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Politique Publié le samedi 21 septembre 2013 | Le Patriote

Sur le plateau du « 20heures » de RTI1: Gnénéma Mamadou Coulibaly (ministre de la Justice et des Libertés publiques)

© Le Patriote Par MDHLP
Le ministre Coulibaly Gnénéma rencontre les organisations ivoiriennes des droits de l`homme.
le lundi 5 novembre 2012 à son Cabinet lLe ministre Coulibaly Gnénéma rencontre les organisations ivoiriennes des droits de l`homme.
Sur le plateau du journal télévisé de 20h, de RTI1, le Garde des Sceaux, ministre de la Justice et des Libertés publiques, Gnénéma Mamadou Coulibaly a expliqué, hier soir, les mesures prises par le gouvernement en Conseil des ministres, notamment le non transfèrement de Simone Gbagbo et la grâce qui sera accordée à 3000 détenus.
Q : Pourquoi avoir transféré l’ex-président Laurent Gbagbo à la CPI et décidé de juger son épouse ici en Côte d’Ivoire ? On aurait pu juger l’ex-président ici en Côte d’Ivoire…
Gnénéma Mamadou Coulibaly : On aurait pu juger l’ex-président ici en Côte d’Ivoire si les circonstances étaient les mêmes. Souvenez-vous que lors du transfèrement de Laurent Gbagbo à la Cour pénale internationale, en novembre 2011, la Côte d’Ivoire sortait à peine d’une longue crise armée. Nous n’avions pas nos infrastructures judiciaires en état. Les maisons d’arrêt avaient été détruites. Les prisons et les tribunaux n’étaient pas fonctionnels et même certains magistrats n’étaient pas à leur poste. A cette période-là, il était manifestement difficile de pouvoir procéder au jugement de Laurent Gbagbo. Il faut aussi noter qu’en principe, la Cour pénale internationale n’intervient que lorsque l’Etat, dans lequel les faits occasionnent sa compétence, n’est pas en mesure de juger, parce que les infrastructures, comme en Côte d’Ivoire, étaient détériorées ou encore n’a pas la volonté que la CPI intervienne. La CPI a une compétence de subsidiarité. Ça veut dire que qu’en tout temps, le pays, dans lequel les faits sont commis, demeure en priorité celui qui doit pouvoir juger les auteurs des faits incriminés. C’est ce qui explique qu’aujourd’hui, où nos juridictions opérationnelles, la Côte d’Ivoire décide de juger Simone Gbagbo.

Q : Si les juridictions sont opérationnelles, cela veut dire qu’on peut demander le retour du président Laurent Gbagbo pour être jugé ici, comme vous le dites. Tout est en place ?
GMC : Nous avons saisi la CPI qui est en train de mener sa procédure. Il est normal qu’elle vide sa saisine. Si d’aventure, elle nous disait que nous avons la capacité de juger monsieur Laurent Gbagbo, nous aviserons.

Q : Cette volonté de juger l’ex-Première Dame en Côte d’Ivoire, pour certains, est le résultat d’une pression de la communauté internationale sur les autorités ivoiriennes. On parle des Etats -Unis d’Amérique et de la France ? Quelle est votre réaction ?
GMC : J’ai déjà dit à plusieurs occasions que le gouvernement de Côte d’Ivoire est un gouvernement responsable, il n’agit sous aucune pression. Personne ne pourrait venir nous imposer de juger quelqu’un en Côte d’Ivoire, si tant est que les infrastructures, les hommes n’existent pas. Nous sommes dans un mécanisme de responsabilité. Nous pensons que nous prenons nos décisions en fonction des circonstances du moment. Aujourd’hui, la Côte d’Ivoire, qui est un pays revenu tout à fait à la norme, se doit de pouvoir juger les personnes auxquelles est reproché quelque chose. Ceci est d’ailleurs plus commode puisque les témoins, les victimes, tout le monde est sur place. C’est plus efficace pour la manifestation de la vérité.

Q : S’il n’y a pas de pression, on peut parler de relent politique, de souci de l’apaisement. Est-ce des mesures qui s’inscrivent dans le processus de réconciliation nationale ?
GCM : Je voudrais dire à l’attention de tous que la justice ivoirienne fonctionne de manière indépendante. Vous savez, nous pouvons accepter qu’un de nos concitoyens soit traduit devant une juridiction extérieure mais, les magistrats ivoiriens, qui ont reçu des formations, toutes aussi qualifiantes, que celles des magistrats qui exercèrent à la CPI, ne se sentiraient pas à l’aise de ne pas pouvoir démontrer à la face de la communauté nationale et internationale qu’ils sont en mesure de conduire des procès qu’elle qu’en soit l’importance. Il y a en eu, des grands procès en Côte d’Ivoire. Il est normal que la justice qui, après avoir analysé ses capacités, s’estime en mesure de juger madame Simone Gbagbo, en fasse la demande au gouvernement. Nous avons porté la voix de la justice ivoirienne au Conseil des ministres de ce matin (hier matin ndlr) qui a marqué son accord.

Q : Alors pas de transfèrement pour l’épouse de l’ex-chef de l’Etat, pas de transfèrement aussi pour Charles Blé Goudé ?
GMC : Nous n’avons encore, au niveau du gouvernement, statué sur le cas Blé Goudé, parce que c’est lorsque la CPI lève le mandat d’arrêt, le rend public qu’il demande à un Etat de procéder au transfèrement de la personne visée par ce mandat d’arrêt. Charles Blé Goudé fait effectivement l’objet d’un mandat d’arrêt, mais à ce stade nous n’avons pas encore été sollicités par la CPI pour assurer son transfèrement à La Haye. Le gouvernement, en temps opportun, apportera la réponse qu’il faut à une telle demande, si elle était formulée.

Q : Parlant de Charles Blé Goudé, dans quel état se trouve-t-il ?
CMG : Charles Blé Goudé se porte bien. Je n’ai pas été saisi d’une situation anormale le concernant. Je peux affirmer qu’il se porte très bien.

Q : Dans la crise postélectorale qu’a connue notre pays, les responsabilités sont partagées. Qu’en est-il des ex-Forces nouvelles qui sont dans le collimateur de la justice ? Pouvez-vous rassurer les uns et les autres ?
CMG : Je voudrais rassurer les uns et les autres. Au terme du rapport de la Commission nationale d’enquête que nous avons instituée, il a été pointé du doigt, des responsables des ex-Forces nouvelles. Le juge d’instruction, qui est saisi du dossier et qui est en train, aujourd’hui, de le faire avancer à son temps, prendra les décisions nécessaires s’il a des éléments en charge contre les responsables militaires. L’enquête de la Commission nationale n’était pas une enquête judicaire. On a entendu des gens qui n’avaient pas la capacité technique pour procéder à ces enquêtes. Il revient maintenant aux magistrats, le juge d’instruction qui conduit le dossier de conduire les investigations pour éventuellement, s’il y a lieu d’inculper les auteurs qui sont dans tous les camps. Le Président de la République l’a assez indiqué. En Côte d’Ivoire, il n’y aura d’impunité pour personne. Tous ceux qui seront visés par des infractions, tous ceux qui seront reconnus ou supposés être des auteurs d’infractions devront répondre devant la justice. C’est une volonté ferme du chef de l’Etat et nous sommes là pour que celle-ci se traduise en acte concret.

Q : Parlons maintenant des 3000 concernés par la grâce présidentielle. De quoi s’agit-il quand on parle de délits mineurs ?
CMG : Nous avons indiqué dans le communiqué, les personnes qui ne sont pas concernées. On parle de délits mineurs généralement lorsqu’il s’agit de vol simple, par exemple à la tire, de faux et usage de faux, de coups et blessures volontaires, de violence, de voies de fait, de défrichement illicite de forêt, de consommation de cannabis. Il y a beaucoup d’infractions qui ne rentrent pas dans le cadre des infractions qu’on considère comme portant un trouble substantiel à l’ordre public et à la paix sociale.

Q : Dans ces 3000 concernés, figure t-il des pro-Gbagbo ?
CMG : S’ils sont jugés pour des qualifications comme celles que nous venons de décrire et que leur condamnation est définitive, parce que pour bénéficier de la grâce, il est bon de savoir qu’il faut être condamné définitivement. La procédure des pro-Gbagbo est en phase d’instruction. La grâce ne peut pas concerner les personnes qui sont en phase d’instruction. Seules les personnes jugées et condamnées peuvent bénéficier d’une grâce. Nous avons indiqué que si ces pro-Gbagbo sont poursuivis pour des faits d’atteinte à la sûreté de l’Etat ou pour des infractions militaires, naturellement, elles ne peuvent pas bénéficier de la grâce que nous venons de prendre le jour.

Q : En 2007, l’ex président a accordé la grâce à 107 prisonniers. Cette année on parle de 3000. Pourquoi un nombre aussi important, monsieur le ministre?
CMG : Vous venez d’en donner la réponse. La décision, que vous évoquez, a lieu en 2007, nous sommes aujourd’hui en 2013, soit quasiment six années après. Vous savez que la grâce est une tradition dans l’administration de la justice. Normalement dans tous les Etats à l’occasion des grands évènements comme la fête nationale, comme la fin d’année, le gouvernement accorde des grâces aux prisonniers. Parce qu’il y a des délinquants primaires qui peuvent être transformés en grands bandits au contact des caïds par une longue détention. L’administration judiciaire peut à un moment donné voir opportunément si on peut accorder, comme la loi l’autorise, parce que disons le, c’est la Constitution qui, en son article 49, autorise le Président de la République à prendre la mesure de grâce. Etant donné qu’il n’y a pas eu de grâce de 2007 à aujourd’hui, il va s’en dire que le nombre de personnes susceptibles d’en bénéficier est plus élevé. Rappelons qu’en 2007, la grâce a été ponctuelle, elle ne concernait que les femmes. La population carcérale, c’est plus de 10160 détenus, là où nos prisons sont habilitées à ne recevoir que 4500. Il faut aussi penser à la paix sociale.

Q : Peut-on bénéficier d’une liberté provisoire et avoir une activité politique intense ?
CMG : Oui. La loi sur les partis politiques n’interdit pas à une personne qui bénéficie d’une liberté provisoire d’exercer des activités politiques. La loi indique que lorsque vous avez fait l’objet de condamnation pour certaines infractions vous ne pouvez pas diriger un parti politique. Tant que vous n’êtes pas jugés définitivement, temps que vous êtes en liberté provisoire, vous êtes supposés aussi être innocents parce qu’il y a la présomption d’innocence. Ne l’oubliez pas. C’est la règle principale qui fait fonctionner nos juridictions pénales. Vous êtes en liberté provisoire, vous êtes considérés comme encore innocents. Si la décision intervient et qu’elle vous condamne, en ce moment-là vous êtes privés de droits publics. Et si c’est le cas, vous ne pouvez pas diriger un parti politique.

Recueillis par Thiery Latt
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