Leader du célèbre groupe zouglou, Traoré Salif alias A’salfo revient sur la dernière édition du Festival des Musiques Urbaines d’Anoumabo (FEMUA), qui s’est tenue du 23 au 26 juin 2011. Il fait la lumière sur les imperfections constatées. Aussi se prononce t-il sur la réconciliation nationale prônée par le chef de l’Etat et surtout explique l’engagement social, aux côtés de la foundation Children of Africa, de Magic System. Entretien.
Le Patriote: Etes-vous surpris par l’ascension fulgurante du FEMUA ?
A’salfo : Nous nous étions donnés cinq années pour asseoir la notoriété de ce festival. Mais, j’avoue qu’avec tout le comité d’organisation, nous sommes vraiment surpris et aussi heureux de l’ascension du FEMUA.
L.P : Qu’est-ce qui fait justement le succès retentissant de ce jeune festival ?
A : Je crois que c’est la constance dans l’organisation et également la spontanéité des artistes qui ont accepté de nous accompagner. Je pense également que les actions sociales qui accompagnent le projet sont un facteur catalyseur du succès du FEMUA.
L.P : Il ne faut quand même pas oublier que la renommée de Magic System est pour beaucoup dans la réussite du FEMUA …
A : Ah si. Il est évident que c’est parce que le projet est de Magic System que des partenaires décident de le soutenir. Car, il y a de la crédibilité. Mais, il faut aussi noter que le succès du FEMUA est dû en partie à l’organisation professionnelle qu’il y a autour de ce festival et à l’importance des artistes programmés.
L.P : A propos de la programmation des artistes, pourquoi JB M’Piana n’est-il pas venu, comme initialement annoncé ?
A : JB M’Piana n’est pas venu par manque de professionnalisme.
L.P : Que s’est-il passé exactement ?
A : On a essayé de le joindre par tous les moyens. C’est quelqu’un qui donnait son accord à midi et marquait son désaccord le lendemain. Il donnait une liste le matin, et voulait la changer le surlendemain. Il donnait des conditions tarifaires et voulait les changer après. Nous sommes restés dans cet imbroglio jusqu’au jour du départ pour Abidjan où j’ai décidé de le sortir de la liste. Cela dit, je suis content qu’on n’ait pas ressenti son absence durant le festival, et surtout que tous ceux qui sont venus aient donné le meilleur d’eux-mêmes de sorte qu’on ne sache pas que JB M’Piana n’est pas venu.
L.P : Avec l’engouement populaire constaté cette année, ne pensez-vous pas que l’espace d’Anoumabo devient exigu pour le FEMUA ?
A : C’est vrai qu’il devient exigu. Mais, c’est malheureusement le plus grand espace que nous avons à Anoumabo.
L.P : Le festival pourrait alors être délocalisé ?
A : Non, je n’aimerais pas délocaliser le FEMUA. Parce que retirer le festival d’Anoumabo, c’est lui enlever pratiquement son symbole. Il y a des événements comme l’Abissa qui se tiennent sur des sites plus étroits que celui du FEMUA mais qui y sont demeurés pendant des années. Je pense que le FEMUA doit être maintenu à Anoumabo. Par contre, on pourrait le décentraliser en créant des scènes éclatées dans certains quartiers d’Abidjan. Cela dit, à Anoumabo, pour gagner plus d’espace, on pourrait réduire les barrières de sécurité et le périmètre accordé à la régie.
L.P : A propos de la sécurité, cette année, des festivaliers ont déploré quelque peu le zèle de certains agents qui visiblement en ont fait plus qu’on le leur demandait…
A : Ils ont agi selon des consignes qui leur ont été données. Je préfère que les agents de sécurité fassent du zèle et avoir un festival sans incident que d’être confronté à des problèmes sécuritaires importants. Des consignes ont été données par le ministre de l’Intérieur lui-même et les différents commandants, que je remercie au passage, pour que le festival se déroule dans des conditions sécuritaires idoines. Vouloir respecter cette rigueur a fait dire à certaines personnes qu’il y a eu du zèle. Non, il n’y a pas eu de zèle. Il y a eu plutôt, une sécurité plus rigoureuse. D’ailleurs, je ne cesserai aujourd’hui de remercier les agents de sécurité. Grâce à leur rigueur, il n’y a pas eu d’incidents.
L.P : Vous avez publiquement sur la scène du FEMUA regretté l’absence des artistes zouglou, à l’exception de Dezy Champion, à vos côtés. Ressentez-vous cela comme un pique dans le dos ?
A : Vous savez, ce n’est pas un festival zouglou. Donc, les artistes zouglou ne sont pas nécessairement obligés d’y être, même si à chaque édition, j’ai essayé de programmer un artiste zouglou parce que le FEMUA est avant tout un festival de musiques urbaines. Cela dit, venir ne serait-ce que nous apporter un encouragement ferait remonter mon moral. Je suis conscient que beaucoup de barons du zouglou sont aussi à l’extérieur du pays. Par le passé, Soum Bill, Yodé et Siro sont venus au Femua. Mais, le fait que ceux qui sont restés au pays ne soit pas venu au Femua est déplorable, à part Dezy Champion. J’ai voulu donc attirer l’attention du public sur le soutien que Dézy Champion m’apportait, mais pas sur l’absence des autres.
L.P : A y voir de près, avouez que vous n’êtes pas enchanté de leur absence surtout que vous êtes tous de la même famille musicale…
A : Il y a certaines circonstances qui font qu’il serait déplacé de ma part de tirer à boulets rouges sur les artistes zouglou. Ce que je constate, c’est que ceux de ma génération ne vivent pratiquement tous plus en Côte d’Ivoire. Ils sont soit en tournée, soit à l’extérieur pour une raison ou une autre. Cela dit, je voulais simplement lancer un signal fort aux zougloumen. Quelle que soit la dévotion que j’aie, quand on n’a pas le soutien de sa propre famille, c’est souvent difficile. C’est un appel que je leur lance. Le FEMUA est organisé par un groupe zouglou, j’aurais voulu voir des artistes zouglou dans le comité d’organisation, dans le protocole d’accueil, parmi les membres de la régie.
L.P : Combien pèse aujourd’hui le FEMUA en termes de budget ?
A : Chez nous, on dit que dans on offre un cadeau, la valeur n’a pas d’importance. Ce que je peux vous dire, c’est qu’il n’est pas facile d’organiser un spectacle pour lequel, on n’attend rien en retour. C’est quand même 120 personnes qui ont été déplacées, billets d’avion et prises en charge compris. C’est un festival qui se chiffre à des centaines de millions de FCFA. Heureusement que nous avons le soutien d’un partenaire comme MTN, que vous me permettez de citer, qui nous a apportés une aide matérielle et financière. Asky qui a accepté d’être le convoyeur officiel des festivaliers a convoyé toutes les délégations. Il y a aussi la Banque nationale d’investissement qui a accepté de nous accompagner aussi bien sur nos projets sociaux que culturels. Je n’oublie pas l’apport très conséquent du gouvernement ivoirien, à travers le Président de la République, qui nous a permis de recevoir tous nos hôtes et qui repartent très satisfaits de leur séjour à Abidjan. Je profite de l’occasion pour remercier le Président de la République et à la Première dame qui a tenu à effectuer le déplacement à Anoumabo en tant que marraine et nous a aidé à couper le ruban marquant l’inauguration de l’EPP Magic System. Je remercie également les membres du gouvernement présents à l’ouverture du FEMUA et à tous ceux qui nous ont apporté, ne serait-ce qu’une contribution morale.
L.P : Justement comment va fonctionner concrètement l’EPP Magic System ?
A : Ecoutez, c’est une école que nous avons mis à la disposition du ministère de l’Education nationale. Nous avons eu la chance de rencontrer le ministre Kandia Camara et nous avons discuté de comment cette école pourrait fonctionner. Le ministère de l’éducation accorde une grande importance à cette école, de même la fondation Children of Africa nous apporte son sa contribution en tant que partenaire de Magic System. Elle nous permettra d’avoir des tables bancs pour équiper toutes les classes, nous aiderra aussi pour l’équipement de la bibliothèque et du bureau du directeur. Je voudrais avec votre permission lui dire grand merci, en tant que marraine du FEMUA et aussi comme contributrice de l’EPP Magic System. Nul est aveugle. Ce qu’elle a déjà fait est énorme. Sa fondation a offert du matériel de grande valeur à l’hôpital d’Anoumabo pour la cérémonie d’ouverture. Ce qui permettra aux femmes d’être à l’aise désormais. Ce sont des choses qui peuvent nous encourager.
L.P : Il n’empêche, vous aurez quand même un droit de regard sur la gestion de l’école…
A : Quand tu offres une chemise à quelqu’un et que tu dois être là pour savoir si elle l’a repassée ou portée, ce n’est pas bien. Notre objectif était de l’offrir. Seulement, nous souhaitons, comme l’a suggéré le ministre Kandia Camara, que la directrice soit une femme. Sinon, nous ne sommes pas des administrateurs mais plutôt des chanteurs. Il appartient à l’Etat donc de gérer cette école.
L.P : L’EPP Magic System a mobilisé 100 millions de FCFA, l’avez-vous financée entièrement ?
A : Non pas entièrement parce que le coût était lourd. Mais, Magic System a financé les 75% des travaux. Le reste a été assuré par des partenaires comme MTN qui nous a aidés à hauteur de 25 millions de FCFA pour terminer l’école.
L.P : Une maternité, puis une école. Quelle sera la prochaine œuvre sociale en 2012 ?
A : Pour l’heure, il est trop tôt de se prononcer. Une commission montée par Gaou Production va plancher sur le dossier et en tant opportun, elle nous dira quelle œuvre sociale il faudra faire.
L.P : Pourquoi ne créez-vous pas une fondation ?
A : Vous savez, pour créer une fondation, il faut acquérir une certaine expérience. C’est pourquoi, je suis très proche de Mme Ouattara qui me donne des conseils. D’ailleurs, nous développons avec son cabinet des projets. Et j’apprends beaucoup. Au moment venu, si nous pouvons faire une fondation qui épaulera Children of Africa, on la fera. Mais, il ne faut pas confondre vitesse et précipitation. Nous aimons nous engager dans quelque chose quand nous sommes sûrs que nous avons la compétence pour le faire.
L.P : Comment est née justement l’idylle entre Magic System et la fondation Children of Africa ?
A : C’est la rencontre entre deux idôles. D’un côté, Mme Ouattara apprécie beaucoup Magic System et de l’autre Magic System a beaucoup d’admiration pour cette maman qui fait beaucoup pour les enfants d’Afrique. Lors d’une de nos tournées aux Etats-Unis, nous avons eu l’honneur d’être reçus par le couple Ouattara qui n’était pas présidentiel à l’époque et nous avons échangé, évoqué des projets sociaux. Nous avons aussi décidé de la réalisation d’un single pour la fondation, qui est sorti d’ailleurs cette année et dont les ventes iront entièrement à Children of Africa. C’est de là qu’est parti un contact que nous avons gardé.
L.P : Vous êtes l’un des premiers artistes à s’engager pour la réconciliation dès le mois de février avec un single enregistré en duo avec Tiken Jah Fakoly. Comment doit se faire, à vos yeux, cette réconciliation ?
A : Je savais que la chose la plus dure après l’accession du Président Ouattara au pouvoir allait être la réconciliation. Et nous lui avons promis à notre manière d’apporter notre contribution à cette réconciliation. C’est pourquoi, nous tenions absolument à ce que le FEMUA ait lieu, parce que c’est à partir de ce genre de manifestations que l’opinion internationale prend conscience que la paix est revenue, en Côte d’Ivoire. D’autres actions, comme des tournées pour parler à la population vont suivre. Nous allons nous mettre ensemble avec d’autres artistes pour sillonner le pays et parler aux Ivoiriens. C’est notre rôle, de parler aux gens pour qu’ils se pardonnent. Nous devons nous parler, afin d’exorciser nos rancoeurs et de nous projeter vers l’avenir avec beaucoup d’optimisme.
L.P : Pourquoi estimez-vous que les artistes ont démissionné durant la crise postélectorale ?
A : Tous les artistes ont démissionné, y compris Magic System parce que nous nous sommes tus quand c’était chaud. Et si les artistes se sont tus, c’est aussi parce qu’il n’y avait plus d’idéologie et tout dire était interprété en mal ou en bien. Il était donc difficile de parler, car tout était interprété. Maintenant que tout est redevenu normal, il est temps que chacun se rattrape.
L.P : Près de douze ans après « 1er gaou », la magie du succès continue pour Magic System. Comment expliquez-vous cette réussite insolente ?
A : Il y a déjà la bénédiction divine. Après, on a la chance d’être resté ensemble pendant quinze ans sans se diviser. Notre potion magique, c’est l’union et la cohésion qui règne entre nous. Enfin, il y a l’abnégation dans le travail, la rigueur dans tout ce que nous faisons. Personne ne niera que Magic System fait des efforts pour prendre sa carrière en mains. Il y a aussi les prières de tous ceux qui nous soutiennent.
L.P : Après le Femua, quelles sont les prochaines dates de Magic System ?
A : Après le Femua, nous reprenons notre tournée estivale. Nous avons joué le week-end dernier à Strasbourg et là nous allons en Polynésie, puis en Albanie. On reviendra en France pour aller aux Etats-Unis début octobre. Ensuite, on reviendra en Côte d’Ivoire, pour une tournée ivoirienne qui parcourira 10 villes parce que cela fait longtemps qu’on n’a pas pris langue avec nos fans du pays profond. Et début novembre, nous entamerons la tournée africaine.
Réalisée par Y.Sangaré
Le Patriote: Etes-vous surpris par l’ascension fulgurante du FEMUA ?
A’salfo : Nous nous étions donnés cinq années pour asseoir la notoriété de ce festival. Mais, j’avoue qu’avec tout le comité d’organisation, nous sommes vraiment surpris et aussi heureux de l’ascension du FEMUA.
L.P : Qu’est-ce qui fait justement le succès retentissant de ce jeune festival ?
A : Je crois que c’est la constance dans l’organisation et également la spontanéité des artistes qui ont accepté de nous accompagner. Je pense également que les actions sociales qui accompagnent le projet sont un facteur catalyseur du succès du FEMUA.
L.P : Il ne faut quand même pas oublier que la renommée de Magic System est pour beaucoup dans la réussite du FEMUA …
A : Ah si. Il est évident que c’est parce que le projet est de Magic System que des partenaires décident de le soutenir. Car, il y a de la crédibilité. Mais, il faut aussi noter que le succès du FEMUA est dû en partie à l’organisation professionnelle qu’il y a autour de ce festival et à l’importance des artistes programmés.
L.P : A propos de la programmation des artistes, pourquoi JB M’Piana n’est-il pas venu, comme initialement annoncé ?
A : JB M’Piana n’est pas venu par manque de professionnalisme.
L.P : Que s’est-il passé exactement ?
A : On a essayé de le joindre par tous les moyens. C’est quelqu’un qui donnait son accord à midi et marquait son désaccord le lendemain. Il donnait une liste le matin, et voulait la changer le surlendemain. Il donnait des conditions tarifaires et voulait les changer après. Nous sommes restés dans cet imbroglio jusqu’au jour du départ pour Abidjan où j’ai décidé de le sortir de la liste. Cela dit, je suis content qu’on n’ait pas ressenti son absence durant le festival, et surtout que tous ceux qui sont venus aient donné le meilleur d’eux-mêmes de sorte qu’on ne sache pas que JB M’Piana n’est pas venu.
L.P : Avec l’engouement populaire constaté cette année, ne pensez-vous pas que l’espace d’Anoumabo devient exigu pour le FEMUA ?
A : C’est vrai qu’il devient exigu. Mais, c’est malheureusement le plus grand espace que nous avons à Anoumabo.
L.P : Le festival pourrait alors être délocalisé ?
A : Non, je n’aimerais pas délocaliser le FEMUA. Parce que retirer le festival d’Anoumabo, c’est lui enlever pratiquement son symbole. Il y a des événements comme l’Abissa qui se tiennent sur des sites plus étroits que celui du FEMUA mais qui y sont demeurés pendant des années. Je pense que le FEMUA doit être maintenu à Anoumabo. Par contre, on pourrait le décentraliser en créant des scènes éclatées dans certains quartiers d’Abidjan. Cela dit, à Anoumabo, pour gagner plus d’espace, on pourrait réduire les barrières de sécurité et le périmètre accordé à la régie.
L.P : A propos de la sécurité, cette année, des festivaliers ont déploré quelque peu le zèle de certains agents qui visiblement en ont fait plus qu’on le leur demandait…
A : Ils ont agi selon des consignes qui leur ont été données. Je préfère que les agents de sécurité fassent du zèle et avoir un festival sans incident que d’être confronté à des problèmes sécuritaires importants. Des consignes ont été données par le ministre de l’Intérieur lui-même et les différents commandants, que je remercie au passage, pour que le festival se déroule dans des conditions sécuritaires idoines. Vouloir respecter cette rigueur a fait dire à certaines personnes qu’il y a eu du zèle. Non, il n’y a pas eu de zèle. Il y a eu plutôt, une sécurité plus rigoureuse. D’ailleurs, je ne cesserai aujourd’hui de remercier les agents de sécurité. Grâce à leur rigueur, il n’y a pas eu d’incidents.
L.P : Vous avez publiquement sur la scène du FEMUA regretté l’absence des artistes zouglou, à l’exception de Dezy Champion, à vos côtés. Ressentez-vous cela comme un pique dans le dos ?
A : Vous savez, ce n’est pas un festival zouglou. Donc, les artistes zouglou ne sont pas nécessairement obligés d’y être, même si à chaque édition, j’ai essayé de programmer un artiste zouglou parce que le FEMUA est avant tout un festival de musiques urbaines. Cela dit, venir ne serait-ce que nous apporter un encouragement ferait remonter mon moral. Je suis conscient que beaucoup de barons du zouglou sont aussi à l’extérieur du pays. Par le passé, Soum Bill, Yodé et Siro sont venus au Femua. Mais, le fait que ceux qui sont restés au pays ne soit pas venu au Femua est déplorable, à part Dezy Champion. J’ai voulu donc attirer l’attention du public sur le soutien que Dézy Champion m’apportait, mais pas sur l’absence des autres.
L.P : A y voir de près, avouez que vous n’êtes pas enchanté de leur absence surtout que vous êtes tous de la même famille musicale…
A : Il y a certaines circonstances qui font qu’il serait déplacé de ma part de tirer à boulets rouges sur les artistes zouglou. Ce que je constate, c’est que ceux de ma génération ne vivent pratiquement tous plus en Côte d’Ivoire. Ils sont soit en tournée, soit à l’extérieur pour une raison ou une autre. Cela dit, je voulais simplement lancer un signal fort aux zougloumen. Quelle que soit la dévotion que j’aie, quand on n’a pas le soutien de sa propre famille, c’est souvent difficile. C’est un appel que je leur lance. Le FEMUA est organisé par un groupe zouglou, j’aurais voulu voir des artistes zouglou dans le comité d’organisation, dans le protocole d’accueil, parmi les membres de la régie.
L.P : Combien pèse aujourd’hui le FEMUA en termes de budget ?
A : Chez nous, on dit que dans on offre un cadeau, la valeur n’a pas d’importance. Ce que je peux vous dire, c’est qu’il n’est pas facile d’organiser un spectacle pour lequel, on n’attend rien en retour. C’est quand même 120 personnes qui ont été déplacées, billets d’avion et prises en charge compris. C’est un festival qui se chiffre à des centaines de millions de FCFA. Heureusement que nous avons le soutien d’un partenaire comme MTN, que vous me permettez de citer, qui nous a apportés une aide matérielle et financière. Asky qui a accepté d’être le convoyeur officiel des festivaliers a convoyé toutes les délégations. Il y a aussi la Banque nationale d’investissement qui a accepté de nous accompagner aussi bien sur nos projets sociaux que culturels. Je n’oublie pas l’apport très conséquent du gouvernement ivoirien, à travers le Président de la République, qui nous a permis de recevoir tous nos hôtes et qui repartent très satisfaits de leur séjour à Abidjan. Je profite de l’occasion pour remercier le Président de la République et à la Première dame qui a tenu à effectuer le déplacement à Anoumabo en tant que marraine et nous a aidé à couper le ruban marquant l’inauguration de l’EPP Magic System. Je remercie également les membres du gouvernement présents à l’ouverture du FEMUA et à tous ceux qui nous ont apporté, ne serait-ce qu’une contribution morale.
L.P : Justement comment va fonctionner concrètement l’EPP Magic System ?
A : Ecoutez, c’est une école que nous avons mis à la disposition du ministère de l’Education nationale. Nous avons eu la chance de rencontrer le ministre Kandia Camara et nous avons discuté de comment cette école pourrait fonctionner. Le ministère de l’éducation accorde une grande importance à cette école, de même la fondation Children of Africa nous apporte son sa contribution en tant que partenaire de Magic System. Elle nous permettra d’avoir des tables bancs pour équiper toutes les classes, nous aiderra aussi pour l’équipement de la bibliothèque et du bureau du directeur. Je voudrais avec votre permission lui dire grand merci, en tant que marraine du FEMUA et aussi comme contributrice de l’EPP Magic System. Nul est aveugle. Ce qu’elle a déjà fait est énorme. Sa fondation a offert du matériel de grande valeur à l’hôpital d’Anoumabo pour la cérémonie d’ouverture. Ce qui permettra aux femmes d’être à l’aise désormais. Ce sont des choses qui peuvent nous encourager.
L.P : Il n’empêche, vous aurez quand même un droit de regard sur la gestion de l’école…
A : Quand tu offres une chemise à quelqu’un et que tu dois être là pour savoir si elle l’a repassée ou portée, ce n’est pas bien. Notre objectif était de l’offrir. Seulement, nous souhaitons, comme l’a suggéré le ministre Kandia Camara, que la directrice soit une femme. Sinon, nous ne sommes pas des administrateurs mais plutôt des chanteurs. Il appartient à l’Etat donc de gérer cette école.
L.P : L’EPP Magic System a mobilisé 100 millions de FCFA, l’avez-vous financée entièrement ?
A : Non pas entièrement parce que le coût était lourd. Mais, Magic System a financé les 75% des travaux. Le reste a été assuré par des partenaires comme MTN qui nous a aidés à hauteur de 25 millions de FCFA pour terminer l’école.
L.P : Une maternité, puis une école. Quelle sera la prochaine œuvre sociale en 2012 ?
A : Pour l’heure, il est trop tôt de se prononcer. Une commission montée par Gaou Production va plancher sur le dossier et en tant opportun, elle nous dira quelle œuvre sociale il faudra faire.
L.P : Pourquoi ne créez-vous pas une fondation ?
A : Vous savez, pour créer une fondation, il faut acquérir une certaine expérience. C’est pourquoi, je suis très proche de Mme Ouattara qui me donne des conseils. D’ailleurs, nous développons avec son cabinet des projets. Et j’apprends beaucoup. Au moment venu, si nous pouvons faire une fondation qui épaulera Children of Africa, on la fera. Mais, il ne faut pas confondre vitesse et précipitation. Nous aimons nous engager dans quelque chose quand nous sommes sûrs que nous avons la compétence pour le faire.
L.P : Comment est née justement l’idylle entre Magic System et la fondation Children of Africa ?
A : C’est la rencontre entre deux idôles. D’un côté, Mme Ouattara apprécie beaucoup Magic System et de l’autre Magic System a beaucoup d’admiration pour cette maman qui fait beaucoup pour les enfants d’Afrique. Lors d’une de nos tournées aux Etats-Unis, nous avons eu l’honneur d’être reçus par le couple Ouattara qui n’était pas présidentiel à l’époque et nous avons échangé, évoqué des projets sociaux. Nous avons aussi décidé de la réalisation d’un single pour la fondation, qui est sorti d’ailleurs cette année et dont les ventes iront entièrement à Children of Africa. C’est de là qu’est parti un contact que nous avons gardé.
L.P : Vous êtes l’un des premiers artistes à s’engager pour la réconciliation dès le mois de février avec un single enregistré en duo avec Tiken Jah Fakoly. Comment doit se faire, à vos yeux, cette réconciliation ?
A : Je savais que la chose la plus dure après l’accession du Président Ouattara au pouvoir allait être la réconciliation. Et nous lui avons promis à notre manière d’apporter notre contribution à cette réconciliation. C’est pourquoi, nous tenions absolument à ce que le FEMUA ait lieu, parce que c’est à partir de ce genre de manifestations que l’opinion internationale prend conscience que la paix est revenue, en Côte d’Ivoire. D’autres actions, comme des tournées pour parler à la population vont suivre. Nous allons nous mettre ensemble avec d’autres artistes pour sillonner le pays et parler aux Ivoiriens. C’est notre rôle, de parler aux gens pour qu’ils se pardonnent. Nous devons nous parler, afin d’exorciser nos rancoeurs et de nous projeter vers l’avenir avec beaucoup d’optimisme.
L.P : Pourquoi estimez-vous que les artistes ont démissionné durant la crise postélectorale ?
A : Tous les artistes ont démissionné, y compris Magic System parce que nous nous sommes tus quand c’était chaud. Et si les artistes se sont tus, c’est aussi parce qu’il n’y avait plus d’idéologie et tout dire était interprété en mal ou en bien. Il était donc difficile de parler, car tout était interprété. Maintenant que tout est redevenu normal, il est temps que chacun se rattrape.
L.P : Près de douze ans après « 1er gaou », la magie du succès continue pour Magic System. Comment expliquez-vous cette réussite insolente ?
A : Il y a déjà la bénédiction divine. Après, on a la chance d’être resté ensemble pendant quinze ans sans se diviser. Notre potion magique, c’est l’union et la cohésion qui règne entre nous. Enfin, il y a l’abnégation dans le travail, la rigueur dans tout ce que nous faisons. Personne ne niera que Magic System fait des efforts pour prendre sa carrière en mains. Il y a aussi les prières de tous ceux qui nous soutiennent.
L.P : Après le Femua, quelles sont les prochaines dates de Magic System ?
A : Après le Femua, nous reprenons notre tournée estivale. Nous avons joué le week-end dernier à Strasbourg et là nous allons en Polynésie, puis en Albanie. On reviendra en France pour aller aux Etats-Unis début octobre. Ensuite, on reviendra en Côte d’Ivoire, pour une tournée ivoirienne qui parcourira 10 villes parce que cela fait longtemps qu’on n’a pas pris langue avec nos fans du pays profond. Et début novembre, nous entamerons la tournée africaine.
Réalisée par Y.Sangaré