Le secrétaire fédéral FPI de Prikro, M. Emmanuel Kouassi, se prononce, sans détours dans l’interview qui suit sur l’actualité brûlante. Pour lui, il n’y aura pas de réconciliation sans le président Laurent Gbagbo et le FPI ne peut pas aller aux législatives pour se faire laminer.
Notre Voie : Le renversement du président Laurent Gbagbo par les forces françaises et onusiennes a-t-il refroidi l’ardeur des militants sur le terrain à Prikro ?
Emmanuel Kouassi : Ils ont été choqués, meurtris dans leur chair par l’injustice qui a été faite. Mais, ils se sont ressaisis et ont compris que la victoire ne se trouvera pas dans le découragement. Ils m’ont demandé d’être prêt et de reprendre rapidement les activités de sorte qu’ils puissent se sentir rassurés. Et depuis, c’est ce que nous avons fait. Tous nos secrétaires de sections, des militants de base, de simples sympathisants sont encore plus motivés, comme si on avait fouetté leur orgueil. Nous avons tous souffert de cette crise. J’étais obligé d’abandonner domicile et enfants pendant plus de deux mois. Et c’est maintenant que nous sommes rentrés pour les uns de Divo, pour d’autres de Tien- N’Dékro. Tout cela n’a pas altéré notre détermination. Dans la vie, il y a des injustices qui sont faites et Dieu cautionne cela pour tester notre foi comme ce qui est arrivé à Job.
N.V : La répression s’abat sur les cadres LMP et les militants pro-Gbagbo. Si certains ne sont pas emprisonnés et torturés, d’autres sont contraints de vivre terrés et même de s’exiler. Cette situation ne risque-t-elle pas de casser le FPI ?
E.A : Cela ne peut pas casser le FPI. Car, le FPI est un parti de combat. Le FPI est en Côte d’Ivoire comme l’ANC en Afrique du Sud. Pour les épreuves que nous subissons, cela fait partie des moyens pour rassurer les populations de notre capacité à lutter pour leur indépendance vraie. Si le FPI devait être cassé, ce serait depuis 1992.
N.V : Le président Laurent Gbagbo et son épouse viennent d’être inculpés. La réconciliation est-elle possible dans ces conditions?
E.A : Non ! C’est de la comédie à laquelle nous assistons à travers ces cérémonies de pseudo-réconciliation. Concernant l’inculpation du président Laurent Gbagbo et de son épouse, c’est le contraire qui nous aurait étonné. Les gens qui avaient envie d’être président de la République, avec tout ce qu’ils ont fait pour parvenir au pouvoir, rien ne peut nous étonner ou surprendre, venant d’eux. L’inculpation du président Gbagbo et de son épouse fait partie de leur logique. Cependant, nous tenons à préciser que cette inculpation viole le bon sens, les lois et la Constitution sur laquelle le président Ouattara a prêté serment. Au cours d’une réunion, le président Mamadou Koulibaly nous a dit qu’il était en train de tout mettre en œuvre pour que le président Ouattara entre dans la légalité constitutionnelle. C’est pourquoi, il a tout mis en œuvre pour pousser l’éminent Professeur Yao N’dré à venir faire ce qu’ils ont appelé prestation de serment. Mais malgré cela, le président Ouattara a démis le Professeur Yao N’dré violant ainsi la Constitution, fait inculper le président Gbagbo qui est couvert par l’immunité présidentielle pour tout acte posé pendant qu’il exerçait le pouvoir d’Etat.
Je me rappelle qu’à l’occasion du forum de la récon-ciliation nationale, organisé par le président Gbagbo, tout a été mis en œuvre pour que M. Ouattara vienne y prendre part. Alors qu’aujourd’hui, à son tour, pendant qu’il parle de réconciliation, il emprisonne les autres. Quelle logique ! Je ne parle pas au nom de la direction du FPI. Je n’ai pas de mandat. Mais, au vu de tout ce qui se passe, je suis convaincu que le FPI n’est pas concerné par cette pseudo-réconciliation. La vraie réconciliation partira du jour où le président Ouattara trouvera dans le FPI, des interlocuteurs dignes à ses yeux pour discuter avec eux.
N.V : Le départ de Mamadou Koulibaly a-t-il créé un vide au sein du FPI ?
E.A : Le départ de Mamadou Koulibaly est comme la mère qui abandonne ses enfants en l’absence du père. Mamadou Koulibaly a constitué un espoir, l’unique qui nous restait. Et on était en train de constituer un grand groupe autour de lui. Les milieux que je fréquente étaient en train de prédire que Mamadou Koulibaly allait faire un bon travail. C’est pourquoi, jusqu’à présent, tout le monde se demande ce qui explique l’attitude du président Mamadou Koulibaly. Mais, nul n’est indispensable au FPI et même dans la vie de tous les jours. Le président Gbagbo nous disait que le FPI, c’est une maison dont la porte est ouverte, celui qui veut, il y entre. Celui qui veut, il en sort. Concernant le Professeur Mamadou Koulibaly, moi fédéral de Prikro, je me pose encore des questions parce qu’il a été mon parrain d’investiture. Il s’est déplacé d’Abidjan à Prikro pour aller m’investir. Et le discours qu’il a tenu, a fait venir près de 200 personnes au FPI qui lui ont remis, main à main, leurs cartes de PDCI. Je regrette profondément que le Professeur Mamadou Koulibaly ait choisi de quitter le FPI à ce moment précis. Mais Mamadou Koulibaly est un éminent Professeur. Donc, il sait ce qu’il fait et où il va. Je ne peux que lui souhaiter une glorieuse carrière politique avec son nouveau parti.
N.V : Pendant qu’il promet la non-poursuite des FDS en exil, le régime d’Alassane Ouattara met aux arrêts des officiers. La dernière arrestation en date est celle du général Guiai Bi Poin à la suite, dit-on, de la découverte d’un charnier à l’école de gendarmerie….
E.A : Sur ce point, j’insiste pour dire que cette manière de gérer ne peut aboutir à la réconciliation véritable. Car, cela ne peut que susciter la haine, l’envie de ne pas se sentir concerné par la réconciliation. Nous souhaitons que les conseillers du président Ouattara Alassane lui disent de faire autre chose. Car les arrestations, les inculpations, même les condamnations ne pourront pas réveiller les morts, ni restituer les biens perdus. Seul, le pardon des uns et des autres peut ramener la paix.
Dans mon for intérieur, je souhaite que tout ce qui s’est passé, les uns et les autres acceptent de les effacer. Parce que si nous voulons rentrer dans un procès équitable sur les 20 millions d’Ivoiriens que nous sommes, 10 millions seront au moins condamnables.
N.V :Le FPI peut-il aller aux législatives dans le contexte actuel ?
E.A : Non ! Je pense même que le pouvoir actuel cherche à empêcher le FPI d’aller à ces élections. Parce que, Ouattara Alassane n’a pas été autorisé à se présenter aux législatives de 2000, le RDR a refusé de participer aux élections. On les a suppliés. Le président Gbagbo a envoyé des émissaires. On a utilisé leur parrain actuel, la France, pour leur demander d’aller aux élections. Le RDR a refusé. Aujourd’hui, tous les cadres, toute la direction du parti, le président Gbagbo, inspirateur et fondateur du FPI, Mme Gbagbo, député, présidente du groupe parlementaire FPI, se trouvent en prison. Des hauts cadres, des militants sont pourchassés. Les jeunes ne peuvent pas porter des tee-shirts à l’effigie du président Gbagbo et du FPI. Qui dans ces conditions va aller faire compagne ? Devant quelle population ? Laquelle, dès qu’on va tourner le dos, sera pourchassée et tuée parce qu’elle a participé aux meetings du FPI. Non ! Le FPI ne peut pas aller aux élections pour se faire massacrer, physiquement, politiquement et matériellement. Une fois encore, comme ce qui s’est passé pour la présidentielle, le président Ouattara et le RHDP ont beau jeu et nous souhaitons qu’ils nomment purement et simplement les députés. Rien ne leur arrivera.
Interview réalisée par Didier Keï
Notre Voie : Le renversement du président Laurent Gbagbo par les forces françaises et onusiennes a-t-il refroidi l’ardeur des militants sur le terrain à Prikro ?
Emmanuel Kouassi : Ils ont été choqués, meurtris dans leur chair par l’injustice qui a été faite. Mais, ils se sont ressaisis et ont compris que la victoire ne se trouvera pas dans le découragement. Ils m’ont demandé d’être prêt et de reprendre rapidement les activités de sorte qu’ils puissent se sentir rassurés. Et depuis, c’est ce que nous avons fait. Tous nos secrétaires de sections, des militants de base, de simples sympathisants sont encore plus motivés, comme si on avait fouetté leur orgueil. Nous avons tous souffert de cette crise. J’étais obligé d’abandonner domicile et enfants pendant plus de deux mois. Et c’est maintenant que nous sommes rentrés pour les uns de Divo, pour d’autres de Tien- N’Dékro. Tout cela n’a pas altéré notre détermination. Dans la vie, il y a des injustices qui sont faites et Dieu cautionne cela pour tester notre foi comme ce qui est arrivé à Job.
N.V : La répression s’abat sur les cadres LMP et les militants pro-Gbagbo. Si certains ne sont pas emprisonnés et torturés, d’autres sont contraints de vivre terrés et même de s’exiler. Cette situation ne risque-t-elle pas de casser le FPI ?
E.A : Cela ne peut pas casser le FPI. Car, le FPI est un parti de combat. Le FPI est en Côte d’Ivoire comme l’ANC en Afrique du Sud. Pour les épreuves que nous subissons, cela fait partie des moyens pour rassurer les populations de notre capacité à lutter pour leur indépendance vraie. Si le FPI devait être cassé, ce serait depuis 1992.
N.V : Le président Laurent Gbagbo et son épouse viennent d’être inculpés. La réconciliation est-elle possible dans ces conditions?
E.A : Non ! C’est de la comédie à laquelle nous assistons à travers ces cérémonies de pseudo-réconciliation. Concernant l’inculpation du président Laurent Gbagbo et de son épouse, c’est le contraire qui nous aurait étonné. Les gens qui avaient envie d’être président de la République, avec tout ce qu’ils ont fait pour parvenir au pouvoir, rien ne peut nous étonner ou surprendre, venant d’eux. L’inculpation du président Gbagbo et de son épouse fait partie de leur logique. Cependant, nous tenons à préciser que cette inculpation viole le bon sens, les lois et la Constitution sur laquelle le président Ouattara a prêté serment. Au cours d’une réunion, le président Mamadou Koulibaly nous a dit qu’il était en train de tout mettre en œuvre pour que le président Ouattara entre dans la légalité constitutionnelle. C’est pourquoi, il a tout mis en œuvre pour pousser l’éminent Professeur Yao N’dré à venir faire ce qu’ils ont appelé prestation de serment. Mais malgré cela, le président Ouattara a démis le Professeur Yao N’dré violant ainsi la Constitution, fait inculper le président Gbagbo qui est couvert par l’immunité présidentielle pour tout acte posé pendant qu’il exerçait le pouvoir d’Etat.
Je me rappelle qu’à l’occasion du forum de la récon-ciliation nationale, organisé par le président Gbagbo, tout a été mis en œuvre pour que M. Ouattara vienne y prendre part. Alors qu’aujourd’hui, à son tour, pendant qu’il parle de réconciliation, il emprisonne les autres. Quelle logique ! Je ne parle pas au nom de la direction du FPI. Je n’ai pas de mandat. Mais, au vu de tout ce qui se passe, je suis convaincu que le FPI n’est pas concerné par cette pseudo-réconciliation. La vraie réconciliation partira du jour où le président Ouattara trouvera dans le FPI, des interlocuteurs dignes à ses yeux pour discuter avec eux.
N.V : Le départ de Mamadou Koulibaly a-t-il créé un vide au sein du FPI ?
E.A : Le départ de Mamadou Koulibaly est comme la mère qui abandonne ses enfants en l’absence du père. Mamadou Koulibaly a constitué un espoir, l’unique qui nous restait. Et on était en train de constituer un grand groupe autour de lui. Les milieux que je fréquente étaient en train de prédire que Mamadou Koulibaly allait faire un bon travail. C’est pourquoi, jusqu’à présent, tout le monde se demande ce qui explique l’attitude du président Mamadou Koulibaly. Mais, nul n’est indispensable au FPI et même dans la vie de tous les jours. Le président Gbagbo nous disait que le FPI, c’est une maison dont la porte est ouverte, celui qui veut, il y entre. Celui qui veut, il en sort. Concernant le Professeur Mamadou Koulibaly, moi fédéral de Prikro, je me pose encore des questions parce qu’il a été mon parrain d’investiture. Il s’est déplacé d’Abidjan à Prikro pour aller m’investir. Et le discours qu’il a tenu, a fait venir près de 200 personnes au FPI qui lui ont remis, main à main, leurs cartes de PDCI. Je regrette profondément que le Professeur Mamadou Koulibaly ait choisi de quitter le FPI à ce moment précis. Mais Mamadou Koulibaly est un éminent Professeur. Donc, il sait ce qu’il fait et où il va. Je ne peux que lui souhaiter une glorieuse carrière politique avec son nouveau parti.
N.V : Pendant qu’il promet la non-poursuite des FDS en exil, le régime d’Alassane Ouattara met aux arrêts des officiers. La dernière arrestation en date est celle du général Guiai Bi Poin à la suite, dit-on, de la découverte d’un charnier à l’école de gendarmerie….
E.A : Sur ce point, j’insiste pour dire que cette manière de gérer ne peut aboutir à la réconciliation véritable. Car, cela ne peut que susciter la haine, l’envie de ne pas se sentir concerné par la réconciliation. Nous souhaitons que les conseillers du président Ouattara Alassane lui disent de faire autre chose. Car les arrestations, les inculpations, même les condamnations ne pourront pas réveiller les morts, ni restituer les biens perdus. Seul, le pardon des uns et des autres peut ramener la paix.
Dans mon for intérieur, je souhaite que tout ce qui s’est passé, les uns et les autres acceptent de les effacer. Parce que si nous voulons rentrer dans un procès équitable sur les 20 millions d’Ivoiriens que nous sommes, 10 millions seront au moins condamnables.
N.V :Le FPI peut-il aller aux législatives dans le contexte actuel ?
E.A : Non ! Je pense même que le pouvoir actuel cherche à empêcher le FPI d’aller à ces élections. Parce que, Ouattara Alassane n’a pas été autorisé à se présenter aux législatives de 2000, le RDR a refusé de participer aux élections. On les a suppliés. Le président Gbagbo a envoyé des émissaires. On a utilisé leur parrain actuel, la France, pour leur demander d’aller aux élections. Le RDR a refusé. Aujourd’hui, tous les cadres, toute la direction du parti, le président Gbagbo, inspirateur et fondateur du FPI, Mme Gbagbo, député, présidente du groupe parlementaire FPI, se trouvent en prison. Des hauts cadres, des militants sont pourchassés. Les jeunes ne peuvent pas porter des tee-shirts à l’effigie du président Gbagbo et du FPI. Qui dans ces conditions va aller faire compagne ? Devant quelle population ? Laquelle, dès qu’on va tourner le dos, sera pourchassée et tuée parce qu’elle a participé aux meetings du FPI. Non ! Le FPI ne peut pas aller aux élections pour se faire massacrer, physiquement, politiquement et matériellement. Une fois encore, comme ce qui s’est passé pour la présidentielle, le président Ouattara et le RHDP ont beau jeu et nous souhaitons qu’ils nomment purement et simplement les députés. Rien ne leur arrivera.
Interview réalisée par Didier Keï