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Editorial Publié le lundi 29 avril 2013 | Le Patriote

Les temps ont changé

Il suffit alors de bien peu pour que les fondements d’une nation soient fissurés et qu’ils menacent de faire s’écrouler tout l’édifice national. Bien sûr, personne n’ira comparer l’incomparable. Personne n’ira jusqu’à dire que le tumulte qui a suivi ces dernières élections est de la même puissance – j’allais dire de la même nuisance – que la foudre postélectorale qui s’est abattue sur ce pays, suite à l’élection présidentielle de 2010. Mais force est de reconnaître que les réflexes des uns et des autres face à la conservation ou la conquête du pouvoir, fut-il infime, restent les mêmes.

Quand on a une parcelle de pouvoir, on est prêt à tout pour le conserver. On est prêt à sacrifier l’ensemble pour sauver l’individu. De même, quand on convoite cette parcelle de pouvoir, on est prêt tel un bulldozer à écraser tout sur son passage, parfois sans distinguer adversaires et partenaires.
Il en a été ainsi de la semaine que nous évoquions plus haut. Une semaine où des aspirants au pouvoir ont tenté de tout brûler parce qu’ils voulaient s’en approprier coute que coute les rênes. Une semaine aussi ou ceux qui détenaient ce pouvoir – parfois depuis des décennies – ont réveillé le diable qui sommeillait en eux pour tenter d’anéantir – bien souvent au sens propre du terme – l’adversaire et tous ceux qui lui ressemblaient.
Faut-il donc désespérer des hommes politiques, qui ont la détestable tendance de ne regarder que leur nombril là où ceux dont ils réclament les suffrages regardent plutôt, bien plus loin que ce petit organe, l’estomac qui à l’intérieur du ventre abritant ce nombril, crie famine ?

L’autre leçon à retenir de cette élection, c’est incontestablement la percée fulgurante des candidats indépendants. C’est sans doute de mémoire d’Ivoirien, la première fois que des élections enregistrent un nombre aussi important de candidatures affranchies des partis politiques. Bien sûr, beaucoup d’analystes politiques ou qui se proclament tels, diront que cette indépendance est factice. Ils argumenteront que ces nombreux hommes et femmes gardent intact le cordon ombilical qui les lient à leur partis d’origine. Ils diront qu’après tout, dans la quasi-totalité des cas, ces personnes « reviendront à la maison-mère » après avoir ou non remporté la victoire. Du reste, ils n’ont pas si tort, puisque ce « chemin du retour » a déjà commencé pour certains.

Mais c’est dans le message dont il est porteur pour le jeu politique en Côte d’Ivoire, ce pays ultra politisé où lever le petit doigt contre le dictat des barrons peut s’avérer fatal pour une carrière politique, qu’il faut pouvoir déceler les signes avant-coureur de la rupture d’un certain ordre établi. Par leur acte, les indépendants ont bien enfoui dans les esprits des garants des partis politiques que seule compte la volonté de la base, c’est-à-dire du peuple, mieux, du petit peuple. C’est à lui et à lui seul, a-t-il désormais décidé, qu’il revient la latitude de se choisir ceux qui doivent présider à son destin.

Au vu des résultats du scrutin, on ne peut pas dire que cette option ne leur ait pas souri. On ne peut pas dire que la leçon n’est pas bien partie pour être comprise par ceux à qui elle est destinée.
Cette percée des indépendants a aussi révélé une chose, c’est l’entrée des jeunes dans l’arène politique. Ils sont nombreux à s’être présentés à ces élections et à avoir triomphé, parfois de gros calibres, de surcroît soutenus – financièrement notamment – par leur direction. Là encore, la base lance le message de la nécessité d’une rupture générationnelle. Elle semble dire à la vieille garde, qu’elle entend bien épouser l’air du temps, celui du travail sur des bases modernes, des nouvelles technologies, etc. Elle ne veut plus, cette base, se laisser bercer par des discours lénifiants sans lendemain, dont raffolent des politiciens qui ont encore les pieds dans la dimension affective d’une certaine politique aux relents parfois dynastiques

PAR emmanuel Koré
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