Son départ du Rassemblement des républicains, son soutien à Alassane Ouattara et ce qu’il en a obtenu, l’éventualité d’un retour dans son ancienne formation… Zémogo Fofana, le président de l’Alliance nouvelle pour la Côte d’Ivoire se prononce sur ces points dans cette interview.
Vous êtes-vous découvert des talents de parieur après la victoire d’Alassane Ouattara, votre candidat à la présidentielle ?
Les décisions politiques ont, c’est vrai, une part de hasard. Ce n’est pas forcément rationnel même si on raisonne, on analyse avant de tirer une conclusion. Ces réflexions se traduisent par un engagement politique. Je crois que parier sur la personne de M. Alassane Ouattara pour la présidence de la République de Côte d’Ivoire, n’était pas un pari risqué. Dès lors que les élections sont transparentes et équitables. Pour nous, l’analyse politique était axée d’abord sur l’homme, sa carrure, sa stature. Parce que cela compte dans la mesure où l’élection présidentielle c’est un candidat face au peuple de Côte d’Ivoire. Mais l’engagement était surtout fondé sur la vision politique. C’est-à-dire le projet que porte le candidat et qui a été largement publié. Je puis prétendre être de ceux qui ont suivi ce programme depuis les premières heures de leur rédaction, leur validation par les structures du parti et leur diffusion. Je suis donc bien placé pour connaître son contenu. Notre choix était donc basé sur ces éléments qui sont capitaux dans une stratégie politique : le projet de société que porte le candidat et le programme de gouvernement qu’il propose. Il s’agit donc d’un choix par conviction et non d’un choix circonstanciel. Et, je tiens à préciser que le charisme de l’homme dans cette décision n’est pas à négliger. Nous le connaissons. Nous l’avons pratiqué pendant de longues années, durant des moments difficiles. Ayant connaissance de sa stature, nous le savions capable de remporter les élections. Et, nous le savons capable de diriger la Côte d’Ivoire.
Vous disiez avoir été présent aux premières heures de la rédaction du programme de gouvernement ?
Le programme a été diffusé. Maintenant, tout le monde le connaît. Mais à l’époque, au moment de sa rédaction, le programme de gouvernement de M. Ouattara, le « Vivre ensemble », le projet de société que le Rdr (Rassemblement des républicains, le parti d’Alassane Ouattara) a porté ensuite, j’étais parmi les personnes qui ont participé à l’élaboration de ces documents.
Vous semblez avoir des difficultés pour encaisser le jackpot après le succès de votre pari. Qu’avez-vous obtenu comme récompense ?
J’ai obtenu une très grande satisfaction au plan moral et au plan politique. Lorsqu’on fait un choix politique et qu’il réussi, c’est un objectif qui est atteint. On ne cherche pas le pouvoir pour le pouvoir mais pour servir le peuple. On est dans cette phase. Donc une chose est de conquérir le pouvoir et une autre est de l’exercer. Le jackpot, pour moi, était de réussir cette élection et de faire en sorte que M. Ouattara soit élu président de la République de Côte d’Ivoire. C’est fait. J’en suis très heureux. Le bénéfice que j’en tire est moral. Il est aussi politique parce que ce fut un succès franc. Malheureusement nous avons connu cette crise post-électorale. Mais les élections se sont très bien passées et M. Ouattara a gagné. C’est notre fierté. C’est un objectif politique de très grande envergure que nous avions atteint. Nous gagnons cela. Ce n’est pas rien.
Et, au-delà ?
Au-delà… que peut-on chercher au-delà de cela ? Peut-être que vous pensez à des postes de nomination, à des positions personnelles ?
Exactement.
Cela est légitime et c’est dans l’ordre normal des choses. Parce qu’avant de rentrer en campagne j’ai eu des entretiens avec le candidat de l’époque, M. Ouattara, aujourd’hui président de la République. Nous avons passé des accords électoraux qui se résument à se battre pour gagner les élections. Et, gérer le pouvoir ensemble. Nous sommes dans cette perspective. Personnellement, je jubile d’abord cette victoire puisque l’exercice du pouvoir ne fait que commencer.
Qu’est-ce qu’il y a exactement dans la close « gérer le pouvoir ensemble » de l’accord ?
Permettez-moi de ne rien dire sur les promesses qui m’ont été faites. Aussi bien moi que le président Ouattara les connaissons. Pour moi c’est largement suffisant. Ce qui est sûr, lui est content d’être le président de la République. Et, moi je le suis encore plus pour avoir réussi à aider quelqu’un à devenir chef de l’Etat.
Pour des raisons politiques, Alassane Ouattara a fait des promesses à d’autres personnes qui l’ont soutenu. Ne craignez-vous pas qu’à l’heure de la récompense la priorité leur soit accordée à votre détriment ?
Je pense que c’est à M. Ouattara que vous devriez poser cette question. Je ne vois aucune raison qui me laisserait penser qu’il ne tiendra pas ses promesses. Je n’ai donc aucune inquiétude.
Etiez-vous à l’hôtel du Golf pendant la crise parce qu’il semblerait que cela a été déterminant dans les différentes nominations.
Ha bon ! Vous m’informer. Je n’étais pas résident à l’hôtel du Golf. J’y étais très fréquent : en moyenne une fois par semaine. Ce n’était pas beaucoup. J’ai eu l’honneur d’être reçu par le président Ouattara lui-même, par le président Bédié et par leurs collaborateurs.
Est-ce à dire que vos relations avec Alassane Ouattara sont bonnes ?
Elles sont même excellentes. Chaque fois que j’ai eu l’occasion de le rencontrer, j’ai eu l’impression que rien n’a changé dans la stature de l’homme. J’ai connu le président Ouattara. J’ai connu le Premier ministre Ouattara. Et, Ouattara le directeur-adjoint du Fonds monétaire international. J’ai connu Ouattara en exil. L’homme reste égal à lui-même : sérieux, très courtois. Nos rapports sont très, très fraternels. Je m’en honore.
Les rapports sont-ils aussi excellents avec le Rdr, son parti politique ? On ne vous aurait pas pardonné d’être parti.
La séparation a été difficile. On ne voulait pas que je parte. Même certains qui comprenaient mes motivations voulaient que je reste. Aujourd’hui, on s’est retrouvé. Je l’avais dis à l’époque, il fallait qu’on sache se quitter pour savoir se retrouver. C’est ce qui s’est passé. Nous avons travaillé, ensemble, pour la victoire du président Ouattara. Il fallait que je parte pour changer des choses. Mais ce genre de départ laisse forcément des traces. Quand on a vécu tous ces moments ensemble, lorsqu’on a partagé autant d’épreuves, il n’est pas facile de se séparer. A l’époque, beaucoup de choses ont été dites. Laurent Gbagbo m’aurait donné de l’argent. La même chose a été dite lorsque j’ai décidé de soutenir Alassane Ouattara. Il parait qu’il m’a offert cinq cent millions pour cela. Et, c’est à Ouaga qu’il aurait choisi de me convoquer pour me remettre l’argent (il rit). C’est incongru tout cela. J’habite à quelques pas de chez lui. Pourquoi ne suis-je pas allé tout simplement à la maison prendre l’argent ? Et, il a fallu que j’aille jusqu’à Ouagadougou pour le charger avant de revenir en Côte d’Ivoire.
Dites, aujourd’hui, quelles sont les raisons réelles pour lesquelles vous êtes parti du Rdr ?
Je l’ai suffisamment expliqué. Nous n’allons pas tout le temps revenir sur cette question. Pour moi, c’est clos. Il y avait des problèmes, j’en ai parlé avec le président Alassane Ouattara qui était mon patron dans le parti. Nous n’allons pas toujours revenir sur ce qui est passé.
La veille même de l’annonce de votre départ du Rdr, Alassane Ouattara vous aurait demandé de ne pas partir. Est-ce exact ?
Je ne sais pas d’où vous tenez cette information. J’ai eu plusieurs rencontres avec lui au cours desquelles je lui ai fait part de mon désir de me retirer. Et, je dois le lui reconnaître, il n’a jamais voulu que je parte. Il me l’a fait clairement savoir. Il m’a dit qu’il ne faut pas que je parte.
Vous dites que vous êtes parti pour que les choses changent. Même dehors, vous continuiez de voir dans la case. Les choses ont-elles changées ?
Oui, énormément !
Et, qu’est-ce qui a changé ?
Tout ce que je ne voulais plus voir.
Et, qu’est-ce que vous ne vouliez plus voir ?
Je vous l’ai dit, je préfère ne pas revenir là-dessus. Je puis seulement vous dire que mes remarques ont été prises en compte. Et, le Rdr continue de changer. C’est même dans son intérêt. Il est aujourd’hui un parti au pouvoir. En tant que tel, il ne peut pas se comporter comme le parti d’opposition qu’il était.
Regrettez-vous, aujourd’hui, d’être parti du Rdr ?
Oui, j’ai des regrets. C’est surtout sur le plan humain. Lorsqu’on a mené autant de combat avec des gens et qu’on doit les quitter, on a toujours un pincement au cœur. Certains m’ont dit que je n’aurais pas dû partir et qu’on aurait pu régler les choses autrement. Donc vu l’impact que cela a pu avoir sur mes relations avec certains, j’ai des regrets.
Un retour est-il à exclure ?
Non, ce n’est pas à exclure. Il y a des militants de l’Anci qui nous disent même que, vu la parfaite collaboration avec le Rdr lors des élections présidentielles, pourquoi ne pas le rejoindre en même temps ? Pour moi, fondre l’Anci dans le Rdr, rejoindre le Rdr, je ne suis opposé à rien de tout cela. Maintenant, la formule, s’il faut aller à un congrès pour décider, rien n’est à exclure.
L’Anci pourrait-il rejoindre le Rhdp de façon formelle ?
L’Anci a soutenu le président Ouattara au premier tour. Le Rhdp l’a soutenu au second tour. Pour moi, ce n’est qu’une question de dénomination du moment où nous sommes avec Ouattara. Donc, en principe, nous sommes avec ceux qui le soutiennent.
Quel poste local visez-vous pour les prochaines élections ?
Lorsque le moment de ces élections viendront, nous vous informerons. Mais cette ambition ne se limite pas au seul président de l’Anci. Nous avions annoncé que nous n’aurions pas de candidat à la présidentielle mais que nous en aurions lors des élections locales.
Ne craignez-vous pas que les postes électifs qu’Alassane Ouattara avait pu vous promettre soient réduits vu qu’il a d’autres alliés ?
Ce serait logique. Si avec un nombre, disons de trois-cents députés, le Rdr aurait consenti à nous en laisser cinquante, ce nombre baisse forcément s’il y a d’autres alliés. Mais la qualité de nos candidats peut faire la différence. C’est-à-dire que si l’Anci propose cinquante candidats qui ont plus de charisme que les autres, qui sont plus capables de gagner, ils seront retenus à leur détriment.
Quel devrait être la meilleure formule pour un parti dans le choix de ses candidats aux élections locales.
Le Pdci qui est le plus ancien des partis a opté pour la recherche du consensus. Le Rdr également. Je trouve que ce sont des décisions sages. A l’Anci, le secrétaire général est en tournée auprès de la base pour décider de ce qu’il y a à arrêter. Mais il faut savoir qu’en la matière, il n’y a pas de formule standard.
Avez-vous des nouvelles de vos anciens camarades de parti ? Je pense particulièrement à Jean-Jacques Béchio.
Non.
Avez-vous cherchez à le rencontrer ?
Non.
Pourquoi ?
Y avait-il une obligation à le faire ?
La réconciliation nationale.
A l’Anci, nous avons eu des problèmes à la faveur de la présidentielle. La direction a décidé de soutenir un candidat. Des personnes, une minorité, ont fait un autre choix. Je ne leur en ai jamais voulu pour cela. Et, même maintenant je ne leur en veux pas. Ce que je leur ai reproché, c’est d’avoir refusé que les autres puissent faire un choix différent du leur. Cette situation était liée à la présidentielle. L’élection est finie. Donc, il n’y a plus de problème. La preuve, je reçois plusieurs personnes parmi celles qui étaient parties. J’ai reçu, hier, (mercredi 7 septembre, la veille de l’interview, ndlr) celui qui était le président des jeunes du parti. C’est dire qu’en notre sein, la réconciliation est une réalité du moment où ce qui nous opposait n’existe plus. Maintenant, que des gens soient là où ils sont parce qu’ils ont posé des actes à titre personnel, je ne peux que le regretté par pur humanisme. Cela dit, lorsqu’on fait un choix politique, il faut pouvoir en assumer les conséquences. J’informe les militants et cadres de l’Anci que les activités du parti ont repris. Même si elles n’avaient pas été interrompues suite à une décision officielle mais mises en veilleuse à cause de la crise. Que tous ceux qui aspirent à devenir député rentrent en contact avec nous afin que leurs dossiers soient enregistrés. S’agissant de la réconciliation, j’invite tous les Ivoiriens à s’y impliquer. J’exhorte la population à accompagner la reconstruction du pays initiée par Alassane Ouattara en adoptant un comportement citoyen.
Interview réalisée par Bamba K. Inza
Vous êtes-vous découvert des talents de parieur après la victoire d’Alassane Ouattara, votre candidat à la présidentielle ?
Les décisions politiques ont, c’est vrai, une part de hasard. Ce n’est pas forcément rationnel même si on raisonne, on analyse avant de tirer une conclusion. Ces réflexions se traduisent par un engagement politique. Je crois que parier sur la personne de M. Alassane Ouattara pour la présidence de la République de Côte d’Ivoire, n’était pas un pari risqué. Dès lors que les élections sont transparentes et équitables. Pour nous, l’analyse politique était axée d’abord sur l’homme, sa carrure, sa stature. Parce que cela compte dans la mesure où l’élection présidentielle c’est un candidat face au peuple de Côte d’Ivoire. Mais l’engagement était surtout fondé sur la vision politique. C’est-à-dire le projet que porte le candidat et qui a été largement publié. Je puis prétendre être de ceux qui ont suivi ce programme depuis les premières heures de leur rédaction, leur validation par les structures du parti et leur diffusion. Je suis donc bien placé pour connaître son contenu. Notre choix était donc basé sur ces éléments qui sont capitaux dans une stratégie politique : le projet de société que porte le candidat et le programme de gouvernement qu’il propose. Il s’agit donc d’un choix par conviction et non d’un choix circonstanciel. Et, je tiens à préciser que le charisme de l’homme dans cette décision n’est pas à négliger. Nous le connaissons. Nous l’avons pratiqué pendant de longues années, durant des moments difficiles. Ayant connaissance de sa stature, nous le savions capable de remporter les élections. Et, nous le savons capable de diriger la Côte d’Ivoire.
Vous disiez avoir été présent aux premières heures de la rédaction du programme de gouvernement ?
Le programme a été diffusé. Maintenant, tout le monde le connaît. Mais à l’époque, au moment de sa rédaction, le programme de gouvernement de M. Ouattara, le « Vivre ensemble », le projet de société que le Rdr (Rassemblement des républicains, le parti d’Alassane Ouattara) a porté ensuite, j’étais parmi les personnes qui ont participé à l’élaboration de ces documents.
Vous semblez avoir des difficultés pour encaisser le jackpot après le succès de votre pari. Qu’avez-vous obtenu comme récompense ?
J’ai obtenu une très grande satisfaction au plan moral et au plan politique. Lorsqu’on fait un choix politique et qu’il réussi, c’est un objectif qui est atteint. On ne cherche pas le pouvoir pour le pouvoir mais pour servir le peuple. On est dans cette phase. Donc une chose est de conquérir le pouvoir et une autre est de l’exercer. Le jackpot, pour moi, était de réussir cette élection et de faire en sorte que M. Ouattara soit élu président de la République de Côte d’Ivoire. C’est fait. J’en suis très heureux. Le bénéfice que j’en tire est moral. Il est aussi politique parce que ce fut un succès franc. Malheureusement nous avons connu cette crise post-électorale. Mais les élections se sont très bien passées et M. Ouattara a gagné. C’est notre fierté. C’est un objectif politique de très grande envergure que nous avions atteint. Nous gagnons cela. Ce n’est pas rien.
Et, au-delà ?
Au-delà… que peut-on chercher au-delà de cela ? Peut-être que vous pensez à des postes de nomination, à des positions personnelles ?
Exactement.
Cela est légitime et c’est dans l’ordre normal des choses. Parce qu’avant de rentrer en campagne j’ai eu des entretiens avec le candidat de l’époque, M. Ouattara, aujourd’hui président de la République. Nous avons passé des accords électoraux qui se résument à se battre pour gagner les élections. Et, gérer le pouvoir ensemble. Nous sommes dans cette perspective. Personnellement, je jubile d’abord cette victoire puisque l’exercice du pouvoir ne fait que commencer.
Qu’est-ce qu’il y a exactement dans la close « gérer le pouvoir ensemble » de l’accord ?
Permettez-moi de ne rien dire sur les promesses qui m’ont été faites. Aussi bien moi que le président Ouattara les connaissons. Pour moi c’est largement suffisant. Ce qui est sûr, lui est content d’être le président de la République. Et, moi je le suis encore plus pour avoir réussi à aider quelqu’un à devenir chef de l’Etat.
Pour des raisons politiques, Alassane Ouattara a fait des promesses à d’autres personnes qui l’ont soutenu. Ne craignez-vous pas qu’à l’heure de la récompense la priorité leur soit accordée à votre détriment ?
Je pense que c’est à M. Ouattara que vous devriez poser cette question. Je ne vois aucune raison qui me laisserait penser qu’il ne tiendra pas ses promesses. Je n’ai donc aucune inquiétude.
Etiez-vous à l’hôtel du Golf pendant la crise parce qu’il semblerait que cela a été déterminant dans les différentes nominations.
Ha bon ! Vous m’informer. Je n’étais pas résident à l’hôtel du Golf. J’y étais très fréquent : en moyenne une fois par semaine. Ce n’était pas beaucoup. J’ai eu l’honneur d’être reçu par le président Ouattara lui-même, par le président Bédié et par leurs collaborateurs.
Est-ce à dire que vos relations avec Alassane Ouattara sont bonnes ?
Elles sont même excellentes. Chaque fois que j’ai eu l’occasion de le rencontrer, j’ai eu l’impression que rien n’a changé dans la stature de l’homme. J’ai connu le président Ouattara. J’ai connu le Premier ministre Ouattara. Et, Ouattara le directeur-adjoint du Fonds monétaire international. J’ai connu Ouattara en exil. L’homme reste égal à lui-même : sérieux, très courtois. Nos rapports sont très, très fraternels. Je m’en honore.
Les rapports sont-ils aussi excellents avec le Rdr, son parti politique ? On ne vous aurait pas pardonné d’être parti.
La séparation a été difficile. On ne voulait pas que je parte. Même certains qui comprenaient mes motivations voulaient que je reste. Aujourd’hui, on s’est retrouvé. Je l’avais dis à l’époque, il fallait qu’on sache se quitter pour savoir se retrouver. C’est ce qui s’est passé. Nous avons travaillé, ensemble, pour la victoire du président Ouattara. Il fallait que je parte pour changer des choses. Mais ce genre de départ laisse forcément des traces. Quand on a vécu tous ces moments ensemble, lorsqu’on a partagé autant d’épreuves, il n’est pas facile de se séparer. A l’époque, beaucoup de choses ont été dites. Laurent Gbagbo m’aurait donné de l’argent. La même chose a été dite lorsque j’ai décidé de soutenir Alassane Ouattara. Il parait qu’il m’a offert cinq cent millions pour cela. Et, c’est à Ouaga qu’il aurait choisi de me convoquer pour me remettre l’argent (il rit). C’est incongru tout cela. J’habite à quelques pas de chez lui. Pourquoi ne suis-je pas allé tout simplement à la maison prendre l’argent ? Et, il a fallu que j’aille jusqu’à Ouagadougou pour le charger avant de revenir en Côte d’Ivoire.
Dites, aujourd’hui, quelles sont les raisons réelles pour lesquelles vous êtes parti du Rdr ?
Je l’ai suffisamment expliqué. Nous n’allons pas tout le temps revenir sur cette question. Pour moi, c’est clos. Il y avait des problèmes, j’en ai parlé avec le président Alassane Ouattara qui était mon patron dans le parti. Nous n’allons pas toujours revenir sur ce qui est passé.
La veille même de l’annonce de votre départ du Rdr, Alassane Ouattara vous aurait demandé de ne pas partir. Est-ce exact ?
Je ne sais pas d’où vous tenez cette information. J’ai eu plusieurs rencontres avec lui au cours desquelles je lui ai fait part de mon désir de me retirer. Et, je dois le lui reconnaître, il n’a jamais voulu que je parte. Il me l’a fait clairement savoir. Il m’a dit qu’il ne faut pas que je parte.
Vous dites que vous êtes parti pour que les choses changent. Même dehors, vous continuiez de voir dans la case. Les choses ont-elles changées ?
Oui, énormément !
Et, qu’est-ce qui a changé ?
Tout ce que je ne voulais plus voir.
Et, qu’est-ce que vous ne vouliez plus voir ?
Je vous l’ai dit, je préfère ne pas revenir là-dessus. Je puis seulement vous dire que mes remarques ont été prises en compte. Et, le Rdr continue de changer. C’est même dans son intérêt. Il est aujourd’hui un parti au pouvoir. En tant que tel, il ne peut pas se comporter comme le parti d’opposition qu’il était.
Regrettez-vous, aujourd’hui, d’être parti du Rdr ?
Oui, j’ai des regrets. C’est surtout sur le plan humain. Lorsqu’on a mené autant de combat avec des gens et qu’on doit les quitter, on a toujours un pincement au cœur. Certains m’ont dit que je n’aurais pas dû partir et qu’on aurait pu régler les choses autrement. Donc vu l’impact que cela a pu avoir sur mes relations avec certains, j’ai des regrets.
Un retour est-il à exclure ?
Non, ce n’est pas à exclure. Il y a des militants de l’Anci qui nous disent même que, vu la parfaite collaboration avec le Rdr lors des élections présidentielles, pourquoi ne pas le rejoindre en même temps ? Pour moi, fondre l’Anci dans le Rdr, rejoindre le Rdr, je ne suis opposé à rien de tout cela. Maintenant, la formule, s’il faut aller à un congrès pour décider, rien n’est à exclure.
L’Anci pourrait-il rejoindre le Rhdp de façon formelle ?
L’Anci a soutenu le président Ouattara au premier tour. Le Rhdp l’a soutenu au second tour. Pour moi, ce n’est qu’une question de dénomination du moment où nous sommes avec Ouattara. Donc, en principe, nous sommes avec ceux qui le soutiennent.
Quel poste local visez-vous pour les prochaines élections ?
Lorsque le moment de ces élections viendront, nous vous informerons. Mais cette ambition ne se limite pas au seul président de l’Anci. Nous avions annoncé que nous n’aurions pas de candidat à la présidentielle mais que nous en aurions lors des élections locales.
Ne craignez-vous pas que les postes électifs qu’Alassane Ouattara avait pu vous promettre soient réduits vu qu’il a d’autres alliés ?
Ce serait logique. Si avec un nombre, disons de trois-cents députés, le Rdr aurait consenti à nous en laisser cinquante, ce nombre baisse forcément s’il y a d’autres alliés. Mais la qualité de nos candidats peut faire la différence. C’est-à-dire que si l’Anci propose cinquante candidats qui ont plus de charisme que les autres, qui sont plus capables de gagner, ils seront retenus à leur détriment.
Quel devrait être la meilleure formule pour un parti dans le choix de ses candidats aux élections locales.
Le Pdci qui est le plus ancien des partis a opté pour la recherche du consensus. Le Rdr également. Je trouve que ce sont des décisions sages. A l’Anci, le secrétaire général est en tournée auprès de la base pour décider de ce qu’il y a à arrêter. Mais il faut savoir qu’en la matière, il n’y a pas de formule standard.
Avez-vous des nouvelles de vos anciens camarades de parti ? Je pense particulièrement à Jean-Jacques Béchio.
Non.
Avez-vous cherchez à le rencontrer ?
Non.
Pourquoi ?
Y avait-il une obligation à le faire ?
La réconciliation nationale.
A l’Anci, nous avons eu des problèmes à la faveur de la présidentielle. La direction a décidé de soutenir un candidat. Des personnes, une minorité, ont fait un autre choix. Je ne leur en ai jamais voulu pour cela. Et, même maintenant je ne leur en veux pas. Ce que je leur ai reproché, c’est d’avoir refusé que les autres puissent faire un choix différent du leur. Cette situation était liée à la présidentielle. L’élection est finie. Donc, il n’y a plus de problème. La preuve, je reçois plusieurs personnes parmi celles qui étaient parties. J’ai reçu, hier, (mercredi 7 septembre, la veille de l’interview, ndlr) celui qui était le président des jeunes du parti. C’est dire qu’en notre sein, la réconciliation est une réalité du moment où ce qui nous opposait n’existe plus. Maintenant, que des gens soient là où ils sont parce qu’ils ont posé des actes à titre personnel, je ne peux que le regretté par pur humanisme. Cela dit, lorsqu’on fait un choix politique, il faut pouvoir en assumer les conséquences. J’informe les militants et cadres de l’Anci que les activités du parti ont repris. Même si elles n’avaient pas été interrompues suite à une décision officielle mais mises en veilleuse à cause de la crise. Que tous ceux qui aspirent à devenir député rentrent en contact avec nous afin que leurs dossiers soient enregistrés. S’agissant de la réconciliation, j’invite tous les Ivoiriens à s’y impliquer. J’exhorte la population à accompagner la reconstruction du pays initiée par Alassane Ouattara en adoptant un comportement citoyen.
Interview réalisée par Bamba K. Inza