, Adama se positionnera. Et je suis convaincu qu’il
m’aidera à faire campagne. Cela dit, ça a été une très belle expérience. Même
si je n’ai pas gagné les élections, je suis le vrai gagnant de ce scrutin. Car, je suis
le seul artiste ivoirien à avoir été candidat à une élection présidentielle en Côte
d’Ivoire.
Réalisée par Y. Sangaré