Dans un document signé de lui et dont copie est parvenue à notre Rédaction hier vendredi 10 février 2012, Mamadou Koulibaly, président de Audace Institut Afrique (AIA) et de Liberté et Démocratie pour la République (LIDER), jette un regard critique sur les 50 années d`indépendance de l`Afrique.
L’année 2011 qui vient de s’écouler a vu sur le continent africain au moins douze élections présidentielles. Cette année 2012, sept pays se préparent pour le même type d’élection plus six législatives qui vont se dérouler dans un contexte de risque de violence. En effet, les élections se suivent avec le même degré de violence et de ce fait, n’ont pas encore montré clairement qu’elles suffisent à conduire à la prospérité, à la stabilité et à la paix. Bien au contraire le processus des transitions démocratiques initié au milieu des années 90 n’est pas encore achevé. Bien souvent, ces transitions se prolongent en état régulier excluant ainsi tout choix du peuple.
La vie politique africaine, après quarante années de partis uniques, a débouché sur un multipartisme qui montre ses limites. Tout se passe dans une consternante continuité et les élites qui avaient jadis ardemment revendiqué les libertés politiques n’ont pas été capables de conduire les États à la démocratie. D’évidence, le multipartisme n’est pas la seule clé de la démocratie. Chaque élection sur le continent le prouve.
En effet, les partis uniques africains après avoir parrainé la libération de leurs pays du joug colonial ont oublié celle des populations. Pire, ils ont préféré perpétuer la domination aliénante avec un seul changement majeur : le maître n’était plus le colon blanc et européen, il avait désormais couleur locale. Les peuples ont ainsi été maintenus dans les mêmes enclos sans droit, seuls les geôliers avaient changé. Plus de cinquante années d’indépendance n’ont rien changé à leur captivité. Ainsi, ni les indépendances, ni le multipartisme n’ont eu raison de cet état de fait. Les Africains restent enchaînés et leur liberté reste entière à conquérir.
Le multipartisme n’a finalement permis de libérer que les politiciens qui ont désormais la liberté de créer leurs partis et d’entrer en compétition les uns avec les autres pour accéder au pouvoir de contrôle patrimonial sur l’État et sur ses enclos. Les libertés politiques ainsi acquises n’ont pas eu d’impact sur la libération des populations qui demeurent soumises aux mêmes spoliations. Malgré le multipartisme qui aurait dû créer un espace de contre-pouvoir favorable aux populations, on voit que la terre qui, avant la colonisation appartenait aux habitants, demeure la propriété des États sans que quiconque ne s’insurge contre cette spoliation. Les terres restent propriété des États et les titres fonciers ruraux n’ont pas été produits et octroyés aux paysans qui ont pourtant toujours eu le droit coutumier sur ces terres ; l’intégration africaine reste fragile voire inexistante, chaque État ayant préféré garder son droit de propriété sur son enclos et son contenu. Pire le bilan du multipartisme est lourd en vie humaine si l’on compte le nombre de morts consécutifs aux conflits internes occasionnés par les bagarres politiques. L’Afrique reste le continent le plus violent. Selon un communiqué récent du Département d’État américain 16 pays africains dont la Côte d’Ivoire sont classés parmi les 32 pays les plus dangereux au monde.
Ainsi, au constat de ce bilan désastreux, la décennie qui s’engage devrait être celle de la libération des peuples africains et essentiellement celle de l’essor de la liberté économique. Cette liberté économique concrètement revient à briser les barreaux qui font le mur des enclos en libérant le cadre des contrats, le droit de la propriété privée, la liberté d’échanger, la liberté des prix, la libre concurrence dans tous les domaines et tous les secteurs et l’ouverture des marchés au monde entier. Ainsi, après les libertés politiques obtenues par le multipartisme, il est impératif de lutter pour l’essor de la liberté économique.
Les libertés en question sont celles qui gouvernent les contrats libres, les marchés transparents et elles ne font aucune place aux arrangements de gré à gré. Les libertés concernées exigent que les prix et les revenus soient exprimés en des monnaies flexibles et stables. Des titres fonciers sur les terres rurales doivent être enfin distribués dans des délais et des coûts raisonnables pour mettre fin au régime de confiscation des terres par les Etats africains qui sont eux-mêmes déclarés défaillants pour la plupart. La mondialisation exige que les marchés africains soient ouverts pour favoriser les industriels africains ainsi que l’investissement direct étranger privé mais également pour permettre une baisse des prix pour le consommateur final.
Globalement l’objectif est d’arriver à une inversion de la situation : au lieu que ce soit les Etats qui contrôlent les populations, leurs activités, et leurs propriétés, ce devrait être l’inverse. Les populations devenues propriétaires privés, entrepreneurs, commerçants devraient contrôler l’action et les dépenses de leurs dirigeants ainsi que le jeu du multipartisme pour former ainsi le contre-pouvoir essentiel à la bonne marche d’une démocratie. C’est le principe même de l’irresponsabilité des élites politiques qui serait ainsi corrigé. Les hommes de l’État se retrouveraient alors serviteurs là où ils ont eu l’habitude d’être maîtres.
A cet effet, le régime parlementaire avec le scrutin majoritaire à un tour crée un contexte plus propice à la promotion des libertés économiques et au contrôle des Etats que les régimes présidentiels forts que nous avons actuellement dans la plupart des pays africains. Une étude récente menée par Audace Institut Afrique comparant les régimes parlementaires et présidentiels en Afrique montre d’ailleurs que dans les régimes parlementaires en Afrique non seulement la liberté économique est plus importante mais la gouvernance est meilleure, la richesse par habitant est supérieure ainsi que le taux de scolarisation, d’alphabétisation, et le niveau de soins médicaux. Ajoutons à cela que ces pays sont plus stables politiquement et connaissent moins de conflit.
La liberté économique permettrait de s’attaquer enfin de manière concrète au Pacte colonial dans les pays africains de la Zone Franc par, entre autres, un audit des comptes d’opérations ; la remise en cause des statuts actuels des banques centrales de la zone, BCEAO et de la BEAC ; la saisine de la Cour Internationale de justice de la Haye pour faire valoir que la France signataire des accords de coopération franco-africains ne remplit plus ses obligations contractuelles et n’est plus en mesure de le faire depuis 1993 lorsqu’elle a unilatéralement décidé de ne plus assurer la libre convertibilité du Franc CFA. Notons que, depuis l’entrée en vigueur de l’Euro, le Franc français n’existe plus et que, de surcroît, depuis janvier 2012, le poids de la lourde dette publique et la taille du déficit budgétaire de l’Etat français lui ont fait perdre la qualité de sa signature sur le marché financier mondial. Aujourd’hui, la Convention de Vienne sur les droits des traités, entrée en vigueur le 27 janvier 1980, en son article 62, donne les moyens légaux aux Etats africains de remettre en cause tous les contrats léonins, protectionnistes et appauvrissants dans lesquels ils se sont engagés quand leurs peuples étaient encore dans les enclos coloniaux. Et pour cela nous n’avons pas besoin de guerre. Et pour cela nous n’avons pas besoin de conflits armés supplémentaires. L’Afrique ne peut bénéficier des bienfaits de la mondialisation qu’en commençant par libérer d’abord les populations du joug des Etats africains eux-mêmes. Et ce sont ces nouveaux Etats construits sur de nouvelles bases morales, économiques et politiques qui vont engager le processus de rupture des carcans protectionnistes, avilissants, humiliants et inefficaces d’avec certains partenaires étrangers. Avec la fin des enclos, c’est le début du progrès, de la paix et de la prospérité. Encore faut-il oser sortir de la captivité des enclos construits par les Etats africains pour y maintenir leurs populations. Seule une société civile forte, audacieuse, prête à s’engager dans les reformes de fond pourra en briser les barreaux.
Mamadou KOULIBALY
Président d’Audace Institut Afrique
Président de LIDER
L’année 2011 qui vient de s’écouler a vu sur le continent africain au moins douze élections présidentielles. Cette année 2012, sept pays se préparent pour le même type d’élection plus six législatives qui vont se dérouler dans un contexte de risque de violence. En effet, les élections se suivent avec le même degré de violence et de ce fait, n’ont pas encore montré clairement qu’elles suffisent à conduire à la prospérité, à la stabilité et à la paix. Bien au contraire le processus des transitions démocratiques initié au milieu des années 90 n’est pas encore achevé. Bien souvent, ces transitions se prolongent en état régulier excluant ainsi tout choix du peuple.
La vie politique africaine, après quarante années de partis uniques, a débouché sur un multipartisme qui montre ses limites. Tout se passe dans une consternante continuité et les élites qui avaient jadis ardemment revendiqué les libertés politiques n’ont pas été capables de conduire les États à la démocratie. D’évidence, le multipartisme n’est pas la seule clé de la démocratie. Chaque élection sur le continent le prouve.
En effet, les partis uniques africains après avoir parrainé la libération de leurs pays du joug colonial ont oublié celle des populations. Pire, ils ont préféré perpétuer la domination aliénante avec un seul changement majeur : le maître n’était plus le colon blanc et européen, il avait désormais couleur locale. Les peuples ont ainsi été maintenus dans les mêmes enclos sans droit, seuls les geôliers avaient changé. Plus de cinquante années d’indépendance n’ont rien changé à leur captivité. Ainsi, ni les indépendances, ni le multipartisme n’ont eu raison de cet état de fait. Les Africains restent enchaînés et leur liberté reste entière à conquérir.
Le multipartisme n’a finalement permis de libérer que les politiciens qui ont désormais la liberté de créer leurs partis et d’entrer en compétition les uns avec les autres pour accéder au pouvoir de contrôle patrimonial sur l’État et sur ses enclos. Les libertés politiques ainsi acquises n’ont pas eu d’impact sur la libération des populations qui demeurent soumises aux mêmes spoliations. Malgré le multipartisme qui aurait dû créer un espace de contre-pouvoir favorable aux populations, on voit que la terre qui, avant la colonisation appartenait aux habitants, demeure la propriété des États sans que quiconque ne s’insurge contre cette spoliation. Les terres restent propriété des États et les titres fonciers ruraux n’ont pas été produits et octroyés aux paysans qui ont pourtant toujours eu le droit coutumier sur ces terres ; l’intégration africaine reste fragile voire inexistante, chaque État ayant préféré garder son droit de propriété sur son enclos et son contenu. Pire le bilan du multipartisme est lourd en vie humaine si l’on compte le nombre de morts consécutifs aux conflits internes occasionnés par les bagarres politiques. L’Afrique reste le continent le plus violent. Selon un communiqué récent du Département d’État américain 16 pays africains dont la Côte d’Ivoire sont classés parmi les 32 pays les plus dangereux au monde.
Ainsi, au constat de ce bilan désastreux, la décennie qui s’engage devrait être celle de la libération des peuples africains et essentiellement celle de l’essor de la liberté économique. Cette liberté économique concrètement revient à briser les barreaux qui font le mur des enclos en libérant le cadre des contrats, le droit de la propriété privée, la liberté d’échanger, la liberté des prix, la libre concurrence dans tous les domaines et tous les secteurs et l’ouverture des marchés au monde entier. Ainsi, après les libertés politiques obtenues par le multipartisme, il est impératif de lutter pour l’essor de la liberté économique.
Les libertés en question sont celles qui gouvernent les contrats libres, les marchés transparents et elles ne font aucune place aux arrangements de gré à gré. Les libertés concernées exigent que les prix et les revenus soient exprimés en des monnaies flexibles et stables. Des titres fonciers sur les terres rurales doivent être enfin distribués dans des délais et des coûts raisonnables pour mettre fin au régime de confiscation des terres par les Etats africains qui sont eux-mêmes déclarés défaillants pour la plupart. La mondialisation exige que les marchés africains soient ouverts pour favoriser les industriels africains ainsi que l’investissement direct étranger privé mais également pour permettre une baisse des prix pour le consommateur final.
Globalement l’objectif est d’arriver à une inversion de la situation : au lieu que ce soit les Etats qui contrôlent les populations, leurs activités, et leurs propriétés, ce devrait être l’inverse. Les populations devenues propriétaires privés, entrepreneurs, commerçants devraient contrôler l’action et les dépenses de leurs dirigeants ainsi que le jeu du multipartisme pour former ainsi le contre-pouvoir essentiel à la bonne marche d’une démocratie. C’est le principe même de l’irresponsabilité des élites politiques qui serait ainsi corrigé. Les hommes de l’État se retrouveraient alors serviteurs là où ils ont eu l’habitude d’être maîtres.
A cet effet, le régime parlementaire avec le scrutin majoritaire à un tour crée un contexte plus propice à la promotion des libertés économiques et au contrôle des Etats que les régimes présidentiels forts que nous avons actuellement dans la plupart des pays africains. Une étude récente menée par Audace Institut Afrique comparant les régimes parlementaires et présidentiels en Afrique montre d’ailleurs que dans les régimes parlementaires en Afrique non seulement la liberté économique est plus importante mais la gouvernance est meilleure, la richesse par habitant est supérieure ainsi que le taux de scolarisation, d’alphabétisation, et le niveau de soins médicaux. Ajoutons à cela que ces pays sont plus stables politiquement et connaissent moins de conflit.
La liberté économique permettrait de s’attaquer enfin de manière concrète au Pacte colonial dans les pays africains de la Zone Franc par, entre autres, un audit des comptes d’opérations ; la remise en cause des statuts actuels des banques centrales de la zone, BCEAO et de la BEAC ; la saisine de la Cour Internationale de justice de la Haye pour faire valoir que la France signataire des accords de coopération franco-africains ne remplit plus ses obligations contractuelles et n’est plus en mesure de le faire depuis 1993 lorsqu’elle a unilatéralement décidé de ne plus assurer la libre convertibilité du Franc CFA. Notons que, depuis l’entrée en vigueur de l’Euro, le Franc français n’existe plus et que, de surcroît, depuis janvier 2012, le poids de la lourde dette publique et la taille du déficit budgétaire de l’Etat français lui ont fait perdre la qualité de sa signature sur le marché financier mondial. Aujourd’hui, la Convention de Vienne sur les droits des traités, entrée en vigueur le 27 janvier 1980, en son article 62, donne les moyens légaux aux Etats africains de remettre en cause tous les contrats léonins, protectionnistes et appauvrissants dans lesquels ils se sont engagés quand leurs peuples étaient encore dans les enclos coloniaux. Et pour cela nous n’avons pas besoin de guerre. Et pour cela nous n’avons pas besoin de conflits armés supplémentaires. L’Afrique ne peut bénéficier des bienfaits de la mondialisation qu’en commençant par libérer d’abord les populations du joug des Etats africains eux-mêmes. Et ce sont ces nouveaux Etats construits sur de nouvelles bases morales, économiques et politiques qui vont engager le processus de rupture des carcans protectionnistes, avilissants, humiliants et inefficaces d’avec certains partenaires étrangers. Avec la fin des enclos, c’est le début du progrès, de la paix et de la prospérité. Encore faut-il oser sortir de la captivité des enclos construits par les Etats africains pour y maintenir leurs populations. Seule une société civile forte, audacieuse, prête à s’engager dans les reformes de fond pourra en briser les barreaux.
Mamadou KOULIBALY
Président d’Audace Institut Afrique
Président de LIDER