Les aspects chiffrés et infractionnels du procès des anciens barons de la filière café-cacao ont été entamés depuis le lundi 16 juillet. Avec la comparution des experts douaniers commis, en 2008, pour auditer la filière, et celle du Conseil du café-cacao. une "guerre" des chiffres a véritablement commencé pour les confrontations entre toutes les parties. "Nous allons, dès cette audience, examiner les infractions relatives aux abus de confiance, abus de biens sociaux et détournements de fonds. Les experts douaniers doivent donc nous faire le récapitulatif des chiffres", a déclaré, à l’entame, le juge Ahmed Souleymane Coulibaly. Avant de s’adresser directement aux experts douaniers : "L’objet de votre comparution est de nous attester la remise des fonds de redevance aux structures de la filière. Il y a l’aspect des fraudes fiscales sur les exportations et l’aspect des redevances". En répondant donc aux préoccupations du tribunal, les deux experts douaniers, Roland André et Fanouh Antoine, ont expliqué le travail qu’ils ont fait. "Le 18 juin 2008, les dirigeants des structures de gestion de la filière café-cacao ont été mis sous mandat de dépôt. Et l’ordonnance N°216 du 24 octobre 2008 prise par le doyen des juges d’instruction nous a donné pour mission de faire des audits financiers dans la filière", ont-ils dit. Expliquant que les 80 sociétés exportatrices concernées par les audits leur ont camouflé les chiffres de leurs transactions. Ils ont donc eu, ont-ils révélé, recours au fichier de la douane (puisqu’aucune fève de cacao ne pouvait être exportée sans être déclarée à la douane), puis à celui du guichet unique (où le Frc représentait les autres structures, excepté le Fgccc) et au manifeste des ports (port autonome d’Abidjan et port autonome de San-Pedro). Selon eux, les résultats des chiffres sortis concernent les montants des redevances payées à quatre structures (Bcc, Fdpcc, Frc, Arcc), de janvier 2002 à décembre 2008. Ainsi, de leur avis, le montant global des redevances payées à l’ensemble de ces quatre structures atteindrait plus 597,1 milliards F. Un montant qu’ils ont reparti de la façon suivante : 40 milliards pour la Bcc ; 50,2 milliards pour l’Arcc ; 200,4 milliards pour le Fdpcc-Fonctionnement ; 59,5 milliards pour le Fdpcc-Investissement ; 20,6 milliards pour le Frc. Au sujet des redevances pour la sacherie brousse, 44,6 milliards F auraient été perçus, pour la même période (janvier 2002-décembre 2008) par ces structures. Concernant la réserve de prudence, 150,7 milliards F auraient été également perçus par les structures. Quant au Fimr (Fonds d’investissement en milieu rural, créé en 2006), ce sont 27,2 milliards F qui auraient aussi été payés aux structures, de 2006 en 2008. Au sujet du Fonds de relance caféière (créé en 2007), les experts douaniers ont indiqué que ce sont 3,5 milliards F qui auraient été versés aux structures, de 2007 à 2008. Ce sont les chiffres payés à l’ensemble des quatre structures sus-indiquées, au titre des redevances de 2002 à 2008, et élevés au montant global de 597,1 milliards F qui ont fait l’objet d’une contestation du bâtonnier Joachim Bilé Aka Joachim (avocat de la défense). "Que les experts douaniers nous disent si leur travail est exhaustif ou si ce sont là des chiffres minimums. Ensuite, ils devront nous dire par quel mécanisme les redevances sont intervenues dans la filière", a-t-il réagi. Avant d’avoir la réponse de l’expert douanier Fanouh Antoine : "Ce que nous avons donné, ce sont des chiffres-planchers, parce que les exportateurs nous ont refusé leurs chiffres. Les redevances ne sont pas perçues par hasard. C’est un arrêté interministériel qui a fixé les taux des redevances. "Monsieur le président, les données de redevances 2002-2008 sont aussi disponibles au Conseil du café-cacao, nouvelle organisation centrale de régulation de la filière. Le représentant du Conseil café-cacao, Kokora, a indiqué, à son tour, le montant global des redevances payées, de 2001 à 2008, aux quatre structures, qui est de l’ordre de 602,5 milliards F Cfa.
SYLVAIN TAKOUE
SYLVAIN TAKOUE