Depuis le mois de juillet 2013, le gouvernement a interdit l’exploitation et la commercialisation du bois de vêne en Côte d’Ivoire. Des opérateurs du secteur ont donné de la voix pour condamner cette mesure qui, selon eux, leur cause un lourd préjudice. Nous avons rencontré Jacob N’Zi, un écologiste bien connu, qui fait des propositions en vue de sauver la forêt ivoirienne.
A la tête de l’Ong dénommée Groupe écologique de Côte d’Ivoire (GECI), vous avez mené, pendant une décennie, un combat pour la préservation du patrimoine forestier ivoirien. Mais depuis un certain temps, c’est le silence radio. Que se passe-t-il ?
Jacob N’Zi : Je continue de mener des actions en faveur de la préservation du couvert forestier. Dès lors qu’on veut une pluviométrie stable pour une meilleure rentabilité de nos produits agricoles, nous devrions combattre la destruction du patrimoine forestier. C’est pourquoi je salue la décision du président de la République qui a pris un décret en juillet dernier, portant interdiction de l’exploitation, de la coupe, du transport, de la commercialisation et de l’exportation du PTEROCARPUS SPP (vêne) qui est le bois dominant dans le nord. Et cela, pour préserver l’environnement et l’écosystème des zones septentrionales. Pour le reste, je voudrais dire que depuis janvier 2013, j’ai démissionné de mon poste de directeur exécutif du GECI, pour inconvenance personnelle. Tout en restant écologiste, j’occupe présentement mon temps à faire des travaux publics et de l’agriculture.
Le GECI n’épouserait-il pas votre vision des choses, dans le cadre de la préservation de la forêt ? Pourquoi avoir démissionné au moment où le combat contre la destruction de la forêt est engagé par le gouvernement ?
Je ne voudrais pas m’étaler sur ce sujet. Mais, ce que je peux dire au passage, c’est que le 22 juin 2012, l’ancien ministre des Eaux et Forêts avait pris un Arrêté pour interdire l’exploitation du bois de vêne au-dessus du 8ème parallèle. Pour contourner cette décision, des opérateurs véreux acheminaient le bois de vêne vers le Burkina Faso voisin. C’est alors qu’en tant que Ong, j’ai conduit une mission dans ce pays pour constater l’ampleur du phénomène. Sur place, mes amis et moi avions découvert des stocks importants de bois derrière l’aéroport de Bobodioulasso, sur un port sec. J’ai produit un rapport assorti de recommandations. A savoir, permettre le ramassage des bois pour éviter une saignée vers les pays voisins. Ce qui pourrait être bénéfique pour la Côte d’Ivoire, au double plan écologique et économique. Pour moi, si ce bois était vendu aux opérateurs, ceux-ci pourraient faire du reboisement compensatoire dans les zones déboisées en vue de régénérer la végétation. Malheureusement, je n’ai pas été suivi. Cela a débouché sur de fâcheuses divergences de vue au sein de l’Ong. Moi, j’ai pris du recul car j’avais d’autres challenges.
Il nous revient que vous avez contacté des partenaires israéliens et suédois pour mettre sur orbite une Ong dont la vocation serait la reconstitution du couvert forestier. Est-ce que vous confirmez cela ?
(Rires) Je préfère ne pas faire de commentaire pour l’instant. Moi, j’adopte toujours la philosophie du président de la République qui consiste à privilégier l’action au détriment des déclarations pompeuses. Le moment venu, vous serez davantage situé.
En tant qu’écologiste, quel commentaire faites-vous du décret du chef de l’Etat portant interdiction, exploitation et commercialisation du bois de vêne en Côte d’Ivoire ?
Beaucoup de choses ont été dites autour de ce décret. Pour ma part, je demande aux opérateurs de la filière bois de se conformer à cette décision, si nous voulons stopper l’avancée du désert. Mais, au-delà de ce décret, je voudrais proposer la mise sur pied d’un comité scientifique composé d’Ong nationales et internationales, d’experts forestiers ivoiriens afin d’effectuer des missions d’évaluation relatives aux dégâts écologiques exercés dans la partie nord du pays. Car, il nous revient que c’est plus de 3 millions de bois de vêne qui ont été abattus et disséminés d’Odienné à Bondoukou, en passant par le centre. De notre analyse, si ces bois restent au sol, ils deviendront une menace aussi bien pour les écosystèmes que pour les habitats. En effet, le PTEROCARPUS est un bois dur, à forte densité, qui conserve le feu. Ce faisant, il pourrait devenir une ’’bombe’’ pendant la saison sèche, en cas de feu de brousse.
Si je vous comprends, les bois déjà coupés, gisant au sol, sont une menace pour l’environnement et les hommes ?
Absolument ! C’est pourquoi nous attirons l’attention du gouvernement sur le revers de ce décret qui interdit également le transport du bois de vêne. Et pourtant, il faut bien qu’on ramasse les bois déjà coupés, qui peuvent amplifier un incendie, même mineur, en pleine forêt.
Ah bon ?
Oui, il faut permettre aux nationaux de transformer ce bois sur place. Le phénomène de l’exploitation à outrance réside dans l’exportation à grande échelle, de ce bois vers l’Asie. Dés l’instant où l’on s’engage à le transformer sur place par les petites industries locales, auxquelles il sera exigé un reboisement compensatoire, l’on résoudra l’épineuse question du pillage et de la fraude qui déciment, malheureusement, le couvert forestier. Je salue, au passage, le ministère des Eaux et Forêts qui conduit, actuellement, à l’intérieur du pays, la caravane ’’journée nationale de l’arbre’’ en vue de reconstituer le couvert forestier fortement dégradé par les œuvres humaines, par le reboisement. Cette reconstitution du couvert forestier doit être le combat de chaque Ivoirien. Si les Ivoiriens optent pour le bois de teck, par exemple, pour faire du reboisement, ils pourraient réaliser des gains substantielles au bout d’une vingtaine d’années. Sans oublier qu’ils auraient amélioré notre pluviométrie qui est favorable à l’agriculture. J’exhorte également la société civile à plus d’implication dans la reconstitution du couvert forestier. Voilà le sens du nouveau combat
Réalisé par :
G. DE GNAMIEN
A la tête de l’Ong dénommée Groupe écologique de Côte d’Ivoire (GECI), vous avez mené, pendant une décennie, un combat pour la préservation du patrimoine forestier ivoirien. Mais depuis un certain temps, c’est le silence radio. Que se passe-t-il ?
Jacob N’Zi : Je continue de mener des actions en faveur de la préservation du couvert forestier. Dès lors qu’on veut une pluviométrie stable pour une meilleure rentabilité de nos produits agricoles, nous devrions combattre la destruction du patrimoine forestier. C’est pourquoi je salue la décision du président de la République qui a pris un décret en juillet dernier, portant interdiction de l’exploitation, de la coupe, du transport, de la commercialisation et de l’exportation du PTEROCARPUS SPP (vêne) qui est le bois dominant dans le nord. Et cela, pour préserver l’environnement et l’écosystème des zones septentrionales. Pour le reste, je voudrais dire que depuis janvier 2013, j’ai démissionné de mon poste de directeur exécutif du GECI, pour inconvenance personnelle. Tout en restant écologiste, j’occupe présentement mon temps à faire des travaux publics et de l’agriculture.
Le GECI n’épouserait-il pas votre vision des choses, dans le cadre de la préservation de la forêt ? Pourquoi avoir démissionné au moment où le combat contre la destruction de la forêt est engagé par le gouvernement ?
Je ne voudrais pas m’étaler sur ce sujet. Mais, ce que je peux dire au passage, c’est que le 22 juin 2012, l’ancien ministre des Eaux et Forêts avait pris un Arrêté pour interdire l’exploitation du bois de vêne au-dessus du 8ème parallèle. Pour contourner cette décision, des opérateurs véreux acheminaient le bois de vêne vers le Burkina Faso voisin. C’est alors qu’en tant que Ong, j’ai conduit une mission dans ce pays pour constater l’ampleur du phénomène. Sur place, mes amis et moi avions découvert des stocks importants de bois derrière l’aéroport de Bobodioulasso, sur un port sec. J’ai produit un rapport assorti de recommandations. A savoir, permettre le ramassage des bois pour éviter une saignée vers les pays voisins. Ce qui pourrait être bénéfique pour la Côte d’Ivoire, au double plan écologique et économique. Pour moi, si ce bois était vendu aux opérateurs, ceux-ci pourraient faire du reboisement compensatoire dans les zones déboisées en vue de régénérer la végétation. Malheureusement, je n’ai pas été suivi. Cela a débouché sur de fâcheuses divergences de vue au sein de l’Ong. Moi, j’ai pris du recul car j’avais d’autres challenges.
Il nous revient que vous avez contacté des partenaires israéliens et suédois pour mettre sur orbite une Ong dont la vocation serait la reconstitution du couvert forestier. Est-ce que vous confirmez cela ?
(Rires) Je préfère ne pas faire de commentaire pour l’instant. Moi, j’adopte toujours la philosophie du président de la République qui consiste à privilégier l’action au détriment des déclarations pompeuses. Le moment venu, vous serez davantage situé.
En tant qu’écologiste, quel commentaire faites-vous du décret du chef de l’Etat portant interdiction, exploitation et commercialisation du bois de vêne en Côte d’Ivoire ?
Beaucoup de choses ont été dites autour de ce décret. Pour ma part, je demande aux opérateurs de la filière bois de se conformer à cette décision, si nous voulons stopper l’avancée du désert. Mais, au-delà de ce décret, je voudrais proposer la mise sur pied d’un comité scientifique composé d’Ong nationales et internationales, d’experts forestiers ivoiriens afin d’effectuer des missions d’évaluation relatives aux dégâts écologiques exercés dans la partie nord du pays. Car, il nous revient que c’est plus de 3 millions de bois de vêne qui ont été abattus et disséminés d’Odienné à Bondoukou, en passant par le centre. De notre analyse, si ces bois restent au sol, ils deviendront une menace aussi bien pour les écosystèmes que pour les habitats. En effet, le PTEROCARPUS est un bois dur, à forte densité, qui conserve le feu. Ce faisant, il pourrait devenir une ’’bombe’’ pendant la saison sèche, en cas de feu de brousse.
Si je vous comprends, les bois déjà coupés, gisant au sol, sont une menace pour l’environnement et les hommes ?
Absolument ! C’est pourquoi nous attirons l’attention du gouvernement sur le revers de ce décret qui interdit également le transport du bois de vêne. Et pourtant, il faut bien qu’on ramasse les bois déjà coupés, qui peuvent amplifier un incendie, même mineur, en pleine forêt.
Ah bon ?
Oui, il faut permettre aux nationaux de transformer ce bois sur place. Le phénomène de l’exploitation à outrance réside dans l’exportation à grande échelle, de ce bois vers l’Asie. Dés l’instant où l’on s’engage à le transformer sur place par les petites industries locales, auxquelles il sera exigé un reboisement compensatoire, l’on résoudra l’épineuse question du pillage et de la fraude qui déciment, malheureusement, le couvert forestier. Je salue, au passage, le ministère des Eaux et Forêts qui conduit, actuellement, à l’intérieur du pays, la caravane ’’journée nationale de l’arbre’’ en vue de reconstituer le couvert forestier fortement dégradé par les œuvres humaines, par le reboisement. Cette reconstitution du couvert forestier doit être le combat de chaque Ivoirien. Si les Ivoiriens optent pour le bois de teck, par exemple, pour faire du reboisement, ils pourraient réaliser des gains substantielles au bout d’une vingtaine d’années. Sans oublier qu’ils auraient amélioré notre pluviométrie qui est favorable à l’agriculture. J’exhorte également la société civile à plus d’implication dans la reconstitution du couvert forestier. Voilà le sens du nouveau combat
Réalisé par :
G. DE GNAMIEN