Présidentielle au Sénégal : 5 leçons du 1er tour

Les urnes ont rendu leur verdict. Abdoulaye Wade (34,82% des suffrages) doit affronter au second tour le 18 mars prochain Macky Sall (26,57%). Mais avant ce duel, il convient de tirer quelques leçons du scrutin du 26 février dernier.

Premièrement, le scrutin du 26 février est la victoire de la démocratie, la victoire du peuple sénégalais. Ce dimanche-là, les Sénégalais ont voté dans le calme et la sérénité. Le peuple a démontré sa maturité et désavoué tous ceux qui avaient prédit l’apocalypse pour le pays de la Téranga. Après une campagne de 21 jours très mouvementés, couronnés par 6 morts et plusieurs blessés, les Sénégalais ont montré aux yeux du monde qu’ils sont capables de sursaut pour préserver la mère-patrie. Ils ont su dire à temps stop à la violence. Deuxièmement, les appels au boycott n’ont pas prospéré. Le taux de participation (60%) s’explique par la levée du boycott lancé par l’opposition. La veille du scrutin, le M23 avait appelé les électeurs à se mobiliser massivement pour exprimer dans les urnes le “tout sauf Wade“. Le taux d’abstention n’a finalement pas été trop élevé. Troisièmement, ce sont des programmes que les électeurs ont choisi une fois dans d’isoloir. Parmi les 14 prétendants au palais du Plateau, ce sont les deux qui ont véritablement battu campagne, (Abdoulaye Wade et Macky Sall) qui se sont retrouvés au second tour. Les électeurs ont plus besoin de savoir ce que le futur président pourra faire pour eux que d’écouter des attaques personnelles dirigées contre des adversaires. Les partis membres du M23 ont passé le clair de la campagne à s’opposer à une troisième candidature d’Abdoulaye Wade. Le vote-sanction auquel on s’attendait contre Me Wade n’a pas eu lieu. Son bilan n'a pas été négativement sanctionné. Au contraire, Wade a été en quelque sorte plébiscité avec 34,82% des suffrages valablement exprimés.
Quatrièmement, à force de répéter l'argument sur l'âge de Gorgui (il a 85 ans), les opposants de Wade sont parvenus à démotiver ses militants. Et donc, naturellement, ces derniers ont choisi celui qui leur semble être le mieux placé pour assurer la continuité. Sans oublier l'argument relatif à la "dévolution monarchique du pouvoir" (une autre attaque en dessous de la ceinture). En effet, on entend souvent des militants ou sympathisants dire : Wade a vraiment très bien travaillé, ce qu'il a fait est formidable mais, c'est le fait que Wade veuille mettre son fils qui nous gène). Et là aussi les militants de Wade ont-semble-t-il-choisi parmi les candidats celui qui pourrait le mieux assurer la continuité. Les sénégalais tiennent aux chantiers de Wade et encore une fois, ils savent qui est qui. Cinquièmement, en même temps qu’il se prépare pour le second tour, le Sénégal s’attend à une recomposition en profondeur de sa classe politique et un rééquilibrage des pouvoirs. Si Macky gagne, il récupérera le PDS et aura la majorité absolue au parlement. Et il enverra définitivement à la retraite, les Niass, Tanor, Idy, Fall qui ne verront jamais les conclusions de leurs assises appliquées. Par contre si Wade gagne, le groupe des Idy, Tanor, Fall, Niass...pourra former une coalition aux législatives et battre Wade. Il pourra ainsi imposer la cohabitation à Wade et appliquer le programme des assises nationales, tant réclamé par une partie de la classe politique sénégalaise. En attendant le 18 mars, les jeux sont ouverts.... que la démocratie sénégalaise reste vainqueur....

Bakayoko Youssouf