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Économie Publié le jeudi 25 juillet 2013 | Le Patriote

La grande interview / Jean-Louis Billon à propos de la cherté de la vie : “Il faut supprimer toutes les taxes informelles ou les coûts illégaux”

© Le Patriote Par Didier ASSOUMOU
Relance économique: le forum d`affaires franco-ivoirien s`ouvre en présence du premier ministre.
Lundi 15 octobre 2012. Abidjan. Hotel Ivoire.Les différents partenaires du premier évènement officiel de promotion des échanges économiques entre la France et la Côte d`Ivoire animent un point de presse. Photo: Jean-Louis Billon, président de la Chambre de commerce et d`industrie de Côte d`Ivoire.
En marge de la rencontre avec les associations de consommateurs, nous avons rencontré le ministre du Commerce, de l'Artisanat et des Pme, Jean-Louis Billon. Il fait le bilan de huit mois de présence dans ce département ministériel, évoque les décisions relatives à sa sphère de compétence, la cherté de la vie et l'affaire Bolloré.
Le Patriote : Monsieur le Ministre, voilà huit mois que vous êtes en charge du Ministère du Commerce, de l'Artisanat et de la Promotion des Pme. Quel bilan?
Jean-Louis Billon : Je vous remercie de l'opportunité que vous nous donnez de parler aux Ivoiriens et faire le point de nos actions. Quand nous sommes arrivés à la tête de ce département, il nous fallait d'abord faire l'état des lieux. Le ministère était dans une situation délicate, d'abord, parce que d'un ministère avec un portefeuille, nous avions désormais un ministère avec trois portefeuilles : le Commerce, l'Artisanat et la Promotion des PME. Ensuite, parce que ces trois portefeuilles regroupaient désormais quelques 900 agents dont plus de 200 sans bureaux en raison du déménagement de l'immeuble abritant notre ministère. L'immeuble CCIA étant affecté à la Banque Africaine de Développement (Bad) pour son retour, nous devions relocaliser au plus vite l'ensemble du personnel. Nous avons trouvé des bureaux, que nous louons dans plusieurs immeubles de la place. Ceci a considérablement réduit notre efficacité par rapport au rythme de travail initialement programmé. Nous avons donc installé tous les agents, dans des bureaux rééquipés en meubles, matériels bureautiques et informatiques, avec les liaisons téléphoniques et internet ainsi que les interconnexions entre les services et également e-gouv. Ce sont les Délégations Régionales et Départementales qui sont encore dans l'attente et nous avons de gros efforts à faire pour leur équipement. C'est une véritable préoccupation pour nous. Nous dotons progressivement chacun de nos services et agents. En dehors du redéploiement de nos équipes, nous avons repris l'organigramme du ministère, pour plus d'efficacité. Nous avons aussi rédigé notre plan d'action et progressé au niveau du Programme de Travail Gouvernemental. Il était important que nous apportions rapidement notre propre programme et notre vision pour chaque département.

LP : De quoi s'agit-il ?
JLB : Au niveau du commerce, nous avons immédiatement décidé de proposer un projet de code de la consommation pour mieux protéger le consommateur, surtout à l'ère du commerce électronique. Il y a aussi un projet de code de l'Artisanat, un projet de la loi pour les PME, un projet sur la révision de la loi sur la concurrence. Cette loi doit être adoptée à l'Assemblée Nationale afin d'être en conformité avec les directives de l'UEMOA. Il y a également le texte sur la période des soldes. Nous avons également remis sur pied la Commission de la Concurrence qui n'était plus fonctionnelle depuis 1999. Nous avons entrepris de reprendre tous les textes qui régulent le commerce et qui sont dépassés ou désormais inadaptés par rapport au contexte actuel, afin qu'ils soient mis à jour et que ceux relatifs aux conventions internationales soient ratifiées par l'Etat de Côte d'Ivoire. Certains textes datent des années 1960 et leur ancienneté est utilisée par certains agents zélés pour justifier des contrôles et des sanctions qui ne sont opportunes, ni pour les opérateurs ni même pour les consommateurs. Depuis plus de sept mois, nous essayons de faire jouer toutes les synergies pour que les agents travaillent dans de bonnes conditions. La mise en place d'un dialogue avec les syndicats et la mutuelle était essentielle car dans notre plan d'action, nous avons décidé de la création d'une cellule de veille sociale, l'assermentation de certains agents, la formation du personnel, des badges pour les agents de contrôle, la définition de fonctions, des profils et des passerelles en vue de faciliter la gestion de leur carrière. Nous avons également décidé de sacrifier une partie du budget de fonctionnement du cabinet en l'affectant au soutien de la mutuelle car elle regroupe tous les agents du ministère. Concernant les syndicats, nous les avons aidé financièrement et matériellement afin d'installer leurs sections dans les délégations régionales et départementales. Mais grâce à la révision de procédures de contrôle, à la création d'un comité de suivi des amendes transactionnelles, à la fois pour protéger les agents, les commerçants et les consommateurs, nous avons obtenu une augmentation des recettes de plus de 300 % au niveau du commerce intérieur par rapport à l'année dernière. Autant de résultats qui ont permis d'augmenter le montant des primes versées aux agents. On a donc véritablement gagné en efficacité ! Beaucoup reste à faire, et en fonction du budget, on va mieux s'équiper et gagner en optimisation du personnel et des ressources sur l'ensemble du territoire. L'essentiel est d'avoir lancé ce plan dont les fruits devraient porter d'ici 2014.

LP : Concrètement, qu'est-ce qui a été fait depuis votre arrivée et qui concerne l'ensemble des ivoiriens?
JLB : Au vu de la matrice du plan d'action de notre ministère, vous constaterez que l'on a bien avancé, et surtout que l'on travaille en toute transparence. Il est vrai que les Ivoiriens ne ressentent pas ce travail au quotidien, préoccupés qu'ils sont par le coût de la vie, qui ne cesse d'augmenter. Concernant le coût de la vie, justement, je voudrais insister très particulièrement sur le travail accompli. D'abord, lorsque l'on parle de cherté de la vie, il faut savoir comment un prix est composé et quels sont les éléments qui impactent sur un produit. Nous nous sommes donc attelés à éditer un rapport reprenant toutes ces informations. Désormais, les Ivoiriens sauront exactement pourquoi un produit arrivant sur le marché est à tel ou tel prix. Nous avons procédé à l'identification de tous les facteurs qui concourent au coût de la vie. Il était important de savoir pourquoi la vie est chère, indépendamment des cours de certaines matières premières et des cours mondiaux de certains produits, et pourquoi, il y a des variations du prix de certains produits. La population se tourne toujours vers le Ministère du Commerce quand il s'agit du coût de la vie, alors qu'il n'est pas responsable de la fixation des prix ni des facteurs d'augmentation. Tous les facteurs sont identifiés et tous les ministères concernés sont connus. C'est d'ailleurs à la suite de nos différents constats que nous avons relancé le Comité Interministériel sur la Cherté de la Vie.

LP : Quelle sera son utilité ?
JLB : Ce Comité permet de réfléchir et faire des propositions pour l'obtention des meilleurs prix dans le pays. Mais il doit être beaucoup plus offensif qu'il ne l'est actuellement.

LP : Justement, que préconisez-vous pour faire baisser les prix à la consommation sur les marchés?
JLB : Faire baisser les prix reste complexe. Pour les produits fabriqués en Côte d'Ivoire, seule la compétitivité de nos produits peut apporter une réponse à l'augmentation des prix. Les entreprises doivent se faire concurrence pour mettre à la disposition des consommateurs, une gamme de produits en quantité et en qualité, à un coût abordable. Nous devons produire beaucoup plus car c'est la quantité qui va permettre de jouer sur les prix. En ce qui concerne les vivriers, il n'est pas normal qu'ils soient chers en Côte d'Ivoire. Le prix du vivrier reste très abordable mais tout dépend du lieu où vous l'achetez. Pour des produits de grande consommation tels que le riz, l'huile et le sucre, il n'y a que la quantité produite qui peut nous amener à une baisse des prix. La création d'entreprises et d'un environnement propice aux affaires doit être favorisée. A travers la création d'entreprises, on augmente le nombre de travailleurs et par conséquent le pouvoir d'achat. Mais je le redis encore, en supprimant toutes les taxes informelles ou les coûts illégaux on peut déjà grandement faire baisser les prix de certains produits. Il faut souligner qu'en Côte d'Ivoire, les taxes illégales, en d'autres termes le racket, constituent le principal facteur d'augmentation du coût de la vie. Déjà, il y a quelques années, une étude du Bnetd avait démontré que la Côte d'Ivoire avait le secteur transport le plus cher du monde. A titre d'exemple, au cours des 3 premiers mois de l'année 2013, on note que c'est dans le Gbèkè que les plus fortes concentrations de barrages existent (axe Bouaké - Niakara : densité=11 et axe Bouaké - Katiola : densité=14), suivi en cela de la région de l'Agnéby (axe Agboville-Grand Morié : densité = 12 ; axe Agboville-Abidjan : densité= 8), la région du Guemon, avec une densité observée de 12 barrages au 100 km. Le niveau élevé de la densité au 100 km dans ces régions montre l'ampleur des entraves qui peuvent y exister puisqu'à chaque barrage, correspond un prélèvement illicite. Les prélèvements illicites dans les régions dépassent en moyenne le seuil de 15.000 francs cfa aux 100 km. Comment, après ce constat pensez-vous faire baisser le coût des denrées !

LP : Alors justement, quelle est votre recette pour lutter contre le racket ?
JLB : La sanction tout simplement. Mais il doit y avoir une véritable volonté d'appliquer cette sanction. Pour ce qui concerne mon département, et dès ma passation de charges, je l'ai dit, quand je reçois une plainte, ou que je constate un dysfonctionnement, je l'analyse et la sanction suit si les faits sont avérés après enquête. Chez nous, au lieu de sanctionner les fautes on déplace les problèmes ! Et le phénomène continue car toute faute impunie engendre une progéniture de fautes. C'est pourquoi nous avons mis à la disposition des consommateurs et des commerçants, un numéro vert (80 00 00 99 / 80 08 00 09) afin de faciliter l'accès direct au ministre et porter plainte. Mais il n'y pas seulement des agents indélicats, il y a également des commerçants véreux qui trouvent parfaitement leur compte dans des situations floues pour écouler sur le marché des produits avariés ou issus de contrebande. Cela ne saurait prospérer éternellement. La transparence dans toutes nos activités est également un gage de bonne gestion. Les procédures que nous avons mises en place en sont la meilleure preuve. Depuis que nous avons supprimé la manipulation d'argent, nous avons tout de même augmenté nos recettes de plus de 300 %. Tout le traitement de contrôle est effectué selon des procédures très précises et la chaîne des responsabilités est « désolidarisée » pour éviter toute envie d'arrangement illicite. Les résultats de nos méthodes sont très concrets même si nous constatons avec parfois de la déception, des freins, voire des menaces de la part de certains agents n'ayant plus accès à certaines opérations. C'est bien dommage mais nous espérons vivement que tout rentrera vite dans l'ordre.

LP : Vous avez certes pris des mesures, ouvert de grands chantiers, mais les consommateurs qui étaient jusque-là habitués à vos coups de gueule, estiment ne pas sentir votre ministère à leurs côtés. Que répondez-vous ?
JLB : Oui j'en suis bien conscient. Il faut tout de même préciser que je ne suis plus dans la situation d'interpellant depuis que je suis Ministre. Je suis dans la situation d'interpellé, et à ce titre, mon discours est différent en tonalité. Cela ne veut pas dire que je n'ai pas la capacité de parler. Cela veut dire que je dois parler en fonction des dossiers qui sont traités par mon département. Le vrai débat se situe au niveau de la cherté de la vie dont nous sommes les premiers à nous plaindre. Nous en avions d'ailleurs parlé dès notre prise de fonction. De ce point de vue, l'Ivoirien a raison de manifester son mécontentement. J'ai pour habitude de prendre l'exemple de l'Allemagne et de la France, dans la communauté européenne. Comme la Côte d'Ivoire, dans la sous-région, l'Allemagne a l'économie la plus forte de l'Union européenne. Mais contrairement à nous, dont le coût de la vie est le plus élevé de l'UEMOA, l'Allemagne a le coût de la vie le moins cher. Elle (la vie) est environ 30 % moins cher que la France. Les années de crise ont fortement diminué le pouvoir d'achat des ménages qui ont une pression plus forte. Il est donc normal que les Ivoiriens se plaignent et pas seulement sur le panier de la ménagère. Le logement, le transport, l'éducation, la santé, tout est trop cher ! Il reste peu de place pour les loisirs qui constituent aussi un pan important de l'économie. Les circuits commerciaux qui appliquent des niveaux de prix parfois inexpliqués doivent être interpellés afin qu'ils respectent les règles commerciales et les consommateurs. Si en plus vous y ajoutez le phénomène de racket et des barrages qui semblent reprendre, notamment à l'ouest. C'est un facteur important qui intervient dans le prix des denrées. Nous l'avons parfaitement expliqué dans notre dernier rapport sur la vie chère.

LP : Trouvez-vous normal que la Côte d'Ivoire qui bénéficie de bonnes conditions naturelles, puisse continuer d'importer du riz pour combler son déficit de production ?
JLB : Ce n'est pas normal et le gouvernement a pris conscience de ce phénomène en mettant en place une Stratégie nationale pour le développement de la riziculture (Sndr) et l'intensification de la culture du riz. Avec l'identification des zones de production, il y a de bons résultats. En quelques mois, il y a eu déjà 200 mille tonnes de riz local catégorisé en riz semi-luxe produit en plus. D'ici la fin de l'année, on devrait franchir le million de tonnes de riz produit dans notre pays. Nous consommons en moyenne, annuellement, 1,6 million de tonnes de riz en Côte d'Ivoire pendant que la production nationale n'est que de 980 000 tonnes de riz blanchi pour 2012. En 2015/2016, nous serons entre 1,2 et 1,6 millions de tonne de riz produit. Il faut aussi tenir compte du cours mondial du riz. Il faut une baisse pour que le consommateur ivoirien ressente lui aussi véritablement une baisse locale. Même si nous produisons demain plus de 3 millions de tonnes de riz au plan national, si le cours mondial de cette denrée est élevé, le kg du riz restera toujours cher. L'Etat contrôle le prix du kg du riz au plan local mais ne peut faire de même au plan international, sauf à subventionner ce prix ! Ce qui, à notre sens, n'est pas envisageable. Le paysan ivoirien doit plutôt être aidé pour produire plus de riz. Cela permettra au gouvernement de lutter davantage contre la pauvreté, dont le taux est particulièrement élevé dans nos campagnes.

LP : L'importation du riz est un négoce juteux qui profite à certains cercles privilégiés. Ça été le cas, sous les régimes précédents dit-on et il se dit que les mêmes pratiques ont pignon sur rue. Faut-il entrevoir un monopole déguisé ?
JLB : Votre approche ne me semble pas la meilleure car l'importation du riz est libéralisée. Il ne s'agit donc pas d'une chasse gardée. Par contre, ce qu'on a pu déplorer auparavant, c'est qu'une seule structure importait à elle seule plus de 50 % du riz consommé en Côte d'Ivoire. Du point de vue du droit de la concurrence, ce n'est pas une bonne chose. La multiplication du nombre d'importateurs aujourd'hui, est la meilleure solution car elle permet la mise en compétition des entreprises qui sont alors obligées de revoir leurs coûts. Cela ne peut qu'entraîner une baisse du prix du kg du riz à la consommation, avec des prix plus « réels ». Je voudrais saisir l'opportunité de votre question pour mettre l'accent sur le fait que plus vous avez de concurrence, plus vous vous donnez la possibilité de créer des entreprises et donc des emplois.

LP : En 2012, l'INIE a initié un recensement. Où en sommes-nous avec les résultats de cette opération ?
JLB : Il s'agit d'un recensement des PME. Parlant d'identification, celle d'une entreprise est automatique. Il suffit de contacter les différents services compétents de l'Etat et de faire des rapprochements pour obtenir le dénombrement des opérateurs économiques régulièrement immatriculés. Les services de l'Etat sont outillés pour le faire. Et d'ailleurs, s'ils ne l'étaient pas, ils ne pourraient pas collecter l'impôt sur toute l'étendue du territoire. Ce recensement ne nous semble pas très pertinent mais nous allons en analyser les résultats. Nous en obtiendrons au moins une photographie des Pme, à un moment donné. Par ailleurs, dès notre arrivée, après la revue des dossiers, nous avons constaté qu'il était urgent de restructurer cette structure pour la rendre plus opérationnelle dans sa mission et surtout la préparer à devenir l'Agence des Pme.

LP : Que représente l'Artisanat pour votre ministère ?
JLB : C'est la filière où se trouve le plus grand nombre d'employés et d'auto-emplois. Mais il est vrai que dans l'inconscient populaire, quand on parle d'Artisanat, on parle de secteur informel, de capitaux moins importants, de moins d'infrastructures et surtout d'entreprises à notoriété moins évidente. Mais l'impact sur la vie quotidienne est pourtant réel. Dès notre arrivée, nous avons rencontré aussi bien les artisans que les PME et des conclusions établies par mon équipe, trois grandes problématiques se sont dégagées : d'abord le besoin en renforcement de capacité et en formation, ensuite le financement et enfin le recasement. Il faut rendre davantage formelles les activités des artisans, non parce qu'ils sont dans l'illégalité, car la plupart des artisans possède un registre du Commerce et paie les taxes légales, mais plutôt parce que leur statut ne correspond pas forcément aux règles appliquées habituellement aux PME ou aux autres opérateurs économiques. Nous travaillons à cet effet à l'élaboration d'un code de l'Artisanat, en conformité avec les directives de l'Uemoa, mais aussi au Registre des Métiers, en collaboration avec la Chambre Nationale des Métiers de Côte d'Ivoire. Avant la fin de l'année, nous aurons donné non seulement un statut réel à ces acteurs économiques, mais aussi un statut fiscal particulier. En plus du code de l'artisanat, nous avons initié certains projets sur toute l'étendue du territoire nationale, qui exigent une grande implication de notre part, notamment au plan financier, tels que les villages artisanaux et les centres de formation et de redynamisation de la Chambre Nationale des Métiers. Il y a aussi des dossiers sensibles tels que la casse de N'Dotré.

LP : Qu'en est-il au niveau des Pme ?
JLB : Elles constituent le fondement des entreprises en Côte d'Ivoire comme dans tout pays. C'est aussi bien au niveau des Pme qu'au niveau de l'artisanat, que l'on trouve le plus gros vivier d'emplois. La Pme est la structure qui reflète le dynamisme d'une économie et qui en détermine la compétitivité. Une grande entreprise ne peut être compétitive que si elle trouve à ses côtés, un tissu de Pme organisées, structurées et fortes, capables d'assurer une sous-traitance de métiers qu'elle ne sait pas faire. Sur ce volet-là, nous travaillons sur une loi des Pme inspirée de la Small Business Act, aux Usa, ainsi que sur la création de l'Agence des Pme.
LP : Quelles sont vos recettes pour aider à relancer les Pme qui ont été très fragilisées au sortir de la crise ?
JLB : Nous avions fait des recommandations lorsque nous étions Président de la CCI-CI, et nous considérons qu'elles sont toujours valables. Mais nous avons maintenant une démarche beaucoup plus institutionnelle et conforme aux recommandations du gouvernement. Nous fondons beaucoup d'espoir sur le texte -small business act à l'ivoirienne- qui va permettre aux Pme d'être beaucoup plus fortes et attractives. Cette loi va exiger par exemple, en ce qui concerne les gros marchés à passer par appel d'offres, un taux de 20 % réservé aux Pme locales. Les Pme qui ont une partie de ce marché seront soit préfinancées par l'adjudicataire soit par une banque. La Banque mondiale nous assiste dans ce sens, dans le cadre de la mise en place de l'Agence des Pme. Il nous faudra ensuite restructurer les fonds mis en place et destinés à l'artisanat et aux Pme. Non seulement dans leurs modes de fonctionnement mais aussi dans leurs modes d'allocation des ressources aux Pme qui sont effectivement très fragilisées suite aux crises successives. Sur ce chapitre, il ne faut pas oublier que nous avons perdu plus de la moitié de nos entreprises, autant en salariés du secteur privé moderne.

LP : La mesure d'importation de la ferraille ?
JLB : En ce qui concerne la mesure d'interdiction d'exportation de la ferraille, elle vise à alimenter d'une part, les industries locales qui se mettent en place depuis quelques années et d'autre part, à recycler la ferraille et la fonte avant exportation. Un pays comme le Japon, qui n'a pas de fer, s'est trouvé à un moment donné, leader mondial de la production d'acier alors qu'il n'exporte pas sa ferraille. Pourquoi ne pas s'inspirer de bons exemples !

LP : Monsieur le Ministre, on ne peut pas vous avoir sans parler de cette affaire de concession du deuxième terminal à conteneurs du port d'Abidjan. Vous n'en parlez plus ?
JLB : Je savais que vous me poseriez la question ! Sachez qu'il y a une procédure pendante devant la Cour de Justice de l'UEMOA et que nous devons attendre la décision de cette juridiction supranationale. Sur le motif qui a motivé notre position, et que nous avons signifié en son temps aussi bien au Ministre des Transports qu'au Directeur Général de l'Autorité de Régulation, nous sommes constants. En 2003, nous avons eu une position et elle n'a pas varié. Il aurait d'ailleurs été difficile pour nous d'avoir une position, il y a dix ans et changer d'avis sur les mêmes sujets aujourd'hui étant donné que la donne n'a pas changé. Déjà en 2003, les gens n'ont pas compris que la Chambre de commerce et d'Industrie qui est membre du Conseil d'Administration du Port Autonome d'Abidjan et qui n'avait pas été informée de l'opération se plaigne. A l'époque, il y avait déjà vice de procédure. Même la Banque Mondiale avait émis des critiques car elle gérait le Programme d'Ajustement du secteur des transports. Je ne ferai pas d'autres commentaires, trop d'encre et de salive ont déjà coulé sur cette affaire, mais j'insisterais sur le fait que favoriser la concurrence contribue à la baisse des prix et à l'émulation du tissu économique.

Réalisée par Jean-Eric Adingra
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