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Économie Publié le mercredi 18 février 2009 | Notre Voie

Le franc CFA dans l`économie mondiale - Claude Adou (président de l`Association des cadres financiers et trésoriers de l`UEMOA) : "Il faut réviser les accords monétaires"

La crise financière qui s`est déclenchée aux Etats-Unis, et qui se transforme en crise économique, n`épargne pratiquement aucun pays au monde. Le président de l`Association des cadres financiers et trésoriers des Etats de l`Uemoa (AFT/UEMOA), Claude Adou, fait des propositions pour les entreprises et les Etats en vue de juguler cette crise.


Notre Voie : Où en est l’Association avec la modernisation des systèmes de paiement ?

Claude Adou : La modernisation initiée en 1999 par la Bceao porte sur deux instruments dont les chantiers ont débuté en juin 2004. Le premier instrument s`appelle Star-Uemoa, c`est-à-dire Système de transfert automatisé et de règlement dans l`Uemoa. Il concerne le règlement des gros montants. Les paiements se font en une seconde. Les transferts dans la zone Uemoa se font rapidement. Le second système s`appelle Sica-Uemoa. C`est le Système interbancaire de compensation automatisé dans l`Uemoa. Il concerne le règlement des petits montants. Le virement des salaires des employés des sociétés, les cartes de crédit et de paiement. Il est caractérisé par une grande rapidité et de la souplesse. C`est le système par lequel avec une carte bancaire, l`on peut effectuer une opération à Abidjan, à Dakar, à Lomé, à Ouaga. Avec ce système, le délai d`encaissement des entreprises qui travaillent dans plusieurs pays a connu une réduction. En 2007, le Sica-Uemoa a connu une bonne avancée parce que le Niger, le Togo et la Guinée Bissau ont fait leur entrée dans le système. Ce qui achève la mise en production du système de compensation au sein de l`Union. Le système de paiement par carte bancaire continue donc d`être vulgarisé pour que les entreprises l’utilisent, ainsi que les employés qui voyagent en remplacement des frais de voyage en espèces. La Bceao a par ailleurs rénové le cadre juridique avec certains textes en vigueur qui accompagnent le système.


N.V. : Selon les spécialistes, quel que soit le temps, les pays qui utilisent le FCFA vont sortir du compte d`opération avec la France. Quel est votre avis?

C.A. : Ce débat ne date pas d’aujourd’hui. La crise financière sévit dans le monde entier. Et dans la zone Uemoa, il y a beaucoup de crainte. Ailleurs, on estime que les économistes de l’Union sont muets comme une carpe face à la crise financière. Et qu`ils ne font pas de propositions. Vous savez que la zone CFA est unique au monde. Créée en 1939, elle a commencé à fonctionner en 1947. La mise en place de la communauté financière africaine (CFA) comporte beaucoup de contraintes pour nos pays. Et comme les spécialistes le disent, tôt ou tard, il faut réviser les accords monétaires. Le monde évolue. La zone CFA est la seule au monde avec 15 Etats plus les Comores indépendants qui dépendent d`un compte ouvert auprès du Trésor français. Or on devrait plutôt dépendre d`une banque centrale. C`est une anomalie qu`il faut corriger. C`est un peu difficile pour les chefs d`Etat de la zone de rompre avec l`ex-puissance colonisatrice qu`est la France. Mais c`est notre rôle de leur faire comprendre qu`il faut sauter le pas. Et que même si on ne change pas de système du jour au lendemain, on est obligé d`évoluer, de transformer le système et l`adapter. Dans le compte d`opération, les 15 Etats qui utilisent le FCFA sont obligés d’y mettre 65% de leurs réserves de changes depuis 1973. Pourtant, ça devrait être le processus inverse. Aujourd`hui, nous avons beaucoup de spécialistes pour gérer nos réserves de changes. Il va falloir changer les accords, les passer soit avec la Banque de France ou la Banque centrale européenne, soit changer les piliers de la zone franc. Les quatre piliers institués en 1945 sont dépassés.


N.V. : Quel sont ces piliers auxquels vous faites allusion ?

C.A. : Ce sont la parité fixe, la garantie illimitée de la part du Trésor français. Comment peut-on garantir quelque chose de manière illimitée. Le trésor est lui-même une entité limitée. Comment peut-il garantir la monnaie pour 15 Etats. Il y a la libre transférabilité des fonds, et la mise en commun des réserves de changes. Ainsi, dès qu`on exporte un produit comme le cacao, 65 FCFA sur 100 FCFA sont destinés au compte d`opération du Trésor français. Savez-vous que nos billets ne sont pas échangeables entre les pays de l`Afrique de l`Ouest qui utilisent le FCFA et ceux de l`Afrique centrale qui utilisent la même monnaie ? C`est aussi une anomalie. A terme, le compte d`opération doit évoluer. Soit il devient beaucoup plus souple, soit il disparaît. Il est aussi possible que le franc CFA ne soit plus ancré à une seule devise comme l`euro. Pourquoi ne pas trouver un système avec un panier ou notre monnaie est liée à deux ou trois monnaie avec plus de flexibilité. Pour qu`en cas de coup dur, on puisse faire des ajustements.


N.V. : Quelle est la position des chefs d`Etat de la zone franc à propos de l`évolution du compte d`opération ?

C.A. : Les chefs d`Etat attendent le rapport des spécialistes des banques centrales et de leurs conseillers, et des ministres en charge de l`Economie et des Finances. On espère que dans un avenir proche, les chefs d`Etat, au cours d’un sommet, pourront poser ce problème aux autorités françaises de la même manière qu’ils discutent des accords de défense. Il va falloir discuter des accords monétaires entre le Trésor français et tous les pays de la zone CFA et les Comores. Il faut que nos chefs d`Etat fassent comprendre aux autorités françaises la nécessité de mettre les accords à jour.


N.V. : L`AFT-UEMOA organise un séminaire du 27 au 28 février prochain. Peut-on en connaître les grandes lignes ?

C.A. : Nous organisons chaque année un séminaire national où nous débattons de certains thèmes. Et au sein de chaque pays, nous organisons aussi un séminaire régional pour sensibiliser les membres. Ainsi du 27 au 28 février à Yamoussoukro et à Abidjan, nous organisons un séminaire sur le thème : “Crise financière internationale et nouveau système de paiement”. Le système de paiement est important pour nous parce que la Côte d`Ivoire exporte beaucoup de produits agricoles. Nous allons débattre des effets négatifs de la crise financière et voir comment les nouveaux systèmes de paiement peuvent aider nos entreprises et nos Etats à faire face à la crise qui devient économique à cause des licenciements dans les pays.

Interview réalisée par Gomon Edmond
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