x Télécharger l'application mobile Abidjan.net Abidjan.net partout avec vous
Télécharger l'application
INSTALLER
PUBLICITÉ

Politique Publié le lundi 17 octobre 2011 | L’intelligent d’Abidjan

Entretien / Agbéyomé Messan Kodjo (Ancien Premier ministre togolais) : ‘’La réconciliation doit être authentique pour la paix en Côte d’Ivoire’’

Il a été à plusieurs reprises ministre puis président de l’Assemblée nationale et Premier ministre du président Gnassingbé Eyadéma, avant de claquer la porte et de s’exiler du Togo.

Depuis, il est de retour dans son pays natal et préside aux destinées de l’Organisation pour Bâtir dans l’Union un Togo Solidaire, l’OBUTS, un parti d’opposition. Personnalité forte, qualifié par certains d’animal politique, il se dit prêt à revenir aux affaires pour aider le Togo à sortir de la crise sociopolitique qui mine le pays depuis maintenant plusieurs années.

Rencontre avec un homme qui croît dur comme fer à l’avenir du Togo, à la consolidation de l’intégration sous-régionale en Afrique de l’Ouest avec une Côte d’Ivoire restaurée dans son unité nationale.
Quelle est la situation sociopolitique du Togo aujourd’hui ?

Impasse sociopolitique, grande désespérance sociale sur fond de fracture sociale, imposture et absence de vision stratégique au sommet de l’Etat, déliquescence de l’Etat avec déficit prononcé d’éthique politique, scandales financiers à répétition, désagrégation du Rassemblement du Peuple Togolais(RPT), parti au pouvoir, divisions au sein de l’armée et de la famille Gnassingbé au pouvoir, violations massives des droits humains et constitutionnels. Tel est le cliché panoramique de la situation sociopolitique actuelle du Togo !

Reconnaissez-vous avoir joué un rôle dans cette situation puisque vous avez eu à servir l’Etat togolais au plus haut niveau à plusieurs reprises?
Oui, j’accepte volontiers ma part de responsabilité dans cette situation. Mais l’histoire retient aussi qu’à un moment donné, en l’occurrence le 27 juin 2002, j’ai dû remettre ma démission du poste de Premier Ministre et Chef de Gouvernement, face au refus du système RPT d’opérer les réformes indispensables pour asseoir la bonne gouvernance et l’Etat de droit au Togo. Je fus alors exposé à toutes sortes de persécutions qui continuent toujours. Mon tort est d’avoir anticipé trop tôt l’impasse politique actuelle. Aujourd’hui, Faure Gnassingbé souhaite enterrer le RPT qu’il considère comme un véritable obstacle à la démocratisation et à la modernisation du Togo.

Pourquoi le processus démocratique entériné par l’accord de Ouagadougou, du 20 août 2006, est-il en panne ?
C’est simple, il n’y a pas de volonté politique ! Le RPT est allergique aux réformes qu’il considère comme une grave menace à sa logique de conservation du pouvoir. Il use constamment de la même stratégie pour maintenir le statu quo dans le pays. Généralement, il organise une élection présidentielle truquée, suivie de législatives dans les mêmes conditions de tripatouillage électoral. Ce qui lui permet de contrôler tous les leviers du pouvoir pour gérer à sa guise le pays, sans tirer les leçons du passé. A une année de la fin de l’échéance de la législature, il feint de privilégier le consensus politique en organisant un dialogue avec l’opposition pour des législatives transparentes ; ceci juste pour desserrer les pressions surtout extérieures et duper la communauté internationale.
Pour s’en convaincre, il suffit d’analyser les élections depuis la mort du général Eyadema en 2005. En effet, au lendemain de la contrevérité des urnes du 26 avril 2005, suivie du massacre d’un millier de citoyens togolais qui contestaient le hold up électoral de Faure Gnassingbé et de l’armée, l’Accord Politique Global (APG) qui est le dernier des accords signés avec l’opposition s’est imposé et a permis la mise en place du Parlement actuel dont la législature court jusqu’en octobre 2012. Aussitôt après ces législatives, l’APG fut rangé dans les tiroirs pour être remis à l’ouvrage ces dernières semaines, à un an des prochaines législatives. Et pourtant, Faure Gnassingbé a juré devant le monde entier qu’il respecterait les termes de l’Accord Politique Global. C’est hélas se méprendre sur sa duplicité et son cynisme politiques légendaires!
Le dialogue actuel convoqué au forceps dans le cadre du CPDC rénové par Faure Gnassingbé procède malheureusement de la même dynamique, et il serait illusoire d’en espérer de grandes avancées démocratiques pour le Togo à moins qu’il y ait un véritable sursaut patriotique au sein de la Nomenklatura au pouvoir.

Quelles sont les ambitions de l’Organisation pour Bâtir dans l’Union un Togo Solidaire, l’OBUTS ?
Contribuer avant tout à bâtir une société de confiance, démocratique et de prospérité partagée au Togo.

De quels moyens financiers, matériels et humains dispose l’OBUTS pour assurer l’alternance démocratique ?
Notre véritable moyen à ce jour est le capital humain formidable dont nous disposons. Et comme vous le savez, il n’y a de richesse que d’hommes. Avec la conjugaison par la grâce de Dieu des efforts variés de l’équipe dirigeante, des militants et du peuple togolais, nous sommes sûrs que l’alternance va prochainement voir le jour au-delà des agendas humains.

Quel est le projet de société de l’OBUTS, et avez-vous des garanties qu’il rencontre l’adhésion des Togolais ?
Il s’agit pour OBUTS de promouvoir l’éducation citoyenne en mettant l’Homme et l’éthique au cœur de l’action politique, afin de contribuer par des voies pacifiques à réaliser l’alternance politique au Togo. Il est établi que le Togo dispose des ressources humaines de qualité et des ressources naturelles en quantité pour couvrir les besoins de sa population. OBUTS met l’accent sur la culture de l’excellence, la justice sociale et la solidarité partagée pour construire une véritable société de confiance au Togo. A ce jour, il apparaît que l’offre politique de OBUTS réponde aux aspirations des Togolais qui font confiance à l’expérience et à l’expertise de ses dirigeants.

Comment entendez-vous œuvrer pour permettre au Togo de jouer un rôle de poids dans l’économie de la sous-région ouest-africaine?
Par la bonne gouvernance et une grande ambition de faire du Togo, surtout avec son Port en eau profonde et ses installations modernes un Hub pour l’économie maritime internationale. Nous engagerons un travail de remise à niveau professionnel dans tous les secteurs d'activité existants et à créer afin de faire de l’escale du Togo, un plaisir pour tous ceux qui abordent notre sous-région. C’est ce challenge qu’OBUTS entend incarner dans les mois qui viennent. Par ailleurs, les autres pans de l’économie nationale seront mieux valorisés pour renforcer la compétitivité internationale du Togo.

Sur le plan diplomatique, qu’allez-vous faire de mieux pour consolider les relations avec les autres pays de la sous-région?
Nous allons allier à l’œuvre de construction de la démocratie et de l’Etat de droit, une diplomatie proactive et performante. Nous entendons dans cette perspective pratiquer au plan international, une politique fondée sur le respect, l’intérêt mutuel, notamment la promotion des pôles d’excellence sous-régionaux pour renforcer la coopération entre nos pays. Par ailleurs, face aux enjeux géopolitiques et stratégiques actuels, il nous semble impérieux que l’Afrique se dote de son propre agenda, d’où notre souci de soumettre à l’ensemble des partenaires africains, l’Agenda de la paix et de la prospérité partagée (AP3) proposé par le Collectif pour la Vérité des Urnes (CVU), un mouvement citoyen que nous dirigeons. L’objectif étant de créer la synergie nécessaire pour garantir la paix, créer la richesse et assurer la prospérité partagée sur notre continent.

Quel est votre avis sur le processus de réconciliation nationale engagé par la Côte d’Ivoire au lendemain de la crise postélectorale ?
J’ai été peiné par les dramatiques évènements qui ont secoué la Côte d’Ivoire, suite aux contestations post-électorales liées à la contrevérité des urnes. J’exhorte le président Alassane Ouattara et son Gouvernement à persévérer dans la voie du courage politique pour ramener la paix en Eburnie. Je les encourage à œuvrer davantage pour que ceux qui sont en exil puissent obtenir les garanties nécessaires pour leur sécurité afin de regagner leur pays, et œuvrer au succès du processus de réconciliation nationale. La réconciliation doit être authentique pour que la paix revienne en Côte d’Ivoire !
Les autorités ivoiriennes savent mieux que moi que ce qui fait la grandeur de l’homme, c’est sa capacité à pardonner et à transcender les clivages pour construire ensemble une société de confiance, de solidarité et de prospérité partagées. Je souhaite vivement qu’une solution heureuse puisse découler du processus de réconciliation en cours sous l’autorité du Premier Ministre Konan Banny, afin que toutes les filles et tous les fils de la Côte d’Ivoire tout entière se retrouvent main dans la main pour faire rayonner de nouveau la Côte d’Ivoire dans le monde.

51 ans après l’indépendance, considérez-vous que le Togo soit réellement un Etat souverain? Sinon, comment allez-vous procéder pour qu’il le devienne?
La souveraineté d’un pays est une conquête de tous les instants. L’unique et véritable souveraineté nous semble la dignité. Il urge en cela que nous nous retrouvions dans notre véritable identité de Togolais, et travaillions avec rigueur et abnégation à la grandeur de notre pays, à la promotion de notre patrimoine culturel et des talents de notre peuple, à la diversification de notre économie pour la création des richesses nécessaires pour rendre effective la prospérité partagée. Concomitamment, nous devons axer notre diplomatie sur la promotion de l’Agenda de la paix et de la prospérité partagée (AP3), tout en plaçant l’éthique au cœur de l’action politique. Ce n’est qu’à cette condition que notre souveraineté s’imposera dans le concert des nations !

Monsieur le Premier ministre, merci.
C’est moi plutôt qui vous remercie pour le travail que vous réalisez pour une Afrique libre et épanouie.
Entretien réalisé par JANSEE à Paris
PUBLICITÉ
PUBLICITÉ

Playlist Politique

Toutes les vidéos Politique à ne pas rater, spécialement sélectionnées pour vous

PUBLICITÉ