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Politique Publié le samedi 21 avril 2012 | AFP

Ouest ivoirien: un an après les tueries, "la peur dans les coeurs" à Duékoué

DUEKOUE (Côte d`Ivoire) - "On sent encore la peur dans les coeurs", soupire le curé de Duékoué. Cette localité de l`Ouest ivoirien, où le président Alassane Ouattara est attendu pour la première fois lundi, reste meurtrie un an après avoir connu les pires tueries de la crise postélectorale.

"Au moindre incident les gens sont paniqués", explique à l`AFP le père Dieudonné Dembélé qui, dans la cour de sa mission catholique, avait accueilli jusqu`à 30.000 déplacés fuyant les exactions, dont la quasi-totalité ont été transférés dans un camp à proximité de la cité ou sont retournés chez eux.

Toutefois, "la ville est en train de revivre petit à petit", souligne-t-il.
Sur les artères nettoyées et ornées du drapeau ivoirien orange-blanc-vert,
des patrouilles militaires circulent à pied ou en jeeps: la ville carrefour
proche du Liberia et de la Guinée se prépare à accueillir M. Ouattara, qui
commence samedi à Man (à environ 100 km au nord) sa première visite dans
l`Ouest, région symbole des déchirements ivoiriens.

Des centaines de personnes ont été tuées à Duékoué et dans ses environs fin
mars 2011 à l`occasion de la prise de la ville par les forces pro-Ouattara qui
le 11 avril arrêtaient Laurent Gbagbo à Abidjan, mettant fin à une crise née
du refus de l`ex-chef d`Etat de reconnaître sa défaite à la présidentielle. La
crise de décembre 2010-avril 2011 a fait quelque 3.000 morts, dont un millier
dans l`Ouest selon l`ONU.

A Duékoué, en proie depuis des années à des violences interethniques sur
fond de conflits fonciers, il reste beaucoup de maisons aux toits détruits
l`an dernier au quartier "Carrefour", habité par les autochtones de l`ethnie
guéré, comptant de nombreux partisans du président déchu.

Charniers

Le chef du quartier, Edouard Glahou, montre du doigt un terrain couvert de
gazon et de fleurs où, dit-il, des charniers ont été découverts. "A Carrefour
aujourd`hui, c`est la désolation. Le village est rempli de veuves et
d`orphelins abandonnés", lâche-t-il, assis dans la cour de sa modeste maison.

"La seule vue d`une arme de guerre me fait peur et j`en tremble", raconte
la septuagénaire Clémentine Glazaï devant un "maquis" (gargote) baptisé
"Tolérance, pardon et paix". La dame n`a quitté qu`il y a deux mois le refuge
de la mission catholique.

Selon elle, le quartier, repaire des milices pro-Gbagbo durant la crise,
subit encore des descentes des Forces républicaines (FRCI), la nouvelle armée.
Ces militaires intègrent de nombreux ex-rebelles nordistes pro-Ouattara, qui
avaient pris Duékoué en mars 2011 et sont en premier lieu mis en cause par les
ONG internationales pour les tueries.

"Les exactions se poursuivent" dans le quartier "livré à lui-même", dénonce
une jeune femme, bébé accroché au dos.

En face, sur une colline, le quartier "Côcôma" est peuplé de dioula, des
Ivoiriens venus du nord du pays et considérés comme les plus fervents
pro-Ouattara.

"On ne peut pas oublier le passé, mais l`arrivée du président pourrait cicatriser les plaies", avance Bakary Bamba, étudiant à casquette.

Lui et ses amis dioula songent aux exactions des milices pro-Gbagbo, un passé "dramatique et douloureux", et espèrent un avenir meilleur.

Déjà, les temps changent. "Aujourd`hui, les jeunes de +Carrefour+ peuvent fréquenter leurs amis de +Côcôma+, ce qui n`était pas possible il y a un an", affirme Mamadou Bamba, un jeune en boubou blanc et à la barbe épaisse.

Venu parler réconciliation mais aussi développement dans cette région longtemps oubliée, le président Ouattara aura fort à faire.

"Il faudrait du courage pour se relever de ce désastre. Il faut du temps, les coeurs sont meurtris", insiste le père Dembélé.
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