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Politique Publié le lundi 18 mars 2013 | LG Infos

Devant les députés congolais : Guillaume Soro fait une sortie de route

© LG Infos Par Aristide
Audiences du chef de l`Etat: le chef de l`Etat, SEM Alassane Ouattara a reçu le nouveau Président de l`Assemblée nationale, Guillaume Kigbafori Soro
Mardi 13 mars 2012. Palais de la présidence de la République. Photo: le Président Alassane Ouattara accorde une audience au nouveau Président de l`Assemblée nationale, Guillaume Kigbafori Soro
Ecouter Guillaume Soro, quand on arrive à dépasser la peine que cela inflige, c’est croire que sombrer dans le théorique incohérent d’une vision improbable, qui fait croire que le juste est perdu, que le digne doit être honteux, ou encore que l’idéaliste désintéressé doit se cacher pour mieux fuir la prospérité d’une œuvre portant inévitable qui devrait profiter au véritable épanouissement de ses congénères. Écouter Soro, c’est prendre le risque grave de désespérer de la bonne nature humaine, celle qui construit pour autres que soit. Écouter et lire Soro, c’est croire que la Côte d’Ivoire est un imaginaire destiné à l’horreur permanente et que l’Afrique doit abandonner ses nobles ambitions, pour s’offrir à des aventuriers sans attaches pour qui la revendication du «chez soi» est une quête coupable, dès lors transformée en une inexistence offerte à des bandes guerrières criminelles déshumanisées, dont l’on peut justifier la présence au-dessus des enfants du terroir, dont le lien invisible mais indélébile avec leurs terres, leurs passés, leurs cultures aux valeurs de solidarité pourtant jamais démenties. Écouter Soro, c’est accepter, coupable, de céder tout ce que l’on peut représenter, pour surfer sur une superficialité sans destination, uniquement attirée par l’instant furtif, pourtant et certainement confrontée à l’histoire pour ses mensonges et ses crimes. Suivre Soro, c’est se vendre, et vendre tout ce qu’on n’a pas et qui pourtant devient l’objet de transactions avilissantes et sans apports pour la communauté à qui leurs objets appartiennent pourtant.
Deux faits ou discours récents, dont chacun se souvient certainement sont là pour soutenir cette peine que l’histoire nous impose pourtant, car il y a demain. Son discours devant l’Assemblée nationale congolaise à Brazzaville et surtout son autosatisfaction à la suite de l’opération de naturalisation en masse opérée par son régime, dont les arguments, venant en justification des crimes contre la Côte d’Ivoire et ses populations, sont les deux évènements qui interpellent et choquent. Même le plus détaché des Ivoiriens ou le plus neutres des observations. Les deux étant liés, dans leur accusation du Président Laurent Gbagbo et la justification «d’un combat qui lui seul», en plus de ceux à qui cela profite, comprennent. Et ceux-là ne se trouveront certainement pas parmi les Ivoiriens. Dans sa démarché cynique, son discours «à la face des Ivoiriens», qui subissent chaque jour, depuis 2002, les effets de «sa vision de notre pays», Soro donne quelques définitions, dont une bien particulière du «panafricanisme», censée être à l’opposé de la vision panafricaniste de Laurent Gbagbo. Ainsi, Soro veut nous convaincre que le «panafricanisme», c’est «ouvrir les frontières de son pays à tout venant, quand ailleurs, on ferme les portes aux Ivoiriens» ! Mieux, Soro ambitionne de faire croire aux Ivoiriens que le «panafricanisme, c’est être esclave et soumis chez soi, au profit d’intérêts qui ne nous rapporte rien, dans une gestion de la chose publique et sociale, qui nous laisse sans rien de productif et aucun héritage possible pour notre descendance» ! Soro nous dit, donc qu’il est normal que notre pays ne nous appartienne plus désormais, car les «autres l’aiment tellement, qu’il vaut mieux pour nous de ne plus y exister», au profit des autres et d’une clique locale dont le seul mérite est de répéter en longueur de journées une litanie bien préparée par ces maîtres au profit de qui nous n’avons plus de pays. Le plus grave, c’est que lui veut nous convaincre qu’il y croit, pendant qu’il s’enrichit, devenant puissant propriétaire terrien, grand agriculteur, riche propriétaire immobilier, et évidemment comptes remplis de milliards savamment «planqués» dans des zones amies à lui. Donc, de fait, Soro nous dit «j’ai combattu mon propre pays et mes propres parents et concitoyens, dans l’unique but de permettre à d’autres de venir nous commander chez nous, nous diriger, nous indiquer les décisions à prendre et célébrer une nouvelle forme de panafricanisme dont la définition n’est pas encore claire, mais, j’y travaille» !
Quand Soro avance, avec forces arguments et célébrations qu’il est fier de «voir son combat enfin aboutir, après la naturalisation en masse d’étrangers» dont la situation n’est pourtant pas claire, il veut nous faire applaudir nos propres morts, nos blessures dont les cicatrices nous accompagneront dans nos tombes, dont les afflictions multiples et invisibles, mais si douloureuses, sont normales ! Soro nous demande d’applaudir quand des hordes entières viennent nous spolier de nos terres, avec armes et baves dégoulinantes ! Soro nous demande de le féliciter parce qu’il nous a détruits pendant 10 ans, sans relâche, sans pitié, sans égards pour ce que nous représentions pour lui. Soro nous demande d’applaudir alors que pendant presqu’une décennie, le Président Laurent Gbagbo nous a poussés dans les derniers retranchements de notre inaltérable tolérance, pour accepter ce discours non encore prononcé, mais pourtant déjà bien clair et sur lequel nous nous interrogions, comme éclairés déjà par tant de fourberies perçues autour de notre sort. Soro prétend que Laurent Gbagbo est antidémocrate alors que lui serait un combattant de la démocratie, par la force de l’arme, justifié par «l’intention de sauver l’autre au préjudice de soi-même» ! Épatant, non ! Comme dit, lire Soro est une affliction qui peut devenir incommensurable, si la foi ou tout autre moyen ne vous maintient pas votre raison supérieure, contre l’inacceptable transformé en vérité universelle, sous la conduite d’une pensée dominante, certes inique pour ceux qui la subissent et coûteuse pour ceux qui y participent, pas dans l’instant, certainement idéale pour ces derniers.
Soro va dans un pays qui n’a aucune culture de la solidarité et de l’accueil de l’étranger, pour y dire qu’il faut vouer Laurent Gbagbo aux gémonies, l’oublier et ne pas laisser «la jeunesse africaine s’abreuver de ses enseignements séditieux et pernicieux pour l’Afrique de Soro» ! Il ne faut laisser les constituants de la nouvelle Afrique «être intoxiqués par le Gbagboïsme» grandissant, danger inévitable contre des certitudes surréelles d’une vision sans fondement, sans contenu, sans autres intérêts que celui de quelques énergumènes éperdus de gloire éphémère et de grandeur sans fond ! Partant, il souhaite ainsi combattre un phénomène qui le dépasse, nous dépasse et dépasse même l’objet qui en est le centre. L’Afrique d’aujourd’hui et encore plus, celle de demain, ressemble plus à Gbagbo qu’a Soro. Et Soro, qu’on envoie pour se battre contre elle et l’étouffer, reste profondément convaincu, malgré ses discours, ses actes et sa détermination, que c’est de cette Afrique que les Africains, les vrais rêvent. Cette Afrique, qu’on l’appelle «panafricaine» ou pas, est une Afrique qui sera unie, malgré la richesse et la diversité de ses caractéristiques. Elle sera fière de ses différences et en usera comme autant d’atout. Mais, pour autant, aucune de ses composantes ne sera «indument ouverte, sans contrôle, sans lois, sans capacité à identifier et évaluer ses nombreuses particularités, pour mieux les exploiter.
Car, comme le dit, probablement, sans le comprendre d’ailleurs, Soro, si l’Afrique n’est qu’une et se ressemble, en quoi elle serait riche au point d’attiser tant de convoitises ? En quoi le Burkina, la Côte d’Ivoire, le Mali, la Guinée serait chacun ou chacune en soit, si chacun ou chacune ressemble à la Côte d’Ivoire actuelle de Soro ? Qui Soro arrive-t-il à convaincre quand il se lance dans ses grandes envolées, devant ces assemblées où il s’invite pour déclamer une vision sans forme, en dehors de sa base qui n’arrête pas de dénigrer Gbagbo, de le condamner avant qu’il soit jugé et de vouloir l’effacer, au moment même où il «envahit l’espace médiatique et les esprits des Africains», comme un vent qui souffle dans une direction destinée ? Certes, il est compréhensible qu’en accusant et en accablant Laurent Gbagbo, Soro ambitionne de se disculper, de protéger son régime et d’éloigner la compétition politique représentée par Gbagbo et ses partisans, déterminés (ce qui l’étonne, dit-il ?), et donc il lui paraît nécessaire d’assurer un soutien diplomatique face à l’éventualité d’une libération qui est désormais plus que possible. Mais, pour autant, a-t-il besoin de s’aventurer avec tant de risques dans des débats aussi cruciaux pour l’Afrique, avec des arguments aussi légers et improbables ? C’est certes son problème, mais, partout où il ira nous attaquer, attaquer Laurent Gbagbo et présenter notre pays comme une aventure accessible à tout et son contraire, nous nous «infligerons la peine de le lire», pour comprendre les ressorts de sa démarche et la logique de ses envolées aventureuses, pour lui dire combien nous restons déterminés à lui opposer l’argumentaire de la réalité qu’il feint d’ignorer et qui finira par le rattraper et redresser l’histoire que lui et son régime tentent d’étouffer avec tant d’efforts vains et de peine criminelle !
Ba Bemba, correspondance particulière
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