Les rapports au sein du Rassemblement des Houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) demeurent soupçonneux. La grande cohésion qui a prévalu dans la famille avant, pendant et après la présidentielle s’est un peu effritée à la base. Des militants portés sur des intérêts égoïstes mettent à mal l’unité de la coalition qui a permis de faire chuter Laurent Gbagbo. Leurs actions de contestation des décisions prises à la tête du RHDP ont fini par créer la suspicion et la méfiance de part et d’autre. La brèche s’est créée lors des dernières législatives. La base du RHDP n’a pu s’accorder pour aller ensemble à ce scrutin. Pourtant, les résultats individuels des deux piliers de l’alliance, le RDR et le PDCI-RDA, ne constituaient pas un enjeu majeur, car si l’un d’entre eux n’obtenait pas la majorité, à deux, ce serait chose facile. Et puis, en face, il n’y avait aucun adversaire. Il n’y avait pas péril en la demeure. Le raccourci était donc d’aller aux législatives en RHDP. N’ayant pas réussi à entretenir l’esprit du ‘’vivre ensemble’’ après la présidentielle, le RHDP donne aux Ivoiriens une mauvaise interprétation de son propre slogan de campagne. Heureusement que le processus électoral n’est pas achevé. La famille a encore l’occasion de se rattraper, de laver son linge sale. Les régionales et les municipales qui approchent seront un test qui va consacrer la consolidation ou la rupture de l’alliance. Ce sera la bataille entre les extrémistes divisionnistes et les partisans de l’unité au sein du RHDP. Déjà des propos peu rassurants sont lâchés de part et d’autre, signe que l’accord qui crée l’harmonie n’est pas encore trouvé. Cela doit interpeller la haute direction de la coalition, qui a le devoir d’imposer à la base ‘’le vivre ensemble’’, pour qu’elle en fasse sa culture. Les appréhensions, les suspicions et autres récriminations doivent faire place à la confiance et aux concessions mutuelles. La survie de la famille en dépend. D’ailleurs, nul n’est besoin de rappeler cette impérieuse nécessité, au regard des incessants signes évidents de menace de la stabilité fraîchement acquise, d’âpre lutte, par la conjugaison des efforts des partis politiques réunis au sein de la coalition. Autre aspect de la question, et non des moindres, qui engage les partis réunis au sein du RHDP à s’unir, la longue histoire de paix qui en caractérise les membres influents : le RDR et le PDCI. Nonobstant les récents bruits de couloirs et les soubressauts, d’ailleurs compréhensibles, au sein des partis composant la coalition, on ne peut s’empêcher de reconnaître que depuis sa création, le PDCI, parti de feu Félix Houphouët-Boigny, homme de paix devant l’Eternel, jouit d’une réputation qui parle pour lui. Tout averti de la vie politique de la Côte d’Ivoire sait les efforts fournis par les hauts responsables issus de ce parti pour préserver la cohésion au sein du PDCI. Il plaît, à ce niveau, de rappeler les mots d’un député, citant le Bélier de Yamoussoukro. Et qui défendait l’idée qu’un parti politique ne peut survivre sans les remous internes qui disposent ses membres à envisager les voies et moyens permettant d’améliorer les textes, favorisant ainsi une pérennité des rapports. Ainsi, les palabres internes, lorsqu’ils ne débordent pas le cadre de la saine polémique, ouvrent des espaces de réflexion, de vision, de regards appréciatifs de la vie du parti et de projection. Un parti ne peut donc vivre sans problèmes. A plus forte raison une coalition de partis composée de ces groupements politiques aussi ‘’divisés’’ en interne les uns que les autres. C’est Félix Houphouët-Boigny qui disait que s’il se réveillait un matin sans problèmes, il se plaindrait à Dieu de l’avoir abandonné. Une coalition de partis ne peut échapper à cette donne. Cependant, c’est de sa capacité à intégrer les remous à son fonctionnement que dépend sa survie. Si donc le RHDP va bien - avec ses problèmes -, la Côte d’Ivoire va bien.
Ulrich Mouahet
Ulrich Mouahet