Que retenir de la défaite de Lionel Zinsou au Bénin ? Deux choses simples, mais alors très simples.
Première chose : ceux qui continuent de clamer que la France a encore un mot à dire dans le choix des personnalités qui doivent diriger nos Etats africains se nourrissent encore de fantasmes obscurantistes de gens qui ne voient pas que les lignes bougent sur notre continent, s’ils ne sont pas carrément de piteux propagandistes qui expliquent par le sempiternel complot de la Françafrique, leur cuisante incapacité à monter sur les plus hautes marches du pouvoir.
Je m’explique. Zinsou a été présenté comme le candidat de la France (il est indéniable qu’il avait de nombreux soutiens français, étant donné sa double nationalité, cependant il est aussi vrai que Talon avait aussi des soutiens français, étant donné que c’est en France qu’il a atterri quand il avait des déboires politico-judiciaires avec Boni Yayi. Dans les deux cas, il ne faut pas être dupe, personne ne va à une compétition présidentielle, sans compter ses amis européens, américains ou africains), mais cela n’a eu aucune incidence sur le contrôle du processus électoral. Je répète à qui veut l’entendre depuis des années : aucun Français ne peut imposer un Président à un Africain, au 21è siècle, lors d’un scrutin au suffrage universel. La raison relève du bon sens même : ce sont les voix sorties des urnes qui sont comptabilisées et tant qu’un candidat a la possibilité d’avoir un représentant dans chaque bureau de vote (les hommes sont tous tentés par la fraude, pour se donner davantage de chance, on l’a vu lors des élections intra-muros en France, avec l’ex-UMP), il est difficile de manipuler les chiffres sortis des urnes.
Zinsou ne pouvait pas gagner
Deuxième chose. Lionel Zinsou, 62 ans, ne pouvait pas gagner face à Patrice Talon, 58 ans. Je m’explique encore. La défaite du premier était prévisible. Pour deux raisons très simples, qui relèvent de la science politique élémentaire. Raison un : il était candidat de la mouvance présidentielle sortante et a gagné au premier tour avec un score peu honorable (28.44%). Seulement 100 000 voix le séparaient de Patrice Talon (24.80%). En général, quand le candidat d’une mouvance présidentielle sortante (je dis bien mouvance et non parti) est en ballotage défavorable dès le premier tour (au Niger, le candidat de la mouvance présidentielle sortante était en ballotage favorable avec plus de 48% des voix), alors qu’il est parti, au premier tour, avec une coalition de partis politiques, il n’a pas assez de réserves de voix, pour le second tour.
Raison deux et elle est la conséquence de la première : Patrice Talon était soutenu par une vingtaine de candidats malheureux du premier tour, dont le troisième homme Sébastien Ajavon (23.03%), le quatrième Abdoulaye Bio Tchané (8.79%), le cinquième Pascal Irénée Koupaki (5.85%). Rappelons que tous ces candidats avaient signé avant le scrutin, un accord qui devrait permettre au mieux placé parmi eux, au premier tour, de bénéficier du soutien des autres, au second. On est exactement dans le scénario de la présidentielle ivoirienne d’octobre 2010, où le candidat de la continuité de la mouvance présidentielle s’était retrouvé en ballotage défavorable, face à un candidat de la rupture de l’opposition, soutenu par les principaux candidats malheureux du premier tour, qui avaient signé un accord de collaboration, des années auparavant. Cela ne pardonne jamais, la défaite est quasi assurée, malgré les voix discordantes esseulées de certains supporteurs (par exemple, l’association des zémidjan, soutiens d’Ajavon, au premier tour, a appelé à voter Zinsou).
Au Bénin, il s’est trouvé un candidat malheureux, qui très vite, a joué le jeu de la responsabilité républicaine en concédant avant l’heure, sa défaite électorale, même si dans le fond, il avait des raisons de se baser sur certaines irrégularités, qui de toute évidence, n’ont pas pu avoir d’incidence, sur l’issue du scrutin. L’histoire de la Côte d’Ivoire aurait été écrite autrement si cette sagesse républicaine avait habité la mouvance présidentielle de 2010. Les faits sont têtus…
André Silver Konan
Journaliste-écrivain
Première chose : ceux qui continuent de clamer que la France a encore un mot à dire dans le choix des personnalités qui doivent diriger nos Etats africains se nourrissent encore de fantasmes obscurantistes de gens qui ne voient pas que les lignes bougent sur notre continent, s’ils ne sont pas carrément de piteux propagandistes qui expliquent par le sempiternel complot de la Françafrique, leur cuisante incapacité à monter sur les plus hautes marches du pouvoir.
Je m’explique. Zinsou a été présenté comme le candidat de la France (il est indéniable qu’il avait de nombreux soutiens français, étant donné sa double nationalité, cependant il est aussi vrai que Talon avait aussi des soutiens français, étant donné que c’est en France qu’il a atterri quand il avait des déboires politico-judiciaires avec Boni Yayi. Dans les deux cas, il ne faut pas être dupe, personne ne va à une compétition présidentielle, sans compter ses amis européens, américains ou africains), mais cela n’a eu aucune incidence sur le contrôle du processus électoral. Je répète à qui veut l’entendre depuis des années : aucun Français ne peut imposer un Président à un Africain, au 21è siècle, lors d’un scrutin au suffrage universel. La raison relève du bon sens même : ce sont les voix sorties des urnes qui sont comptabilisées et tant qu’un candidat a la possibilité d’avoir un représentant dans chaque bureau de vote (les hommes sont tous tentés par la fraude, pour se donner davantage de chance, on l’a vu lors des élections intra-muros en France, avec l’ex-UMP), il est difficile de manipuler les chiffres sortis des urnes.
Zinsou ne pouvait pas gagner
Deuxième chose. Lionel Zinsou, 62 ans, ne pouvait pas gagner face à Patrice Talon, 58 ans. Je m’explique encore. La défaite du premier était prévisible. Pour deux raisons très simples, qui relèvent de la science politique élémentaire. Raison un : il était candidat de la mouvance présidentielle sortante et a gagné au premier tour avec un score peu honorable (28.44%). Seulement 100 000 voix le séparaient de Patrice Talon (24.80%). En général, quand le candidat d’une mouvance présidentielle sortante (je dis bien mouvance et non parti) est en ballotage défavorable dès le premier tour (au Niger, le candidat de la mouvance présidentielle sortante était en ballotage favorable avec plus de 48% des voix), alors qu’il est parti, au premier tour, avec une coalition de partis politiques, il n’a pas assez de réserves de voix, pour le second tour.
Raison deux et elle est la conséquence de la première : Patrice Talon était soutenu par une vingtaine de candidats malheureux du premier tour, dont le troisième homme Sébastien Ajavon (23.03%), le quatrième Abdoulaye Bio Tchané (8.79%), le cinquième Pascal Irénée Koupaki (5.85%). Rappelons que tous ces candidats avaient signé avant le scrutin, un accord qui devrait permettre au mieux placé parmi eux, au premier tour, de bénéficier du soutien des autres, au second. On est exactement dans le scénario de la présidentielle ivoirienne d’octobre 2010, où le candidat de la continuité de la mouvance présidentielle s’était retrouvé en ballotage défavorable, face à un candidat de la rupture de l’opposition, soutenu par les principaux candidats malheureux du premier tour, qui avaient signé un accord de collaboration, des années auparavant. Cela ne pardonne jamais, la défaite est quasi assurée, malgré les voix discordantes esseulées de certains supporteurs (par exemple, l’association des zémidjan, soutiens d’Ajavon, au premier tour, a appelé à voter Zinsou).
Au Bénin, il s’est trouvé un candidat malheureux, qui très vite, a joué le jeu de la responsabilité républicaine en concédant avant l’heure, sa défaite électorale, même si dans le fond, il avait des raisons de se baser sur certaines irrégularités, qui de toute évidence, n’ont pas pu avoir d’incidence, sur l’issue du scrutin. L’histoire de la Côte d’Ivoire aurait été écrite autrement si cette sagesse républicaine avait habité la mouvance présidentielle de 2010. Les faits sont têtus…
André Silver Konan
Journaliste-écrivain