x Télécharger l'application mobile Abidjan.net Abidjan.net partout avec vous
Télécharger l'application
INSTALLER
PUBLICITÉ

Société Publié le mercredi 11 février 2009 | Le Temps

Lakota / 57e pèlerinage des fidèles du Dehima - Plus de 8000 adeptes sur les traces de Bagué Wlonyo

Les fidèles Déhima étaient à leur 57e pèlerinage en ce mois de janvier, à Lakota, pour magnifier leur leader. Reportage.
Il est environ 14 heures 30 minutes, ce vendredi 23 janvier 2009. Le grand carrefour de Lakota a pris l'allure d'une gigantesque firme de fabrication et de vente de cars et minicars. Mais en réalité, il n’en est rien, seulement des adeptes du Déhima qui font une escale pour faire l'ultime approvisionnement avant d'atteindre Gagoué " la terre de pèlerinage ". Ils sont tous de blanc vêtus, de la tête aux pieds. Parmi ces pèlerins, ceux qui voulaient acheter du pain resteront sur leur fin. Point de pain dans les boulangeries de la localité, pareil pour le carburant. Les premiers pèlerins ont déjà tout emporté. Après cette escale, le cap est mis sur Gagoué. Sur l'axe poussiéreux Lakota-Gagoué, c'est un véritable ballet de grosses cylindrés et de véhicules de transport en commun qui s'offre en spectacle. A Gagoué, déjà à 17 heures 30 minutes, le déferlement humain se passe de commentaire. Ce petit village d'environ 3000 âmes a vu sa population tripler du fait de ce pèlerinage. Et tous attendent la veillée de la prophétesse Bagué Wlonyo (révélatrice de la religion Déhima). Il est précisément 23 heures 45 minutes quand la cloche, un des éléments liturgiques de cette religion, annonce le début de la veillée. Et c'est le chef suprême national adjoint de la religion précitée, le Bawaba, Koffi Etienne de la Paroisse Denis Pita de Yopougon (Sideci) qui a la lourde responsabilité de conduire, de plonger dans la plus grande révérence, ces milliers de fidèles dans la méditation divine. Ce dignitaire religieux est aidé dans sa tâche par deux " Lezé ", c'est-à-dire des prédicateurs. La température est très basse, environ 18°C, mais cela n'a point altéré l'engouement des fidèles. Le Bawaba Koffi et les Lézé relatent aux fidèles et aux visiteurs la vie " pieuse " et la biographie de la prophétesse Bagué Wlonyo.
Genèse de la religion Déhima
Au cours de leur homélie, ces dignitaires religieux expliquent à l'auditoire que la révélation de la religion Déhima s'inscrit dans la continuité du ministère de Jésus-Christ, qui n'est pas arrivé en Afrique noire durant sa mission sur terre. C'est à la faveur des visées impérialistes et colonialistes que les missionnaires européens vont faire connaître Jesus-Christ aux Africains par la bible, soutiendront-ils. Malgré le fait que ceux-ci ne savent ni écrire, ni lire. Ils ajouteront que l'enseignement de la parole de Dieu qui devrait être accessible à tous, a été vicié, étant donné que les missionnaires étaient là pour le compte des intérêts de leur métropole, ils ne pouvaient qu'enseigner des parties de la Bible qui pouvaient permettre aux colonisateurs de mieux asseoir leur suprématie en Afrique noire. Entre-temps, la sorcellerie, le fétichisme continuaient de régner en maîtres absolus. La prophétesse Bagué Wlonyo, dans sa révélation de fonder l'Eglise Déhima va formellement proscrire la pratique de la sorcellerie et du fétichisme. Elle recevra de Dieu, par révélation, de restituer la mission de jésus-Christ à ses contemporains par l'oralité, moyen par excellence de la transmission du savoir en Afrique. Les prédicateurs finiront par noter que l'église du Déhima ne nie pas le caractère sacro-saint de la Bible qui, selon eux, reste et demeure l'apanage des églises européennes qui détiennent tous ces secrets qu'elles ne sont prêtes à livrer aux Africains. Pendant que ces hommes dignitaires prêchent, les fidèles restent très attentionnés malgré l'heure tardive et cette fraîcheur qui a presque frigorifié certains d'entre eux. Nous nous approchons de certains d'entre eux pour comprendre leur dévouement pour ce pèlerinage. Dame Affoué venue de Béoumi est presque en larmes quand elle veut expliquer son dévouement pour le Déhima. Car, dira-t-elle "c'est le Déhima qui a libéré ma famille et moi de l'emprise de la sorcellerie. C’est pourquoi, je ne manquerai sous aucun prétexte, le pèlerinage même si je suis hors du pays". A moins de quinze mètres de dame Affoué, se trouve Mireille à genoux au pied de la tombe de la prophétesse. Comme elle, il y a plus d'une centaine de fidèles en prière. Mireille nous confiera que c'est par cet acte qu'elle aura sa pénitence et toutes les grâces qu'elle souhaite. " On ne peut pas quitter ce pèlerinage sans être bénie ", nous souligne-t-elle. A un kilomètre de Gagoué, se trouve le village de Niabessaria où un autre groupe de fidèles a installé son quartier général, non loin de "l'arbre de l'alliance", nous échangeons avec Oyourou ," il nous explique que cet arbre aurait été planté par la prophétesse Bagué Wlonyo, un arbre qui n'a pu être abattu par les populations après la mort de cette dernière et ce, malgré leurs nombreuses tentatives pour l'abattre". Il nous confiera par ailleurs, qu'il participe à ce pèlerinage depuis 1957. " Ce pèlerinage m'a permis d'avoir beaucoup de bénédictions, tous les vœux que j'ai émis sur cette terre de naissance de la prophétesse se sont exhaussés ", nous revèle-t-il avant d'ajouter que " La Côte d'Ivoire peut avoir l'indépendance économique seulement si elle s'approprie l'enseignement de la prophétesse ".
Malgré sa mort, Bagué Wlonyo draine du monde
Pour les dignitaires religieux du Déhima, Bagué Wlonyo, Guigba Dawlon à l'état civil, est née à Gagoué vers 1892. Déjà à 14 ans, elle commence à faire des révélations. Elle expliquera, dit-on, à ses parents qu'elle n'était pas prédestinée à une vie de couple, mais devait se consacrer à l'œuvre du Seigneur. Mais ces parents fouleront aux pieds ses révélations en la donnant en mariage dans un village de la région de Fresco. Cependant, son mari ne la connaîtra pas comme femme jusqu'à sa mort. Car, note-t-on, le jour où son mari voulu la connaître comme femme, il disparut mystérieusement. Après la disparition de celui-ci, sa belle famille voulait la donner à un des frères du disparu, comme l'exigeait la tradition, mais Dieu la fit tomber dans quatorze ans de démence. Ce qui va pousser sa belle famille à la rapatrier à Gagoué, son village natal. C'est le début de son ministère. Elle traque les sorciers et les esprits maléfiques de ce village. Ce qui lui coûte la proscription. Et c'est le village voisin de Niambesaria qui l'accueille. Elle y accomplira tout son ministère jusqu'à sa mort en 1951. Mais dit-on la prophétesse n'aura point eu la tâche facile. Elle est persécutée par le système colonial en place jusqu'en 1945, où sa religion est reconnue par arrêté général N° 2541 AP/D du 20 août 1945 en application du décret du 14 février 1922 réglementant l'enseignement et la propagande confessionnelle en Afrique occidentale française. Bagué aurait prophétisé l'avènement de l'indépendance à feu le Président Félix Houphouët-Boigny le 15 novembre 1948 à Divo. Au cours de cette rencontre historique, elle va révéler à ce dernier sa mission d'homme politique providentiel devant conduire la lutte pour l'émancipation politique de l'Afrique noire. Mais, à la condition de faire de la paix, sa seconde religion. Une prophétie qui a rapproché le père fondateur de la prophétesse au point où il aura fait construire la tombe de cette dernière.
Ces personnalités qui oeuvrent pour la survie du Déhima
“De mémoire de pèlerins, jamais pèlerinage n’a suscité autant d'implication de la part des cadres de la région en ce qui concerne la religion Déhima que Gagoué 2009 ", a noté M. Aka, président du comité d'organisation de la 57e édition du pèlerinage du Déhima dénommée Gagoué 2009. Et ce dernier ne se tromperait en faisant cette affirmation. Car les ministres Dano Djédjé, Lida Kouassi Moïse et M. Boubli Bénoit, Directeur du patrimoine d'Etat auront été des maillons très forts dans l'organisation de “Gagoué 2009”. Et l'on pouvait le remarquer sur le terrain. Une équipe de 6 éléments du groupement des sapeurs-pompiers militaires sur le terrain. Plus de douze éléments de la Croix-Rouge locale. Par ailleurs, une citerne d'eau de la Sodeci a été dépêchée sur le terrain. Ainsi, grâce à l'effort conjugué des pompiers et de la Sodeci, plus 256 mille litres d'eau potable ont été servis aux populations de ce village. Permettant d'éviter du coup, les problèmes de pénurie qui se posaient chaque année, à la même date. En plus d'avoir mobilisé les pompiers et les éléments de la Sodeci, ces personnalités susmentionnées ont été d'un soutien financier très considérable pour la communauté Déhima dans l'organisation du Pèlerinage de cette année. Ainsi, ces derniers ont donné à cette 57e édition, un véritable aspect touristique qui, malheureusement, pourrait être perturbé par les gènes de division qui ont commencé à gagner la religion Déhima.
Gagoué, comme Israël et Médine
Tous ces milliers de pèlerins venus de toutes les paroisses Déhima de la Côte d'Ivoire avaient presque la même conviction. Celle de considérer la terre de Gagoué comme une terre à l'image de Médine et de Jérusalem. D'un pèlerin à un autre le slogan était le même " Nous sommes venus pour nous purifier, nous laisserons tous nos pêchés et nous renaitrons de nouveau, après avoir purifié notre esprit ". Et chaque année, le nombre de pèlerins se multiplie. Une ferveur spirituelle a fini par gagner cette localité. Gagoué prend désormais l'allure des grandes villes de pèlerinage telles que Médine, Jérusalem..., puisque cette édition de Gagoué a même enregistré des pèlerins venus du Togo, du Benin, du Burkina Faso, de France et même des Etats-Unis.

Gninlkita Coulibaly
Envoyé spécial à Gagoué (Lakota)
PUBLICITÉ
PUBLICITÉ

Playlist Société

Toutes les vidéos Société à ne pas rater, spécialement sélectionnées pour vous

PUBLICITÉ