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Art et Culture Publié le samedi 22 décembre 2012 | Le Patriote

Interview / Abdulhamid Juma (Président du DIFF) : “Pourquoi nous avons créé ce festival”

Affable et sympathique à souhait, Abdulhamid Juma est le Président du Festival International du Film de Dubaï (DIFF). Dans cet entretien, il explique les enjeux de cet événement et tire les leçons de la 9ème édition de ce festival qui a rythmé, du 9 au 16 décembre dernier, la belle ville de Dubaï, capitale de l’Emirat du même nom, aux Emirats Arabes Unis.Le Patriote : Comment est née l’idée de ce festival ?
Le Patriote : Comment est née l’idée de ce festival ?
Abdulhamid Juma : Elle est née après les événements du 11 septembre 2001(nldr, l’attentat du World Trade Center). L’Occident voulait en savoir plus des Arabes et des musulmans. Nous avons pensé que la meilleure manière de nous faire connaître était que nos ressortissants fassent leurs propres films, qu’ils montrent aux Occidentaux au lieu qu’eux viennent faire des films avec leurs perspectives ou points de vue sur ce qu’ils pensent de nous. C’était la première idée qui a suscité la création de ce festival. La deuxième chose, c’est que nous voulions faire de Dubai, un hub pour le tourisme, le commerce, la finance et surtout le cinéma.

L.P : Concrètement quelle est la première vocation du DIFF ?
A.J : Notre première vocation est, comme le stipule notre slogan (« Bridging Cultures, Meeting Minds »), est de tisser un pont entre les cultures, tout en rapprochant les mentalités. Notre leitmotiv, est donc de favoriser les échanges entre les humains. Car, nous pensons que c’est en discutant que nous apprenons à nous connaître et que nous ferons tomber le mur de la méfiance. Et le cinéma est un formidable moyen pour fédérer les cultures.

L.P : Qu’est-ce que le festival a justement apporté, depuis sa création, à la région ?
A.J : Beaucoup. Cette année, nous avons eu dix films des Emirats Arabes Unis, 6 productions du Golf dont l’Arabie Saoudite et autres. Au cours du festival, nous avons eu la grande première du 1er long métrage saoudien intitulé «Wadjda». Il y a deux ans, en 2009, nous avons eu la première du 1er film émirati, « City of life ». Dans la sélection de cette 9ème édition du DIFF, il y avait 158 films dont 75 films arabes. C’est dire combien, ce festival a donné un nouveau souffle au cinéma dans la région. Toutefois, nous ne voulons pas nous en arrêter là. Nous voulons aussi étendre notre influence au-delà du Moyen-Orient, jusqu’à l’Asie et l’Afrique parce que nous estimons que nous sommes si proches les uns des autres.

L.P : L’un des gros défis qui attendent le cinéma dans le Moyen-Orient est la distribution. Qu’avez-vous prévu dans ce sens ?
A.J : Je vous rassure que c’est une de nos préoccupations majeures. Il y a trois ans, nous avons initié le Marché du Film de Dubaï dont l’une des branches est le Filmmart, la toute première bibliothèque digitale qui permet d’acheter et de vendre des films. L’an dernier, nous en avons vendu 170. Et cette année, le Filmmart a présenté 323 films pendant le festival. Nous avons aussi fait des ateliers, des débats sur les difficultés auxquelles les hommes de l’industrie cinématographique sont confrontés. Des consultants américains sont venus partager avec nous leurs expériences. Nous sommes conscients que Dubaï est un carrefour et que nous sommes dans une bonne position pour distribuer des films de l’Est à l’Ouest, de l’Afrique en Asie.

L.P : Cette année, le festival a retenu 158 films. Comment la sélection a été faite ?
A.J : Nous avons un excellent comité de sélection des films. Le mode opératoire est simple, nous lançons des appels à films pour chaque édition du festival. Aussi les membres du comité de sélection vont-ils assister à des grandes premières un peu partout dans le monde pour voir des films susceptibles d’être retenus pour le festival. Cette année, après l’appel à films, nous avons reçu 1200 candidatures. Les membres du Comité ont visionné ces films, pour en sortir ceux que nous avons vus durant le festival.

L.P : Toutefois, il y a eu très peu de films de l’Afrique noire francophone dans cette sélection. Comment expliquez-vous cela ?
A.J : A Dubaï, il y a 200 nationalités qui y vivent en parfaite harmonie. Et cette diversité est une richesse. C’est pourquoi, nous ne nous concentrons pas sur une seule région, une communauté précise. Au festival, nous accueillons aussi bien des films faits à Hollywood qu’en Asie et en Afrique, mais en mettant un accent sur les films arabes. Notre ambition, il ne faut pas l’oublier, c’est d’être la rampe de lancement de l’industrie cinématographique dans le Moyen-Orient, singulièrement le Monde Arabe. Dans la sélection, il y avait deux bons films français dont «Amour » de Michael Haneke. Cette année, nous avons eu avec les 158 films, 61 nationalités pour 43 langues différentes. Cela traduit l’esprit de notre festival qui se résume dans notre slogan « Bridging Cultures, Meeting Minds ».

L.P : Le 9ème DIFF vient de s’achever. Pensez-vous avoir atteint tous vos objectifs ?
A.J : Vous savez, nos objectifs se répètent. Cette année, nous sommes satisfaits d’avoir eu un beau festival, avec une bonne organisation dans l’ensemble. Je profite de l’occasion que vous m’offrez pour remercier et féliciter chaleureusement toute l’équipe qui a travaillé à la réussite de ce festival. Elle a fait preuve de dynamisme et d’un grand professionnalisme. Nous avons une bonne stratégie et une belle équipe pour faire marcher le festival. Nous exhortons le public, à se mobiliser à chaque édition du festival, pour y participer et voir toutes les opportunités que nous offrons.

L.P : Après neuf éditions et une notoriété établie, quels seront les prochains défis du DIFF ?
A.J : En 2013, ce sera notre 10ème édition. Après, nous verrons où nous en sommes. Ce qu’il faut savoir, c’est que notre ambition est de prendre plus de dimension, de nous affirmer davantage comme l’évènement cinématographique majeur du Moyen-Orient et de l’Asie. Nous voulons, pour les 10 prochaines années, que les cinéastes arabes fassent davantage de longs métrages, tout en continuant à faire des courts métrages et des documentaires. Nous avons aujourd’hui une compétition pour les films émiratis, arabes, d’Afrique-Asie, et pourquoi pas, demain, pour les films internationaux. C’est aussi pour nous un défi à relever. Le festival continuera de s’améliorer au fil des ans, afin de proposer le meilleur du cinéma dans notre région au monde entier.

Réalisée à Dubaï par Y. Sangaré, envoyé spécial
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