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Politique Publié le vendredi 27 mars 2009 | Notre Voie

A tout vent : Requiem pour la Françafrique ?

Depuis hier, jeudi 26 mars 2009, le Chef de l’Etat français, Nicolas Sarkozy, a entamé une tournée dans trois pays africains : République démocratique du Congo (RDC), Congo-Brazzaville et Niger. Après Kinshasa et Brazzaville, M. Sarkozy sera, aujourd’hui vendredi, à Niamey. A la faveur de ce périple aux apparences politiques mais, en réalité, à la silhouette économique (Sarkozy est en VRP pour les entreprises françaises dont certaines l’accompagnent d’ailleurs), tentons de réfléchir ensemble autour de questions épineuses pour les nouvelles générations africaines. Celles qui n’ont pas connu les années 60-70 voire 80 et “l’Afrique de papa” : La Françafrique peut-elle mourir ? Vit-on réellement le requiem de ce système comme l’avait promis l’actuel Président français avant son élection à la magistrature suprême de son pays ?
L’origine de l’expression “France-Afrique” remonte à 1955.Elle a été inventée par le premier Président ivoirien, feu Félix Houphouët-boigny. Qui voulait ainsi définir les bonnes relations qu’il envisageait d’établir avec la France. Houphouët fut, jusqu’à sa mort en 1993, le plus grand “fidèle ouvrier” africain au service de la mainmise politico-économique de la France sur ses ex-colonies en Afrique. L’expression “France-Afrique” a dérivé plus tard pour devenir “Françafrique” grâce à feu François-Xavier Verschave, philosophe français et ancien président de l’association Survie. L’ouvrage de Verschave publié en 1998 et intitulé “La Françafrique, le plus long scandale de la République” est apparu comme un bréviaire pour découvrir la “Françafrique”, ses motivations et ses méthodes.

François-Xavier Verschave a d’ailleurs défini dans son essai, la Françafrique comme “une nébuleuse d’acteurs économiques, politiques et militaires, en France et en Afrique, organisée en réseaux et lobbies, et polarisée sur l’accaparement de deux rentes : les matières premières et l’aide publique au développement. La logique de cette ponction est interdite de l’initiative hors du cercle des initiés. Le système autodégradant se recycle dans la criminalisation. Il est naturellement hostile à la démocratie”.

Entre autres motivations de la mise en place de ce système, assurer la place de la France au niveau international, grâce à une “sphère d’influence” en Afrique francophone garantissant un nombre important de votes à l’ONU ; un accès privilégié aux matières premières stratégiques, fort nombreuses dans la région ; la corruption et le détournement de l’aide publique au développement au profit d’intermédiaires divers, d’hommes politiques français et africains, et de grands partis politiques français, avec son corollaire : les trafics délictueux ou criminels.

La Françafrique a été portée à bout de bras par feu le Général De Gaulle, ancien Chef de l’Etat français et son “Monsieur Afrique”, l’énigmatique Jacques Koch-Foccart (né en 1913, mort en 1997). Mais elle n’était pas seulement l’affaire de la droite française, la gauche y était grandement mêlée avec feu le Président François Mitterrand et son entourage, dont son fils Jean-Christophe Mitterrand surnommé “Papa m’a dit...”.

De 1960 à 1990, “la Françafrique” traditionnelle a vécu avec le soutien ouvert aux “Présidents africains à vie” et aux dictateurs. A partir de 1990, conscient que “ses amis” font de plus en plus face à des opposants, pour la plupart intellectuels et universitaires, ainsi qu’à une opinion publique qui se réveille, Paris met du vernis sur les “pratiques françafricaines” pour ne pas paraître anachronique et démodée. C’est l’époque de la conférence de La Baule et de l’appel au multipartisme. “Les conférences nationales” irritent les “amis” de la France qui s’en plaignent auprès de Paris. Certains “amis” accusent même l’Elysée de vouloir les lâcher. En vérité, il n’en était rien. La France ne lâche aucun de ses “amis” françafricains. Bien au contraire, elle les pouponne sans grand bruit. Puis met à profit la décennie 1990-2000 pour recruter de nouveaux membres de “La Françafrique” au sein de la nouvelle génération d’hommes politiques africains. “La Françafrique” se régénère, s’adapte au contexte socio-économico-politique nouveau et entre dans le 21ème siècle avec de nouveaux leaders et de nouveaux enjeux. Tout en maintenant “l’ordre” par tous les moyens dans ce “pré carré” (exemple de novembre 2004 en Côte d’Ivoire où des civils aux mains nues ont été tués par l’armée française), elle œuvre à étendre “l’influence de la France” sur d’autres régions du continent africain. Des régions comme, par exemple, celle des Grands Lacs si riche en matières premières. Loin de célébrer son requiem, “La Françafrique” vit une nouvelle ère sans se saborder.

Au-delà de son nouvel aspect bling-bling (fouka-fouka, dirait-on en Côte d’Ivoire), elle n’est ni affaiblie ni mourante. Ceux qui en Afrique (Laurent Gbagbo) ou en France (Jean-Marie Bockel) ont voulu la remettre en cause, ont été “servis”. L’un à travers une rébellion sans visage et l’autre, par un limogeage de son précédent poste en échange d’un strapontin. Bockel a fait ses bagages sur insistance,

a-t-on appris, d’un doyen de “La Françafrique”. Comme quoi, le système est bien solide. Même si Bernard Kouchner, ministre français des Affaires étrangères, Françafricain rusé, estime que c’est “une politique qui, de toute façon, n’est plus de mise”. (cf. Jeune Afrique N°2515 du 22 mars 2009). Vérité ou pure démagogie ?

Par Didier Depry ddepry@hotmail.com
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