Le torchon brûle entre la direction intérimaire du front populaire ivoirien (F.P.I.) et ses délégations générales en Europe. La lettre du secrétaire national chargé des finances du FPI donnant mandat à Claudel Guigui pour recueillir les fonds en Europe dans le but d’aider aux frais de défense de Laurent Gbagbo a mis le feu aux poudres. Depuis la visite de Sylvain Miaka Ouretto au mois de février 2012 en France, les dissensions se sont révélées au sein du parti bleu. «Le président m’a demandé de mettre de l’ordre dans le parti. La direction du parti est à Abidjan. Le président du parti c'est Miaka Ouretto, le secrétaire général adjoint porte- parole c'est Laurent Akoun, autour de lui, il y a Marie Odette Lorougnon qui est chargée en même temps de nos structures spécialisées et des activités, Il y a le ministre Dano Djédjé qui est chargé de la réconciliation, le ministre Alphonse Douaty, chargé du suivie de la politique gouvernementale et le ministre Amani Nguessan, chargé de l'organisation et de la défense. Ce sont ces personnes qui constituent le secrétariat général du parti. Si nous avons des consignes à donner, on les donnera de manière claire. Lorsque vous recevez des consignes qui ne sont pas signées du parti, considérez que c'est nul et de nul effet. Il ne faut pas vous laisser distraire», avait déclaré l’actuel patron du FPI au sortir de sa rencontre de trois heures avec Laurent Gbagbo au centre pénitentiaire de Scheveningen. Il s’agissait pour lui de signifier clairement que seule Abidjan abritait la direction du front populaire ivoirien. Seule la direction du F.P.I. à Abidjan pouvait parler au nom de Laurent Gbagbo, et seule elle donnait les consignes et mots d’ordre. Propos qui visaient à l’évidence à l’endroit des exilés d’Accra, histoire de mettre un bémol à leurs sorties tendant à donner des consignes aux militants du F.P.I. A Paris, Miaka Ouretto a également évoqué les difficultés financières du parti dont il a la charge depuis l’emprisonnement d’Affi Nguessan et la démission de Mamadou Koulibaly. Il avait même annoncé l’arrivée à Paris du secrétaire chargé des finances dans le but d’organiser la mobilisation de fonds des militants de la diaspora pour aider le parti. Ce dernier n’a pas pu arriver pour non obtention de visa. Au mois de mars, c’est le Dr Koffi Aka, directeur financier du front populaire ivoirien sous la présidence d’Affi Nguessan et en exil à Accra qui débarque à Paris (avec son passeport français, ‘’heureusement’’, en poche) pour demander l’apport financier de la diaspora aux fins d’aider à la résistance aux nouvelles autorités ivoiriennes. La nomination de Claudel Guigui par Tcheidé Jean-Gervais (même si elle ne serait pas statutaire ni réglementaire selon les représentants du FPI en Europe) sonne comme une contre-attaque à l’action des exilés d’Accra et crée une levée de bouclier au sein des représentations européennes du F.P.I. Brigitte Kuyo, la déléguée générale du front populaire ivoirien en France, connue pour être une fidèle parmi les fidèles d’Affi Nguessan et soupçonnée de rouler pour les exilés d’Accra, dénonce une volonté de Miaka de la garder en dehors de la gestion des affaires du FPI en France même si Tcheidé Jean-Gervais se défend de vouloir la dégommer par cette nomination. Pour lui, «Claudel Guigui est uniquement chargé de mobiliser toutes les ressources et dons nécessaires à la libération du président Laurent Gbagbo. Il n’est donc pas le nouveau représentant du F.P.I. en Europe. Sa nomination est donc purement économique. Il doit se mettre à la disposition des représentants du F.P.I. en Europe, et notamment de Brigitte Kuyo, représentante du F.P.I. en France» (In www.ivoirebusiness.net). Brigitte Kuyo ne l’entend pas de cette oreille. Elle n’hésite pas à penser que le patron par intérim du parti fondé par Laurent Gbagbo roule pour lui-même et non pour l’ensemble des préoccupations des militants du parti, surtout celles concernant les exilés d’Accra et les détenus du Nord. «La question de notre entrée au gouvernement doit se décider au terme d'une discussion.(…)L'entrée au gouvernement ce n'est pas une question d'aller chercher de l'argent. Nous avons posé des conditions. Nous avons demandé qu'il faut que le président Laurent Gbagbo, Affi N'Nguessan, Aboudramane Sangaré, Simone Gbagbo et Michel Gbagbo, tous nos camarades qui sont injustement détenus soient libérés. Il faut que tous les exilés rentrent au pays, il faut que la CEI soit revue dans sa composition, il faut que le financement des partis politiques soit effectif, il faut que la sécurité soit rétablie sur l'ensemble du territoire national. Voilà un ensemble de conditions que nous posons», nous a-t-elle déclaré. Elle est même allée plus loin en martelant et répétant aux partisans de Laurent Gbagbo ‘’qu’il y avait de la sorcellerie dans l’air’’. C’était à l’occasion d’une manifestation de commémoration du 11 avril 2011 sur la place de la Bastille à Paris ce samedi 14 avril dernier. Dans son adresse, la déléguée du F.P.I. a laissé entendre aux Gbagboistes de Paris que la direction actuelle du parti avait des agissements suspects. Il a suffit d’une telle adresse pour que des militants se mettent à murmurer pour certains.
Jean-Paul Oro à Paris
Jean-Paul Oro à Paris