L`ancien ministre de la Défense, dans le régime déchu de Laurent Gbagbo, Michel Amani N`Guessan, a été longuement entendu, le lundi 20 février 2012, par le commissaire du gouvernement, Ange Kessy Kouamé, dans le cadre d`une affaire de trafic d`armes des anciennes autorités ivoiriennes aux États-Unis. « J`ai transmis son dossier à un juge d`instruction militaire. Son sort est donc scellé. C`est ce juge d`instruction militaire qui décidera très bientôt de la suite à donner à l`enquête. C`est ce juge qui va décider de son sort », nous a dit, sans d`autres précisions, le procureur militaire, Ange-Bernard Kessy Kouamé, lorsque nous l`avons joint, le mardi 21 février 2012, en milieu de matinée. L`ancien ministre de l`éducation nationale, puis de la Défense dans les gouvernements Affi N`Guessan, Charles Konan Banny et Guillaume Soro, est poursuivi pour complicité de violation « d`embargo sur les armes de guerre, de trafic d`armes de guerre, complot criminel...». Il faut remonter au 2 juillet 2009 pour, plus ou moins, appréhender les faits qui pourraient, aujourd’hui, coûter à ce baron du Front populaire ivoirien ( Fpi) sa liberté. Le 2 juillet 2009, Michel Amani N’Guessan écrit au président du Comité des sanctions du Conseil de Sécurité de l’Onu, pour, selon lui, demander “un allègement de la mesure d’embargo” infligée à la Côte d’Ivoire par les résolutions 1572/2004 et 1580/2005. En effet, la Côte d`Ivoire, à l`approche des élections présidentielles, veut se procureur des armes. L`argument développé est de « permettre aux forces de police et de gendarmerie de remplir leurs missions de sécurisation » …Le ministre de la Defense sollicite donc l`importation de 4.000 pistolets automatiques, 200.000 munitions 9 mm et 50.000 grenades lacrymogènes. Michel Amani N`Guessan prend langue directement avec des fournisseurs d`armes aux États-Unis représentés par un « sulfureux » ivoirien nommé Innocent Nagnon. Ceux-ci rencontrent, dans un grand secret, Amani N`Guessan Michel à Odienné, en marge de la visite de Laurent Gbagbo dans le Denguélé. Le marché est tout de suite conclu. Feu vert est alors donné au ministre de l’Économie et des Finances pour décaisser un acompte d`un montant de 1 milliard 900 millions de Fcfa, représentant les 50 % du montant total. En vue de la mise en œuvre de l`opération, le ministre Amani N`Guessan Michel envoie aux États-Unis son homme de confiance, le colonel Yao N’Guessan, officier supérieur des Forces armées nationales de Côte d’Ivoire, membre de son cabinet. Il débarque à New-York le 29 août 2009. Le mercredi 10 septembre 2009, il tombe dans les nasses du FBI, la police fédérale des États-Unis. L’assistant du Procureur Général des États-Unis, l`Honorable Gary G. Fry, a instruit la Cour que l`inculpé a participé à ce complot " avec le Ministre de la Défense de Côte d`Ivoire" M. Michel Amani N`Guessan, rapporte The Washington Times, LLC, publié le 1er Octobre 2010. Les documents judiciaires en possession du procureur incriminent particulièrement Amani N`Guessan et six autres conspirateurs, souligne le journal. " De très hautes personnalités du gouvernement ivoirien étaient au parfum de cette affaire depuis septembre 2009," a confié au Washington Times, James Bevan, le Chef du groupe des Nations Unies qui veille sur les sanctions. Le Colonel Yao avait été arrêté après avoir personnellement inspecté les armes dans un entrepôt de New Jersey et après avoir viré les paiements sur un compte bancaire spécial créé par des agents d`infiltration. Pendant l`inspection des armes, « le Colonel Yao N`Guessan a même sollicité l`émission de fausses factures afin de dissimuler la véritable nature du conteneur, proposant qu`elles décrivent son contenu comme étant des panneaux solaires ou des équipements de développement », selon les documents officiels, poursuit le journal. Au cours d`une conférence de presse qu`il avait animée à son cabinet en octobre 2010, Amani N`Guessan avait crié sa colère, tout en reconnaissant sa part de responsabilité : “Je déplore et condamne cette façon de faire de certains pays amis dans les relations avec la Côte d’Ivoire”. “Je n’ai jamais commandé d’armes de guerre, j’ai commandé, régulièrement et en toute légalité, du matériel de maintien d’ordre aux Etats-Unis. Et c’est dans ce cadre là que j’y ai envoyé une mission régulière conduite par le colonel Yao N`Guessan », avait-il avoué. Signalons que l`officier des Fanci, le colonel Yao N’Guessan, a été arrêté le mercredi 08 septembre, dans un des aéroports de New York, alors qu`il était dans le rang d`embarquement pour Abidjan via Paris.
Armand B. DEPEYLA
Armand B. DEPEYLA