L’heure est à la grande mobilisation chez les frontistes. Une mobilisation pourquoi ? Pour sauver le soldat Gbagbo, pardi ! Et pour cela, le Front populaire ivoirien entend utiliser les grands moyens. A l’approche du 18 juin, date du procès de l’ancien président de la République, une frénésie messianique s’est emparée des tenants de l’ancien régime. Dans le communiqué final qui a sanctionné le Comité central du samedi dernier, Miaka Ouretto et ses amis sonnent la mobilisation générale pour retirer Laurent Gbagbo des griffes de la CPI. Pour le Comité central du FPI, « la comparution de Laurent Gbagbo est avant tout un acte politique posé par le pouvoir ivoirien et ses alliés externes ». En d’autres termes, l’ex-chef d’Etat est à La Haye par la simple volonté des autorités ivoiriennes et de la communauté internationale. Parce qu’il a voulu, selon eux, défendre « la souveraineté des peuples africains en général et du peuple ivoirien en particulier ». Laurent Gbagbo est donc cette espèce d’ « icône de la lutte pour la libération des peuples » que tout bon Africain doit défendre. Mais on a compris le jeu et l’enjeu de cette démarche. Le FPI veut présenter le « Machiavel des Lagunes » comme un martyr du néocolonialisme. Non pas pour attendrir la grande majorité des Ivoiriens qui se sont déjà fait une opinion de l’homme. Mais pour rallier à leur cause, les panafricanistes de tout poil en manque de perspective et autres pseudo-frustrés de la « Françafrique ». « (…) le FPI et tous les démocrates maintiendront la mobilisation politique dans la dignité pour qu’éclate la vérité, consubstantielle de la libération totale et du retour du président Laurent Gbagbo en Côte d’Ivoire », lit-on dans le communiqué. Le procès du 18 juin, le FPI veut le jouer dans la rue. Il prépare donc activement un grand rassemblement à La Haye. Pas pour l’éclatement de la vérité comme il le prétend. Mais faire passer Laurent Gbagbo pour la victime d’un complot international. Et les 3000 victimes de la crise postélectorale ? Le FPI n’en a que faire. Le plus important est de gagner la bataille de l’opinion. Rassembler le maximum d’activistes et d’aboyeurs dans la paisible ville de La Haye pour faire croire à l’opinion internationale que l’on veut sacrifier « le messie des temps modernes » sur l’autel des intérêts d’un néocolonialisme qui n’existe que dans la tête de tous ceux qui prétendent vouloir délivrer leur peuple, mais qui, en réalité, se servent de cette rhétorique pour mieux l’asservir. Les préparatifs pour redonner une virginité à Gbagbo ont commencé. Depuis maintenant un mois, les cadres du FPI en Europe multiplient les réunions et les rencontres pour la date du 18 juin. Dans le milieu ivoirien et africain, le travail de propagande a déjà commencé. De gros sous sont actuellement déboursés pour organiser des foires aux injures et des tribunes de désinformation pour inciter partisans de Laurent Gbagbo et tous ceux qui ont un compte à régler avec la France à venir « faire du bruit » devant la Cour pénale internationale. La bataille de l’opinion ne se limite pas seulement à l’Europe. L’Amérique est également touchée. Le 8 juin prochain, c’est-à-dire à 10 jours du procès, Alain Toussaint, conseiller de l’ex-chef d’Etat organise une conférence au « National press » de Washington aux Etats Unis. Il sera épaulé dans sa tâche par Albert Bourgi, professeur de droit, dont on connait les accointances avec l’ex-homme fort d’Abidjan et Joseph Koffigoh, ancien Premier ministre togolais, un ami du couple Gbagbo et devenu depuis l’un de leurs défenseurs acharnés et aveugles. En un mot, le FPI sait qu’il sera difficile pour son leader de gagner la bataille juridique. Aussi tente-t-il de gagner la bataille des cœurs et de la pensée. Il serait donc suicidaire de le laisser seul sur ce terrain. C’est pourquoi, il appartient à tous les Ivoiriens épris de justice et aux « vrais » démocrates de tout bord de se mobiliser pour faire échouer l’imposture qui se prépare. Au risque d’être complices de la seconde mort de tous ces hommes, femmes et enfants qui ont péri par la faute du même Laurent Gbagbo.
Jean-Claude Coulibaly
Jean-Claude Coulibaly